Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A...D...a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2012.
Par un jugement n° 1621416/1-3 du 27 février 2018, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 26 avril et 13 septembre 2018,
M.D..., représenté par MeB..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Paris du 27 février 2018 ;
2°) de prononcer la décharge des impositions litigieuses ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient :
- que les frais d'avocats qui ont été engagés aux fins de réorganiser l'actionnariat des sociétés DMS Ascenseurs et DMS Entretien visent à garantir leur pérennité par la constitution d'une holding familiale comportant un actionnaire majoritaire apte à exercer le pouvoir de décision dans l'hypothèse de son décès, en sorte que de tels frais comportaient une contrepartie pour la société ;
- que le jugement du Tribunal administratif de Montreuil rendu sur la demande de la société DMS Ascenseurs est revêtu de l'autorité de la chose jugée.
Par un mémoire en défense, enregistré le 11 juillet 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- les moyens soulevés par M. D...ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 27 août 2018, la clôture de l'instruction a été fixée au
17 septembre 2018.
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Magnard,
- et les conclusions de M. Cheylan, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. La SAS DMS Ascenseurs a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration fiscale a remis en cause la déduction, de ses résultats de l'exercice clos le 31 décembre 2012, d'une charge de 49 050 euros correspondant au montant hors taxes (soit
57 870 euros toutes taxes comprises) des frais liés à l'apport à la société civile ISCT holding de
90 % des titres de la société DMS Ascenseurs que M. D...détenait personnellement. La prise en charge de ces frais par la société DMS Ascenseurs a été regardée comme une distribution sur le fondement du c de l'article 111 du code général des impôts. M. D...relève appel du jugement du 27 février 2018 en tant que le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti en conséquence au titre de l'année 2012.
2. Aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : (...) c. Les rémunérations et avantages occultes (...) ". Lorsqu'une société a pris en charge des dépenses incombant normalement à un associé sans que la comptabilisation de cette opération ne révèle, par elle-même, l'octroi d'un avantage, il appartient à l'administration, si elle entend faire application des dispositions précitées du c de l'article 111 du code général des impôts pour imposer cette somme entre les mains de l'associé, d'établir, d'une part, que la prise en charge de cette dépense ne comportait pas de contrepartie pour la société, et d'autre part, qu'il existait une intention, pour celle-ci, d'octroyer, et pour l'associé, de recevoir, une libéralité.
3. La somme de 49 050 euros dont s'agit correspond aux factures du cabinet d'avocats ACOR qui a effectué, au cours de l'exercice 2012, des prestations de conseil en vue de la réorganisation de l'actionnariat de la société DMS Ascenseurs, laquelle a notamment consisté dans l'apport des parts détenues par M. D...à la holding familiale ISCT holding. L'administration soutient que de tels frais constituent des dépenses qui incombent normalement à l'associé et que par cette opération, M. D...a organisé la transmission de son entreprise à sa compagne, MmeC..., qui, après les opérations de restructuration, détenait 52, 17 % de la société nouvellement constituée, la société civile Thisand, laquelle, par l'intermédiaire de la société ISCT holding, contrôle les deux sociétés d'exploitation DMS Ascenseurs et DMS Entretien. Il résulte toutefois de l'instruction que l'opération en cause visait à garantir la pérennité de la société DMS Ascenseurs et de la société DMS Entretien, par la constitution d'une holding familiale comportant un actionnaire majoritaire apte à exercer le pouvoir de décision en se prémunissant des effets de mésententes familiales dans l'hypothèse d'un décès de M. D..., lequel avait neuf enfants. L'anticipation et la couverture du risque en cause étant dans l'intérêt des sociétés DMS Ascenseurs et DMS Entretien, l'administration ne peut utilement faire valoir qu'un tel risque serait hypothétique. S'il est constant que les factures émises par la société ACOR incluent également des prestations au bénéfice de la société DMS Entretien, et que les dépenses en cause ont été prises en charge uniquement par la SAS DMS Ascenseurs alors que les deux sociétés étaient intéressées par la restructuration, de telles circonstances ne peuvent, au regard de ce qui précède, permettre de regarder lesdites dépenses comme engagées au profit des associés. Il suit de là que l'administration fiscale n'établit pas l'existence, à raison de la prise en charge par la société DMS Ascenseurs des dépenses en cause, d'un avantage occulte consenti par cette dernière au profit de M.D....
4. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur l'autre moyen de la requête, que M. D...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Il y a lieu d'annuler ledit jugement, de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles l'intéressé a été assujetti au titre de l'année 2012 et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1621416/1-3 du 27 février 2018 du Tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2 : M. D...est déchargé des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2012.
Article 3 : L'Etat versera à M. D...la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...D...et au ministre de l'action et des comptes publics.
Copie en sera adressée au chef des services fiscaux chargé de la direction de contrôle fiscal d'Ile-de-France.
Délibéré après l'audience du 23 janvier 2019, à laquelle siégeaient :
- Mme Appèche, président,
- M. Magnard, premier conseiller,
- Mme Jimenez, premier conseiller.
Lu en audience publique le 6 février 2019.
Le rapporteur,
F. MAGNARDLe président assesseur,
En application de l'article R. 222-26 du code
de justice administrative
S. APPECHE
Le greffier,
P. LIMMOIS
La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.