Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D... C... a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté en date du 6 avril 2018 par lequel le préfet de Seine-et-Marne lui a fait obligation de quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ, a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de un an et a fixé le pays de destination de sa reconduite.
Par un jugement n° 1802771 du 12 juin 2018, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 4 août 2018, M. C..., représenté par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1802771 du 12 juin 2018 du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Melun ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté contesté ;
3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros à verser à son conseil au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, Me A... renonçant à percevoir la somme allouée au titre de l'aide juridictionnelle.
Il soutient que :
- la décision portant obligation de quitter le territoire français a été prise en violation des stipulations du 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant et celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision refusant un délai de départ volontaire est illégale en raison de l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français ;
- la décision fixant le pays de destination est contraire aux stipulations du 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant ;
- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de un an méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense enregistré le 23 octobre 2019, le préfet de Seine-et-Marne conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.
M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris du 30 novembre 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention de New York du 26 janvier 1990 sur les droits de l'enfant ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et son décret d'application n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme B... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., ressortissant malien, est entré en France, selon ses déclarations, en 2009. Après avoir fait l'objet d'une interpellation le 5 avril 2018 à Dammarie-les-Lys (Seine-et-Marne) au volant d'un véhicule non assuré, sans permis de conduire valide en France, il a indiqué être sans profession ni ressources, être logé par une personne qu'il présentait comme son épouse, avoir deux enfants, ne pas avoir de titre de séjour, son passeport étant caché et ne pas avoir l'intention de repartir dans son pays d'origine. Par un arrêté en date du 6 avril 2018, le préfet de Seine-et-Marne a fait obligation à M. C... de quitter le territoire français, a fixé le pays de destination de sa reconduite et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an. M. C... relève appel du jugement du 12 juin 2018, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
3. M. C... soutient qu'il réside en France avec sa compagne, titulaire d'un titre de séjour, et qu'il est père de deux enfants nés en 2014 et 2017. Il n'établit, toutefois, pas qu'il subviendrait à l'entretien et à l'éducation de ses enfants, par la production d'une attestation de la mère de ses enfants, et une facture d'électricité du 30 juillet 2018, alors que l'engagement de location d'un local à usage d'habitation avec effet au 4 avril 2018 a été souscrit au seul nom de sa compagne. Par ailleurs, si M. C... se prévaut d'un contrat de travail signé en mai 2017 et quelques feuilles de paie dont la plus récente date du mois d'août 2017, cette circonstance ne permet pas non plus de considérer que le centre de ses intérêts personnels et familiaux se situe en France, alors qu'il a déclaré lors de son audition par les services de police lors de son interpellation être sans ressources, et qu'il n'établit pas, en outre, être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, ni ne justifie d'une intégration particulière au sein de la société française, où il est l'auteur de plusieurs vols à l'étalage et en réunion, et de dégradations diverses. Dans ces conditions, le préfet de Seine-et-Marne, en lui faisant obligation de quitter le territoire français, n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cette décision a été prise. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit, par suite, être écarté.
4. Aux termes de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant susvisée : " 1. Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale (...) ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.
5. Il résulte de ce qui a été dit au point 3 que les pièces produites au dossier n'établissent pas que M. C... entretiendrait des liens réguliers avec ses enfants. Dans ces conditions, il n'a pas été porté atteinte à l'intérêt supérieur de ces enfants. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ne peut qu'être écarté.
Sur la décision de refus de délai de départ volontaire :
6. Il résulte de ce qui a été dit précédemment que l'obligation de quitter le territoire français prononcée à l'encontre de M. C... étant légale, il n'est dès lors pas fondé à exciper de son illégalité pour demander l'annulation de la décision lui refusant un délai de départ volontaire.
Sur la décision fixant le pays de destination :
7. Le requérant ne démontrant pas contribuer de manière effective à l'éducation et à l'entretien de ses enfants depuis leur naissance ou au moins depuis deux ans, il n'est dès lors pas fondé à soutenir que cette décision violerait les dispositions du 1 de l'article 3 de la convention internationale sur les droits de l'enfant.
Sur la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an :
8. Aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " III. - L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de sa notification, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger ou lorsque l'étranger n'a pas satisfait à cette obligation dans le délai imparti. / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. / (...) / La durée de l'interdiction de retour mentionnée au premier alinéa du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. / Sauf menace grave pour l'ordre public, la durée totale de l'interdiction de retour ne peut excéder cinq ans, compte tenu des prolongations éventuellement décidées. ".
9. M. C... se borne à reproduire en appel, sans l'assortir d'éléments nouveaux, le moyen qu'il avait développé en première instance tiré de ce que la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il y a lieu par adoption des motifs retenus par les premiers juges d'écarter ce moyen.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de Seine-et-Marne.
Délibéré après l'audience du 7 novembre 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Formery, président de chambre,
- Mme Poupineau, président assesseur,
- Mme B..., premier conseiller,
Lu en audience publique, le 21 novembre 2019.
Le rapporteur,
C. B...Le président,
S.-L. FORMERY
La greffière,
C. DABERT
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18PA02697