Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Le haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie a demandé au tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie, d'une part, d'annuler la délibération n° 53-A/2017 du conseil d'administration de l'Office des postes et télécommunications de Nouvelle-Calédonie (OPT-NC) du 13 décembre 2017 et les statuts de la société par actions simplifiée OFFRATEL joints à la délibération, et, d'autre part, d'annuler la décision implicite de rejet du recours gracieux présenté par le haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie.
Par un jugement n° 1800175 du 25 septembre 2018, le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a annulé la délibération n° 53-A/2017 du 13 décembre 2017 du conseil d'administration de l'Office des postes et télécommunications de Nouvelle-Calédonie portant approbation de la transformation de la société en nom collectif OFFRATEL en société par actions simplifiée et les statuts de la société par actions simplifiée OFFRATEL joints à cette délibération, ainsi que la décision implicite de rejet du recours gracieux du 14 février 2018 du haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie.
Procédure devant la Cour :
I. Par une requête, enregistrée le 18 décembre 2018 sous le n° 18PA03951, et un mémoire en réplique, enregistré le 2 août 2019, l'Office des postes et télécommunications de Nouvelle-Calédonie, représenté par la SELARL d'avocats Royanez, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1800175 du 25 septembre 2018 du tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le motif du point 4 du jugement attaqué selon lequel, en l'absence de précision textuelle, les détentions de capital des personnes de droit public visées à l'article 53 II de la loi organique du 19 mars 1999 sont nécessairement minoritaires, n'a pas été invoqué en première instance et n'a pas été débattu ; par suite, le jugement attaqué, qui s'est fondé sur ce motif, doit être annulé ;
- c'est à tort que le jugement attaqué a estimé que les dispositions de l'article 53 II de la loi organique du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie faisaient obstacle à ce que l'Office des postes et télécommunications de Nouvelle-Calédonie puisse participer, de manière majoritaire, au capital d'une société privée gérant un service public.
Par un mémoire en défense, enregistré le 19 juillet 2019, la ministre des outre-mer conclut au rejet de la requête et demande à la Cour de mettre à la charge de l'OPT-NC la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par l'Office des postes et télécommunications de Nouvelle-Calédonie ne sont pas fondés.
II. Par une requête, enregistrée le 18 décembre 2018 sous le n° 18PA03950, et un mémoire en réplique, enregistré le 2 août 2019, l'Office des postes et télécommunications de Nouvelle-Calédonie (OPT-NC), représenté par la SELARL d'avocats Royanez, demande à la Cour :
1°) de prononcer le sursis à l'exécution du jugement n° 1800175 du 25 septembre 2018 du tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- il a fait appel du jugement n° 1800175 du 25 septembre 2018 du tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie ;
- il existe des moyens sérieux et de nature à justifier l'annulation du jugement du 25 septembre 2018 du tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie et le rejet des conclusions aux fins d'annulation du haut-commissaire.
Par un mémoire en défense, enregistré le 19 juillet 2019, la ministre des outre-mer conclut au rejet de la requête et demande à la Cour de mettre à la charge de l'OPT-NC la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par l'Office des postes et télécommunications de Nouvelle-Calédonie ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi organique n° 99-209 et la loi n° 99-210 du 19 mars 1999 ;
- la loi organique n° 2009-969 du 3 août 2009, et notamment son article 20 ;
- le code de commerce applicable en Nouvelle-Calédonie ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- la loi n° 2002-1 du 2 janvier 2002 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A...,
- les conclusions de Mme Bernard, rapporteur public,
- et les observations de Me Royanez, avocat de l'Office des postes et télécommunications de Nouvelle-Calédonie.
Considérant ce qui suit :
1. Les requêtes susvisées n°s 18PA03950 et 18PA03951, présentées pour l'Office des postes et télécommunications de Nouvelle-Calédonie, sont dirigées contre le même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune ; il y a lieu de les joindre pour qu'elles fassent l'objet d'un seul arrêt.
Sur la requête n° 18PA03951, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement attaqué :
2. Il ressort des pièces du dossier que le conseil d'administration de l'Office des postes et télécommunications de Nouvelle-Calédonie (OPT-NC) a, par une délibération n° 53-A/2017 en date du 13 décembre 2017, approuvé la transformation de la société en nom collectif OFFRATEL en société par actions simplifiée ; la même délibération a approuvé les statuts de la société OFFRATEL, ainsi constituée sous forme de société par actions simplifiée, dont le capital social est réparti, aux termes de l'article 8 des statuts de cette société, entre l'Office des postes et télécommunications de Nouvelle-Calédonie à hauteur de 170 actions, soit 85 %, et la société CITIUS à hauteur de 30 actions, soit 15 % du capital. Le 14 février 2018, le haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie a formé contre cette délibération un recours gracieux, qui a été implicitement rejeté. Le 12 juin 2018, en vertu des articles 204 et 209-17 de la loi organique susvisée du 19 mars 1999 modifiée relative à la Nouvelle-Calédonie, le haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie a saisi le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie d'un déféré aux fins d'annulation de la délibération n° 53-A/2017 du conseil d'administration de l'Office des postes et télécommunications de Nouvelle-Calédonie du 13 décembre 2017 et des statuts de la société par actions simplifiée OFFRATEL annexés à cette délibération. Par le jugement du 25 septembre 2018 dont l'Office des postes et télécommunications de Nouvelle-Calédonie relève appel, le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a annulé la délibération n° 53-A/2017 du 13 décembre 2017 du conseil d'administration de l'Office des postes et télécommunications de la Nouvelle-Calédonie portant approbation de la transformation de la société en nom collectif OFFRATEL en société par actions simplifiée et les statuts de cette société joints à cette délibération, ainsi que la décision implicite de rejet du recours gracieux du 14 février 2018 du haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie.
3. Aux termes de l'article 53 de la loi organique susvisée du 19 mars 1999 modifiée relative à la Nouvelle-Calédonie : " (...) II. - La Nouvelle-Calédonie, les provinces et leurs établissements publics peuvent participer au capital de sociétés privées gérant un service public ou d'intérêt général. (...) ".
4. D'une part, il ne résulte ni du texte même de ces dispositions, ni des travaux préparatoires de l'article 20 de la loi organique susvisée du 3 août 2009 qui a modifié celles-ci, que l'intention du législateur ait été de faire obstacle à ce que les participations de la Nouvelle-Calédonie, des provinces et de leurs établissements publics au capital de sociétés privées gérant un service public ou d'intérêt général puissent être majoritaires. D'autre part, les dispositions des articles L. 233-1 et L. 233-2 du code de commerce, qui prévoient respectivement que " Lorsqu'une société possède plus de la moitié du capital d'une autre société, la seconde est considérée, pour l'application des sections 2 et 4 du présent chapitre, comme filiale de la première " et que " Lorsqu'une société possède dans une autre société une fraction du capital comprise entre 10 et 50 %, la première est considérée, pour l'application des sections 2 et 4 du présent chapitre, comme ayant une participation dans la seconde ", n'ont ni pour objet, ni pour effet de limiter les participations mentionnées par les dispositions précitées de l'article 53 de la loi organique susvisée du 19 mars 1999 modifiée à des participations minoritaires au capital de sociétés privées gérant un service public ou d'intérêt général, dès lors, en particulier, que, d'une part, la définition donnée par le code de commerce ne vaut que pour l'application de certaines des dispositions de ce code et, d'autre part, que le terme de " participation " au capital d'une entreprise est un terme générique qui s'emploie tant pour les détentions majoritaires que minoritaires du capital.
5. Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur le moyen tiré de ce que les dispositions de l'article 53 de la loi organique du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie faisaient obstacle à des prises de participations majoritaires de l'Office des postes et télécommunications de Nouvelle-Calédonie (OPT-NC) au capital de sociétés privées gérant un service public ou d'intérêt général pour annuler les délibération et décision attaquées. Par suite, en l'absence d'autre moyen développé par le haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie devant le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie, le jugement attaqué du 25 septembre 2018 doit être annulé et la demande présentée par le haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie doit être rejetée.
Sur les frais liés à l'instance :
6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Office des postes et télécommunications de Nouvelle-Calédonie, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme demandée par l'Etat (ministère des outre-mer) au titre des frais liés à l'instance. Dans les circonstances de l'espèce, il y a en revanche lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser au requérant au titre des frais liés au litige.
Sur la requête n° 18PA03950 :
7. La Cour statuant, par le présent arrêt, sur la requête au fond, il n'y a plus lieu de statuer sur la requête n° 18PA03950 tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution du jugement attaqué.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1800175 du 25 septembre 2018 du tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie est annulé.
Article 2 : La demande présentée par le haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie devant le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie est rejetée.
Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 18PA03950 de l'Office des postes et télécommunications de Nouvelle-Calédonie.
Article 4 : L'Etat (ministère des outre-mer) versera à l'Office des postes et télécommunications de Nouvelle-Calédonie une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Les conclusions de l'Etat (ministère des outre-mer) présentées au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à l'Office des postes et télécommunications de Nouvelle-Calédonie et à la ministre des outre-mer.
Copie en sera adressée au haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie et à la SAS OFFRATEL.
Délibéré après l'audience du 26 septembre 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Lapouzade, président,
- M. A..., président assesseur,
- Mme Larsonnier, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 2 décembre 2019.
Le rapporteur,
I. A...Le président,
J. LAPOUZADELe greffier,
Y. HERBERLa République mande et ordonne à la ministre des outre-mer en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°s 18PA03950, 18PA03951