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21/02/2019 | FRANCE | N°18PA02293

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 21 février 2019, 18PA02293


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 14 février 2018 par lequel le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office.

Par un jugement n° 1804186/1-2 du 2 mai 2018, le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 6 juillet 2018, M. B..., représenté par Me A...

, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1804186/1-2 du 2 mai 2018 du tribunal administr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 14 février 2018 par lequel le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office.

Par un jugement n° 1804186/1-2 du 2 mai 2018, le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 6 juillet 2018, M. B..., représenté par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1804186/1-2 du 2 mai 2018 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté du 14 février 2018 du préfet de police ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au bénéfice de son conseil, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. B...soutient que :

- le jugement n'est pas suffisamment motivé ;

- l'arrêté attaqué n'est pas suffisamment motivé ;

- son recours devant la cour nationale du droit d'asile fait obstacle à une obligation de quitter le territoire français.

Par un mémoire en défense enregistré le 1er février 2019, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Le préfet de police soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Par une décision du 5 juillet 2018, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Paris a accordé à M. B...le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention relative au statut des réfugiés, signée à Genève le 28 juillet 1951 ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Platillero a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M.B..., ressortissant congolais entré sur le territoire français le 26 mars 2015 selon ses déclarations, a présenté une demande d'asile qui a été rejetée par décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 18 mai 2016, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 22 février 2017. Il a alors fait l'objet d'un arrêté du 26 juin 2017 par lequel le préfet de police lui a fait obligation de quitter le territoire français. L'intéressé n'a pas exécuté cet arrêté et a présenté une demande de réexamen de sa demande d'asile le 5 janvier 2018 sur le fondement de l'article L. 723-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que l'OFPRA a rejetée pour irrecevabilité le 17 janvier 2018, la CNDA ayant été saisie d'un recours enregistré le 9 mai 2018. A la suite de la décision de l'OFPRA, le préfet de police a pris un arrêté du 14 février 2018 par lequel il a obligé M. B...à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office. M. B...fait appel du jugement du 2 mai 2018 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".

3. D'une part, M. B...n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué serait insuffisamment motivé faute de faire état de son recours devant la CNDA à l'encontre de la décision de l'OFPRA du 17 janvier 2018, dès lors que l'enregistrement de ce recours est postérieur à ce jugement. D'autre part, le premier juge, après avoir cité les textes applicables, a expliqué le motif pour lequel la demande de réexamen présentée par l'intéressé devait être regardée comme destinée à faire échec à une mesure d'éloignement et en a conclu en citant le texte applicable que le préfet de police n'était dès lors pas tenu d'attendre la décision de la CNDA. Il a ainsi suffisamment exposé les motifs pour lesquels les moyens de légalité interne invoqués devaient être écartés. Par suite, le moyen tiré de ce que le jugement attaqué est insuffisamment motivé au regard de l'article L. 9 du code de justice administrative et des exigences résultant de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

Sur le bien fondé du jugement attaqué :

4. En premier lieu, M. B...soutient que le préfet de police n'a eu " recours qu'à des formules générales et stéréotypées ". Il ressort toutefois des termes mêmes de l'arrêté attaqué que celui-ci mentionne l'ensemble des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Le moyen tiré du défaut de motivation manque ainsi en fait.

5. En deuxième lieu, d'une part, l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose : " I. L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 6° Si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou si l'étranger ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 743-1 et L. 743-2, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...) ".

6. D'autre part, aux termes de l'article L. 743-1 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur : " Le demandeur d'asile dont l'examen de la demande relève de la compétence de la France et qui a introduit sa demande auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la notification de la décision de l'office ou, si un recours a été formé, jusqu'à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile. L'attestation délivrée en application de l'article L. 741-1, dès lors que la demande d'asile a été introduite auprès de l'office, vaut autorisation provisoire de séjour et est renouvelable jusqu'à ce que l'office et, le cas échéant, la cour statuent ". Selon l'article L. 743-2 du même code, " par dérogation à l'article L. 743-1, sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention relative au statut des réfugiés, signée à Genève le 28 juillet 1951, et de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, adoptée à Rome le 4 novembre 1950, le droit de se maintenir sur le territoire français prend fin et l'attestation de demande d'asile peut être refusée, retirée ou son renouvellement refusé lorsque : (...) 4° L'étranger n'a introduit une première demande de réexamen, qui a fait l'objet d'une décision d'irrecevabilité par l'office en application du 3° de l'article L. 723-11, qu'en vue de faire échec à une mesure d'éloignement (...) ". Aux termes de l'article L. 723-11 de ce code : " L'office peut prendre une décision d'irrecevabilité écrite et motivée, sans vérifier si les conditions d'octroi de l'asile sont réunies, dans les cas suivants : (...) 3° En cas de demande de réexamen lorsque, à l'issue d'un examen préliminaire effectué selon la procédure définie à l'article L. 723-16, il apparaît que cette demande ne répond pas aux conditions prévues au même article (...) ". L'article L. 723-16 de ce code dispose : " A l'appui de sa demande de réexamen, le demandeur indique par écrit les faits et produit tout élément susceptible de justifier un nouvel examen de sa demande d'asile. L'office procède à un examen préliminaire des faits ou des éléments nouveaux présentés par le demandeur intervenus après la décision définitive prise sur une demande antérieure ou dont il est avéré qu'il n'a pu en avoir connaissance qu'après cette décision (...) Lorsque, à la suite de cet examen préliminaire, l'office conclut que ces faits ou éléments nouveaux n'augmentent pas de manière significative la probabilité que le demandeur justifie des conditions requises pour prétendre à une protection, il peut prendre une décision d'irrecevabilité ".

7. Il ressort des pièces du dossier que la première demande de réexamen présentée par M. B... au titre de l'asile a fait l'objet d'une décision d'irrecevabilité de l'OFPRA prise sur le fondement des dispositions précitées du 3° de l'article L. 732-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, faute de répondre aux conditions prévues à l'article L. 723-16 du même code. Par ailleurs, M. B... ne présente aucune argumentation de nature à contester utilement que sa demande de réexamen n'a été introduite qu'en vue de faire échec à une mesure d'éloignement. Enfin, si M. B...se prévaut du dépôt, antérieurement à l'arrêté attaqué, d'une demande d'aide juridictionnelle pour contester la décision d'irrecevabilité de l'OFPRA devant la CNDA, et de l'enregistrement de son recours devant la cour, postérieurement à cet arrêté, il résulte des dispositions mentionnées au point 6 que le recours dirigé contre une décision d'irrecevabilité prononcée par l'OFPRA sur une première demande de réexamen introduite par l'étranger dans le seul but de faire échec à une mesure d'éloignement ne présente pas un caractère suspensif et que le préfet de police n'était ainsi pas tenu d'attendre la décision de la CNDA. Dans ces conditions, le préfet de police n'a pas méconnu les dispositions précitées du 4° de l'article L. 743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en estimant que M. B...ne bénéficiait d'aucun droit à se maintenir sur le territoire français ni celles du 6° de l'article L. 511-1 du même code en l'obligeant à quitter le territoire français, à défaut d'être titulaire d'un titre de séjour en cours de validité.

8. En troisième lieu, à supposer que M. B...ait entendu se prévaloir de l'inconstitutionnalité des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile mentionnées au point 6, il n'appartient pas au juge administratif, hors question prioritaire de constitutionnalité, d'apprécier la conformité de dispositions législatives à la Constitution. Par ailleurs, s'il soutient que l'asile est " un droit de nature conventionnelle ", il n'apporte aucun élément de droit permettant d'apprécier le bien fondé de ce moyen.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'annulation et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent ainsi être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 7 février 2019, à laquelle siégeaient :

- Mme Pellissier, présidente de chambre,

- M. Diémert, président-assesseur,

- M. Platillero, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 21 février 2019.

Le rapporteur,

F. PLATILLEROLa présidente,

S. PELLISSIER Le greffier,

A. LOUNISLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 18PA02293


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18PA02293
Date de la décision : 21/02/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme PELLISSIER
Rapporteur ?: M. Fabien PLATILLERO
Rapporteur public ?: Mme NGUYÊN-DUY
Avocat(s) : LEBUGHE-MANGAI

Origine de la décision
Date de l'import : 26/02/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2019-02-21;18pa02293 ?
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