Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B...a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 4 septembre 2017 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, en fixant son pays de destination.
Par un jugement n° 1707542 du 29 novembre 2018, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 3 janvier 2019 et des nouvelles pièces enregistrées les 22 avril et 27 mai 2019, M. B..., représenté par Me Azincourt, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 29 novembre 2018 du Tribunal administratif de Melun ;
2°) d'annuler l'arrêté du 4 septembre 2017 du préfet du Val-de-Marne ;
3°) d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de procéder au réexamen de sa situation administrative et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à compter d'un délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
Sur la décision portant refus de titre de séjour :
- la décision en litige méconnaît les dispositions de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 313-11, 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- cette décision est entachée d'illégalité par voie d'exception d'illégalité de la décision de refus d'admission au séjour ;
- la décision en litige méconnaît les dispositions de l'article L. 511-4, 1° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
Sur la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :
- la décision en litige méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
La requête a été communiquée au préfet du Val-de-Marne qui n'a pas présenté de mémoire en défense.
M. B... a produit de nouvelles pièces enregistrées le 4 juin 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié,
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Julliard,
- et les conclusions de Me Azincourt, avocat de M. B....
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant tunisien né le 2 mai 1999, est entré en France le 27 mars 2013 à l'âge de quatorze ans selon ses déclarations sans être muni de visa. Par un arrêté du 4 septembre 2017 le préfet du Val-de-Marne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné. M. B... relève appel du jugement du 29 novembre 2018 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
Sur la décision portant refus de titre de séjour :
2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; ".
3. M. B... soutient que le préfet du Val-de-Marne a entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle, sa décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour mention " vie privée et familiale " sur le fondement des dispositions précités. Il ressort en effet des pièces du dossier que M. B... est entré en France en mars 2013, à l'âge de quatorze ans, où il a été scolarisé dès l'année suivante, et qu'il y a été accueilli par son oncle et sa tante qui se sont vus conférer l'autorité parentale par jugement du 23 mars 2017 du Tribunal de grande instance de Créteil. Il ressort également des pièces du dossier qu'il a obtenu un diplôme de CAP agricole " jardinier paysagiste " en juin 2017, qu'il est actuellement en deuxième année d'un baccalauréat professionnel " aménagement paysagers " et envisage la préparation d'un BTS, qu'il justifie d'une promesse d'embauche en contrat de professionnalisation qui n'a pu aboutir du fait de l'absence d'un titre de séjour lui permettant de travailler, qu'il est hébergé depuis son arrivée en France chez son oncle et sa tante qui prennent en charge ses frais de scolarité et qu'il déclare ne pas être en mesure de poursuivre ses études en cas de retour dans son village d'origine. Ainsi, dans les circonstances particulières de l'espèce, eu égard à la durée et aux conditions de séjour en France de M. B... ainsi qu'aux conséquences sur sa situation personnelle d'une interruption de son parcours scolaire, ce dernier est fondé à soutenir que le refus d'autoriser son séjour porte à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et à en demander, pour ce motif, l'annulation.
4. Il résulte de ce qui précède, que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 4 septembre 2017 par lequel le préfet du Val-de-Marne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de destination :
5. Il résulte de ce qui précède que M. B... est fondé à demander, par voie de conséquence de l'annulation de la décision lui refusant un titre de séjour, l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
6. Eu égard au motif d'annulation ci-dessus retenu, il y a lieu d'enjoindre au préfet de police de procéder au réexamen de la situation de l'intéressée dans le délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui accorder dans cette attente une autorisation provisoire de séjour.
Sur les frais liés au litige :
7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à M. B...au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du 29 novembre 2018 du Tribunal administratif de Melun est annulé.
Article 2 : L'arrêté du 4 septembre 2017 du préfet du Val-de-Marne est annulé.
Article 3 : Il est enjoint au préfet du Val-de-Marne de procéder au réexamen de la situation de M. A... B...dans le délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui accorder, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour.
Article 4 : L'Etat versera la somme de 1 500 euros à M. A... B...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Val-de-Marne.
Délibéré après l'audience du 7 juin 2019, à laquelle siégeaient :
- Mme Heers, président de chambre,
- Mme Julliard, présidente-assesseure,
- M. Mantz, premier conseiller.
Lu en audience publique le 24 juin 2019.
La rapporteure,
M. JULLIARD
Le président,
M. HEERS
Le greffier,
F. DUBUY
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 18PA00022 4