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03/10/2019 | FRANCE | N°18PA03747

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 03 octobre 2019, 18PA03747


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... D... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler les arrêtés du 7 juin 2018 par lesquels le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, a fixé le pays où il pourrait être reconduit et lui a interdit de retourner en France pendant douze mois.

Par un jugement n° 1805134 du 26 septembre 2018, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire compléme

ntaire enregistrés les 30 novembre 2018 et 9 juillet 2019, M. D..., représenté par Me B..., demand...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... D... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler les arrêtés du 7 juin 2018 par lesquels le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, a fixé le pays où il pourrait être reconduit et lui a interdit de retourner en France pendant douze mois.

Par un jugement n° 1805134 du 26 septembre 2018, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés les 30 novembre 2018 et 9 juillet 2019, M. D..., représenté par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1805134 du 26 septembre 2018 du tribunal administratif de Melun ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de police du 7 juin 2018 ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt de la Cour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 100 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement méconnaît les stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'arrêté n'a pas été précédé d'un examen approfondi de sa situation ;

- son arrestation a été entachée d'un vice de procédure ;

- il avait droit à un titre de séjour de plein droit au regard des dispositions 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté méconnaît les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La requête et le mémoire complémentaire ont été communiqués au préfet de police, qui n'a pas produit de mémoire en défense.

M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 22 février 2019 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Paris.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. C... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. D..., ressortissant malien né en octobre 1989, est entré en France selon ses déclarations le 1er novembre 2016 pour solliciter l'octroi du statut de réfugié, demande rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFRPA) en décembre 2017. A la suite de son interpellation lors d'un contrôle d'identité à Paris, le préfet de police, par deux arrêtés du 7 juin 2018, d'une part, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai de départ volontaire et a fixé le pays où il pourrait être reconduit, et, d'autre part, lui a interdit de retourner en France pour une durée de douze mois. M. D... fait appel du jugement du 26 septembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés du préfet de police du 7 juin 2018.

Sur la régularité du jugement attaqué

2. M. D... soutient que le jugement a été rendu en méconnaissance des stipulations du premier paragraphe de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que du droit au procès équitable dès lors qu'il a eu des difficultés de communication avec son avocat et que le premier juge a refusé, malgré la demande de son conseil, de reporter l'audience, alors qu'il n'avait pu s'y présenter. Toutefois, les difficultés de communication avec l'avocat désigné au titre de l'aide juridictionnelle ne sont pas établies et le juge, auquel il incombe de veiller à la bonne administration de la justice, n'a aucune obligation, hormis le cas où des motifs exceptionnels tirés des exigences du débat contradictoire l'imposeraient, de faire droit à une demande de report de l'audience formulée par une partie et n'a pas à motiver le refus qu'il oppose à une telle demande. Par suite, à supposer même qu'un report d'audience ait effectivement été sollicité, le moyen tiré de ce que le jugement serait irrégulier ne peut qu'être écarté.

Sur le bien fondé

3. En premier lieu, M. D... soutient que son interpellation a été irrégulière. Toutefois, ce moyen est inopérant à l'encontre des décisions administratives contestées.

4. En deuxième lieu, M. D... soutient qu'il pouvait, compte tenu de son état de santé, bénéficier d'un titre de séjour de plein droit sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui prévoient la délivrance de la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" " A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ".

5. M. D... fait valoir d'une part, qu'il a subi un accident et a été hébergé le temps de sa convalescence, d'autre part, qu'il est atteint d'une hépatite B chronique. Toutefois, il n'apporte aucune précision sur son état de santé à la date de l'arrêté litigieux et il ressort des pièces qu'il produit en appel que sa contamination par le virus de l'hépatite B n'a été diagnostiquée qu'en avril 2019. Ainsi il ne ressort d'aucune pièce du dossier qu'à la date du 7 juin 2018 à laquelle le préfet de police lui a fait obligation de quitter le territoire français son état de santé nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut aurait pu entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

6. En troisième lieu, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Pour l'application de ces stipulations, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.

7. M. D... fait valoir que l'un de ses grands-pères était français, qu'il réside en France depuis le 1er novembre 2016 et qu'il y a retrouvé des oncles, tantes et cousins. Toutefois, le requérant est en France célibataire et sans charge de famille. Il n'établit pas être dépourvu d'attaches familiales au Mali, pays dont il est ressortissant et où il a vécu jusqu'à l'âge de 27 ans selon ses dires. Dés lors, les décisions contestées n'ont pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des objectifs poursuivis. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

8. En quatrième lieu, l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". M. D... fait valoir que sa vie serait menacée en cas de retour au Mali. Toutefois, alors que sa demande d'asile a été rejetée en décembre 2017 par l'OFPRA, M. D... ne produit devant la Cour aucun élément permettant d'établir la réalité des risques auxquels il serait personnellement exposé en cas de retour dans son pays. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Sa requête d'appel, y compris, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peut qu'être rejetée.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... D... et au ministre de l'intérieur

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 12 septembre 2019, à laquelle siégeaient :

- Mme F..., présidente de chambre,

- M. C..., premier conseiller,

- M. Platillero, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 3 octobre 2019.

Le rapporteur,

A. C...La présidente,

S. F...La greffière,

M. A...La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 18PA03747


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18PA03747
Date de la décision : 03/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme PELLISSIER
Rapporteur ?: M. Alain LEGEAI
Rapporteur public ?: Mme GUILLOTEAU
Avocat(s) : KADOCH

Origine de la décision
Date de l'import : 15/10/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2019-10-03;18pa03747 ?
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