Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D... A... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté, en date du 12 juin 2017, par lequel le préfet de police lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 1711119 du 12 septembre 2017, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 12 octobre 2017, M. A..., représenté par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1711119 du 12 septembre 2017 du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté contesté ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour avec autorisation de travail dans un délai de trente jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative et, dans cette attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travail dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros à verser à son conseil au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, Me C... renonçant à percevoir la somme allouée au titre de l'aide juridictionnelle.
Il soutient que :
- le refus de titre de séjour méconnaît les dispositions du 6° de l'article L. 511-1 et de l'article L. 743-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que le préfet de police devait vérifier qu'aucun titre de séjour ne pouvait lui être délivré sur un autre fondement ;
- cette décision méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et celles de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est irrégulière, le préfet de police s'étant abstenu de procéder à un examen particulier de sa situation dès lors que ni son changement de domiciliation, ni sa demande de titre de séjour n'ont été visés et analysés ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- elle a été prise en violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision fixant le pays de destination est insuffisamment motivée ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
La requête de M. A... a été communiquée au préfet de police qui n'a pas présenté de mémoire en défense.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris du 9 février 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et son décret d'application n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme B... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. D... A..., ressortissant ivoirien, est entré en France, selon ses déclarations, le 20 septembre 2013. Il s'est vu refuser l'admission au titre de l'asile par décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 21 avril 2016, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 4 janvier 2017. Par un arrêté en date du 12 juin 2017, le préfet de police a fait obligation à M. A... de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. A... relève appel du jugement du 12 septembre 2017, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la décision de refus de titre de séjour :
2. Ainsi que l'a relevé le premier juge au point 2 de son jugement, l'arrêté attaqué a fait obligation à M. A... de quitter le territoire français en application des dispositions du 6° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sans refuser à l'intéressé la délivrance d'un titre de séjour. La demande de M. A... tendant à l'annulation d'une décision inexistante de titre de séjour est, par suite, irrecevable.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
3. En premier lieu, il ne ressort pas des termes de l'arrêté du 12 juin 2017 que le préfet de police, qui a pris en considération la situation de M. A..., n'aurait pas procédé à un examen sérieux de sa situation personnelle préalablement à l'édiction de l'arrêté attaqué.
4. En deuxième lieu, le droit d'être entendu, tel qu'il ressort des stipulations de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, implique que l'autorité préfectorale, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision portant obligation de quitter le territoire français, mette l'intéressé à même de présenter ses observations écrites et orales, de sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu'elle n'intervienne. Toutefois, dans le cas prévu au 6° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, où la décision faisant obligation de quitter le territoire français est prise à la suite du refus de reconnaissance de la qualité de réfugié ou du bénéfice de la protection subsidiaire à l'étranger concerné, l'obligation de quitter le territoire français découle nécessairement de ce refus. Partant, le droit d'être entendu n'implique pas que l'administration ait l'obligation de mettre l'intéressé à même de présenter ses observations de façon spécifique, dès lors qu'il a pu être entendu avant que n'intervienne la décision lui refusant la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire.
5. M. A... entre dans le champ des dispositions du 6° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il a donc été mis à même de présenter ses observations lors de la procédure d'asile le concernant. En outre, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il ait été empêché, lors de sa demande d'admission au séjour au titre de l'asile comme pendant la durée de son instruction, de formuler toute remarque pertinente, y compris sur sa situation familiale, susceptible d'influer sur la décision préfectorale. Son droit à être entendu avant toute mesure d'éloignement n'a donc pas été méconnu, quand bien même le préfet de police aurait irrégulièrement refusé d'enregistrer sa demande de titre de séjour.
6. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
7. M. A... soutient qu'il réside en France depuis le 20 septembre 2013 et qu'il est lié à une ressortissante française par un pacte civil de solidarité. Toutefois, ce dernier ne justifie pas d'une communauté de vie effective avec sa compagne avant la date à laquelle a été conclu ce pacte, soit le 7 décembre 2016. Il n'établit pas, en outre, être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où vivent ses cinq enfants, ainsi qu'il ressort des mentions de la fiche de salle qu'il a renseignée. Dans ces conditions, le préfet de police, en lui faisant obligation de quitter le territoire français, n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cette décision a été prise. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit ainsi être écarté.
Sur la décision fixant le pays de destination :
8. L'arrêté attaqué comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision fixant le pays de destination. Le moyen tiré du défaut de motivation de cette décision ne peut ainsi qu'être écarté.
9. Les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile interdisent d'éloigner un étranger à destination d'un pays dans lequel sa vie ou sa liberté seraient menacées ou dans lequel il serait exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui proscrivent la torture et les traitements inhumains et dégradants.
10. Si M. A... soutient qu'il encourt des risques de traitements inhumains ou dégradants en Côte d'Ivoire en raison de ses opinions politiques, il ne produit aucun élément de nature à démontrer qu'il serait personnellement exposé à de tels risques en cas de retour dans ce pays, alors que sa demande de protection a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, puis par la Cour nationale du droit d'asile, et qu'il ne fait état d'aucun élément nouveau en appel. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut qu'être écarté.
11. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 3 octobre 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Formery, président de chambre,
- Mme Poupineau, président assesseur,
- M. B..., premier conseiller,
Lu en audience publique, le 17 octobre 2019.
Le rapporteur,
C. B...Le président,
S.-L. FORMERY
Le greffier,
C. DABERTLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 17PA03228 2