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03/10/2019 | FRANCE | N°18PA03815

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 03 octobre 2019, 18PA03815


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté en date du 6 novembre 2017, par lequel le préfet du Val-de-Marne a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et a fixé son pays de destination.

Par un jugement n° 1709809 du 14 juin 2018, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 6 décembre 2018, M. B...,

représenté par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1709809 du Tribunal a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté en date du 6 novembre 2017, par lequel le préfet du Val-de-Marne a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et a fixé son pays de destination.

Par un jugement n° 1709809 du 14 juin 2018, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 6 décembre 2018, M. B..., représenté par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1709809 du Tribunal administratif de Melun en date du 14 juin 2018 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet du Val-de-Marne en date du 6 novembre 2017 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de lui délivrer une carte de séjour temporaire d'une durée d'un an dans un délai d'un mois suivant l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, ou à titre subsidiaire, de procéder à un nouvel examen de sa situation dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer durant cet examen une autorisation provisoire de séjour, sous la même astreinte.

Il soutient que :

- il entend se prévaloir des moyens qu'il a soulevés devant les premiers juges et des pièces qu'il a versées au dossier dont il demande la transmission à la Cour ;

- la décision de refus de titre de séjour n'est pas suffisamment motivée dès lors qu'elle ne fait pas état de sa présence en France depuis 2005 ni de sa situation personnelle ;

- le préfet n'a pas procédé à un examen de sa demande au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni de sa situation personnelle ;

- il n'a pas consulté la commission du titre de séjour en méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale en raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour.

La requête a été communiquée au préfet du Val-de-Marne, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

M. D... B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 19 octobre 2018 du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience publique :

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant de la République démocratique du Congo, entré en France au cours de l'année 2005, fait appel du jugement en date du 14 juin 2018, par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 6 novembre 2017, par lequel le préfet du Val-de-Marne a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et a fixé son pays de destination.

2. En premier lieu, aux termes de son arrêté, le préfet du Val-de-Marne a visé les dispositions applicables à la situation de M. B.... Il a également rappelé les conditions de l'entrée de l'intéressé en France et mentionné les différentes demandes de titre de séjour qu'il a présentées, dont la dernière du 6 juin 2015, fondée sur les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il a indiqué les raisons pour lesquelles il a considéré que M. B... ne remplissait pas les conditions pour obtenir le titre de séjour qu'il sollicitait. Il a enfin exposé des éléments suffisants sur sa situation familiale en relevant que ce dernier était célibataire et sans charge de famille en France, qu'il avait deux enfants mineurs dans son pays et un frère en Allemagne, qu'il était demeuré en République démocratique du Congo jusqu'à l'âge de 25 ans, que ses parents étaient décédés et qu'il n'attestait pas être démuni d'attaches familiales à l'étranger. Dans ces conditions, le préfet du Val-de-Marne a suffisamment exposé les considérations de droit et de fait fondant sa décision de refus de titre de séjour. De même, la décision portant obligation de quitter le territoire français, qui vise les dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et dont la motivation se confond avec celle du refus de titre de séjour dont elle découle nécessairement, est suffisamment motivée. Dès lors, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de ces décisions ne peut qu'être écarté.

3. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier, et en particulier de la motivation des décisions contestées, que le préfet du Val-de-Marne a, contrairement à ce que soutient M. B..., procédé à un examen de ses droits au séjour au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que de sa situation personnelle.

4. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans ".

5. D'une part, pour établir sa résidence habituelle en France depuis l'année 2007, M. B... a produit au titre des années 2007 à 2011 un à deux documents médicaux, un reçu de dépôt d'une somme de 19 euros à l'ambassade de la République démocratique du Congo pour l'année 2009, des attestations d'aide médicale d'Etat et des avis d'imposition ne mentionnant aucun revenu. Ces documents ne sont pas suffisamment nombreux et diversifiés pour établir la présence effective de M. B... en France durant les années ci-dessus mentionnées. Le requérant, qui ne démontre pas ainsi avoir eu sa résidence habituelle sur le territoire national durant les dix années précédant la décision lui refusant un titre de séjour, n'est pas fondé à soutenir que le préfet du Val-de-Marne était tenu de saisir la commission du titre de séjour avant de se prononcer sur sa demande.

6. D'autre part, en présence d'une demande de régularisation présentée, sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, par un étranger qui ne serait pas en situation de polygamie et dont la présence en France ne présenterait pas une menace pour l'ordre public, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ". Dans cette dernière hypothèse, un demandeur qui justifierait d'une promesse d'embauche ou d'un contrat lui permettant d'exercer une activité, ne saurait être regardé, en principe, comme attestant, par là même, des motifs exceptionnels exigés par la loi.

7. Pour contester la décision de refus de titre de séjour du préfet du Val-de-Marne, M. B... se prévaut de la durée de sa présence en France, de l'ancienneté et de l'intensité de ses liens personnels avec la France et de son intégration. Il fait également valoir que la société Staff-Faux-Plafond-plâtrerie souhaite l'embaucher comme staffeur ornemaniste. Toutefois, le requérant était, à la date de la décision de refus de titre de séjour contestée, célibataire et sans charge de famille en France, alors qu'il est père de deux enfants mineurs en République démocratique du Congo, où il a lui-même vécu jusqu'à l'âge de 25 ans. Il n'établit pas la réalité de son expérience professionnelle, ni ne justifie d'une intégration particulière. Dans ces conditions, en estimant que la demande d'admission exceptionnelle au séjour de M. B... ne répondait pas à des considérations humanitaires et ne se justifiait pas davantage au regard de motifs exceptionnels, la durée du séjour ne constituant pas de tels motifs, le préfet du Val-de-Marne n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation dans l'application des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

8. En quatrième lieu, M. B... ne peut utilement se prévaloir de la circulaire du 28 novembre 2012, qui se borne à énoncer des orientations générales destinées à éclairer les préfets dans l'exercice de leur pouvoir de prendre des mesures de régularisation, sans les priver de leur pouvoir d'appréciation.

9. En cinquième lieu, le requérant n'établissant pas que la décision portant refus de titre de séjour en litige serait illégale, l'exception d'illégalité de cette décision soulevée à l'appui de ses conclusions à fin d'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français, doit être écartée.

10. En sixième lieu, le moyen tiré de ce que la mesure d'éloignement prononcée à l'encontre de M. B... est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation doit être écarté par les mêmes motifs que ceux énoncés au point 7.

11. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement est éloigné: 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; 2° Ou à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité; 3° Ou à destination d'un autre pays dans lequel il est légalement admissible. Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de 1'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ". Aux termes de l'article 3 de cette convention : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".

12. Si M. B... fait valoir qu'il ne peut retourner dans son pays d'origine, il ne produit aucun élément de nature à établir qu'il y serait personnellement exposé à des risques de traitements prohibés par les stipulations précitées de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Sa demande d'asile a d'ailleurs été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides par une décision du 21 avril 2005 et il s'est désisté de son recours devant la Cour nationale du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de ces stipulations ainsi que des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui n'est opérant qu'à l'appui des conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de destination, doit être écarté.

13. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Val-de-Marne.

Délibéré après l'audience du 19 septembre 2019, à laquelle siégeaient :

- M. Formery, président de chambre,

- Mme C..., président assesseur,

- M. Doré, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 3 octobre 2019.

Le rapporteur,

V. C...Le président,

S.-L. FORMERY

La greffière,

F. DUBUYLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 18PA03815


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 18PA03815
Date de la décision : 03/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. FORMERY
Rapporteur ?: Mme Valérie POUPINEAU
Rapporteur public ?: M. LEMAIRE
Avocat(s) : CHANEY

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2019-10-03;18pa03815 ?
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