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16/10/2019 | FRANCE | N°18PA01528

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 16 octobre 2019, 18PA01528


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Socoter a demandé au Tribunal administratif de la Polynésie française de prononcer la décharge des cotisations à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2012 et suivantes, en raison du refus de la Polynésie française d'imputer un crédit d'impôt de 22 200 000 F CFP.

Par un jugement n° 1700355/1 du 27 mars 2018, le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requ

ête et un mémoire enregistrés les 5 mai 2018 et 5 février 2019, la société Socoter, représentée par Me...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Socoter a demandé au Tribunal administratif de la Polynésie française de prononcer la décharge des cotisations à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2012 et suivantes, en raison du refus de la Polynésie française d'imputer un crédit d'impôt de 22 200 000 F CFP.

Par un jugement n° 1700355/1 du 27 mars 2018, le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 5 mai 2018 et 5 février 2019, la société Socoter, représentée par Me A... B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de la Polynésie française

du 27 mars 2018 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions litigieuses ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 169 000 F CFP en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- son action est recevable ;

- les pièces attestant du financement de l'investissement ont été produites.

Par un mémoire en défense enregistré le 14 novembre 2018, le gouvernement de la Polynésie française, représentée par Me E... C..., conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les moyens soulevés par la société Socoter ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 18 février 2019 la clôture de l'instruction a été fixée au

6 mars 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 modifiée portant statut d'autonomie de la Polynésie française, ensemble la loi n° 2004-193 du 27 février 2004 complétant le statut d'autonomie de la Polynésie française ;

- le code des impôts de la Polynésie française ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. D...,

- et les conclusions de Mme Jimenez, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société Socoter déclare avoir participé au financement d'une opération défiscalisée de construction d'une résidence hôtelière. Pour l'établissement de ses cotisations à l'impôt sur les sociétés, la Polynésie française n'a pas tenu compte de cette opération qui, selon la société requérante, aurait dû entrainer à son bénéfice un crédit d'impôt de 22 200 000 F CFP. La société Socoter a formé une réclamation sur ce point le 30 juillet 2015, puis le 22 janvier 2016. La Polynésie française, après avoir sollicité des informations complémentaires par courrier

du 12 avril 2016, a pris une décision de rejet de la réclamation du 30 juillet 2015 le 3 juin 2016. La société Socoter relève appel du jugement du 27 mars 2018 par lequel le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande en décharge des cotisations à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2012 et suivantes, en raison du refus du gouvernement de la Polynésie française d'imputer ce crédit d'impôt de 22 200 000 F CFP.

2. Aux termes de l'article LP. 611-8 du code des impôts de la Polynésie française :

" En cas de rejet total ou partiel de la réclamation, le contribuable peut saisir le tribunal administratif de la Polynésie française dans le délai du recours contentieux fixé à deux mois par l'article R. 421-1 du code de justice administrative, à partir du jour de la réception de la décision prise sur sa réclamation. Toutefois, le contribuable qui n'a pas reçu la décision du Président de la Polynésie française, ou de son délégué, dans le délai de six mois mentionné à l'article LP. 611-7, peut saisir le Tribunal administratif de la Polynésie française dès l'expiration de ce délai. ".

3. La décision de rejet de la réclamation du 30 juillet 2015 a été adressée non à l'adresse figurant en entête de la réclamation et à laquelle l'administration a d'ailleurs envoyé à la société requérante les avis d'impôt sur les sociétés 2013 et 2015, mais à un numéro de boite postale inscrit sur le tampon par lequel la société avait authentifié la signature figurant à la fin de ladite réclamation. Dans ces conditions, et alors même qu'il résulte de l'attestation du service de l'Office des Postes et Télécommunications que deux avis de mise en instance ont été délivrés à cette adresse et que le courrier a été retourné au gouvernement de la Polynésie française avec la mention " non réclamé " le 30 juin 2016, la décision de rejet de la réclamation ne peut être regardée comme ayant régulièrement été notifiée à la date du 13 juin 2016. C'est par suite à tort que les premiers juges ont estimé qu'à la date où la société requérante avait déposé sa requête au tribunal, soit le 27 septembre 2017, le délai de deux mois prévu par l'article LP. 611-8 précité du code des impôts de la Polynésie française était expiré et ont constaté pour ce motif l'irrecevabilité de la demande qui leur était soumise. Il y a par suite lieu d'annuler le jugement du 27 mars 2018 du Tribunal administratif de la Polynésie française et de statuer par la voie de l'évocation sur la demande présentée par la société Socoter devant les premiers juges.

4. En vertu des dispositions de l'article 374-1 du code des impôts, dans sa rédaction alors applicable, un crédit d'impôt est institué en faveur des personnes passibles de l'impôt sur les sociétés qui participent au financement de projets de construction à vocation hôtelière sous réserve du respect d'un certain nombre de conditions relatives notamment au montant total du coût du projet de construction et à la date de délivrance du permis de construire et du certificat de conformité. En ce qui concerne la forme du financement, l'article susmentionné dispose que : " (...). Sont considérés comme financements au sens du présent article, (...) les apports en compte courant non rémunérés ; (...). / Ces financements peuvent intervenir soit directement, soit par le biais de sociétés dont l'objet social est la participation au capital de sociétés s'engageant à réaliser des projets définis au présent article. (...) ".

5. Il résulte de l'instruction que la société Socoter a souscrit, en tant qu'investisseur du projet immobilier réalisé par la société Povea III dénommé " Sarah Nui ", auprès de la banque de Polynésie, des conventions par lesquelles cet établissement lui a prêté les sommes nécessaires au financement de ce projet par des apports en compte courant inscrits dans les comptes de la société Povea III. Le gouvernement de la Polynésie française fait valoir que les fonds en cause n'ont pas été affectés au financement du projet immobilier mais ont en réalité servi intégralement à garantir la banque du remboursement de ces prêts et que dès lors, le montage financier mis en place par la société Socoter était uniquement destiné à percevoir un avantage fiscal indu, en l'occurrence le bénéfice de crédits d'impôt, en l'absence de tout financement réel. La société requérante, en se bornant à faire valoir que les fonds ont été effectivement apportés et que le projet a été effectivement réalisé, n'apporte pas le moindre élément permettant de constater l'affectation des fonds audit projet.

6. Il résulte de tout ce qui précède que la société Socoter n'est pas fondée à demander la décharge des cotisations à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2012 et suivantes en raison du refus du gouvernement de la Polynésie française d'imputer un crédit d'impôt de 22 200 000 F CFP. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'État, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de la somme que la société requérante demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1700355/1 du 27 mars 2018 du Tribunal administratif de la Polynésie française est annulé.

Article 2 : Les conclusions de la société Socoter devant le Tribunal administratif de la Polynésie française ainsi que le surplus de ses conclusions devant la Cour sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Socoter et au gouvernement de la Polynésie française.

Délibéré après l'audience du 2 octobre 2019, à laquelle siégeaient :

- Mme Appèche, président,

- M. D..., premier conseiller,

- Mme Bonneau-Mathelot, premier conseiller.

Lu en audience publique le 16 octobre 2019.

Le rapporteur,

F. D...Le président assesseur,

En application de l'article R. 222-26 du code

de justice administrative,

S. APPECHE

Le greffier,

S. DALL'AVA

La République mande et ordonne au ministre des Outre-mer en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 18PA01528


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 18PA01528
Date de la décision : 16/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme APPECHE
Rapporteur ?: M. Franck MAGNARD
Rapporteur public ?: Mme JIMENEZ
Avocat(s) : DUMAS

Origine de la décision
Date de l'import : 18/10/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2019-10-16;18pa01528 ?
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