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26/06/2019 | FRANCE | N°18PA02528

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 26 juin 2019, 18PA02528


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Recifilms a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge de la cotisation de retenue à la source qui lui a été assignée au titre de l'exercice clos le 30 juin 2013 et d'ordonner le versement des intérêts moratoires prévus à l'article L. 208 du livre des procédures fiscales.

Par un jugement n°1615570/1-3 du 6 juin 2018, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et deux mémoires enregistr

s les 25 juillet, 28 septembre et

13 novembre 2018, la société Recifilms, représentée par Me B.....

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Recifilms a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge de la cotisation de retenue à la source qui lui a été assignée au titre de l'exercice clos le 30 juin 2013 et d'ordonner le versement des intérêts moratoires prévus à l'article L. 208 du livre des procédures fiscales.

Par un jugement n°1615570/1-3 du 6 juin 2018, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et deux mémoires enregistrés les 25 juillet, 28 septembre et

13 novembre 2018, la société Recifilms, représentée par Me B...A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Paris du 6 juin 2018 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions litigieuses ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement n'a pas respecté le principe du contradictoire ;

- la preuve que la société Radioaktive Film Limited était bien résidente fiscale à Chypre a été apportée ;

- la preuve de la qualité de mandataire transparent de la société Crown Resource Trading est apportée.

Par un mémoire en défense enregistré le 19 octobre 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les moyens soulevés par la société Recifilms ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 14 novembre 2018, la clôture d'instruction a été fixée au

5 décembre 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention du 18 décembre 1981 conclue entre la France et la République de Chypre en vue d'éliminer les doubles impositions ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Magnard,

- les conclusions de M. Cheylan, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., représentant la société Récifilms.

Considérant ce qui suit :

1. La société Recifilms, qui exerce une activité de production de films pour le cinéma, a fait l'objet, en 2015, d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration lui a assigné une cotisation de retenue à la source, en application de l'article 182 B du code général des impôts, à raison d'une somme de 102 000 euros versée au cours de l'exercice clos le

30 juin 2013. Elle relève appel du jugement du 6 juin 2018 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge de cette imposition.

Sur la régularité du jugement :

2. Lorsqu'il est saisi, postérieurement à la clôture de l'instruction et au prononcé des conclusions du rapporteur public, d'une note en délibéré émanant de l'une des parties à l'instance, il appartient dans tous les cas au juge administratif d'en prendre connaissance avant la séance au cours de laquelle sera rendue la décision, ainsi, au demeurant, que de la viser sans l'analyser. S'il a toujours la faculté, dans l'intérêt d'une bonne justice, d'en tenir compte, après l'avoir visée et, cette fois, analysée, il n'est tenu de le faire à peine d'irrégularité de sa décision que si cette note contient l'exposé soit d'une circonstance de fait dont la partie qui l'invoque n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction et que le juge ne pourrait ignorer sans fonder sa décision sur des faits matériellement inexacts, soit d'une circonstance de droit nouvelle ou que le juge devrait relever d'office. Dans tous les cas où il est amené à tenir compte de cette note en délibéré, il doit rouvrir l'instruction et soumettre au débat contradictoire les éléments contenus dans la note en délibéré.

3. La société Recifilms fait grief au jugement attaqué de n'avoir pas tenu compte de la note en délibéré par laquelle son représentant a présenté des observations et produit des pièces à l'issue de l'audience du 23 mai 2018. Cette note en délibéré ne fait apparaître aucune circonstance de fait dont l'intéressée n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction ni aucune circonstance de droit nouvelle ou que le juge devrait relever d'office. Dès lors, c'est à bon droit, et sans méconnaitre le principe du contradictoire, que le tribunal administratif a visé sans l'analyser la note susmentionnée.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

4. Aux termes de l'article 182 B du code général des impôts : " I. Donnent lieu à l'application d'une retenue à la source lorsqu'ils sont payés par un débiteur qui exerce une activité en France à des personnes ou des sociétés, relevant de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt sur les sociétés, qui n'ont pas dans ce pays d'installation professionnelle permanente : / a. Les sommes versées en rémunération d'une activité déployée en France dans l'exercice de l'une des professions mentionnées à l'article 92 ; / b. Les produits définis à l'article 92 et perçus par les inventeurs ou au titre de droits d'auteur, ceux perçus par les obtenteurs de nouvelles variétés végétales au sens des articles L. 623-1 à L. 623-35 du code de la propriété intellectuelle ainsi que tous produits tirés de la propriété industrielle ou commerciale et de droits assimilés ;/ c. Les sommes payées en rémunération des prestations de toute nature fournies ou utilisées en France (...) ".

5. Il est constant que la société Recifilms, qui exerce en France une activité de production de films, a versé la somme de 102 000 euros en rémunération de services de tournage d'un film rendus à Moscou entre le 5 et le 9 septembre 2012. Cette somme a été payée par virement bancaire le 19 septembre 2012 sur un compte bancaire ouvert au nom de la société Crown Resource Trading. Il est constant que cette société n'a pas d'installation professionnelle permanente en France. Si la société Recifilms soutient que la société Crown Resource Trading n'a pas elle-même réalisé ces prestations de services mais a uniquement été chargée de l'encaissement de cette somme au nom et pour le compte de la société Radioaktive Film Limited, il est non moins constant que cette dernière société n'a pas non plus d'installation professionnelle permanente en France. La somme versée en rémunération des prestations précédemment mentionnées est dès lors passible de la retenue à la source prévue à l'article 182 B du code général des impôts.

6. La société Recifilms soutient que le bénéficiaire effectif de la somme de

102 000 euros est la société Radioaktive Film Limited enregistrée à Chypre, et se prévaut de l'article 7 de la convention du 18 décembre 1981 conclue entre la France et la République de Chypre en vue d'éliminer les doubles impositions qui stipule : " 1. Les bénéfices d'une entreprise d'un Etat ne sont imposables que dans cet Etat (...) ". Le ministre ne conteste plus devant la Cour que la société Radioaktive Film Limited est une entreprise établie à Chypre au sens des stipulations précitées. Il fait toutefois valoir que la somme en cause n'a pas été versée à la société Radioaktive Film Limited mais à la société Crown Resource Trading et que la requérante n'établit pas le rôle de simple mandataire transparent de la société Crown Resource Trading. La société Recifilms produit un avenant du 15 août 2012 à un contrat qu'elle a signé avec la société Radioaktive Film Limited, par laquelle cette dernière mandate la société Crown Resource Trading pour percevoir les rémunérations qui lui sont dues, deux factures des 15 et

16 septembre 2012 qui ont été présentées lors des opérations de contrôle et une attestation de la société Radioaktive Film Limited du 12 avril 2017 certifiant que la somme lui a été effectivement reversée. Ces pièces, au demeurant en langue étrangère, ne permettent pas d'établir que les sommes versées à la société Crown Resource Trading ont effectivement bénéficié à la société Radioaktive Film Limited, l'avenant du 15 août 2012, étant, en l'absence d'enregistrement, dépourvu de date certaine, les factures des 15 et 16 septembre 2012 ne permettant pas de déterminer, en raison de leurs mentions incohérentes, si la société Crown Resource Trading agit pour le compte d'une société ukrainienne ou pour le compte d'une société chypriote et l'attestation du 12 avril 2017, d'ailleurs établie par une société qui se définit comme ayant son siège social en Ukraine, n'étant pas étayée des documents bancaires permettant d'en attester la sincérité. Il ne résulte en conséquence pas de l'instruction que les sommes versées par la société Recifilms ne puissent, comme elle le soutient, être taxées en France en application des stipulations précitées.

7. Il résulte de tout ce qui précède que la société Recifilms n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de la somme que la requérante demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société Recifilms est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Recifilms et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera adressée au chef des services fiscaux chargé de la direction de contrôle fiscal d'Ile-de-France.

Délibéré après l'audience du 12 juin 2019, à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- Mme Appèche, président assesseur,

- M. Magnard, premier conseiller.

Lu en audience publique le 26 juin 2019.

Le rapporteur,

F. MAGNARDLe président,

I. BROTONS

Le greffier,

P. LIMMOIS

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 18PA02528


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 18PA02528
Date de la décision : 26/06/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: M. Franck MAGNARD
Rapporteur public ?: M. CHEYLAN
Avocat(s) : HPML AVOCATS ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2019-06-26;18pa02528 ?
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