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24/10/2019 | FRANCE | N°19PA02078

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 24 octobre 2019, 19PA02078


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... D... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 8 décembre 2017 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays où il pourrait être reconduit.

Par un jugement n° 1808640 du 18 octobre 2018, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 28 juin 2019, M. D...,

représenté par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1808640 du 18 octobre 2018...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... D... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 8 décembre 2017 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays où il pourrait être reconduit.

Par un jugement n° 1808640 du 18 octobre 2018, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 28 juin 2019, M. D..., représenté par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1808640 du 18 octobre 2018 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de police du 8 décembre 2017 ;

3°) à titre subsidiaire, d'annuler l'obligation de quitter le territoire français ;

4°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour, sous la même astreinte ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le refus de titre de séjour méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le refus de titre de séjour méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- par voie de conséquence de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour, l'obligation de quitter le territoire français est illégale ;

- l'obligation de quitter le territoire français méconnaît le 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations des articles 2 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La requête a été communiquée au préfet de police, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 30 avril 2019 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Paris.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. C... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. D..., ressortissant nigérian né en juin 1978, est entré en France le 4 octobre 2015 selon ses déclarations. Il a sollicité le 2 mai 2017 un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en raison de son état de santé. Il fait appel du jugement du 18 octobre 2018 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police du 8 décembre 2017 refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays où il pourrait être reconduit.

Sur la décision de refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé (...) ".

3. M. D... fait valoir qu'il a subi une opération chirurgicale en novembre 2016 visant à la pose d'une prothèse totale de la hanche en raison d'une fracture ancienne et non traitée dans son pays d'origine. Pour refuser, le 8 décembre 2017, de lui délivrer un titre de séjour, le préfet de police s'est fondé sur l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, qui a estimé que si l'état de santé de M. D... nécessitait une prise en charge médicale, le défaut de celle-ci n'était pas de nature à entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Les certificats médicaux produits par M. D..., datés des 27 avril 2017, 25 septembre 2017, 22 mars 2018 et 12 juillet 2018, font état d'une bonne cicatrisation sans complication suite à l'opération ainsi que d'un traitement par anticoagulant et antalgiques, compte tenu d'une persistance de la douleur. Ils ne sont pas de nature à contredire l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Les certificats médicaux complémentaires des 15 et 20 novembre 2018 produits en appel, qui font état de la possibilité de survenue de complications graves dans l'avenir, pas plus que celui du 2 février 2019, qui se borne à affirmer que le suivi postopératoire ne pourrait être réalisé dans le pays d'origine, ne sont pas de nature à démontrer que l'intéressé avait besoin à la date de la décision attaquée d'un traitement médical dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

4. En second lieu, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Pour l'application de ces stipulations, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.

5. M. D... fait valoir sans plus de précisions que l'arrêté du 8 décembre 2017 porte atteinte à son droit à une vie privée et familiale en raison de sa présence en France depuis 2015 et des liens personnels et familiaux qu'il y aurait noué depuis lors. Toutefois, s'il ne ressort pas des pièces du dossier que M. D... ait construit de tels liens en France, il n'est en revanche pas démuni d'attaches au Nigéria, pays dont il est ressortissant, où il a vécu jusqu'à l'âge de 37 ans et où résident notamment son épouse et ses trois enfants nés en 2008, 2014 et 2016. Dans ces conditions, M. D... n'est pas fondé à soutenir que la décision portant refus de séjour a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

Sur les conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français :

6. En premier lieu, les moyens dirigés contre la décision de refus de titre de séjour ayant été écartés, l'exception d'illégalité de cette décision invoquée par M. D... à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écartée par voie de conséquence.

7. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) ".

8. Ainsi qu'il a été dit au point 3 ci-dessus, il ne ressort pas des pièces du dossier que le défaut de traitement entraînerait des conséquences d'une exceptionnelle gravité, ni, d'ailleurs et en tout état de cause, que la surveillance médicale de la pathologie de M. D... et le traitement nécessaire seraient indisponibles au Nigéria. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

9. En troisième lieu, les moyens tirés de la violation des stipulations des articles 2 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales à l'encontre de la décision faisant obligation à M. D... de quitter le territoire français ne sont pas fondés dès lors que, comme il été indiqué ci-dessus, M. D... n'établit pas que sa vie soit compromise par la décision portant obligation de quitter le territoire français, pas plus que celle-ci ne l'expose à des traitements inhumains ou dégradants.

10. En quatrième lieu, pour les mêmes raisons qu'au point 5 ci-dessus, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales par la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas fondé et doit être écarté.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Sa requête d'appel ne peut qu'être rejetée, y compris les conclusions à fin d'injonction et celles tendant à ce que l'Etat, qui n'est pas partie perdante, verse une somme à son avocat sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... D... et au ministre de l'intérieur

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 3 octobre 2019, à laquelle siégeaient :

- Mme Pellissier, président de chambre,

- M. C..., premier conseiller,

- M. Platillero, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 24 octobre 2019.

Le rapporteur,

A. C...La présidente,

S. PELLISSIERLa greffière,

M. B...La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 19PA02078


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19PA02078
Date de la décision : 24/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme PELLISSIER
Rapporteur ?: M. Alain LEGEAI
Rapporteur public ?: Mme GUILLOTEAU
Avocat(s) : BREVAN

Origine de la décision
Date de l'import : 30/10/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2019-10-24;19pa02078 ?
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