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04/07/2019 | FRANCE | N°17PA21544

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 04 juillet 2019, 17PA21544


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société en nom collectif (SNC) Cininvest Sud a demandé au tribunal administratif de la Réunion d'annuler l'arrêté du 5 septembre 2014 par lequel le maire de la commune de Saint-Pierre a refusé de lui délivrer un permis de construire, ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux.

Par un jugement n° 1500097 du 16 février 2017, le tribunal administratif de la Réunion a rejeté sa demande.

Procédure devant la juridiction d'appel :

Par une ordonnance du 1er mars 2

019 prise sur le fondement de l'article R. 351-8 du code de justice administrative, le préside...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société en nom collectif (SNC) Cininvest Sud a demandé au tribunal administratif de la Réunion d'annuler l'arrêté du 5 septembre 2014 par lequel le maire de la commune de Saint-Pierre a refusé de lui délivrer un permis de construire, ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux.

Par un jugement n° 1500097 du 16 février 2017, le tribunal administratif de la Réunion a rejeté sa demande.

Procédure devant la juridiction d'appel :

Par une ordonnance du 1er mars 2019 prise sur le fondement de l'article R. 351-8 du code de justice administrative, le président de la section du contentieux du Conseil d'État a attribué à la Cour administrative d'appel de Paris le jugement du dossier d'appel enregistré à la Cour administrative d'appel de Bordeaux.

Par une requête et des mémoires complémentaires enregistrés les 17 mai 2017, 19 juillet 2017, 10 juillet 2018, 10 août 2018 et 16 octobre 2018, la SNC Cininvest Sud, représentée par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1500097 du 16 février 2017 du tribunal administratif de la Réunion ;

2°) d'annuler l'arrêté du 5 septembre 2014 par lequel le maire de la commune de Saint-Pierre a refusé de lui délivrer un permis de construire ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Pierre une somme de 5 000 euros à lui verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- s'agissant d'une décision de refus, elle n'a pas à notifier sa requête dans les conditions prévues par l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ;

- elle justifiait d'un intérêt pour agir à l'encontre de la décision de refus la concernant, sans qu'y fasse obstacle l'annulation rétroactive de l'autorisation d'exploitation commerciale ;

- dès lors qu'elle avait attesté avoir qualité pour déposer la demande de permis de construire dans les conditions prévues par l'article R. 431-5 du code de l'urbanisme, il appartenait au maire de le lui délivrer, et non de prendre parti sur son droit de propriété, question qui n'était pas définitivement tranchée par le juge judiciaire ; elle reste seul propriétaire de cette parcelle ;

- le refus de permis de construire est entaché d'un détournement de pouvoir, le maire cherchant par tous moyens à faire obstacle à son projet.

Par mémoires en défense enregistrés les 18 juillet 2017, 11 juillet 2018 et 14 septembre 2018, la commune de Saint-Pierre, représentée par Me Fau, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la SNC Cininvest Sud à lui verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient, dans le dernier état de ses conclusions, que :

- la demande de première instance était irrecevable pour défaut d'intérêt pour agir, dès lors que le Conseil d'Etat a annulé le 26 janvier 2015, antérieurement à l'introduction de cette requête, l'autorisation d'exploitation cinématographique dont disposait la requérante, si bien qu'aucun permis de construire ne peut être délivré ;

- les moyens soulevés par la SNC Cininvest Sud ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Legeai,

- les conclusions de M. Cheylan, rapporteur public,

- les observations de Me Evano, avocate de la société Cininvest Sud, et de Me Fau, avocat de la commune de Saint-Pierre.

Considérant ce qui suit :

1. Le 8 août 2013, la SNC Cininvest Sud a déposé une demande de permis de construire un complexe cinématographique de 5 588 mètres carrés de surface de plancher, sur un terrain d'une surface de 12 450 m² cadastré DI 305 à Saint-Pierre (Réunion), jouxtant la zone d'aménagement concerté de Canabady. Par un arrêté du 5 septembre 2014, le maire de Saint-Pierre a rejeté cette demande au motif que la pétitionnaire n'avait pas qualité pour la présenter, un jugement du tribunal de grande instance de Saint-Pierre du 29 mars 2013, assorti de l'exécution provisoire, ayant déclaré la société Sobeca seule propriétaire de la parcelle et celle-ci ayant informé la commune de Saint-Pierre qu'elle s'opposait expressément à la délivrance du permis demandé par la SNC Cininvest Sud. Par un courrier reçu le 20 octobre 2014 et resté sans réponse, la SNC Cininvest Sud a demandé au maire de Saint-Pierre de retirer l'arrêté du 5 septembre 2014. La SNC Cininvest Sud fait appel du jugement du 16 février 2017 par lequel le tribunal administratif de la Réunion a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 5 septembre 2014 et du rejet de son recours gracieux.

2. En premier lieu, l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme dispose : " Les demandes de permis de construire (...) sont adressées par pli recommandé avec demande d'avis de réception ou déposées à la mairie de la commune dans laquelle les travaux sont envisagés : / a) Soit par le ou les propriétaires du ou des terrains, leur mandataire ou par une ou plusieurs personnes attestant être autorisées par eux à exécuter les travaux (...) ". En vertu du dernier alinéa de l'article R. 431-5 du même code, la demande de permis de construire comporte " l'attestation du ou des demandeurs qu'ils remplissent les conditions définies à l'article R. 423-1 pour déposer une demande de permis ".

3. Il résulte de ces dispositions que les demandes de permis de construire doivent seulement comporter l'attestation du pétitionnaire qu'il remplit les conditions définies à l'article R. 423-1 cité ci-dessus. Les autorisations d'utilisation du sol, qui ont pour seul objet de s'assurer de la conformité des travaux qu'elles autorisent avec la législation et la réglementation d'urbanisme, étant accordées sous réserve du droit des tiers, il n'appartient pas en principe à l'autorité compétente de vérifier, dans le cadre de l'instruction d'une demande de permis, la validité de l'attestation établie par le demandeur. Toutefois, lorsque l'autorité saisie d'une telle demande de permis de construire vient à disposer au moment où elle statue, sans avoir à procéder à une mesure d'instruction lui permettant de les recueillir, d'informations de nature à établir son caractère frauduleux ou faisant apparaître, sans que cela puisse donner lieu à une contestation sérieuse, que le pétitionnaire ne dispose, contrairement à ce qu'implique l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme, d'aucun droit à la déposer, il lui revient de refuser la demande de permis pour ce motif. Il en est notamment ainsi lorsque l'autorité saisie de la demande de permis de construire est informée de ce que le juge judiciaire a remis en cause le droit de propriété sur le fondement duquel le pétitionnaire avait présenté sa demande.

4. Il ressort des pièces du dossier que la SNC Cinivest Sud a attesté, à l'appui de sa demande de permis de construire déposée le 8 août 2013, qu'elle avait qualité pour la déposer. Toutefois, par un courrier reçu le 26 août 2013, la société Sobeca a fait connaitre à la commune de Saint-Pierre qu'elle était devenue propriétaire de la parcelle DI 305 en exécution d'un jugement du tribunal de grande instance de Saint-Pierre du 29 mars 2013, assorti de l'exécution provisoire, qui prononçait la vente forcée de la parcelle DI 305 à son profit, faute pour l'ancien propriétaire, la société Foncière 2001, d'avoir régularisé la vente par acte authentique dans le mois de la signification du jugement, survenue le 8 juillet 2013. Par un courrier du 30 janvier 2014 faisant état du courrier de la société Sobeca du 22 août 2013 et d'un second courrier de celle-ci reçu le 20 janvier 2014, s'opposant à la délivrance d'un permis de construire à la société requérante, le service instructeur, qui a joint une copie du jugement du tribunal de grande instance de Saint-Pierre, a demandé à la SNC Cininvest Sud de justifier de sa qualité à déposer un permis de construire concernant la parcelle DI 305 au regard des dispositions de l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme. Par une lettre du 17 février 2014, reçue le 20 février 2014, la SNC Cininvest Sud a produit une attestation notariale d'achat de la parcelle à la Sarl Foncière 2001 par acte authentique du 10 novembre 2011, tout en contestant l'opposabilité du jugement rendu par le tribunal de grande instance de Saint-Pierre au motif notamment qu'il était frappé d'appel. Or, le 17 janvier 2014, le jugement du tribunal de grande instance du 29 mars 2013 a été publié au registre de la publicité foncière, ce qui vaut titre de propriété pour la société Sobeca aux termes de ce même jugement. Dans ces conditions, le maire de Saint-Pierre, qui n'a pas outrepassé ses pouvoirs ni procédé à une mesure d'instruction irrégulière, a pu légalement estimer que la société Sobeca devait être regardée, à la date à laquelle il statuait, comme le propriétaire de la parcelle DI 305, et qu'ainsi la SNC Cininvest Sud ne justifiait pas, sans qu'il y ait sur ce point de contestation sérieuse alors même que la commune avait contesté la vente forcée à la société Sobeca en se prévalant de son propre droit de préemption, d'une qualité l'autorisant à déposer la demande de permis de construire au regard des dispositions de l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme. Si la société Cininvest soutient qu'elle occupe toujours la parcelle et paie la taxe foncière alors que la société Sobeca est dissoute depuis le 24 janvier 2016, ces circonstances postérieures à l'arrêté de refus de permis de construire contesté sont sans influence sur sa légalité.

5. En second lieu, la SNC Cininvest Sud soutient que le refus de permis de construire en litige est entaché d'un détournement de pouvoir dès lors qu'il participe d'une volonté du maire de Saint-Pierre de faire échec par tous moyens à son projet au bénéfice du projet concurrent porté par une autre société. Toutefois, eu égard au motif légal qui la fonde, la décision litigieuse de refus ne peut être regardée comme ayant été prise dans un but étranger à l'intérêt général. Par suite, le moyen tiré du détournement de pouvoir doit être écarté.

6. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir soulevée par la commune de Saint-Pierre, que la SNC Cininvest Sud n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement attaqué. Sa requête d'appel doit être rejetée en toutes ses conclusions, y compris celles tendant à la condamnation de la commune, qui n'est pas partie perdante, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Dans les circonstances de l'espèce il y a lieu de mettre à la charge de la SNC Cininvest Sud une somme de 1 500 euros à verser à la commune de Saint-Pierre sur le fondement des mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SNC Cininvest Sud est rejetée.

Article 2 : Une somme de 1 500 euros est mise à la charge de la SNC Cininvest Sud à verser à la commune de Saint-Pierre sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société en nom collectif (SNC) Cininvest Sud et à la commune de Saint-Pierre.

Délibéré après l'audience du 20 juin 2019, à laquelle siégeaient :

- Mme Pellissier, présidente de chambre,

- M. Legeai, premier conseiller.

- M. Platillero, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 4 juillet 2019.

Le rapporteur,

A. LEGEAI La présidente,

S. PELLISSIER Le greffier,

M.A...

La République mande et ordonne au préfet de la Réunion en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent jugement.

5

N° 17PA21544


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 17PA21544
Date de la décision : 04/07/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

15-08 Communautés européennes et Union européenne. Litiges relatifs au versement d`aides de l'Union européenne.


Composition du Tribunal
Président : Mme PELLISSIER
Rapporteur ?: M. Alain LEGEAI
Rapporteur public ?: M. CHEYLAN
Avocat(s) : FAU

Origine de la décision
Date de l'import : 16/07/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2019-07-04;17pa21544 ?
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