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20/06/2019 | FRANCE | N°18PA02812

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 20 juin 2019, 18PA02812


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...C...a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler la décision du 24 juillet 2017 par laquelle le préfet de Seine-et-Marne a refusé de lui délivrer un visa de long séjour et un titre de séjour.

Par un jugement n° 1707437 du 19 juin 2018, le tribunal administratif de Melun a rejeté la demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 16 août 2018, M.C..., représenté par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1707437 d

u 19 juin 2018 du tribunal administratif de Melun ;

2°) d'annuler la décision du 24 juillet 2017 du pr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...C...a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler la décision du 24 juillet 2017 par laquelle le préfet de Seine-et-Marne a refusé de lui délivrer un visa de long séjour et un titre de séjour.

Par un jugement n° 1707437 du 19 juin 2018, le tribunal administratif de Melun a rejeté la demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 16 août 2018, M.C..., représenté par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1707437 du 19 juin 2018 du tribunal administratif de Melun ;

2°) d'annuler la décision du 24 juillet 2017 du préfet de Seine-et-Marne ;

3°) d'enjoindre à toute autorité administrative compétente de lui délivrer une carte de séjour " vie privée et familiale " ou un visa de long séjour sur le fondement de l'article L. 211-2-1 dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le même délai et sous la même astreinte, en lui délivrant pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. C...soutient que :

- la commission du titre de séjour devait être saisie ;

- la décision n'est pas motivée ;

- sa situation personnelle n'a pas été examinée ;

- il doit bénéficier d'un visa de long séjour et d'un titre de séjour, dès lors qu'il justifie d'une entrée régulière sur le territoire français et est le conjoint d'une ressortissante française ;

- le préfet de Seine-et-Marne a commis une erreur manifeste d'appréciation ;

- l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales a été méconnu.

La requête a été communiquée au préfet de Seine-et-Marne qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention d'application de l'accord de Schengen, signée le 19 juin 1990 ;

- le règlement (UE) 2016/399 du Parlement européen et du Conseil du 9 mars 2016 concernant un code de l'Union relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes (code frontières Schengen) ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Platillero a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M.C..., de nationalité comorienne et entré en France le 20 juillet 2013 selon ses déclarations, a sollicité la délivrance d'un visa de long séjour et d'un titre de séjour à la suite de son mariage le 9 janvier 2016 avec une Française. Par une décision du 24 juillet 2017, le préfet de Seine-et-Marne a refusé de délivrer à M. C...ce visa et, par voie de conséquence, un titre de séjour en qualité de conjoint d'un ressortissant français. M. C...fait appel du jugement du 19 juin 2018 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.

2. En premier lieu, M. C...invoque les moyens tirés du défaut de motivation de la décision attaquée et de l'absence d'examen particulier de sa situation. Toutefois, il n'apporte à l'appui de ces moyens déjà soulevés devant le tribunal administratif de Melun aucun élément nouveau susceptible de remettre en cause l'appréciation portée à juste titre par le tribunal. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par les premiers juges.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Tout étranger souhaitant entrer en France en vue d'y séjourner pour une durée supérieure à trois mois doit solliciter auprès des autorités diplomatiques et consulaires françaises un visa de long séjour (...) Lorsque la demande de visa de long séjour émane d'un étranger entré régulièrement en France, marié en France avec un ressortissant de nationalité française et que le demandeur séjourne en France depuis plus de six mois avec son conjoint, la demande de visa de long séjour est présentée à l'autorité administrative compétente pour la délivrance d'un titre de séjour ". Aux termes de l'article L. 531-2 du même code : " L'article L. 531-1 est applicable à l'étranger qui, en provenance du territoire d'un Etat partie à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990, est entré ou a séjourné sur le territoire métropolitain (...) sans souscrire, au moment de l'entrée sur ce territoire, la déclaration obligatoire prévue par l'article 22 de la même convention, alors qu'il était astreint à cette formalité (...) ". Aux termes de l'article R. 211-32 de ce code : " La déclaration obligatoire mentionnée à l'article L. 531-2 est, sous réserve des dispositions de l'article R. 212-6, souscrite à l'entrée sur le territoire métropolitain par l'étranger qui n'est pas ressortissant d'un Etat membre de la Communauté européenne et qui est en provenance directe d'un Etat partie à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990 ". Aux termes de l'article R. 211-33 de ce code : " La déclaration d'entrée sur le territoire français est souscrite auprès des services de la police nationale ou, en l'absence de tels services, des services des douanes ou des unités de la gendarmerie nationale. A cette occasion, un récépissé est remis à l'étranger. Il peut être délivré par apposition d'une mention sur le document de voyage. L'étranger assujetti à l'obligation de déclaration doit être en mesure de justifier, à toute réquisition des agents de l'autorité, qu'il a satisfait à cette obligation, par la production de ce récépissé (...) ". Aux termes de l'article 19 de la convention d'application de l'accord de Schengen, signée le 19 juin 1990 : " 1. Les étrangers titulaires d'un visa uniforme qui sont entrés régulièrement sur le territoire de l'une des Parties contractantes peuvent circuler librement sur le territoire de l'ensemble des Parties contractantes pendant la durée de validité du visa (...) 4. Les dispositions du présent article s'appliquent sans préjudice des dispositions de l'article 22 ". Aux termes de l'article 22 de la même convention : " 1. Les étrangers entrés régulièrement sur le territoire d'une des Parties Contractantes sont tenus de se déclarer, dans les conditions fixées par chaque Partie Contractante, aux autorités compétentes de la Partie Contractante sur le territoire de laquelle ils pénètrent. Cette déclaration peut être souscrite au choix de chaque Partie Contractante, soit à l'entrée, soit, dans un délai de trois jours ouvrables à partir de l'entrée, à l'intérieur du territoire de la Partie Contractante sur lequel ils pénètrent (...) ". Aux termes de l'article 23 du règlement du 9 mars 2016 susvisé : " L'absence de contrôle aux frontières intérieures ne porte pas atteinte : (...) d) à la possibilité pour un État membre de prévoir dans son droit national l'obligation pour les ressortissants de pays tiers de signaler leur présence sur son territoire conformément aux dispositions de l'article 22 de la convention d'application de l'accord de Schengen (...) ".

4. Il résulte de la combinaison des dispositions mentionnées au point 3 que la souscription de la déclaration prévue par l'article 22 de la convention d'application de l'accord de Schengen et dont l'obligation figure à l'article L. 531-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est une condition de la régularité de l'entrée en France de l'étranger soumis à l'obligation de visa et en provenance directe d'un Etat partie à cette convention qui l'a admis à entrer ou à séjourner sur son territoire.

5. Il ressort des pièces du dossier que M.C..., dont il est constant qu'il n'entrait pas dans le champ d'application des exceptions prévues à l'article R. 212-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a présenté un passeport revêtu d'un visa " C Schengen ", valable du 20 juillet 2013 au 19 août 2013, avec une entrée sur le territoire grec à Athènes. Il produit également en appel un billet d'avion à son nom, acheté le 27 juillet 2013, pour un trajet au départ de l'aéroport d'Héraklion en direction de Paris-Orly. Toutefois, et ainsi que l'a opposé le préfet de Seine-et-Marne en première instance, il n'est pas contesté que M. C...n'a pas souscrit, lors de son entrée sur le territoire français, la déclaration obligatoire mentionnée à l'article L. 531-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, prévue par l'article 22 de la convention d'application de l'accord de Schengen, conformément aux dispositions des articles R. 211-32 et R. 211-33 du même code. Dans ces conditions, en estimant que M. C...ne justifiait pas d'une entrée régulière sur le territoire français et en lui refusant pour ce motif la délivrance d'un visa de long séjour, le préfet de Seine-et-Marne n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

6. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français (...) ". Aux termes de l'article L. 313-2 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, la première délivrance de la carte de séjour temporaire et celle de la carte de séjour pluriannuelle mentionnée aux articles L. 313-20, L. 313-21, L. 313-23 et L. 313-24 sont subordonnées à la production par l'étranger du visa de long séjour mentionné aux 1° ou 2° de l'article L. 311-1 (...) ".

7. Il résulte de ces dispositions que la production d'un visa de long séjour délivré, le cas échéant, selon les modalités fixées à l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, est au nombre des conditions auxquelles est subordonnée la délivrance d'une carte de séjour temporaire, sur le fondement du 4° de l'article L. 313-11 du même code. Dès lors que, ainsi qu'il a été dit au point 5, c'est à bon droit que le préfet de Seine-et-Marne a refusé de délivrer à M. C... un visa de long séjour, le préfet n'a pas méconnu les dispositions du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en refusant de lui délivrer un titre de séjour en tant que conjoint d'une Française.

8. En quatrième lieu, aux termes du premier alinéa de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la commission du titre de séjour " est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3 (...) ". Aux termes de l'article R. 312-2 de ce code : " Le préfet (...) saisit pour avis la commission lorsqu'il envisage de refuser de délivrer ou de renouveler l'un des titres mentionnés aux articles L. 313-11, L. 314-11 et L. 314-12 à l'étranger qui remplit effectivement les conditions qui président à leur délivrance (...) ".

9. Ainsi qu'il a été dit précédemment, la production d'un visa de long séjour est au nombre des conditions auxquelles est subordonnée la délivrance d'une carte de séjour temporaire sur le fondement du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, dès lors que M. C...ne remplissait pas les conditions pour se voir délivrer un titre de séjour sur ce fondement, le préfet de Seine-et-Marne n'était pas tenu de saisir au préalable la commission du titre de séjour.

10. Enfin, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

11. Il ressort des pièces du dossier que M. C...est entré en France le 20 juillet 2013 selon ses déclarations et s'y est maintenu en situation irrégulière. S'il s'est marié avec une ressortissante de nationalité française le 9 janvier 2016, il ne justifie d'aucune vie commune avec celle-ci avant au plus tôt le mois de mai 2015, soit environ deux ans avant la décision attaquée, et ne se prévaut d'aucune circonstance faisant obstacle à ce qu'il retourne aux Comores pour demander la délivrance d'un visa lui permettant d'entrer régulièrement en France en sa qualité de conjoint d'une ressortissante française. S'il soutient également s'occuper des enfants de son épouse, il ne ressort pas des pièces du dossier que sa présence continue en France serait indispensable pour assurer l'éducation et l'entretien de ces enfants. Il n'est par ailleurs pas établi que d'autres membres de la famille de M. C... résideraient régulièrement en France, ainsi qu'il l'allègue. Enfin, M. C... ne justifie d'aucun travail ni d'aucune ressource. Ainsi, compte tenu de la durée et des conditions du séjour en France de l'intéressé, le préfet de Seine-et-Marne n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels il a pris la décision attaquée et n'a, dès lors, pas méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, le préfet de Seine-et-Marne n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette décision sur la situation personnelle de M.C....

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'annulation, ainsi que, par voie de conséquence, celles à fin d'injonction sous astreinte et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, l'Etat n'étant pas la partie perdante, doivent dès lors être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...C...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de Seine-et-Marne.

Délibéré après l'audience du 23 mai 2019, à laquelle siégeaient :

- Mme Pellissier, présidente de chambre,

- M. Legeai, premier conseiller,

- M. Platillero, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 20 juin 2019.

Le rapporteur,

F. PLATILLEROLa présidente,

S. PELLISSIER Le greffier,

M. A...La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 18PA02812


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18PA02812
Date de la décision : 20/06/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme PELLISSIER
Rapporteur ?: M. Fabien PLATILLERO
Rapporteur public ?: Mme DELAMARRE
Avocat(s) : SCP FGB

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2019-06-20;18pa02812 ?
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