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07/11/2019 | FRANCE | N°18PA01835

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 07 novembre 2019, 18PA01835


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... E... ont demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer " le dégrèvement des impositions supplémentaires liés au redressement effectué portant sur la créance née du droit à restitution des impositions directes (bouclier fiscal) de l'année 2009 au titre des revenus de l'année 2007 " et, à titre subsidiaire, de prononcer la décharge de la pénalité d'un montant de 42 458 euros qui leur a été infligée sur le fondement des dispositions de l'article 1758 A du code général des i

mpôts.

Par un jugement n° 1604936 du 27 mars 2018, le Tribunal administratif de ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... E... ont demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer " le dégrèvement des impositions supplémentaires liés au redressement effectué portant sur la créance née du droit à restitution des impositions directes (bouclier fiscal) de l'année 2009 au titre des revenus de l'année 2007 " et, à titre subsidiaire, de prononcer la décharge de la pénalité d'un montant de 42 458 euros qui leur a été infligée sur le fondement des dispositions de l'article 1758 A du code général des impôts.

Par un jugement n° 1604936 du 27 mars 2018, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 29 mai 2018, et un mémoire enregistré le 7 octobre 2019, M. et Mme E..., représentés par Me A..., demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1604936 du Tribunal administratif de Paris en date du 27 mars 2018 ;

2°) de prononcer la décharge à titre principal des impositions supplémentaires résultant de la reprise de la créance d'un montant de 424 582 euros, née du droit à restitution des impositions directes (bouclier fiscal) de l'année 2009 au titre des revenus de l'année 2007 et, à titre subsidiaire, de la majoration de 10 % qui leur a été infligée sur le fondement de l'article 1758 A du code général des impôts ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le tribunal ne s'est pas prononcé sur l'ensemble des conditions d'application de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales ;

- le service a méconnu les dispositions de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales, la reprise de la créance née du droit à restitution des impositions directes au titre de l'année 2009 sur les revenus de l'année 2007 étant contraire à la décision du 11 décembre 2009 par laquelle la direction des services fiscaux des Yvelines a statué sur leur demande de plafonnement des impôts directs à 50 % des revenus de l'année 2007, formulée le 7 octobre 2009, en limitant le montant de la restitution des impositions directes à 424 582 euros au lieu des 660 975 euros initialement demandés, dès lors que leur situation de fait n'a pas changé entre cette décision et la proposition de rectification qui a suivi, que le service disposait de tous les éléments pour apprécier leur situation, qu'il l'a examinée et que les autres conditions de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales étaient réunies ;

- l'administration a instruit leur demande de restitution à peine deux mois après le dépôt de leur réclamation, alors qu'elle disposait d'un délai de six mois pour y répondre, ce qui établit que le service a apprécié leur situation en toute connaissance de cause ;

- il a également méconnu les dispositions de l'article L. 251 du livre des procédures fiscales dès lors qu'ils ont signé le 23 juin 2010 une transaction, devenue définitive, qui visait l'ensemble de leur situation fiscale au regard de toutes les impositions dues au titre de l'année 2007, y compris la restitution partielle d'impôts obtenue au titre de l'année 2009 sur les revenus de l'armée 2007 ;

- ils sont fondés à se prévaloir des énonciations de l'instruction référencée 13 L-11-10, § 61 et suivants, reprise au BOI-SJ-RES-10-20-10-20120912, § 40 et suivants.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 2 octobre 2018 et le 11 octobre 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. et Mme E... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D...,

- et les conclusions de M. Lemaire, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme C... de la Morinière ont présenté le 7 octobre 2009 une demande de plafonnement de leurs impôts directs à hauteur de 50 % des revenus qu'ils avaient réalisés en 2007. Par une décision du 11 décembre 2009, la direction départementale des finances publiques des Yvelines leur a restitué une somme de 424 582 euros sur les 660 975 euros qu'ils demandaient, après avoir réintégré à leurs revenus de l'année 2007 une plus-value de cession de valeur mobilière d'un montant de 473 419 euros, qui n'était pas mentionnée dans leur réclamation. Les contribuables ont par ailleurs fait l'objet d'un examen de situation fiscale personnelle, à l'issue duquel le service a porté le montant de leurs revenus imposables au titre de l'année 2007 de 677 772 euros à 5 962 568 euros. Par une proposition de rectification du 19 décembre 2012, le service a tiré les conséquences des rectifications opérées au titre des revenus de l'année 2007 sur le droit à restitution acquis par les contribuables en 2009 et a procédé à la reprise de la fraction d'impôts directs correspondante qui leur avait été initialement restituée, le montant de la créance dont les intéressés se prévalaient s'avérant nul. Les requérants font appel du jugement en date du 27 mars 2018 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont en conséquence été assujettis et de la majoration de 10 % qui leur a été infligée sur le fondement de l'article 1758 A du code général des impôts.

Sur l'application de la loi fiscale :

2. D'une part, aux termes de l'article 1er du code général des impôts, alors en vigueur : " Les impôts directs payés par un contribuable ne peuvent être supérieurs à 50 % de ses revenus. / Les conditions d'application de ce droit sont définies à l'article 1649-0 A ". Aux termes de l'article 1649-0 A du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " 1. Le droit à restitution de la fraction des impositions qui excède le seuil mentionné à l'article 1er est acquis par le contribuable au 1er janvier de la deuxième année suivant celle de la réalisation des revenus mentionnés au 4. (...). / 2. Sous réserve qu'elles aient été payées en France et, d'une part, pour les impositions autres que celles mentionnées aux e et f, qu'elles ne soient pas déductibles d'un revenu catégoriel de l'impôt sur le revenu, d'autre part, pour les impositions mentionnées aux a, b et e, qu'elles aient été régulièrement déclarées, les impositions à prendre en compte pour la détermination du droit à restitution sont : / a) l'impôt sur le revenu dû au titre des revenus mentionnés au 4 ; (...) / 4. Le revenu à prendre en compte pour la détermination du droit à restitution s'entend de celui réalisé par le contribuable (...) ".

3. D'autre part, aux termes de l'article L. 251 du livre des procédures fiscales : " Lorsqu'une transaction est devenue définitive après accomplissement des obligations qu'elle prévoit et approbation de l'autorité compétente, aucune procédure contentieuse ne peut plus être engagée ou reprise pour remettre en cause les pénalités qui ont fait l'objet de la transaction ou les droits eux-mêmes. (...) ". Lorsqu'une transaction est devenue définitive, l'administration ne peut pas mettre à la charge du contribuable qui l'a signée une imposition excédant la somme fixée par cet accord.

4. Il résulte de l'instruction que M. et Mme C... de la Morinière ont signé le 23 juin 2010 avec le chef des services fiscaux en charge de la direction nationale des vérifications de situations fiscales une transaction, afin de régler définitivement le litige qui les opposait à l'administration sur les rectifications opérées au titre de leurs revenus de l'année 2007 dans le cadre de l'examen de leur situation fiscale personnelle. Cette transaction vise la proposition de rectification adressée aux contribuables le 10 novembre 2009 relative à l'imposition des revenus de l'année 2007, ainsi que la demande de transaction présentée par M. et Mme C... de la Morinière portant sur les mêmes revenus. Sous l'article 1er, il est exposé que l'administration consent à renoncer aux intérêts de retard et pénalités encourus par les contribuables, qui restent redevables de la somme de 1 684 813 euros, correspondant aux droits dus au titre de l'ensemble des revenus rectifiés de l'année 2007. Ni l'accord transactionnel en litige, ni les courriers précités ne font expressément mention du droit à restitution acquis au 1er janvier 2009 par M. et Mme C... de la Morinière. Ainsi, eu égard notamment à ses énonciations précises et concordantes, la transaction du 23 juin 2010 ne peut être regardée comme ayant inclus dans son champ le droit à restitution précité. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir qu'en procédant à la reprise de la fraction d'impôts directs s'élevant à 424 582 euros qui leur avait été restituée par la décision du 11 décembre 2009 de la direction départementale des finances publiques des Yvelines, l'administration a méconnu les termes de la transaction et, par suite, des dispositions de l'article L. 251 du livre des procédures fiscales.

Sur l'interprétation administrative de la loi fiscale :

5. Aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. (...) ". Aux termes de l'article L. 80 B de ce livre : " La garantie prévue au premier alinéa de l'article L. 80 A est applicable : 1° Lorsque l'administration a formellement pris position sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal ; (...) ".

6. En premier lieu, les requérants soutiennent que la décision du 11 décembre 2009 par laquelle la direction des services fiscaux des Yvelines a statué sur leur demande de plafonnement des impôts directs a été prise après la notification de la proposition de rectification du 10 novembre 2009 portant le montant des revenus qu'ils avaient perçus au titre de l'année 2007 de 677 772 euros à 5 962 568 euros, et donc après, pour le vérificateur, avoir pris connaissance de l'ensemble de leur situation fiscale, et qu'elle constitue, dès lors qu'elle a limité le montant de la restitution des impositions à la somme de 424 582 euros, après réintégration d'une plus-value de cession de valeur mobilière mentionnée dans l'avis d'imposition de l'année 2007, une prise de position formelle de l'administration au sens de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales sur les éléments à retenir pour la détermination du droit à restitution qu'ils ont acquis au 1er janvier 2009 et, par suite, sur l'existence et l'étendue de ce droit. Toutefois, en indiquant dans sa décision du 11 décembre 2009 que le montant des revenus à prendre en compte, pour l'examen de la demande de plafonnement des impôts directs présentée par M. et Mme E..., s'élevait à 677 772 euros compte tenu de l'intégration aux revenus de l'année 2007 d'une plus-value nette d'un montant de 473 419 euros, l'administration ne peut être regardée comme s'étant prononcée explicitement et sans ambiguïté sur les revenus de l'année 2007 devant être pris en compte pour le calcul du droit à restitution en litige, dès lors que le montant de ces revenus n'a été fixé de façon définitive que le 23 juin 2010, par la signature de la transaction précitée entre M. et Mme E... et le chef des services fiscaux en charge de la direction nationale des vérifications de situations fiscales. Ainsi, cette décision ne constitue pas une prise de position formelle de l'administration sur l'appréciation d'une situation de fait au regard de la notion de revenu qui lui serait opposable sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales.

7. En second lieu, si M. et Mme E... font valoir que l'administration a, par son instruction 13 L-11-10, § 61 et suivants, reprise au BOI-SJ-RES-10-20-10-20120912, § 40 et suivants, donné une interprétation du texte fiscal dont l'application conduirait en l'espèce à les décharger des impositions mises à leur charge, cette interprétation, qui ne concerne que la mise en oeuvre des articles L. 80 A et L. 80 B du livre des procédures fiscales, n'a pas pour objet d'interpréter le texte fiscal d'assiette qui constitue le fondement des droits en litige. Dès lors, les requérants ne sont pas fondés à s'en prévaloir.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme E... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande. Par suite, leurs conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme E... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B... E... et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera adressée à la Direction générale des finances publiques - Direction nationale des vérifications de situations fiscales (DNVSF).

Délibéré après l'audience du 17 octobre 2019, à laquelle siégeaient :

- M. Formery, président de chambre,

- Mme D..., président-assesseur,

- M. Doré, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 7 novembre 2019.

Le rapporteur,

V. D...Le président,

S.-L. FORMERY

Le greffier,

F. DUBUY

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 18PA01835


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 18PA01835
Date de la décision : 07/11/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-01-03-07 Contributions et taxes. Généralités. Règles générales d'établissement de l'impôt.


Composition du Tribunal
Président : M. FORMERY
Rapporteur ?: Mme Valérie POUPINEAU
Rapporteur public ?: M. LEMAIRE
Avocat(s) : C.V.S.

Origine de la décision
Date de l'import : 21/01/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2019-11-07;18pa01835 ?
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