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04/04/2019 | FRANCE | N°18PA03650

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 04 avril 2019, 18PA03650


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...C...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 13 juin 2018 par lequel le préfet de police a rejeté sa demande de renouvellement de son certificat de résidence et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination.

Par un jugement n°s 1809439/5-2, 1811244/5-2 du 25 octobre 2018, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregist

rée le 22 novembre 2018, MmeC..., représentée par MeB..., demande à la Cour :

1°) d'annuler...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...C...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 13 juin 2018 par lequel le préfet de police a rejeté sa demande de renouvellement de son certificat de résidence et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination.

Par un jugement n°s 1809439/5-2, 1811244/5-2 du 25 octobre 2018, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 22 novembre 2018, MmeC..., représentée par MeB..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°s 1809439/5-2, 1811244/5-2 du 25 octobre 2018 du Tribunal administratif de Paris en tant qu'il rejette sa demande dirigée contre l'arrêté du 13 juin 2018 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 13 juin 2018 du préfet de police ;

3°) d'enjoindre au préfet de police, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte ou, à titre subsidiaire, de lui délivrer un titre de séjour en qualité de salarié ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'arrêté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'elle apporte la preuve des violences conjugales alléguées ;

- l'arrêté méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'arrêté méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Le préfet de police a présenté un mémoire en défense, enregistré le 19 mars 2019, soit après la clôture de l'instruction.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles,

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Mme Guilloteau a présenté son rapport au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. MmeC..., ressortissante algérienne née en 1990, a sollicité le renouvellement de son certificat de résidence en qualité de conjointe d'un ressortissant français. Par arrêté du 13 juin 2018, le préfet de police a rejeté sa demande et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite. Mme C...relève appel du jugement du 25 octobre 2018 du Tribunal administratif de Paris en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 juin 2018.

2. En premier lieu, aux termes des stipulations de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) Le certificat de résidence portant la mention " 'vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 2) au ressortissant algérien, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que son entrée sur le territoire français ait été régulière, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français (...) Le premier renouvellement du certificat de résidence délivré au titre du 2) ci-dessus est subordonné à une communauté de vie effective entre époux ". L'article 7 bis du même accord stipule que : " (...) Le certificat de résidence valable dix ans est délivré de plein droit sous réserve de la régularité du séjour pour ce qui concerne les catégories visées au a), au b), au c) et au g) : a) Au ressortissant algérien, marié depuis au moins un an avec un ressortissant de nationalité française, dans les mêmes conditions que celles prévues à l'article 6 nouveau 2) et au dernier alinéa de ce même article ; (...) ".

3. Ces stipulations régissent de manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France et y exercer une activité professionnelle, les règles concernant la nature des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés, ainsi que les conditions dans lesquelles leurs conjoints et leurs enfants mineurs peuvent s'installer en France. Si une ressortissante algérienne ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui permettent le renouvellement du titre de séjour obtenu en qualité de conjoint de ressortissant français en dépit de la rupture de la communauté de vie lorsque l'étranger a subi des violences conjugales, il appartient au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose, d'apprécier, compte tenu de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressée, et notamment des violences conjugales alléguées, l'opportunité d'une mesure de régularisation. Il appartient seulement au juge de l'excès de pouvoir, saisi d'un moyen en ce sens, de vérifier que le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation portée sur la situation personnelle de l'intéressée.

4. Mme C...soutient qu'elle a subi des violences conjugales de la part de son ex-époux, qui a initié seul la procédure de divorce en Algérie dont le jugement faisant droit à sa demande a été prononcé le 11 janvier 2017 en son absence, et que ces violences sont à l'origine de la rupture de la communauté de vie survenue à compter de juin 2016. Toutefois, les quatre procès-verbaux de mains courantes qu'elle a déposées pour violences conjugales les 4 août 2016, 15 septembre 2016, 7 novembre 2016 et 19 janvier 2017 et la plainte pour vol déposée le 30 mars 2017 sont peu circonstanciés et la requérante ne précise par ailleurs pas les suites judiciaires qui ont pu y être apportées. Si Mme C...produit également des attestations d'une tante maternelle, d'une amie et de l'association " Halte aux femmes battues ", il est constant qu'aucune des personnes concernées n'a été témoin direct des violences physiques et morales dont la requérante indique avoir été victime. Dans ces conditions, en l'absence d'éléments précis et concordants permettant de corroborer la réalité des violences conjugales, le préfet de police ne peut être regardé comme ayant commis une erreur manifeste d'appréciation en refusant le renouvellement du certificat de résidence dont était titulaire MmeC....

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Pour l'application des stipulations précitées, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.

6. Il ressort des pièces du dossier qu'à la date de la décision contestée, l'intéressée, entrée en France en octobre 2015, résidait sur le territoire national depuis moins de trois ans. Elle est célibataire et sans charges de famille et n'est pas dépourvue d'attaches privées et familiales en Algérie où réside notamment sa mère et où elle a vécu jusqu'à ses vingt-cinq ans. Le fait que Mme C...démontre travailler depuis août 2016 ne suffit pas à caractériser des liens d'une particulière intensité, ancienneté ou stabilité établis en France. Dans ces conditions, la requérante n'est pas fondée à soutenir que le préfet de police a méconnu les stipulations de l'article 8 de convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

7. En dernier lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. ".

8. Mme C...soutient qu'ayant été répudiée par son conjoint, elle risque de subir des traitements inhumains et dégradants tels que des humiliations, un sentiment d'infériorité et des sévices en cas de retour en Algérie. Toutefois, elle n'a produit au soutien de ses allégations aucun document susceptible d'établir les risques personnels qu'elle encourrait en cas de retour en Algérie. Par suite, le moyen tiré de la violation de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui ne peut utilement être invoqué qu'à l'encontre de la décision fixant le pays de destination, doit être écarté.

9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...C...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 21 mars 2019, à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président,

- Mme Larsonnier, premier conseiller,

- Mme Guilloteau, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 4 avril 2019.

Le rapporteur,

L. GUILLOTEAULe président,

J. LAPOUZADE

Le greffier,

Y. HERBER

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

5

N° 18PA03650


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 18PA03650
Date de la décision : 04/04/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: Mme Laëtitia GUILLOTEAU
Rapporteur public ?: Mme BERNARD
Avocat(s) : MAAOUIA

Origine de la décision
Date de l'import : 16/04/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2019-04-04;18pa03650 ?
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