La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/11/2019 | FRANCE | N°19PA00315

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 07 novembre 2019, 19PA00315


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... D... a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 12 juin 2017 par lequel le préfet de Seine-et-Marne a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé son pays de destination.

Par un jugement n° 1705688 du 20 décembre 2018, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 21 janvier 2019, Mme D..., représen

tée par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1705688 du Tribunal administrat...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... D... a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 12 juin 2017 par lequel le préfet de Seine-et-Marne a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé son pays de destination.

Par un jugement n° 1705688 du 20 décembre 2018, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 21 janvier 2019, Mme D..., représentée par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1705688 du Tribunal administratif de Melun en date du 20 décembre 2018 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de Seine-et-Marne en date du 12 juin 2017 ;

3°) d'enjoindre au préfet de Seine-et-Marne de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision de refus de titre de séjour n'est pas suffisamment motivée ;

- elle est entachée d'une erreur de fait, dès lors qu'elle-même justifie d'une communauté de vie avec son époux, qui se trouve en Côte d'Ivoire uniquement pour des raisons professionnelles et ne souhaite pas y demeurer ;

- elle est fondée à se prévaloir des énonciations de la circulaire du ministre de la justice du 1er décembre 2003 qui précise que " l'exigence d'une communauté de vie affective tend à vérifier que la communauté de vie ne se réduit pas à une simple cohabitation et qu'a contrario, l'absence de cohabitation n'exclut pas la communauté de vie " ;

- elle a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions du 7 de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

La requête a été communiquée au préfet de Seine-et-Marne qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,

- le code civil,

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,

- le code des relations entre le public et l'administration,

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- et les observations de Me B..., pour Mme D....

Considérant ce qui suit :

1. Mme D..., ressortissante ivoirienne, qui a épousé un ressortissant français le 5 mars 2015 en Côte d'Ivoire, est entrée en France le 13 juillet 2015, sous couvert d'un visa de long séjour valant titre de séjour, en qualité de conjoint d'un ressortissant français. Elle a sollicité le renouvellement de son titre de séjour sur le fondement des dispositions du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté en date du 12 juin 2017, le préfet de Seine-et-Mame a refusé de faire droit à sa demande au motif qu'elle n'était pas en mesure de justifier d'une vie commune avec son époux, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé son pays à destination. Elle fait appel du jugement en date du 20 décembre 2018 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, il ressort des mentions de l'arrêté contesté que le préfet de

Seine-et-Marne a visé les dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que celles du 4° de l'article L. 313-11 du même code, dont Mme D... s'était prévalue à l'appui de sa demande de titre de séjour en qualité de conjoint d'un ressortissant français. Il a également précisé les raisons pour lesquelles il a considéré que Mme D... ne remplissait pas les conditions pour obtenir le titre de séjour qu'elle sollicitait en relevant, après avoir constaté que son époux avait déclaré vivre pour une durée indéterminée en Côte d'Ivoire, que la communauté de vie entre les intéressés avait cessé. Il a, par ailleurs, exposé des éléments suffisants sur la situation personnelle de Mme D... dont il a rappelé qu'entrée en France en 2015, elle avait vécu jusqu'à l'âge de 32 ans en Côte d'Ivoire, qu'elle n'établissait pas ne plus avoir d'attaches familiales dans ce pays et qu'elle n'avait pas d'enfant en France. Enfin, après avoir mentionné la nationalité de Mme D..., il a indiqué qu'elle n'établissait pas être exposée à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Ainsi, les décisions en litige comportent l'énoncé des considérations de fait et de droit qui en constituent le fondement. Elles sont, dès lors, suffisamment motivées au regard des exigences des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de ces décisions doit être écarté.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ; (...) ". Aux termes de l'article L. 313-12 du même code : " (...) Le renouvellement de la carte de séjour délivrée au titre du 4° de l'article L. 313-11 est subordonné au fait que la communauté de vie n'ait pas cessé, sauf si elle résulte du décès du conjoint français. Toutefois, lorsque l'étranger a subi des violences familiales ou conjugales et que la communauté de vie a été rompue, l'autorité administrative ne peut procéder au retrait du titre de séjour de l'étranger et en accorde le renouvellement. En cas de violence commise après l'arrivée en France du conjoint étranger mais avant la première délivrance de la carte de séjour temporaire, le conjoint étranger se voit délivrer, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ".(...) ". Aux termes de l'article 108 du code civil : " Le mari et la femme peuvent avoir un domicile distinct sans qu'il soit pour autant porté atteinte aux règles relatives à la communauté de la vie. (...) ".

4. Il ressort des pièces du dossier qu'à la date de l'arrêté en litige, l'époux de

Mme D... vivait en Côte d'Ivoire, alors que celle-ci résidait en France au domicile de sa tante. Si la requérante soutient que leurs résidences séparées s'expliquent par des circonstances indépendantes de leur volonté tenant, notamment, à l'activité professionnelle de son époux, elle ne l'établit pas par la seule production de deux attestations de M. D... en date respectivement des 20 avril 2016 et 19 mai 2016, indiquant qu'il se trouve pour des raisons professionnelles à Abidjan puis que des motifs familiaux l'y maintiennent mais qu'il entend revenir en France. Par ailleurs, les autres documents versés aux débats comprenant une attestation de vie commune rédigée par l'intéressée, la déclaration d'impôt des revenus de l'année 2007 qu'elle a souscrite, et qui ne mentionne que ses propres revenus, ainsi que l'avis d'imposition correspondant, des documents médicaux relatifs à une grossesse postérieure aux décisions en litige, et un certificat d'hébergement signé par sa tante, sont insuffisants pour établir que son époux serait, comme elle le soutient, revenu en France au cours du mois de mai 2017 et que la communauté de vie entre les époux D... était effective à la date du 12 juin 2017 de l'arrêté contesté. Par suite, le préfet de Seine-et-Marne a pu sans entacher son arrêté d'erreur de fait, ni méconnaitre les dispositions précitées du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, rejeter la demande de titre de séjour de Mme D....

5. En troisième lieu, si la requérante se prévaut d'une circulaire du ministre de la justice du 1er décembre 2003 qui préciserait que " l'exigence d'une communauté de vie affective tend à vérifier que la communauté de vie ne se réduit pas à une simple cohabitation et qu'a contrario, l'absence de cohabitation n'exclut pas la communauté de vie ", elle ne fournit pas d'autre élément plus précis permettant de l'identifier alors qu'il n'existe pas de circulaire datée de ce jour.

6. En quatrième et dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7°) A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ;(...) ".

7. Il ressort des pièces du dossier que Mme D... est entrée en France le 13 juillet 2015 et qu'à la date de l'arrêté en litige la communauté de vie avec son époux avait cessé. Elle n'allègue pas être dépourvue d'attaches dans son pays d'origine où elle a vécu jusqu'à l'âge de 32 ans. Enfin, elle ne justifie pas, par les pièces qu'elle produit, d'une intégration particulière. Dans ces conditions, eu égard notamment au caractère récent du séjour de Mme D... et à la faible intensité de ses attaches personnelles et familiales en France, l'arrêté contesté doit être regardé comme n'ayant pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté. Pour les mêmes motifs, le préfet de Seine-et-Marne n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de son arrêté sur la situation personnelle de la requérante.

8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction tout comme celles présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... D... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de Seine-et-Marne.

Délibéré après l'audience du 17 octobre 2019, à laquelle siégeaient :

- M. Formery, président de chambre,

- Mme C..., président-assesseur,

- M. Doré, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 7 novembre 2019.

Le rapporteur,

V. C...Le président,

S.-L. FORMERY

La greffière,

F. DUBUY

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 19PA00315

2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19PA00315
Date de la décision : 07/11/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. FORMERY
Rapporteur ?: Mme Valérie POUPINEAU
Rapporteur public ?: M. LEMAIRE
Avocat(s) : KEMADJOU

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2019-11-07;19pa00315 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award