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23/04/2019 | FRANCE | N°18PA03809,18PA03941

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 23 avril 2019, 18PA03809,18PA03941


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...A...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 1er août 2018 par lequel le Préfet de police a décidé son transfert aux autorités italiennes au motif qu'elles sont responsables de l'examen de sa demande d'asile.

Par un jugement n° 1814266/8 du 18 octobre 2018, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

I - Par une requête enregistrée le 6 décembre 2018 sous le n° 18PA03

809, MmeA..., représentée par MeB..., demande à la Cour :

1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...A...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 1er août 2018 par lequel le Préfet de police a décidé son transfert aux autorités italiennes au motif qu'elles sont responsables de l'examen de sa demande d'asile.

Par un jugement n° 1814266/8 du 18 octobre 2018, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

I - Par une requête enregistrée le 6 décembre 2018 sous le n° 18PA03809, MmeA..., représentée par MeB..., demande à la Cour :

1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire ;

2°) d'annuler le jugement du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris n° 1814266/8 du 18 octobre 2018 ;

3°) d'annuler l'arrêté du préfet de police du 1er août 2018 ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à MeB..., sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- sa requête n'est pas tardive ;

- le jugement est irrégulier pour ne pas avoir statué sur sa requête dans le délai de quinze jours prescrit par l'article L. 742-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le jugement est irrégulier dès lors que l'affaire était mentionnée dans l'application Sagace " en cours de délibéré ", plusieurs jours après la date de lecture ;

- le jugement est irrégulier faute d'être signé par le président de la formation de jugement et le greffier en méconnaissance de l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;

- le jugement n'est pas suffisamment motivé dans sa réponse aux moyens tirés de la violation des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'arrêté attaqué a été pris, sans qu'elle ait bénéficié d'un entretien individuel et confidentiel mené par une personne dûment habilitée ;

- il a été pris par une autorité incompétente ;

- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation à raison de la défaillance systémique de l'Italie dans le traitement des demandes d'asile ;

- il méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales à raison des risques encourus en cas de retour en Côte d'Ivoire ;

- il méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant compte tenu de l'intégration et de la scolarisation en France de son enfant ;

- il méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales compte tenu de son intégration et de sa vie familiale en France.

Par un mémoire en défense enregistré le 9 janvier 2019 le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme A...ne sont pas fondés.

II - Par une requête enregistrée le 17 décembre 2018 sous le n° 18PA03941, MmeA..., représentée par MeB..., demande à la Cour :

1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire ;

2°) d'ordonner le sursis à exécution du jugement du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris n° 1814266/8 du 18 octobre 2018 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros à verser à Me B...sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que les moyens énoncés dans sa requête n° 18PA03809, qu'elle reprend, sont sérieux.

Par un mémoire en défense enregistré le 9 janvier 2019 le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme A...ne sont pas fondés.

Mme A...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris du 6 février 2019.

Les parties ont été informées, par application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt de la Cour était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité des moyens tirés de l'illégalité externe de la décision attaquée.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Hamon a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. MmeA..., de nationalité ivoirienne, déclare être entrée en France dans le courant de l'année 2018. A la suite du dépôt de sa demande d'asile le 30 avril 2018, le préfet de police a consulté le fichier " Eurodac " et estimé que l'Italie était compétente pour instruire la demande d'asile de MmeA..., qui y avait été enregistrée le 18 janvier 2018. Par arrêté du 1er août 2018, le préfet de police a décidé de transférer Mme A...aux autorités italiennes. Mme A...fait appel du jugement du 18 octobre 2018 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. L'appel et la demande de sursis à exécution présentés par Mme A...étant formés contre un même jugement, présentant à juger les mêmes questions et ayant fait l'objet d'une instruction commune, il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur l'aide juridictionnelle :

3. Mme A...ayant été admise, dans le cadre de l'instance n° 18PA03809 au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 6 février 2019, il n'y a pas lieu de statuer sur ses conclusions tendant à l'octroi de l'aide juridictionnelle à titre provisoire, qui ont perdu leur objet.

4. En revanche Mme A...n'ayant pas obtenu l'aide juridictionnelle dans le cadre de l'instance n° 18PA03941 il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire, sur le fondement de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Sur la régularité du jugement attaqué :

5. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier d'appel et de première instance que le dispositif du jugement attaqué a été communiqué sur place aux parties le 18 octobre 2018 à l'issue de l'audience, ainsi que le prévoit l'article R. 776-27 du code de justice administrative. Quelles que soient les mentions portées dans l'application informatique " Sagace " afférentes à l'état de l'affaire après l'audience, le jugement a été régulièrement notifié. Mme A...ne peut utilement soutenir que le jugement attaqué serait entaché d'une irrégularité à raison de mentions erronées figurant dans cette application informatique après l'audience.

6. En deuxième lieu, il ressort de la minute du jugement attaqué que celui-ci a été signé par le greffier et le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris qui a statué, conformément aux dispositions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative.

7. Enfin, la circonstance qu'il ait été statué sur la requête de Mme A...plus de quinze jours après son enregistrement, en méconnaissance de l'article L. 742-4 du code de justice administrative, est par elle-même sans incidence sur la régularité du jugement.

Sur la légalité de l'arrêté attaqué :

8. En premier lieu, Mme A...n'a soulevé dans sa requête d'appel que des moyens relatifs à la légalité interne de la décision attaquée. Par suite, le moyen de légalité externe tiré de l'irrégularité de la procédure d'entretien, soulevé par Mme A...pour la première fois après l'expiration du délai de recours contentieux et qui relève d'une cause juridique distincte, est de ce fait irrecevable.

9. En deuxième lieu, par un arrêté n° 201800107 du 9 février 2018, régulièrement publié au bulletin municipal officiel de la ville de Paris du 20 février 2018, le préfet de police a donné à Mme C...E..., attachée d'administration de l'Etat, délégation à effet de signer, notamment, les décisions relatives à la police des étrangers. Par suite, Mme A...n'est pas fondée à soutenir que la décision attaquée a été signée par une autorité incompétente.

10. En troisième lieu, si Mme A...invoque les conditions d'accueil défaillantes et dissuasives des demandeurs d'asile en Italie, elle n'établit nullement qu'elle serait exposée à un risque sérieux de ne pas être traitée par les autorités italiennes dans des conditions conformes à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile. Par ailleurs, elle ne démontre pas davantage qu'elle serait personnellement exposée à des risques sérieux de dénuement matériel extrême constituant des traitements inhumains ou dégradants en Italie, alors que ce pays est un Etat membre de l'Union européenne, partie tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complétée par le protocole de New-York, qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Dès lors, elle n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté attaqué serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation du fait des défaillances du système de traitement des demandes d'asile en Italie.

11. En quatrième lieu, le transfert de Mme A...vers l'Italie n'impliquant pas, en lui même, un risque de refoulement vers la Côte d'Ivoire, le moyen tiré de ce que la décision attaquée exposerait sa fille mineure à un risque de traitements inhumains et dégradants contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en Côte d'Ivoire est inopérant.

12. En cinquième lieu, il ressort des pièces du dossier que Mme A...et son enfant n'étaient présents sur le territoire français, à la date de la décision attaquée, que depuis quelques mois, la scolarisation de celle-ci étant postérieure à la date de la décision. Dans ces conditions, en l'absence de tout autre élément, la décision attaquée ne peut être regardée comme ayant porté une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale et comme ayant, par suite, violé les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs la décision n'a pas non plus porté atteinte à l'intérêt supérieur de son enfant en méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.

13. Il résulte dès lors de tout ce qui précède que la demande de Mme A...tendant à l'annulation de la décision attaquée du 1er août 2018, et par voie de conséquence ses conclusions présentées au titre des frais de justice, ne peuvent qu'être rejetées.

Sur la demande de sursis à exécution :

14. Le présent arrêt statuant sur la demande d'annulation du jugement n° 1814266/8 du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris, les conclusions de la requête n° 18PA03941 tendant au sursis à exécution de ce jugement sont devenues sans objet.

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la demande d'admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle présentée par Mme A...dans le cadre de l'instance n° 18PA03809.

Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 18PA03941 de MmeA....

Article 3 : Mme A...est admise à l'aide juridictionnelle à titre provisoire dans le cadre de l'instance n° 18PA03941.

Article 4 : La requête n° 18PA03809 de Mme A...est rejetée.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 1er avril 2019 à laquelle siégeaient :

- M. Even, président de chambre,

- Mme Hamon, président assesseur,

- Mme d'Argenlieu premier conseiller.

Lu en audience publique, le 23 avril 2019.

Le rapporteur,

P. HAMONLe président,

B. EVEN

Le greffier,

S. GASPARLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

6

Nos 18PA03809...


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 18PA03809,18PA03941
Date de la décision : 23/04/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: Mme Perrine HAMON
Rapporteur public ?: Mme ORIOL
Avocat(s) : DAVID

Origine de la décision
Date de l'import : 07/05/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2019-04-23;18pa03809.18pa03941 ?
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