Vu la procédure suivante :
Par une décision du 27 septembre 2018, la Cour a, en application de l'article L. 113-1 du code de justice administrative, saisi le Conseil d'État d'une demande d'avis sur une question de droit posée par la requête n° 18PA00361 du préfet de police, enregistrée le 31 janvier 2018 et tendant à l'annulation du jugement n° 1712876/6-2 du 26 décembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 13 juillet 2017 par lequel le préfet de police a refusé de délivrer un titre de séjour à MmeB..., ressortissante comorienne, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.
Par décision n° 424581 du 30 janvier 2019, le Conseil d'Etat a rendu son avis.
Par un mémoire en défense enregistré le 26 février 2019, Mme D...B..., représentée par MeC..., demande à la Cour :
1°) de rejeter l'appel du préfet de police et de confirmer l'annulation de l'arrêté du 13 juillet 2017 ;
2°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans le mois de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, ou, à défaut, de lui enjoindre d'instruire à nouveau sa demande, en lui délivrant dans l'attente une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler, et de prendre une décision dans le mois de la notification de la décision à intervenir, sous une astreinte de 150 euros par jour de retard qui devra être liquidée et réévaluée après une période de trois mois ;
3°) de mettre à la charge du préfet des Bouches-du-Rhône une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du10 juillet 1991 sur l'aide juridique.
Elle soutient que :
- l'appel est irrecevable car tardif ;
- l'avis du Conseil d'État n'exclut pas qu'un étranger ayant obtenu un titre de séjour à Mayotte puisse solliciter la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-11 (6°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que, comme elle, il contribue à l'entretien et l'éducation de son enfant français depuis sa naissance ou depuis au moins deux ans ;
- la décision de refus de séjour est insuffisamment motivée ;
- la commission du titre de séjour aurait dû être saisie, en application des dispositions de l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- son droit d'être entendue, qui s'inscrit dans le cadre des principes généraux de bonne administration et du respect des droits de la défense, a été méconnu ;
- la préfecture a commis une erreur de droit en lui opposant les dispositions de l'article L. 832-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors qu'elle remplissait celles de l'article L. 313-11 (6°) ;
- le refus de titre de séjour méconnait les dispositions de l'article L. 313-11 (7°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée ; l'article L. 511-1 I du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est, en tant qu'il prévoit que cette obligation peut ne pas être motivée, non conforme au droit de l'Union ;
- l'obligation de quitter le territoire français manque de base légale dès lors que le refus de séjour est illégal ;
- elle méconnait les dispositions de l'article L. 313-11 (7°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par une décision du 5 juillet 2018 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Paris, Mme B...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Legeai a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. MmeB..., ressortissante comorienne, est mère d'un enfant né à Mayotte en 2001, qui a obtenu la nationalité française par déclaration le 23 janvier 2015. En cette qualité de mère d'un enfant français mineur à sa charge, elle s'est vu délivrer par le représentant de l'Etat à Mayotte, sur le fondement des dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, une carte de séjour temporaire
" vie privée et familiale " valable du 5 janvier 2016 au 4 janvier 2017. La validité de ce titre de séjour était, en application des dispositions de l'article L. 832-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, limitée au territoire de Mayotte.
2. Mme B...est selon ses déclarations entrée sur le territoire métropolitain de la France le 26 août 2016, avec ses deux enfants, dont son fils aîné de nationalité française. Le 6 mars 2017, elle a sollicité à la préfecture de police la délivrance d'un titre de séjour en tant que mère d'un enfant français, sur le fondement du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour lui refuser, par l'arrêté litigieux du 13 juillet 2017, la délivrance de ce titre de séjour et lui faire obligation de quitter le territoire français, le préfet de police a estimé que Mme B...ne pouvait être regardée comme remplissant les conditions de délivrance du titre de séjour demandé car elle séjournait en métropole de façon irrégulière et n'avait, avant d'entrer sur le territoire métropolitain de la France, ni sollicité ni obtenu le visa spécial prévu par les dispositions des articles L. 832-2 et R. 832-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le préfet de police fait appel du jugement du 26 décembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé cet arrêté au motif qu'il avait commis une erreur de droit et que Mme B... remplissait les conditions, en tant que mère d'un enfant français à l'entretien et à l'éducation duquel elle pourvoit, prétendre sur le territoire métropolitain de la France à la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ".
Sur la recevabilité de la requête d'appel :
3. L'article R. 776-9 du code de justice administrative dispose : " Le délai d'appel est d'un mois. Il court à compter du jour où le jugement a été notifié à la partie intéressée. Cette notification mentionne la possibilité de faire appel et le délai dans lequel cette voie de recours peut être exercée ".
4. Il ressort des pièces du dossier de première instance que le jugement attaqué du
26 décembre 2017, accompagné d'une lettre de notification du même jour mentionnant les voies et délais de recours, a été mis à disposition du préfet de police le 26 décembre 2017 dans l'application informatique dite " Télérecours " mentionnée à l'article R. 414-1 du code de justice administrative, mais qu'il n'en a été pris connaissance que le jeudi 4 janvier 2018. L'article R. 611-8-2 du code de justice administrative, dans sa rédaction applicable aux faits de l'espèce, disposait que les parties étaient réputées avoir reçu la notification d'un document adressé dans cette application à la date de sa première consultation, certifiée par l'accusé de réception délivré par l'application informatique, ou, à défaut de consultation dans un délai de huit jours à compter de la date de mise à disposition du document dans l'application, à l'issue de ce délai. En l'espèce, le délai d'un mois dont disposait le préfet de police pour faire appel n'a ainsi couru qu'à compter du 4 janvier 2018 et la requête d'appel, enregistrée le 31 janvier 2018, n'est pas tardive.
Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal administratif de Paris :
5. L'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile régit la délivrance de la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " et prévoit notamment qu'elle est délivrée de plein droit, sauf menace pour l'ordre public, " 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée ". Le titulaire d'une telle carte de séjour, comme tout étranger séjournant régulièrement sur le territoire, peut en principe, ainsi que l'énonce l'article R. 321-1 du code, circuler librement " en France ", c'est à dire, conformément à ce qui résulte de l'article L. 111-3, en France métropolitaine, en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à la Réunion, à Saint-Pierre-et-Miquelon, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin et à Mayotte.
6. Toutefois, l'article L. 832-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile limite la validité territoriale des titres de séjour délivrés à Mayotte, en disposant que : " les titres de séjour délivrés par le représentant de l'Etat à Mayotte, à l'exception des titres délivrés en application des dispositions des articles L. 121-3, L. 313-4-1, L. 313-8, du 6° de l'article L. 313-10, de l'article L. 313-13 et du chapitre IV du titre Ier du livre III, n'autorisent le séjour que sur le territoire de Mayotte ". En vertu du deuxième alinéa de cet article L. 832-2, " les ressortissants de pays figurant sur la liste (...) des pays tiers dont les ressortissants sont soumis à l'obligation de visa pour franchir les frontières extérieures des Etats membres, qui résident régulièrement à Mayotte sous couvert d'un titre de séjour n'autorisant que le séjour à Mayotte et qui souhaitent se rendre dans un autre département doivent obtenir un visa. Ce visa est délivré, pour une durée et dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat, par le représentant de l'Etat à Mayotte après avis du représentant de l'Etat dans le département où ils se rendent, en tenant compte notamment du risque de maintien irrégulier des intéressés hors du territoire de Mayotte et des considérations d'ordre public ". L'article R. 832-2 du même code précise : " L'étranger qui sollicite le visa prévu à l'article L. 832-2 présente son document de voyage, le titre sous couvert duquel il est autorisé à séjourner à Mayotte, les documents permettant d'établir les conditions de son séjour dans le département de destination, les moyens d'existence lui permettant de faire face à ses frais de séjour ainsi que les garanties de son retour à Mayotte. / Sauf circonstances exceptionnelles, ce visa ne peut lui être délivré pour une durée de séjour excédant trois mois (...) ". Sous la qualification de " visa ", ces dispositions instituent une autorisation spéciale, délivrée par le représentant de l'État à Mayotte, que doit obtenir l'étranger titulaire d'un titre de séjour délivré à Mayotte dont la validité est limitée à ce département, lorsqu'il entend se rendre dans un autre département. La délivrance de cette autorisation spéciale, sous conditions que l'étranger établisse les moyens d'existence lui permettant de faire face à ses frais de séjour et les garanties de son retour à Mayotte, revient à étendre la validité territoriale du titre de séjour qui a été délivré à Mayotte, pour une durée qui ne peut en principe excéder trois mois.
7. Les dispositions de l'article L. 832-2, qui subordonnent ainsi l'accès aux autres départements de l'étranger titulaire d'un titre de séjour délivré à Mayotte à l'obtention de cette autorisation spéciale, font obstacle à ce que cet étranger, s'il gagne un autre département sans avoir obtenu cette autorisation, puisse prétendre dans cet autre département à la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions de droit commun et en particulier à la délivrance de plein droit de la carte de séjour temporaire telle que prévue à l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
8. Il ressort des pièces du dossier que MmeB..., mère d'un enfant français né à Mayotte et titulaire à ce titre d'une carte de séjour temporaire délivrée à Mayotte et valable jusqu'au 4 janvier 2017, s'est rendue sur le territoire métropolitain de la France sans être titulaire du visa prévu par les dispositions précitées. Elle ne remplissait dès lors pas les conditions pour prétendre à la délivrance de plein droit de la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " prévue par les dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, quand bien même ces dispositions ne soumettent pas l'obtention du titre de séjour à la condition d'une entrée régulière en France ou à la possession d'un visa de long séjour. Le préfet de police a ainsi fait une exacte application de l'ensemble des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers en refusant de lui délivrer le titre de séjour sollicité pour les motifs cités au point 2 ci-dessus. Il est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 13 juillet 2017 au motif qu'il avait commis une erreur de droit et que Mme B...remplissait les conditions pour bénéficier de la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " prévue par les dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
9. Il y a lieu pour la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés en première instance et en appel par MmeB....
Sur les autres moyens soulevés en première instance et en appel :
En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :
10. En premier lieu, selon les dispositions de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs, codifiées depuis le 1er janvier 2016 à l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration, la motivation " doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".
11. L'arrêté attaqué vise les textes dont il fait application, notamment les articles L. 313-11 (6°) et L. 832-2 et R. 832-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et indique avec précision les motifs de droit et de fait pour lesquels Mme B..., titulaire d'une carte de séjour dont la validité est limitée à Mayotte et entrée en France sans le visa spécial qui aurait pu lui être délivré pour une durée inférieure à trois mois, ne peut être regardée comme remplissant les conditions prévues pour la délivrance de la carte de séjour temporaire qu'elle demande. Le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de cet arrêté ne peut dès lors qu'être écarté.
12. En deuxième lieu, l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3 ". Aux termes de l'article R. 312-2 du même code : " Le préfet ou, à Paris, le préfet de police saisit pour avis la commission lorsqu'il envisage de refuser de délivrer ou de renouveler l'un des titres mentionnés aux articles L. 313-11, L. 314-11 et L. 314-12 à l'étranger qui remplit effectivement les conditions qui président à leur délivrance ". Il résulte de ces dispositions que le préfet n'est tenu de saisir la commission du titre de séjour, lorsqu'il envisage de refuser un titre mentionné à l'article L. 312-2, que du cas des étrangers qui remplissent effectivement l'ensemble des conditions de procédure et de fond auxquelles est subordonnée la délivrance d'un tel titre, et non du cas de tous les étrangers qui se prévalent des articles auxquels les dispositions de l'article L. 312-2 renvoient.
13. Il résulte de ce qui a été dit précédemment que, titulaire d'un titre de séjour délivré à Mayotte et, en outre, ne justifiant pas du visa spécifique prévu par les dispositions de l'article L. 832-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers, Mme B... ne remplissait pas les conditions prescrites pour pouvoir prétendre en métropole à la délivrance du titre de séjour qu'elle sollicitait, prévu par le 6° de l'article L. 313-11. Par suite, le préfet n'était pas légalement tenu, avant de lui opposer un refus de séjour, de consulter la commission du titre de séjour.
14. En troisième lieu, en se bornant à faire valoir, sans autre précision, que la décision de refus de titre de séjour a été prise sans qu'elle soit mise en mesure de présenter préalablement ses observations, MmeB..., qui a été mise à même de faire valoir tout élément utile tenant à sa situation personnelle à l'occasion du dépôt de sa demande et tout au long de l'instruction de celle-ci et qui ne fait état d'aucun élément pertinent qu'elle aurait été empêchée de porter à la connaissance de l'administration, n'est pas fondée à soutenir que son droit à être entendue, qu'elle tient du principe général du droit de l'Union européenne de bonne administration et de respect des droits de la défense, aurait été méconnu.
15. En quatrième lieu, ainsi qu'il a été dit au point 7, MmeB..., titulaire d'une carte de séjour " vie privée et familiale " délivrée à Mayotte, ne remplissait pas les conditions requises pour obtenir en métropole la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 6° ou du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le moyen tiré de ce que l'arrêté contesté méconnaîtrait ces dispositions ne peut qu'être écarté.
16. En dernier lieu, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dispose : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
17. Il ressort des pièces du dossier que MmeB..., qui soutient sans le démontrer avoir fui des violences à Mayotte, est entrée en août 2016 sur le territoire métropolitain de la France, avec ses deux enfants nés à Mayotte en 2001 et 2003, qui ont été scolarisés à Paris en classes de seconde et cinquième, avant que la famille ne déménage courant 2017 à Chambéry. MmeB..., si elle fait état de contrats à durée déterminée postérieurs à la décision litigieuse, ne démontre aucune insertion sociale ou professionnelle en métropole à la date de la décision litigieuse. Son conjoint et père de ses enfants continue à résider à Mayotte. Dans ces conditions, eu égard au caractère très récent du séjour de l'intéressée sur le territoire métropolitain de la France à la date de l'arrêté contesté, la décision portant refus de titre de séjour ne peut être regardée comme portant à sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard du but poursuivi. Le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit ainsi être écarté.
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
18. En premier lieu, le I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré (...) / La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I (...) ".
19. D'une part, ces dispositions, en ce qu'elles prévoient que la décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision refusant un titre de séjour, ne sont pas incompatibles avec les dispositions claires et inconditionnelles du sixième considérant et de l'article 12 de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 qui imposent que les décisions de retour indiquent leurs motifs de fait et de droit, dès lors qu'en portant à la connaissance de l'étranger les raisons pour lesquelles il n'est pas admis à séjourner en France, l'autorité administrative l'informe par là même et de manière suffisante des motifs pour lesquels il est contraint de sortir du territoire français.
20. D'autre part, il résulte clairement de l'arrêté attaqué, alors même qu'il ne cite pas le 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que l'obligation faite à Mme B... de quitter la France découle du refus de lui délivrer un titre l'autorisant à y séjourner, décision dont les motifs lui ont été suffisamment indiqués ainsi qu'il a été dit au point 10 ci-dessus. Cette obligation de quitter le territoire français n'est donc pas dépourvue de base légale. Fondée sur le 3° du I de l'article L. 511-1, elle n'avait pas à faire l'objet d'une motivation spécifique. Par suite, les moyens tirés de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français manquerait de base légale et serait insuffisamment motivée doivent être écartés.
21. En deuxième lieu, il résulte de ce qui a été dit plus haut que le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour qui fonde l'obligation de quitter le territoire français doit être écarté.
22. Enfin, pour les mêmes motifs que ceux énoncés précédemment, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire de la France tel qu'il est défini au point 4 ci-dessus a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cette décision a été prise, ni qu'elle serait entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
23. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 13 juillet 2017 refusant la délivrance d'un titre de séjour à Mme B... et l'obligeant à quitter le territoire français, lui a enjoint de délivrer à Mme B... une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " et a mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, le versement au conseil de la requérante la somme de 1 000 euros en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Les demandes de première instance de Mme B...ainsi que ses conclusions en appel à fins d'injonction et d'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1712876/6-2 du 26 décembre 2017 du tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2 : La demande de Mme B...devant le tribunal administratif et ses conclusions en appel sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à Mme D...B.... Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 9 mai 2019, à laquelle siégeaient :
- Mme Pellissier, présidente de chambre,
- M. Diémert, président-assesseur,
- M. Legeai, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 23 mai 2019.
Le rapporteur,
A. LEGEAILa présidente,
S. PELLISSIERLe greffier,
M. A...La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18PA00361