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24/10/2019 | FRANCE | N°17PA03403

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3ème chambre, 24 octobre 2019, 17PA03403


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 13 octobre 2016 par laquelle le directeur général du Centre des oeuvres universitaires et scolaires (CROUS) de Paris l'a mise en demeure de quitter le logement qu'elle occupe depuis le 1er février 2011 et l'a informée qu'à défaut de départ dans un délai de huit jours le CROUS de Paris saisirait le juge des référés du tribunal administratif de Paris aux fins d'expulsion.

Par une ordonnance n° 1703641 du 7 septemb

re 2017, le vice-président de la 4ème section du tribunal administratif de Paris a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 13 octobre 2016 par laquelle le directeur général du Centre des oeuvres universitaires et scolaires (CROUS) de Paris l'a mise en demeure de quitter le logement qu'elle occupe depuis le 1er février 2011 et l'a informée qu'à défaut de départ dans un délai de huit jours le CROUS de Paris saisirait le juge des référés du tribunal administratif de Paris aux fins d'expulsion.

Par une ordonnance n° 1703641 du 7 septembre 2017, le vice-président de la 4ème section du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 6 novembre 2017, Mme B..., représentée par

Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) d'annuler la décision du directeur général du CROUS de Paris du 13 octobre 2016 refusant sa réadmission et la mettant en demeure de quitter son logement sous huit jours ;

3°) d'enjoindre au directeur du CROUS de Paris, dans un délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt et sous astreinte de 100 euros par jour de retard, de procéder au réexamen de son dossier ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 750 euros à verser à son conseil en application des dispositions combinées du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Mme B... soutient que :

- c'est à tort que le premier juge s'est estimé incompétent pour connaître de sa demande d'annulation de la décision de refus de réadmission dans un logement CROUS, révélée par le courrier du directeur général du CROUS du 13 octobre 2016 dès lors que seul l'ordre administratif est compétent pour connaître d'une demande tendant à l'annulation d'une décision administrative ;

- l'ordonnance est irrégulière dès lors que le moyen d'incompétence a été relevé d'office sans que les parties en soient préalablement informées et sans qu'elles aient été mises à même de présenter leurs observations, ce qui constitue une violation du droit à un procès équitable ;

- la décision portant refus de réadmission dans son logement ne lui a pas été notifiée et ne lui est donc pas opposable ;

- la décision de mise en demeure est insuffisamment motivée en fait dès lors qu'elle fait référence à une décision de refus de réadmission non notifiée et est insuffisamment motivée en droit ;

- les décisions de refus de réadmission et de mise en demeure sont irrégulières dès lors qu'elles n'ont pas été précédées d'une procédure contradictoire lui permettant de faire valoir ses observations ;

- ces décisions sont entachées d'un défaut d'examen réel et complet de sa situation particulière ;

- la décision de refus de réadmission est irrégulière en raison du défaut de saisine de la commission paritaire prévue par l'article 4 de l'arrêté interministériel du 21 juillet 1970 relatif au régime d'occupation et aux conditions financières des étudiants admis dans une résidence universitaire ;

- la décision de refus de réadmission est irrégulière dès lors qu'elle a été prise en méconnaissance de la procédure définie par l'article 22 du règlement général des résidences universitaires du CROUS de Paris du 13 juillet 2010 ;

- le directeur général du CROUS de Paris aurait dû faire usage de son pouvoir discrétionnaire compte tenu de sa situation ;

- ces décisions portent une atteinte disproportionnée à son droit à l'hébergement en foyer durant ses études ;

- ces décisions méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et sont, en outre, entachées d'une erreur manifeste d'appréciation de leurs conséquences sur sa situation personnelle.

Le CROUS de Paris a produit un mémoire en défense, enregistré le 24 mai 2019, par lequel il conclut au rejet de la requête et en faisant valoir qu'elle est irrecevable et subsidiairement qu'il n'y a plus lieu de statuer sur ses conclusions ; il demande que la requérante soit condamnée à lui verser la somme de 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Paris du 12 avril 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'éducation ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- l'arrêté interministériel du 21 juillet 1970 relatif au régime d'occupation et aux conditions financières des étudiants admis dans une résidence universitaire ;

- le règlement général des résidences universitaires du CROUS de Paris du 13 juillet 2010 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. C...,

- les conclusions de Mme Pena, rapporteur public,

- et les observations de Me E..., représentant le CROUS de Paris.

Considérant ce qui suit :

1. Le Centre régional des oeuvres universitaires et scolaires (CROUS) de Paris a, par la conclusion d'une convention temporaire d'occupation, attribué à Mme B... un logement meublé de la résidence " Fontaine au Roi " dans le 11ème arrondissement de Paris à compter du 1er mars 2011. Par un courrier du 13 octobre 2016, le directeur général du CROUS de Paris a informé Mme B... qu'elle n'avait pas été réadmise dans ce logement pour l'année universitaire 2016-2017 et l'a mise en demeure de quitter les lieux dans un délai de huit jours. Par une ordonnance du 7 septembre 2017 le vice-président du tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de Mme B... tendant à l'annulation de cette décision comme portée devant une juridiction incompétente. Mme B... relève régulièrement appel de cette ordonnance.

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

2. La demande présentée par Mme B... devant le tribunal administratif de Paris tendait à l'annulation d'une part, de la décision du directeur du CROUS de Paris du 13 octobre 2016 qui, d'une part, révèlerait un refus de la réadmettre dans son logement au titre de l'année 2016-2017 et, d'autre part, la met en demeure de quitter ce logement sous huit jours. Si les CROUS sont des établissements publics à caractère administratif chargés, en vertu des articles L. 822-1, R. 822-1 et R. 822-14 du code de l'éducation, d'une mission de service public qu'ils assurent en accordant notamment, par décision unilatérale, des logements aux étudiants, que même dans le cas où la résidence universitaire ne peut pas être regardée comme une dépendance du domaine public, toute demande d'expulsion formée par un CROUS vise à assurer le fonctionnement normal et la continuité du service public administratif dont il a la charge. Dès lors, il appartient à la juridiction administrative de connaître du litige ainsi soulevé et Mme B... est fondée à demander l'annulation de l'ordonnance en date du 7 septembre 2017 par lequel le vice-président du tribunal administratif de Paris a rejeté cette demande comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître.

3. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme B... devant le tribunal administratif de Paris.

4. Par son courrier du 13 octobre 2016, le directeur général du CROUS de Paris a informé Mme B... de ce qu'elle n'avait pas été réadmise dans le logement qu'elle occupe depuis le 1er mars 2011 au titre de l'année 2016-2017. Contrairement à ce que soutient l'intéressée, un tel courrier ne peut être regardé comme révélant une décision de refus de réadmission dès lors qu'il n'est pas sérieusement contesté que Mme B... n'a présenté, pour l'année 2016-2017, aucune demande à ce titre. La décision contestée avait seulement pour objet de la mettre en demeure de quitter les lieux dans un délai de huit jours.

5. Il résulte de ce qui a été dit au point 4 que les moyens tirés de l'irrégularité de la décision en raison d'un défaut de saisine de la commission paritaire d'admission et d'une absence de procédure de recouvrement amiable et de transfert à Mme B... du dossier de recouvrement, ainsi que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 4 de l'arrêté interministériel du 21 juillet 1970 qui se rattachent à la procédure applicable en matière de résiliation d'une convention d'occupation ou aux procédures applicables aux bénéficiaires d'une convention d'occupation, ne peuvent être utilement invoqués à l'encontre de la décision contestée de mise en demeure.

6. En outre, cette décision se borne à tirer les conséquences de la situation objective de Mme B... comme occupante sans droit ni titre de son logement à compter du 1er septembre 2016, de sorte que la circonstance que le directeur général du CROUS de Paris aurait dû tenir compte de l'erreur dans le versement de ses allocations par la Caisse d'allocation familiale est sans incidence sur la légalité de la mise en demeure adressée à l'intéressée. Le moyen tiré du défaut d'examen de la situation de Mme B... doit par suite être écarté.

7. Mme B... ne peut utilement se prévaloir de la méconnaissance de son droit à un hébergement en foyer dès lors que, faute d'avoir été réadmise au titre de l'année 2016-2017, elle ne disposait pas d'un tel droit.

8. Le moyen tiré de la méconnaissance du droit au respect de la vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant à l'encontre de la décision contestée, laquelle a seulement pour objet de la mettre en demeure de quitter qu'elle occupe de manière irrégulière et n'est pas susceptible, en tant que telle, de porter atteinte au droit à la vie privée et familiale de Mme B.... Pour le même motif, la décision contestée n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressée.

9. Il résulte de tout ce qui précède que la demande de Mme B... doit être rejetée.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

10. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions aux fins d'annulation présentées par Mme B..., n'appelle, par lui-même, aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions aux fins d'injonction présentées par la requérante doivent être rejetées.

Sur les frais irrépétibles :

11. Les dispositions combinées du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font en tout état de cause obstacle à ce que soit mise à la charge du CROUS de Paris, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, une quelconque somme au bénéfice du conseil de Mme B... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

12. Dans les circonstances de l'espèce il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions du CROUS de Paris tendant à la condamnation de Mme B... à lui verser une somme sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du CROUS de Paris tendant à la condamnation de Mme B... à lui verser une somme sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... B... et au centre régional des oeuvres universitaires et scolaires de Paris.

Copie en sera transmise au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.

Délibéré après l'audience du 10 octobre 2019, à laquelle siégeaient :

- M. C..., premier vice-président,

- M. Bernier, président assesseur,

- Mme Mornet, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 24 octobre 2019.

L'assesseur le plus ancien,

Ch. BERNIERLe président-rapporteur,

M. C...

Le greffier,

E. MOULIN

La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 10PA03855

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N° 17PA03403


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 17PA03403
Date de la décision : 24/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. BOULEAU
Rapporteur ?: M. le Pdt. Michel BOULEAU
Rapporteur public ?: Mme PENA
Avocat(s) : NUNES

Origine de la décision
Date de l'import : 12/11/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2019-10-24;17pa03403 ?
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