Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 13 avril 2018 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, en fixant son pays de destination.
Par un jugement n° 1811232/5-2 du 25 octobre 2018, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 23 novembre 2018, M.B..., représenté par MeC..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1811232/5-2 du Tribunal administratif de Paris du 25 octobre 2018 ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 13 avril 2018 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, en fixant son pays de destination ;
3°) d'enjoindre au préfet de police, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa demande et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour sous les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé ;
- il n'a pas été précédé d'un examen particulier de sa situation personnelle ;
- il méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il ne pourra pas bénéficier d'un traitement adapté à son état de santé en cas de retour dans son pays d'origine ;
- il méconnaît les stipulations de l'article 11 de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Côte d'Ivoire relative à la circulation et au séjour des personnes, signée à Abidjan, le 21 septembre 1992 dès lors qu'il pouvait prétendre à la délivrance d'un titre de séjour sur ce fondement ;
- il porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et méconnaît par suite les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'il vit en concubinage depuis cinq ans avec une ressortissante ivoirienne en situation régulière ;
- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il est entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle dès lors que le préfet de police n'a pas tenu compte de son état de santé et de son insertion professionnelle.
Par un mémoire en défense, enregistré le 5 mars 2019, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,
- le code des relations entre le public et l'administration,
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Mme Guilloteau a présenté son rapport au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M.B..., ressortissant ivoirien né en 1973, a été mis en possession à compter du 17 septembre 2013 d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " en raison de son état de santé, régulièrement renouvelée. Il a sollicité du préfet de police le renouvellement de ce titre de séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 13 avril 2018, le préfet de police a rejeté sa demande et a assorti ce rejet d'une obligation de quitter le territoire français et d'une décision fixant le pays de destination. M. B...relève appel du jugement du 25 octobre 2018 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".
3. L'arrêté contesté vise les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En particulier, le préfet de police a mentionné les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sur le fondement desquelles M. B...a sollicité la délivrance d'un titre de séjour. L'arrêté contesté se réfère à l'avis émis le 29 janvier 2018 par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dont le préfet de police s'est approprié les motifs, en indiquant que si l'état de santé de l'intéressé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, celui-ci peut néanmoins bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé en Côte d'Ivoire. Il expose également que l'intéressé est célibataire et sans charge de famille en France et qu'il n'est pas démuni d'attaches familiales à l'étranger où résident ses parents et ses enfants. Enfin, l'arrêté indique que M. B...n'établit pas être exposé, en cas de retour en Côte d'Ivoire, à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Ainsi, le préfet de police, qui n'avait pas à mentionner l'ensemble des éléments relatifs à la situation personnelle de l'intéressé, a suffisamment énoncé les considérations de droit et de fait fondant son arrêté, et a respecté les exigences de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de l'arrêté contesté doit être écarté.
4. En deuxième lieu, il ne ressort ni des termes de l'arrêté contesté, rappelés au point précédent, ni d'aucune autre pièce du dossier que le préfet de police n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation personnelle de M.B....
5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé. Chaque année, un rapport présente au Parlement l'activité réalisée au titre du présent 11° par le service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ainsi que les données générales en matière de santé publique recueillies dans ce cadre ".
6. Il ressort des pièces du dossier que M. B...est atteint d'une insuffisance rénale chronique secondaire à un syndrome néphrotique et d'une hypertension artérielle sévère, nécessitant une prise en charge médicale. Pour lui refuser la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet de police s'est fondé sur l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 29 janvier 2018, qui a considéré que, si l'état de santé du requérant nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, le traitement approprié à son état est disponible dans son pays d'origine.
7. Pour contredire cet avis, M. B... verse au dossier des certificats médicaux établis entre 2012 et 2017 par un médecin généraliste, qui reprennent les éléments de la situation médicale du requérant et indiquent seulement que son état de santé nécessite une prise en charge médicale qui ne peut être assurée en Côte d'Ivoire. Les certificats médicaux établis entre 2014 et 2018 par un praticien spécialiste en néphrologie du groupe hospitalier Tenon ne se prononcent pas davantage sur la disponibilité d'un traitement approprié en Côte d'Ivoire. Le requérant n'apporte par ailleurs aucun élément pour établir que les médicaments qui lui sont prescrits ne seraient pas disponibles dans ce pays ni qu'il ne pourrait effectivement y accéder. Dans ces conditions, et alors même que M. B... a été précédemment admis au séjour à raison de son état de santé, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de police ait fait une inexacte application des dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en refusant de lui délivrer le titre de séjour qu'il sollicitait sur le fondement de ces dispositions.
8. En quatrième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment pas de la demande formulée par M. B... le 2 mars 2018, que ce dernier ait sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article 11 de la convention franco-ivoirienne du 21 septembre 1992. Le préfet de police, qui n'était pas tenu d'examiner d'office si l'intéressé pouvait prétendre à un titre de séjour sur un autre fondement que celui invoqué à l'appui de sa demande, n'a par suite commis aucune erreur de droit en n'examinant pas la demande dont il était saisi sur ce fondement. Le moyen tiré de la violation, par l'arrêté contesté, des stipulations de l'article 11 de la convention conclue le 21 septembre 1992 entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République de Côte-d'Ivoire ne peut ainsi qu'être écarté comme inopérant.
9. En cinquième lieu, à supposer que M. B...ait entendu se prévaloir des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile permettant à l'autorité préfectorale de délivrer un titre de séjour à un étranger pour des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels, il ne ressort pas davantage des pièces du dossier qu'il aurait saisi l'autorité préfectorale d'une demande sur ce fondement. Il suit de là que le requérant ne peut utilement invoquer une erreur manifeste d'appréciation au regard de ces dispositions.
10. En sixième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
11. M. B...soutient qu'il a désormais le centre de ses intérêts privés et familiaux en France puisqu'il y réside depuis 2010 et vit en concubinage depuis cinq ans avec une ressortissante ivoirienne en situation régulière. Toutefois, au soutien de sa demande de titre de séjour, M. B...a indiqué être célibataire et l'attestation rédigée par cette personne le 18 juin 2018 indique seulement qu'elle l'héberge depuis le mois de juillet 2015. Dans ces conditions, le requérant n'apporte aucun élément établissant la réalité de la relation dont il se prévaut. Par ailleurs, M. B...n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, où il a vécu jusqu'à l'âge de trente-six ans et où vivent ses parents ainsi que ses enfants. Enfin, le fait que le requérant exerce depuis fin 2015 une activité professionnelle en qualité d'agent d'accueil au sein de l'association des Œuvres de la Mie de pain ne suffit pas à caractériser des liens d'une particulière intensité, ancienneté ou stabilité établis en France. Dans ces conditions, l'arrêté ne peut être regardé comme ayant porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels il a été pris. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit ainsi être écarté.
12. En dernier lieu, compte tenu de la situation du requérant précédemment décrite, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en refusant de lui renouveler son titre de séjour, le préfet de police ait commis une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de ce refus sur la situation personnelle de l'intéressé.
13. Il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 21 mars 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Lapouzade, président,
- Mme Larsonnier, premier conseiller,
- Mme Guilloteau, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 4 avril 2019.
Le rapporteur,
L. GUILLOTEAULe président,
J. LAPOUZADE
Le greffier,
Y. HERBER La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18PA03665