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21/03/2019 | FRANCE | N°18PA00590

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 21 mars 2019, 18PA00590


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'établissement public SNCF Mobilités a demandé au tribunal administratif de Paris d'ordonner à la société U Spuntinu de libérer les locaux qu'elle occupe sans droit ni titre à la gare de Pornichet et d'évacuer tous les matériels et machines entreposés dans les locaux indument occupés, de l'autoriser à procéder à cette évacuation et à entreposer ces matériels et machines aux frais de la société U Spuntinu au cas où cette dernière ne déférerait pas à cette injonction et de condamner la soci

té U Spuntinu à lui verser une somme de 10 280,99 euros correspondant au montant des re...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'établissement public SNCF Mobilités a demandé au tribunal administratif de Paris d'ordonner à la société U Spuntinu de libérer les locaux qu'elle occupe sans droit ni titre à la gare de Pornichet et d'évacuer tous les matériels et machines entreposés dans les locaux indument occupés, de l'autoriser à procéder à cette évacuation et à entreposer ces matériels et machines aux frais de la société U Spuntinu au cas où cette dernière ne déférerait pas à cette injonction et de condamner la société U Spuntinu à lui verser une somme de 10 280,99 euros correspondant au montant des redevances d'occupation domaniale impayées et à une indemnité pour occupation indue de cette dépendance du domaine public. La société U Spuntinu a demandé au tribunal d'ordonner la reprise des relations contractuelles.

Par un jugement n° 1617276/4-2 du 15 décembre 2017, le tribunal administratif de Paris a ordonné à la société U Spuntinu et à tous occupants de son chef de libérer, sans délai, les dépendances du domaine public qu'elle occupe au sein de la gare de Pornichet et d'en évacuer tous les matériels et machines entreposés dans les locaux indument occupés, sous astreinte de 75 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai de deux mois à compter de la notification du jugement, condamné la société U Spuntinu à verser à l'établissement public SNCF Mobilités une somme de

10 280,99 euros correspondant au montant des redevances d'occupation domaniale impayées et à une indemnité pour occupation indue du domaine public et rejeté le surplus des conclusions des parties.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 19 février 2018 et le 3 janvier 2019, la société U Spuntinu, représentée par Me Surjous, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1617276/4-2 du 15 décembre 2017 du tribunal administratif de Paris ;

2°) de rejeter la demande de l'établissement public SNCF Mobilités ou, à titre subsidiaire, de minorer les sommes mises à sa charge ;

3°) de mettre à la charge de l'établissement public SNCF Mobilités la somme de

2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La société U Spuntinu soutient que :

- ses conclusions tendant à contester la mesure de résiliation n'étaient pas tardives ;

- les sommes demandées au titre des redevances d'occupation du domaine public ne sont pas justifiées ;

- les sommes demandées au titre de l'occupation sans titre sont excessives au regard de ses conditions d'exploitation.

Par un mémoire en défense enregistré le 23 novembre 2018, l'établissement public SNCF Mobilités, représenté par MeB..., conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la société U Spuntinu de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

L'établissement public SNCF Mobilités soutient que :

- les conclusions en contestation de la validité de la mesure de résiliation étaient tardives ;

- les sommes demandées sont justifiées.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Platillero ;

- les conclusions de Mme Nguyên Duy, rapporteur public ;

- et les observations de Me Surjous, avocat de la société U Spuntinu, et de Me Duarte, avocat de SNCF Mobilités ;

Une note en délibéré, présentée pour la société U Spuntinu, a été enregistrée le 5 mars 2019.

Considérant ce qui suit :

1. Par une convention du 15 février 2011, la société nationale des chemins de fer français (SNCF), devenue l'établissement public à caractère industriel et commercial SNCF Mobilités, a autorisé la société U Spuntinu à occuper pendant neuf ans un espace relevant du domaine public ferroviaire dont elle est propriétaire au sein de la gare de Pornichet, afin d'y exploiter un établissement de restauration à emporter. Constatant l'absence de paiement de l'intégralité des redevances contractuellement prévues pour l'occupation de cette dépendance du domaine public, la SNCF a mis en demeure le 10 mars 2016 la société U Spuntinu d'acquitter sa dette, sous peine de voir résiliée de plein droit la convention d'occupation du domaine public. Par un courrier du

5 avril 2016, la SNCF, d'une part, a informé la société U Spuntinu que, faute d'avoir déféré à la mise en demeure, la convention d'occupation du domaine public du 15 février 2011 était résiliée de plein droit et, d'autre part, l'a mise en demeure de libérer les locaux qu'elle occupait avant le

20 avril 2016. La société U Spuntinu n'ayant pas libéré les locaux, l'établissement public SNCF Mobilités a demandé au tribunal administratif de Paris de lui ordonner de libérer les locaux occupés sans droit ni titre et d'évacuer tous les matériels et machines entreposés dans ces locaux, de l'autoriser à procéder à cette évacuation et à entreposer ces matériels et machines aux frais de la société au cas où cette dernière ne déférerait pas à cette injonction et de condamner la société U Spuntinu à lui verser une somme de 10 280,99 euros correspondant au montant des redevances d'occupation domaniale impayées et à une indemnité pour occupation sans titre. En défense, la société U Spuntinu a demandé au tribunal d'ordonner la reprise des relations contractuelles. Par un jugement du 15 décembre 2017, le tribunal a ordonné à la société U Spuntinu de libérer, sans délai, les dépendances du domaine public qu'elle occupe au sein de la gare de Pornichet et d'en évacuer tous les matériels et machines entreposés dans les locaux indument occupés, sous astreinte de

75 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai de deux mois à compter de la notification du jugement, condamné la société U Spuntinu à verser à l'établissement public SNCF Mobilités une somme de 10 280,99 euros correspondant au montant des redevances d'occupation domaniale impayées et à une indemnité pour occupation indue du domaine public et rejeté le surplus des conclusions des parties. La société U Spuntinu fait appel de ce jugement.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Le juge du contrat, saisi par une partie d'un litige relatif à une mesure d'exécution d'un contrat, peut seulement, en principe, rechercher si cette mesure est intervenue dans des conditions de nature à ouvrir droit à indemnité. Toutefois, une partie à un contrat administratif peut, eu égard à la portée d'une telle mesure d'exécution, former devant le juge du contrat un recours de plein contentieux contestant la validité de la résiliation de ce contrat et tendant à la reprise des relations contractuelles. Elle doit exercer ce recours, y compris si le contrat en cause est relatif à des travaux publics, dans un délai de deux mois à compter de la date à laquelle elle a été informée de la mesure de résiliation.

3. Il résulte de l'instruction que par un courrier du 5 avril 2016, notifié à la représentante de la société U Spuntinu le 7 avril 2016, l'établissement public SNCF Mobilités a régulièrement informé cette société de la mesure de résiliation de la convention d'occupation du domaine public du 15 février 2011, la requérante reconnaissant d'ailleurs une réception de ce courrier " quelques jours après le 5 avril ". Contrairement à ce que soutient la société U Spuntinu, l'introduction d'une requête en référé par l'établissement public SNCF Mobilités le 31 mai 2016 n'a pas interrompu le délai de recours à son bénéfice. À cet égard, il ne ressort en tout état de cause pas des pièces produites que la société aurait, ainsi qu'elle le soutient, dans le cadre de cette instance en référé, formulé des conclusions en reprises des relations contractuelles. Par suite, dès lors que ces conclusions n'ont été présentées par la société U Spuntinu en première instance que le

29 mars 2017, plus de deux mois après qu'elle a été informée de la mesure de résiliation, elles étaient tardives, ainsi que l'a jugé le tribunal administratif.

Sur le bien fondé du jugement attaqué :

4. D'une part, selon l'article 6 de la convention d'occupation du domaine public du

15 février 2011, le montant de la redevance due par la société U Spuntinu pour l'occupation du local en cause est fixé à 3 600 euros par an et indexé au 1er janvier de chaque année, sur l'indice des loyers commerciaux publié par l'INSEE pour le deuxième trimestre de l'année précédente, en vertu de son article 7. L'article 19.1 de la même convention prévoit, en cas de retard de paiement, des intérêts de retard calculés sur la base du taux légal de la Banque centrale européenne majoré de sept points.

5. La société U Spuntinu soutient que la somme demandée par l'établissement public SNCF Mobilités au titre de redevances d'occupation du domaine public impayées, soit 5 839, 01 euros, est erronée, en se prévalant d'un courrier du 10 février 2016, reconnaissant une erreur dans l'actualisation des redevances déterminée en application de l'article 7 de la convention d'occupation du domaine public. Toutefois, l'objet de ce courrier est justement de rectifier l'erreur ainsi commise et la société U Spuntinu ne conteste pas que, correction faite de cette erreur, elle restait redevable d'une somme de 4 680,89 euros au titre de la période de février à décembre 2015, d'une somme de 865,10 euros au titre des mois de janvier et février 2016 et de 293,02 euros au titre de la période du 1er au 21 mars 2016, soit un total de 5 839, 01 euros. Le moyen tiré de ce que le montant des redevances impayées serait erroné doit ainsi être écarté.

6. D'autre part, le propriétaire est fondé à réclamer à l'occupant sans titre de son domaine public, au titre de la période d'occupation irrégulière, une indemnité compensant les revenus qu'il aurait pu percevoir d'un occupant régulier pendant cette période. À cette fin, il doit rechercher le montant des redevances qui auraient été appliquées si l'occupant avait été placé dans une situation régulière, soit par référence à un tarif existant, lequel doit tenir compte des avantages de toute nature procurés par l'occupation du domaine public, soit, à défaut de tarif applicable, par référence au revenu, tenant compte des mêmes avantages, qu'aurait pu produire l'occupation régulière de la partie concernée du domaine public.

7. La société U Spuntinu fait valoir que l'indemnité demandée par l'établissement public SNCF Mobilités au titre de l'occupation sans titre du domaine public, pour un montant de 4 41, 98 euros au titre de la période du 22 mars 2016 au 31 mars 2017, ne tient pas compte des avantages de toute nature procurés par l'occupation du domaine public, compte tenu des manquements commis par l'établissement public SNCF Mobilités. Toutefois, outre que les griefs qu'elle invoque se rattachent à une demande indemnitaire du fait des fautes commises dans l'exécution du contrat, en tout état de cause, la société U Spuntinu n'apporte aucun élément de preuve à l'appui de ses allégations selon lesquelles le propriétaire du domaine public, au cours de la période en cause ou même antérieurement, aurait exigé un investissement de 45 000 euros qui ne lui incombait pas en vertu du contrat, aurait refusé de mettre en valeur les locaux et de mettre à disposition des emplacements publicitaires en méconnaissance de stipulations contractuelles, aurait fait procéder à des travaux en gare de Pornichet, alors que le contrat ne prévoit d'ailleurs aucune indemnisation en ce cas, et aurait refusé de " l'aider à obtenir " une licence en vue de la vente d'alcool, ce qui n'entre au demeurant pas dans la compétence l'établissement public SNCF Mobilités et est exclu par le contrat. Il ne résulte ainsi pas de l'instruction que l'indemnité réclamée par l'établissement public SNCF Mobilités ne correspondrait pas aux revenus qu'il aurait pu percevoir d'un occupant régulier pendant la période d'occupation sans titre des locaux par la société U Spuntinu.

8. Il résulte de tout ce qui précède que la société U Spuntinu, qui ne justifie pas qu'elle aurait versé des sommes se rattachant au paiement de sa dette à l'égard de SNCF Mobilités d'un montant de 10 280,99 euros au titre de la période de février 2015 à mars 2017, n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris lui a ordonné de libérer, sans délai, les dépendances du domaine public qu'elle occupe au sein de la gare de Pornichet et d'en évacuer tous les matériels et machines entreposés dans les locaux indument occupés, sous astreinte, a rejeté ses conclusions tendant à la reprise des relations contractuelles et l'a condamnée à verser à l'établissement public SNCF Mobilités une somme de 10 280,99 euros. Ses conclusions à fin d'annulation du jugement et de rejet de la demande de première instance doivent dès lors être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

9. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".

10. Les dispositions précitées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'établissement public SNCF Mobilités, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la société U Spuntinu demande au titre des frais qu'elle a exposés. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société U Spuntinu la somme demandée par l'établissement public SNCF Mobilités au titre des frais exposés.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société U Spuntinu est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de l'établissement public SNCF Mobilités tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société U Spuntinu et à l'établissement public SNCF Mobilités.

Délibéré après l'audience du 28 février 2019, à laquelle siégeaient :

- M. Diémert, président de la formation de jugement en application des articles L. 234-3 (premier alinéa) et R. 222-6 (premier alinéa) du code de justice administrative,

- M. Legeai, premier conseiller,

- M. Platillero, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 21 mars 2019.

Le rapporteur,

F. PLATILLEROLe président,

S. DIÉMERTLe greffier,

M. A...La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 18PA00590


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18PA00590
Date de la décision : 21/03/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

24-01-02-01 Domaine. Domaine public. Régime. Occupation.


Composition du Tribunal
Président : M. DIEMERT
Rapporteur ?: M. Fabien PLATILLERO
Rapporteur public ?: Mme NGUYÊN-DUY
Avocat(s) : SURJOUS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/04/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2019-03-21;18pa00590 ?
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