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20/06/2019 | FRANCE | N°18PA03971

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 20 juin 2019, 18PA03971


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...D...a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 12 mars 2018 par lequel le préfet de police lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays où elle pourrait être reconduite.

Par un jugement n° 1805855/5-3 du 6 juillet 2018, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa requête.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 18 décembre 20

18, Mme D..., représentée par Me Bello, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1805855/5-...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...D...a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 12 mars 2018 par lequel le préfet de police lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays où elle pourrait être reconduite.

Par un jugement n° 1805855/5-3 du 6 juillet 2018, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa requête.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 18 décembre 2018, Mme D..., représentée par Me Bello, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1805855/5-3 du 6 juillet 2018 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté du 12 mars 2018 du préfet de police ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de réexaminer sa demande à compter de la notification de la décision à intervenir et de lui délivrer durant ce réexamen une autorisation provisoire de séjour.

Elle soutient que :

- l'arrêté est insuffisamment motivé ;

- il méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il méconnait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

L'aide juridictionnelle totale a été accordée à Mme D...par une décision du 6 novembre 2018 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Paris.

Par un mémoire en défense enregistré le 27 mars 2019, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme D...ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Legeai,

- les observations de Me Bello, avocat de MmeD..., et de MmeD....

Considérant ce qui suit :

1. Mme A...D..., ressortissante algérienne née en septembre 1973, entrée en France en juillet 2013 selon ses déclarations, a sollicité un titre de séjour sur le fondement des stipulations du point 7 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles. Par un arrêté du 12 mars 2018, le préfet de police a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays où elle pourrait être reconduite. Mme D...fait appel du jugement du 6 juillet 2018 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration dispose : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) ". L'article L. 211-5 du même code dispose : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".

3. L'arrêté contesté vise l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, notamment son article 6 paragraphe 7 qui constituait le fondement de la demande de titre de séjour, et indique que le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé que si l'état de santé de Mme D...nécessitait une prise en charge médicale, le défaut de celle-ci ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et que l'intéressée ne remplit donc pas les conditions fixées pour obtenir un titre de séjour sur ce fondement. L'arrêté comporte ainsi les motifs de droit et de fait qui fondent la décision de refus de titre de séjour, alors qu'il ne ressort d'aucune pièce du dossier, notamment de la " fiche de salle " qu'elle a remplie en janvier 2017, que Mme D...aurait demandé son admission au séjour en France en faisant valoir son concubinage avec une compatriote, ou en invoquant des circonstances humanitaires sur le fondement de l'article L. 313-14 code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation du refus de titre de séjour doit être écarté.

4. En deuxième lieu, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Pour l'application de ces stipulations, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.

5. Mme D...soutient qu'elle réside en France depuis 2013 avec MmeC..., compatriote qui est sa compagne, et les deux enfants de celle-ci, nés en octobre 2005 en Algérie et novembre 2013 en France. Elle soutient que celle-ci a obtenu la délivrance d'un titre de séjour vie privée et familiale. Toutefois, si l'intéressée produit des courriers et fiches de liaison d'associations ou services sociaux, le plus ancien daté de décembre 2013, qui la désignent comme " l'amie " de Mme C...ou " en couple " avec celle-ci, elle n'établit pas l'intensité ni l'ancienneté de ses liens avec sa compagne alléguée, ni ne démontre que celle-ci résidait régulièrement en France à la date de l'arrêté litigieux. En outre, elle n'établit pas être dépourvue de lien familial en Algérie, pays dont elle est ressortissante et où elle a vécu au moins jusqu'à l'âge de 40 ans selon ses dires, alors qu'elle est en France sans travail ni ressources et dépend de l'assistance sociale pour se loger. Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de police aurait, en refusant de lui délivrer un titre de séjour, porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport au but poursuivi. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

6. En troisième lieu, MmeD..., qui ne démontre pas s'être prévalue de ce texte, ni même avoir invoqué des circonstances humanitaires ou des motifs exceptionnels à l'appui d'une demande d'admission exceptionnelle au séjour, ne peut utilement soutenir que le préfet de police aurait méconnu les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors, d'une part, que ces dispositions ne sont pas applicables aux ressortissants algériens dont la situation est réglée par les stipulations de l'accord franco-algérien susvisé et, d'autre part, que le préfet n'était pas tenu d'examiner d'office la demande au regard de ce texte. En outre, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision en ne régularisant pas la situation de MmeD....

7. En quatrième lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ".

8. Si Mme D...fait état de risques qu'elle encourt en cas de retour en Algérie en raison de son homosexualité, ses allégations ne sont assorties d'aucune précision ni d'aucune justification de nature à établir qu'elle se trouverait effectivement exposée à un risque réel, direct et sérieux pour sa vie ou sa liberté dans son pays d'origine. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté.

9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence sa requête d'appel ne peut qu'être rejetée en toutes ses conclusions, y compris celles à fin d'injonction.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme D...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...D...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 23 mai 2019, à laquelle siégeaient :

- Mme Pellissier, présidente de chambre,

- M. Legeai, premier conseiller,

- M. Platillero, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 20 juin 2019.

Le rapporteur,

A. LEGEAI La présidente,

S. PELLISSIER Le greffier,

M. B...La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 18PA03971


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18PA03971
Date de la décision : 20/06/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme PELLISSIER
Rapporteur ?: M. Alain LEGEAI
Rapporteur public ?: Mme DELAMARRE
Avocat(s) : BELLO

Origine de la décision
Date de l'import : 16/07/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2019-06-20;18pa03971 ?
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