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26/06/2019 | FRANCE | N°18PA03807

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 26 juin 2019, 18PA03807


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... D...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 1er août 2018 par lequel le préfet de police a décidé de le transférer aux autorités italiennes au motif qu'elles sont responsables de l'examen de sa demande d'asile.

Par un jugement n° 1814261 du 18 octobre 2018, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

I - Par une requête n° 18PA03807, et un mémoire complémentaire, enregistrés les

6 décembre 2018 e

t 17 mai 2019, M. D...représenté par MeA..., demande à la Cour :

1°) de l'admettre au bénéfice de l'aid...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... D...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 1er août 2018 par lequel le préfet de police a décidé de le transférer aux autorités italiennes au motif qu'elles sont responsables de l'examen de sa demande d'asile.

Par un jugement n° 1814261 du 18 octobre 2018, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

I - Par une requête n° 18PA03807, et un mémoire complémentaire, enregistrés les

6 décembre 2018 et 17 mai 2019, M. D...représenté par MeA..., demande à la Cour :

1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire ;

2°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Paris du 18 octobre 2018 rejetant sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 1er août 2018 portant transfert aux autorités italiennes au motif qu'elles sont responsables de l'examen de sa demande d'asile ;

3°) d'annuler cet arrêté ;

4°) mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- sa requête n'est pas tardive ;

- le jugement est irrégulier pour ne pas avoir statué sur sa requête dans le délai de quinze jours prescrit par l'article L. 742-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le jugement est irrégulier dès lors que l'affaire était mentionnée dans l'application Sagace " en cours de délibéré ", plusieurs jours après sa date de lecture ;

- le jugement est irrégulier car il n'a pas été signé par le président de la formation de jugement et le greffier en méconnaissance de l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;

- le jugement n'est pas suffisamment motivé dans sa réponse aux moyens tirés de la violation des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'arrêté attaqué a été pris par une autorité incompétente ;

- il a été pris sans qu'il ait bénéficié d'un entretien individuel et confidentiel mené par une personne dument habilitée ;

- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation à raison de la défaillance systémique de l'Italie dans le traitement des demandes d'asile ;

- il méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales à raison des risques encourus en cas de retour en Côte d'Ivoire ;

- il méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant compte tenu de l'intégration et de la scolarisation de son enfant ;

- il méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales compte tenu de son intégration et de sa vie familiale en France.

Par un mémoire en défense, enregistré le 2 avril 2019, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

II - Par une requête n° 19PA01136, enregistrée le 25 mars 2019, M.D..., représenté par MeA..., demande à la Cour :

1°) d'ordonner le sursis à exécution du jugement du Tribunal administratif de Paris n° 1814261 du 18 octobre 2018 ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris du 6 février 2019.

Par un mémoire en défense, enregistré le 2 avril 2019, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Les parties ont été informées le 9 avril 2019, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la Cour était susceptible de relever d'office le moyen d'ordre public tiré de l'irrecevabilité du moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué a été pris sans que le requérant ait bénéficié d'un entretien individuel et confidentiel mené par une personne dument habilitée, dès lors que ce moyen est nouveau en appel et relève d'une cause juridique distincte de celle invoquée en première instance.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Hamon,

- et les observations de MeA... pour M.D....

Considérant ce qui suit :

1. M.D..., ressortissant ivoirien, est entré irrégulièrement sur le territoire français selon ses déclarations. Le préfet de police ayant, à la suite du dépôt de sa demande d'asile formulée le 30 avril 2018, consulté le fichier " Eurodac " et estimé que l'Italie était compétente pour l'instruire, a, par un arrêté du 1er août 2018, ordonner son transfert aux autorités italiennes. M. D... relève appel du jugement du 18 octobre 2018 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. L'appel et la demande de sursis à exécution présentés par M. D...étant formés contre un même jugement, présentant à juger des mêmes questions et ayant fait l'objet d'une instruction commune, il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur l'aide juridictionnelle :

3. M. D...ayant été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 6 février 2019, il n'y a pas lieu de statuer sur ses conclusions tendant à l'octroi de l'aide juridictionnelle à titre provisoire, qui ont perdu leur objet.

Sur la régularité du jugement attaqué :

4. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier d'appel et de première instance que le dispositif du jugement attaqué a été communiqué sur place aux parties le 18 octobre 2018 à l'issue de l'audience, ainsi que le prévoit l'article R. 776-27 du code de justice administrative. Dans ces conditions, quelles que soient les mentions portées dans l'application " Sagace " sur l'état de l'affaire, le jugement doit être regardé comme ayant été régulièrement notifié. M. D...n'est dès lors pas fondé à soutenir que le jugement attaqué serait entaché d'une irrégularité à raison des mentions portées dans cette application informatique.

5. En deuxième lieu, la circonstance qu'il ait été statué sur la requête de M. D...plus de quinze jours après son enregistrement, en méconnaissance de l'article L. 742-4 du code de justice administrative, est par elle-même sans incidence sur la régularité du jugement attaqué.

6. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier de première instance que la minute du jugement attaqué comporte, conformément aux dispositions de l'article R. 741-1 du code de justice administrative, les signatures du magistrat désigné et du greffier de l'audience. Par suite, le moyen tiré de ce que le jugement méconnaîtrait ces dispositions doit être écarté comme manquant en fait.

7. En quatrième lieu, les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à l'ensemble des arguments soulevés, ont suffisamment motivé leur réponse aux moyens invoqués par M. D....

Sur la légalité de l'arrêté attaqué :

8. En premier lieu, M. D...n'a soulevé dans sa requête de première instance que des moyens relatifs à la légalité interne de la décision attaquée. Par suite, le moyen de légalité externe, tiré de l'irrégularité de la procédure d'entretien, soulevé par M. D...pour la première fois en appel, qui relève d'une cause juridique distincte, est de ce fait irrecevable.

9. En deuxième lieu, par un arrêté n° 201800107 du 9 février 2018, régulièrement publié au bulletin municipal officiel de la ville de Paris du 20 février 2018, le préfet de police a donné à

Mme B...E..., attachée d'administration de l'Etat, délégation à effet de signer, notamment, les décisions relatives à la police des étrangers. Par suite, M. D...n'est pas fondé à soutenir que la décision attaquée a été signée par une autorité incompétente.

10. En troisième lieu, en se bornant à invoquer les conditions d'accueil défaillantes et dissuasives des demandeurs d'asile en Italie, M. D...n'établit nullement qu'il serait exposé à un risque sérieux de ne pas être traité par les autorités italiennes dans des conditions conformes à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile et qu'il serait personnellement exposé à des risques sérieux de dénuement matériel extrême constituant des traitements inhumains ou dégradants en Italie, alors que ce pays est un Etat membre de l'Union européenne, partie tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complétée par le protocole de New-York, qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Dès lors, l'intéressé n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté attaqué serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation du fait des défaillances du système de traitement des demandes d'asile en Italie.

11. En quatrième lieu, le transfert de M. D...vers l'Italie n'impliquant pas, en lui-même, un risque de refoulement vers la Côte d'Ivoire, le moyen tiré de ce que la décision attaquée exposerait sa fille mineure à un risque de traitement inhumains ou dégradants contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentale dans ce pays est inopérant.

12. En cinquième lieu, il ressort des pièces du dossier qu'à la date de la décision attaquée M.D..., son épouse et leur fille n'étaient présents sur le territoire français que depuis quelque mois, la scolarisation de l'enfant étant postérieure à la date de cette décision Dans ces conditions, en l'absence de tout autre élément, l'arrêté attaqué ne peut être regardé comme ayant porté une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale garanti par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, la décision n'a pas non plus porté atteinte à l'intérêt supérieur de son enfant en méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.

13. Il résulte de tout ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

Sur la demande de sursis à exécution :

14. Le présent arrêt statuant sur la demande d'annulation du jugement n° 1814261/8 du Tribunal administratif de Paris, les conclusions de la requête n° 19PA01136 tendant au sursis à exécution de ce jugement sont devenues sans objet.

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la demande d'admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle présentée par M.D....

Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 19PA01136 à fin de sursis à exécution du jugement attaqué par M.D....

Article 3 : La requête n° 18PA03807 de M. D... est rejetée.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 4 juin 2019, à laquelle siégeaient :

- M. Even, président de chambre,

- Mme Hamon, président assesseur,

- Mme d'Argenlieu, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 26 juin 2019.

Le rapporteur,

P. HAMONLe président,

B. EVENLe greffier,

S. GASPAR

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

Nos 18PA03807...


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 18PA03807
Date de la décision : 26/06/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

095-02-03


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: Mme Perrine HAMON
Rapporteur public ?: Mme ORIOL
Avocat(s) : DAVID

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2019-06-26;18pa03807 ?
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