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03/10/2019 | FRANCE | N°17PA22853

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 03 octobre 2019, 17PA22853


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le préfet de la Martinique a demandé au tribunal administratif de la Martinique de procéder à la liquidation de l'astreinte prononcée par le jugement n° 1200793 du 12 octobre 2012 par lequel ce tribunal a condamné M. C... D... à payer une amende de 200 euros en application de l'article L. 2132-26 du code général de la propriété des personnes publiques, lui a enjoint de diligenter des travaux de remise en état des lieux à réception de ce jugement, sous astreinte de 500 euros par jour de retard à déf

aut d'exécution des travaux dans un délai de deux mois à compter de sa notifica...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le préfet de la Martinique a demandé au tribunal administratif de la Martinique de procéder à la liquidation de l'astreinte prononcée par le jugement n° 1200793 du 12 octobre 2012 par lequel ce tribunal a condamné M. C... D... à payer une amende de 200 euros en application de l'article L. 2132-26 du code général de la propriété des personnes publiques, lui a enjoint de diligenter des travaux de remise en état des lieux à réception de ce jugement, sous astreinte de 500 euros par jour de retard à défaut d'exécution des travaux dans un délai de deux mois à compter de sa notification, et a autorisé le préfet à faire procéder d'office à la réalisation des travaux aux frais et risques du contrevenant à défaut d'exécution dans un délai de quatre mois à compter de la notification du jugement.

Par un jugement n° 1600248 du 16 mai 2017, le tribunal administratif de la Martinique a condamné M. D... à verser la somme de 30 240 euros à l'Etat.

Procédure devant la Cour :

Par une ordonnance du 1er mars 2019, prise sur le fondement de l'article R. 351-8 du code de justice administrative, le président de la section du contentieux du Conseil d'État a attribué à la Cour administrative d'appel de Paris le jugement du dossier d'appel enregistré à la Cour administrative d'appel de Bordeaux.

Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés le 21 août 2017 et le 30 janvier 2018, M. D..., représenté par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1600248 du 16 mai 2017 du tribunal administratif de la Martinique ;

2°) de rejeter la demande de liquidation d'astreinte présentée par le préfet de la Martinique ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. D... soutient qu'il n'y avait pas lieu de liquider l'astreinte, dès lors qu'il a procédé à la démolition des constructions litigieuses et a remis les lieux en état en novembre 2013, le préfet n'apportant pas la preuve contraire, et que les constructions nouvelles sont distinctes de celles ayant donné lieu au constat d'infraction.

Par des mémoires en défense enregistrés le 16 novembre 2017 et le 9 mars 2018, le ministre de la transition écologique et solidaire conclut au rejet de la requête.

Le ministre soutient que l'occupation irrégulière du domaine public maritime s'étant poursuivie, c'est à juste titre que l'astreinte a été liquidée, l'obtention d'un permis de construire étant sans incidence.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. F... ;

- et les conclusions de Mme Guilloteau, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. D... occupe la parcelle V 984 située sur la commune du Robert en Martinique et comprise dans la zone dite des cinquante pas géométriques qui fait partie du domaine public maritime, ainsi qu'en disposent les articles L. 5111-1 et L. 5111-2 du code général de la propriété des personnes publiques. La cession de cette parcelle lui a été refusée par une décision du 26 septembre 2012. Par un procès-verbal du 26 juillet 2012, il a été constaté que l'intéressé occupait irrégulièrement la parcelle précitée, sur laquelle il a réalisé un bâtiment en bois sur dallage en béton armé avec une couverture en tôle d'une surface d'environ 40 m². Le préfet de la Martinique a saisi le 21 août 2012 le juge de la contravention de grande voirie. Par un jugement du 12 octobre 2012, confirmé par la Cour administrative de Bordeaux par un arrêt du 11 juillet 2013, le tribunal administratif de la Martinique a condamné M. D... à payer une amende de 200 euros en application des dispositions combinées de l'article L. 2132-26 du code général de la propriété des personnes publiques et de l'article 131-13 du code pénal. Il lui a également enjoint de diligenter les travaux de remise en état des lieux, en liaison avec la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement de la Martinique, dès la réception du jugement, sous une astreinte de 500 euros par jour de retard à défaut d'exécution des travaux dans un délai de deux mois à compter de sa notification. Il a enfin autorisé le préfet à faire procéder d'office à la réalisation des travaux aux frais et risques de M. D... à défaut d'exécution dans un délai de quatre mois à compter de cette notification. Après établissement d'un procès-verbal le 11 avril 2016, constatant que la remise en état des lieux n'avait pas été faite et qu'un nouveau bâtiment était en cours de construction sur la parcelle, le préfet de la Martinique a saisi le 18 avril 2016 le tribunal administratif de la Martinique d'une demande tendant à la liquidation de l'astreinte prononcée par le jugement du 12 octobre 2012. Par un jugement du 16 mai 2017, ce tribunal a liquidé l'astreinte pour la période du 26 mars 2013, soit à l'expiration d'un délai de deux mois à compter du dépôt de la requête d'appel à défaut de preuve de la notification du jugement du 12 octobre 2012, au 16 mai 2017 inclus, en modulant son taux à 20 euros par jour. Il a ainsi condamné M. D... à verser la somme de 30 240 euros à l'Etat. M. D... fait appel de ce jugement.

2. Aux termes de l'article L. 911-7 du code de justice administrative, " En cas d'inexécution totale ou partielle ou d'exécution tardive, la juridiction procède à la liquidation de l'astreinte qu'elle avait prononcée. Sauf s'il est établi que l'inexécution de la décision provient d'un cas fortuit ou de force majeure, la juridiction ne peut modifier le taux de l'astreinte définitive lors de sa liquidation. Elle peut modérer ou supprimer l'astreinte provisoire, même en cas d'inexécution constatée ".

3. M. D..., qui ne conteste pas le point de départ de l'astreinte, fixé au 26 mars 2013, soutient qu'il n'y avait pas lieu de procéder à une liquidation provisoire, dès lors que le jugement du 12 octobre 2012 a été exécuté en novembre 2013, par la démolition des constructions visées par ce jugement et le procès-verbal d'infraction initial, et la remise en état de la parcelle V 984. Il fait également valoir qu'il a édifié de nouvelles constructions sur cette parcelle en vertu d'un permis de construire accordé par le maire de la commune du Robert le 6 décembre 2013, assorti d'une demande de cession du terrain déposée auprès de l'Agence des cinquante pas géométriques de la Martinique, et qu'une éventuelle infraction constitutive d'une contravention de grande voirie résultant de ces constructions soulève ainsi un litige distinct.

4. Il ressort des pièces du dossier que le maire de la commune du Robert a attesté le 26 juillet 2017 que M. D... a procédé à la démolition de deux constructions sur la parcelle V 984, avant de procéder à de nouvelles constructions en vertu d'un permis de construire qui lui a été accordé le 6 décembre 2013. Le requérant produit également une facture d'une société du 27 novembre 2013 mentionnant le démontage de deux abris, la démolition d'un chemin de béton et d'une clôture, le démontage de sanitaires, l'enlèvement de tuyauteries et l'évacuation de déchets, travaux confirmés par trois attestations établies par des voisins le 25 juillet 2017. Toutefois, si les travaux de démolition de deux abris, qui figurent sur des photographies produites par le requérant montrant l'état du site en 2012, peuvent être regardés comme établis, il ressort des photographies jointes au procès-verbal de constat du 11 avril 2016 établi par un technicien supérieur principal et dont la régularité n'est pas contestée, qu'une construction présente sur le terrain appartenant au domaine public maritime, correspondant à la bâtisse en bois sur dallage en béton armé avec couverture en tôle d'une surface d'environ 40 m² mentionnée dans le jugement du 12 octobre 2012, n'avait alors pas été démolie. M. D... n'apporte aucun élément justifiant de la démolition de cette construction au 16 mai 2017, l'auteur du procès-verbal du 11 avril 2016 ayant au demeurant précisé que cette construction est celle qui était en litige dans l'affaire ayant donné lieu à condamnation pour contravention de grande voirie par le jugement du 12 octobre 2012. A cet égard, dès lors que les mentions du procès-verbal font foi jusqu'à preuve contraire, M. D... n'est pas fondé à soutenir que ce procès-verbal ne constituerait pas un élément de preuve suffisant de l'inexécution durable du jugement du 12 octobre 2012. Dans ces conditions, le requérant n'établit pas, ainsi qu'il l'allègue, avoir remis les lieux en état, comme le lui imposait ce jugement, à un quelconque moment entre le 26 mars 2013 et 16 mai 2017.

5. Par ailleurs, dès lors que M. D... ne justifie pas avoir remis en état la parcelle qu'il occupe en procédant à la démolition des constructions conformément au jugement du 12 octobre 2012, il ne peut en tout état de cause utilement se prévaloir de la réalisation de constructions distinctes sur cette parcelle conformément à un permis de construire définitif qui lui a été accordé le 6 décembre 2013, circonstance qui ne fait pas obstacle à la liquidation de l'astreinte en l'absence d'exécution du jugement précité. Il ne peut pas plus utilement se prévaloir d'une demande de cession de la parcelle V 984, dès lors que la cession n'a jamais été effective.

6. Enfin, M. D... soutient que le préfet de la Martinique n'a pas agi pendant plus de quatre ans entre le jugement du 12 octobre 2012 et sa demande de liquidation d'astreinte du 18 avril 2016. Toutefois, les premiers juges ont correctement pris en compte cette situation, en modulant le taux de l'astreinte à 20 euros par jour.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Martinique l'a condamné à verser la somme de 30 240 euros à l'Etat, au titre de la liquidation provisoire de l'astreinte prononcée par le jugement du 12 octobre 2012 pour la période du 26 mars 2013 au 16 mai 2017 inclus. Sa requête doit dès lors être rejetée, y compris ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, l'Etat n'étant pas la partie perdante dans la présente instance.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D... et au ministre de la transition écologique et solidaire.

Copie en sera adressée au préfet de la Martinique et au ministère public près la Cour de discipline budgétaire et financière, en application de l'article R. 921-7 du code de justice administrative.

Délibéré après l'audience du 12 septembre 2019, à laquelle siégeaient :

- Mme E..., présidente de chambre,

- M. Diémert, président assesseur,

- M. F..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 3 octobre 2019.

Le rapporteur,

F. F...La présidente,

S. E...Le greffier,

M. B...La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et solidaire en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 17PA22853


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 17PA22853
Date de la décision : 03/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux répressif

Analyses

54-06-07-01-04 Procédure. Jugements. Exécution des jugements. Astreinte. Liquidation de l'astreinte.


Composition du Tribunal
Président : Mme PELLISSIER
Rapporteur ?: M. Fabien PLATILLERO
Rapporteur public ?: Mme GUILLOTEAU
Avocat(s) : BOISSY AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 15/10/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2019-10-03;17pa22853 ?
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