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18/04/2019 | FRANCE | N°18PA01355

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 18 avril 2019, 18PA01355


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B...ont demandé au Tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux auxquels ils ont été assujettis au titre des années 2011, 2012 et 2013 et de condamner l'Etat au versement des intérêts prévus à l'article L. 208 du livre des procédures fiscales.

Par un jugement n° 1601823/7 du 22 février 2018, le Tribunal administratif de Melun, après avoir constaté un non-lieu à

statuer à hauteur de dégrèvements prononcés en cours d'instance, a rejeté le surplus de ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B...ont demandé au Tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux auxquels ils ont été assujettis au titre des années 2011, 2012 et 2013 et de condamner l'Etat au versement des intérêts prévus à l'article L. 208 du livre des procédures fiscales.

Par un jugement n° 1601823/7 du 22 février 2018, le Tribunal administratif de Melun, après avoir constaté un non-lieu à statuer à hauteur de dégrèvements prononcés en cours d'instance, a rejeté le surplus de cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 23 avril et 8 août 2018, MmeB..., représentée par MeA..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Melun du 22 février 2018 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions litigieuses ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat les dépens et le versement d'une somme de

4 980 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les sommes au titre desquelles un non-lieu a été constaté sont erronées ;

- la doctrine administrative référencée BOI-BIC-CHAMP-40-10-20120912 prévoit que le régime de la location meublée implique la présence de mobilier ;

- le local situé à Lille est loué nu à une société de services, qui le sous-loue meublé à des étudiants, ainsi que cela résulte du bail du 2 octobre 1997, l'acte de renouvellement du

27 juillet 2012 étant à cet égard erroné ;

- l'administration a reconnu que M. et Mme B...n'étaient pas propriétaires des meubles ;

- la circonstance que le local soit sous-loué meublé aux étudiants par la société de services est sans influence sur la qualification de l'activité de M. et MmeB... ;

- l'exception à cette règle prévue par la doctrine administrative en cas de participation aux bénéfices de l'activité du loueur en meublé n'est pas applicable en l'espèce ;

- la doctrine administrative confirme cette règle dans le cas de l'application des dispositions de l'article 199 decies E du code général des impôts ;

- il en est de même de la réponse ministérielle Frassa du 9 mars 2017 ;

- la société Résides Etudes a confirmé que les locaux étaient loués nus ;

- la société Résides Etudes exerce une activité de prestations hôtelières au sens de la doctrine administrative référencée BOI-BIC-CHAMP-40-10- 20170405.

Par des mémoires en défense enregistrés les 1er août et 6 septembre 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les moyens soulevés par Mme B...ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 27 août 2018, la clôture de l'instruction a été fixée au

17 septembre 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Magnard,

- et les conclusions de M. Cheylan, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme B...ont donné en location, au cours notamment des années 2011, 2012 et 2013, trois logements respectivement situés 34 rue de la Guillotière à Lyon (Rhône),

87 rue Flandre à Lille (Nord) et 31 quai Malakoff à Nantes (Loire-Atlantique) et ont déclaré les résultats de ces locations dans la catégorie des revenus fonciers s'agissant des logements sis à Lille et à Lyon. A l'issue d'un contrôle sur pièces de leur dossier fiscal, l'administration fiscale a considéré que ces deux locaux avaient été loués meublés et a requalifié les revenus tirés de ces locations en bénéfices industriels et commerciaux. Mme B...relève appel du jugement du

22 février 2018 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à ce que soit prononcé la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux auxquels son foyer fiscal a été assujetti au titre des années 2011, 2012 et 2013.

Sur l'étendue du litige :

2. Par deux décisions des 16 juin 2016 et 25 janvier 2017, postérieures à l'introduction de la demande devant le tribunal, le directeur départemental des finances publiques de Seine-et-Marne a prononcé le dégrèvement de l'imposition en litige à concurrence des montants, d'une part, de 2 413 euros au titre des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu des années 2011, 2012 et 2013 et, d'autre part, de la somme de 559 euros au titre des prélèvements sociaux pour la même période. Les conclusions de la requête y afférentes étaient, dans cette mesure, devenues sans objet. C'est par suite à tort que les premiers juges ont constaté un non-lieu à statuer à hauteur des sommes de 345 euros de cotisation d'impôt sur le revenu au titre de l'année 2012 et de 358 euros de cotisation d'impôt sur le revenu au titre de l'année 2013. Il y a lieu d'annuler l'article 1er du jugement en tant qu'il a constaté un non-lieu à statuer sur des sommes erronées et dans cette mesure, d'évoquer et de prononcer le non-lieu résultant des décisions susmentionnées.

Sur le bien-fondé des impositions restant en litige :

3. Aux termes de l'article 34 du code général des impôts : " Sont considérés comme bénéfices industriels et commerciaux, pour l'application de l'impôt sur le revenu, les bénéfices réalisés par des personnes physiques et provenant de l'exercice d'une profession commerciale, industrielle ou artisanale ". Aux termes de l'article 35 du même code : " I. Présentent également le caractère de bénéfices industriels et commerciaux, pour l'application de l'impôt sur le revenu, les bénéfices réalisés par les personnes physiques désignées ci-après : (...) / 5° Personnes qui donnent en location un établissement commercial ou industriel muni du mobilier ou du matériel nécessaire à son exploitation, que la location comprenne, ou non, tout ou partie des éléments incorporels du fonds de commerce ou d'industrie ; (...) ". Il résulte de ces dispositions que la location d'un logement meublé est une activité de nature commerciale dont les revenus sont imposables dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux et non dans celle des revenus fonciers.

4. M. et Mme B...ont déclaré, au titre des années 2011, 2012 et 2013, des revenus fonciers issus de la location d'un logement situé 87 rue Flandre à Lille dans une résidence de services destinée à un public étudiant, dont la gestion est confiée à la société preneuse. L'administration fiscale a remis en cause la déclaration de ces revenus dans la catégorie des revenus fonciers au motif que le logement correspondait à une location meublée.

5. Il résulte de l'instruction que les rehaussements litigieux ont été notifiés à

M. et Mme B...selon la procédure de redressement contradictoire prévue par les dispositions de l'article L. 55 du livre des procédures fiscales et ont été contestés dans le délai prescrit. L'administration supporte donc la charge de la preuve de leur bien-fondé, en application des dispositions de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales.

6. Contrairement à ce que soutient le ministre ni la circonstance que le bail du logement signé le 2 octobre 1997 entre les époux B...et la SAS Résidence service gestion se présentait comme un bail commercial, se référait à la réglementation applicable en matière de baux commerciaux, et était conclu pour une durée correspondant à la durée de droit commun d'un bail commercial, ni la circonstance qu'il mentionnait en outre dans sa partie III que le preneur exercerait " dans les locaux objets du présent contrat, une activité d'exploitant avec la fourniture de logements meublés et de services para-hôteliers ", ne permet de conclure que les époux B...mettaient à la disposition du preneur, dont la qualité de commerçant exerçant lui-même une activité de location meublée justifiait le recours à un bail relevant de la réglementation propre aux baux commerciaux, un local garni de meubles. Il ne résulte d'ailleurs pas de l'examen de ce bail qu'il se référait à un inventaire des meubles meublants qui auraient été inclus dans l'opération de location. Si le renouvellement de ce bail, établi le 27 juillet 2012, précise, en sa partie I, que le bail concerne " les dits locaux meublés ainsi qu'il résulte d'un état établi lors de l'acquisition ", une telle mention ne saurait suffire, compte tenu des observations qui précèdent, à établir que les locaux auraient été loués meublés au preneur. Il résulte d'ailleurs de l'instruction et notamment des mentions de la réponse aux observations du contribuable du 27 janvier 2005 que le preneur a déclaré que les locaux lui avaient été loués vides par les époux B...et que ces derniers n'étaient pas propriétaires des meubles. Le ministre n'établit par suite pas que la location consentie par M. et Mme B...était une location de locaux meublés.

7. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que Mme B...est fondée à obtenir la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux auxquels son foyer fiscal a été assujetti au titre des années 2011, 2012 et 2013, à raison de la taxation, dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, des loyers de l'appartement situé

87 rue Flandre à Lille. Pour le surplus, elle n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros à verser à Mme B...en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : L'article 1er du jugement n° 1601823/7 du 22 février 2018 du Tribunal administratif de Melun est annulé.

Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les dégrèvements accordés en cours d'instance, à concurrence de 2 413 euros au titre des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu mises à la charge de M et Mme B...pour les années 2011, 2012 et 2013 et de 559 euros au titre des prélèvements sociaux mis à leur charge pour la même période.

Article 3 : M. et Mme B...sont déchargés, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux auxquels le foyer fiscal a été assujetti au titre des années 2011, 2012 et 2013, à raison de la taxation dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux des loyers de l'appartement situé 87 rue Flandre à Lille.

Article 4 : L'article 2 du jugement n° 1601823/7 du 22 février 2018 du Tribunal administratif de Melun est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 5 : L'Etat versera à Mme B...une somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le surplus de la requête de Mme B...est rejeté.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...B...et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera adressée au régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris.

Délibéré après l'audience du 3 avril 2019, à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- Mme Appèche, président assesseur,

- M. Magnard, premier conseiller.

Lu en audience publique le 18 avril 2019.

Le rapporteur,

F. MAGNARDLe président,

I. BROTONS

Le greffier,

P. LIMMOIS

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 18PA01355


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 18PA01355
Date de la décision : 18/04/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: M. Franck MAGNARD
Rapporteur public ?: M. CHEYLAN
Avocat(s) : AGIK'A AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 23/04/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2019-04-18;18pa01355 ?
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