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24/10/2019 | FRANCE | N°18PA02695

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3ème chambre, 24 octobre 2019, 18PA02695


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler le titre exécutoire du 6 septembre 2016 par lequel le Centre régional des oeuvres universitaires et scolaires (CROUS) de Paris a mis à sa charge la somme de 554 euros au titre d'un loyer impayé.

Par un jugement n° 1702800/6-3 du 1er décembre 2017, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une ordonnance n° 417698 du 13 juin 2018, le président de la section du contentieux

du Conseil d'Etat a, en application des articles R. 351-1 et R. 811-1 du code de justice ad...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler le titre exécutoire du 6 septembre 2016 par lequel le Centre régional des oeuvres universitaires et scolaires (CROUS) de Paris a mis à sa charge la somme de 554 euros au titre d'un loyer impayé.

Par un jugement n° 1702800/6-3 du 1er décembre 2017, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une ordonnance n° 417698 du 13 juin 2018, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a, en application des articles R. 351-1 et R. 811-1 du code de justice administrative, attribué à la cour administrative d'appel de Paris le jugement du dossier d'appel enregistré au Conseil d'Etat.

Par une requête et des mémoires enregistrés les 29 janvier 2018, 27 avril 2018 et 8 janvier 2019, M. A..., représenté par Me F..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris du 1er décembre 2017 ;

2°) de faire droit à ses demandes de première instance ;

3°) d'enjoindre au CROUS de Paris de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois et de lui restituer toute somme perçue sur son compte bancaire en vertu de la saisie-attribution du 8 mars 2017.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier dès lors qu'il n'est pas établi qu'il a été régulièrement signé ;

- les premiers juges ont estimé à tort qu'il n'avait pas soulevé de moyen relevant de la légalité externe de l'acte attaqué dans sa demande de première instance ; les moyens de légalité externe qu'il a ensuite invoqués n'étaient donc pas irrecevables ;

- c'est à tort que le tribunal administratif a estimé que le refus de représentation du chèque qu'il a adressé au CROUS était sans incidence sur la légalité du titre exécutoire contesté ; le CROUS a en effet méconnu son obligation de recouvrement amiable des créances, en méconnaissance de l'article 192 du décret du 7 novembre 2012 ;

- l'acte attaqué a été émis en méconnaissance des dispositions de l'article L. 131-73 du code monétaire et financier, dès lors que le CROUS n'a pas préalablement obtenu un certificat de non-paiement de la part de la banque du débiteur ;

- le jugement a mis à sa charge la somme de 200 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, alors qu'il bénéficiait de l'aide juridictionnelle, en méconnaissance des dispositions combinées des articles 43 et 75 de la loi du 10 juillet 1991.

Par deux mémoires en défense enregistrés les 6 septembre 2018 et 22 janvier 2019, le CROUS de Paris, représenté par Me B..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 1 000 euros soit mise à la charge de M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la demande de première instance était irrecevable, faute pour le requérant d'avoir formé la réclamation préalable obligatoire prévue par l'article 118 du décret du 7 novembre 2012 ;

- les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Les parties ont été informées le 16 septembre 2019, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office tiré de l'incompétence du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris sur le fondement des dispositions de l'article R. 222-13 du code de justice administrative, pour statuer sur la demande de M. A... tendant à l'annulation du titre exécutoire du 6 septembre 2016 par lequel le Centre régional des oeuvres universitaires et scolaires (CROUS) de Paris a mis à sa charge la somme de 554 euros au titre d'un loyer impayé.

Par un mémoire enregistré le 25 septembre 2019, M. A... a présenté des observations en réponse au moyen susceptible d'être relevé d'office par la cour.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision n° 2018/040974 du 30 novembre 2018 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Paris.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code monétaire et financier ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- les conclusions de Mme Pena, rapporteur public,

- les observations de Me F..., représentant M. A...,

- et les observations de Me G..., représentant le CROUS de Paris.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... bénéficie d'un logement qui lui a été attribué par le Centre régional des oeuvres universitaires et scolaires (CROUS) de Paris. Le chèque de 554 euros qu'il a adressé à cet établissement en règlement de son loyer pour le mois de décembre 2015 a été rejeté par sa banque le 9 février 2016, pour défaut de provision. Le 6 septembre 2016, le CROUS de Paris a émis à son encontre un titre exécutoire pour un montant de 554 euros, qu'il a fait signifier par huissier au requérant le 14 décembre 2016. Le 13 février 2017, M. A... a notamment demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler ce titre exécutoire, d'enjoindre au CROUS de Paris de réexaminer sa situation et de lui restituer la somme retenue sur son compte bancaire par saisie-attribution du 8 mars 2017. Par le jugement du 1er décembre 2017 dont le requérant relève appel, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes de l'article R.222-13 du code de justice administrative : " Le président du tribunal administratif ou le magistrat qu'il désigne à cette fin et ayant atteint au moins le grade de premier conseiller ou ayant une ancienneté minimale de deux ans statue en audience publique et après audition du rapporteur public, sous réserve de l'application de l'article R. 732-1-1 : / 1° Sur les litiges relatifs aux prestations, allocations ou droits attribués au titre de l'aide ou de l'action sociale, du logement ou en faveur des travailleurs privés d'emploi, mentionnés à l'article R. 772-5 ".

3. M. A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler un titre exécutoire émis par le CROUS de Paris au titre d'un loyer impayé pour le mois de décembre 2015. Une telle action ne peut être regardée comme un litige relatif " aux prestations, allocations ou droits attribués au titre de l'aide ou de l'action sociale, du logement ou en faveur des travailleurs privés d'emploi " au sens des dispositions de l'article R. 222-13 précitées du code de justice administrative. Il en résulte que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris n'était pas compétent pour statuer sur la demande de M. A.... Par suite, le jugement attaqué est irrégulier et doit être annulé.

4. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Paris.

Sur les conclusions à fin d'annulation et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par le centre régional des oeuvres universitaires et scolaires de Paris :

5. M. A... soutient en premier lieu que le CROUS de Paris a méconnu son obligation de recouvrement amiable des créances, issue des dispositions de l'article 192 du décret du

7 novembre 2012, en refusant de présenter à nouveau le chèque rejeté le 9 février 2016 par sa banque pour défaut de provision.

6. Aux termes de l'article 192 du décret du 7 novembre 2012 : " (...) Tout ordre de recouvrer donne lieu à une phase de recouvrement amiable. En cas d'échec du recouvrement amiable, il appartient à l'agent comptable de décider l'engagement d'une procédure de recouvrement contentieux. / L'exécution forcée par l'agent comptable peut, à tout moment, être suspendue sur ordre écrit de l'ordonnateur. "

7. Ces dispositions, qui imposent à l'administration une phase de recouvrement amiable avant poursuite de l'exécution forcée d'un titre de perception, ne sauraient être utilement invoquées pour contester la légalité du titre attaqué, émis en vue de mettre en oeuvre ladite phase, et adressé au requérant accompagné d'une mise en demeure de régler, de lui-même, la somme due, dans un délai de huit jours. Aucune disposition législative ou réglementaire n'imposait par ailleurs au CROUS de Paris de présenter à nouveau le chèque précédemment adressé au CROUS par le requérant et rejeté le 9 février 2016, avant d'émettre le titre exécutoire litigieux.

8. En second lieu, si M. A... soutient que le CROUS a méconnu les dispositions de l'article L. 131-73 du code monétaire et financier en émettant le titre exécutoire du 6 septembre 2016 sans avoir préalablement obtenu un certificat de non-paiement de la part de sa banque, lesdites dispositions, qui en tout état de cause énoncent les modalités permettant aux créanciers privés de poursuivre le recouvrement forcé du montant d'un chèque impayé, ne peuvent être utilement invoquées à l'encontre d'un titre exécutoire émis par une personne publique ;

9. Il résulte de ce qui précède que M. A..., qui ne conteste ainsi ni la régularité formelle de l'acte attaqué, ni le bien-fondé ou l'exigibilité de la créance mise à sa charge, qu'il reconnaît être due au CROUS de Paris, n'est pas fondé à demander l'annulation du titre exécutoire du 6 septembre 2016.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

10. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. A..., n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions à fin d'injonction présentées par le requérant doivent être rejetées.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... une somme au titre des frais exposés par le CROUS de Paris et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n°1702800/6-3 du 1er décembre 2017 du tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : La demande de M. A... est rejetée.

Article 3 : Les conclusions présentées par le CROUS de Paris sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A... et Centre régional des oeuvres universitaires et scolaires de Paris.

Délibéré après l'audience du 10 octobre 2019, à laquelle siégeaient :

- M. E..., premier vice-président,

- M. Bernier, président assesseur,

- Mme C..., premier conseiller,

Lu en audience publique, le 24 octobre 2019.

Le rapporteur,

G. C...Le président,

M. E...

Le greffier,

E. MOULIN

La République mande et ordonne au ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 10PA03855

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N° 18PA02695


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 18PA02695
Date de la décision : 24/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. BOULEAU
Rapporteur ?: Mme Gaëlle MORNET
Rapporteur public ?: Mme PENA
Avocat(s) : BROUCHOT

Origine de la décision
Date de l'import : 12/11/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2019-10-24;18pa02695 ?
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