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06/02/2019 | FRANCE | N°17PA03155

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 06 février 2019, 17PA03155


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Le Morgan's a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2011 à 2013 ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2011 au 30 septembre 2014.

Par un jugement n° 1621995/1-2 du 3 août 2017, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure deva

nt la Cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 29 septembre 2017, 26 février 2...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Le Morgan's a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2011 à 2013 ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2011 au 30 septembre 2014.

Par un jugement n° 1621995/1-2 du 3 août 2017, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 29 septembre 2017, 26 février 2018 et 13 mars 2018 à 11h28, la SARL Le Morgan's, représentée par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1621995/1-2 du 3 août 2017 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées devant ce tribunal.

Elle soutient que :

- la proposition de rectification est insuffisamment motivée ;

- c'est à tort que l'administration fiscale a considéré que sa comptabilité n'était pas probante ;

- la méthode de reconstitution méconnaît les caractéristiques propres de son exploitation et est fondée sur les données d'une période insuffisamment étendue.

Par des mémoires en défense enregistrés les 24 janvier et 6 mars 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la SARL Le Morgan's ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 26 février 2018, la clôture d'instruction a été fixée au

13 mars 2018 à 12h00.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales,

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Jimenez,

- les conclusions de M. Cheylan, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., représentant la SARL Le Morgan's.

Considérant ce qui suit :

1. A la suite d'une vérification de sa comptabilité, la SARL Le Morgan's, qui exerce une activité d'exploitation de café-bar-brasserie sous l'enseigne " Le Dijon-Bercy ", a été assujettie à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des années 2011 à 2013 et à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 2011 au

30 septembre 2014. Elle a demandé au Tribunal administratif de Paris la décharge, en droits et pénalités, de ces impositions. Elle relève appel du jugement n° 1621995/1-2 du 3 août 2017 par lequel ce tribunal a rejeté sa demande.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation ". Aux termes de l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée (...) ". Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les rectifications envisagées, de façon à permettre au contribuable de formuler utilement ses observations. En revanche, sa régularité ne dépend pas du bien-fondé de ces motifs.

3. Il résulte de l'instruction que la proposition de rectification du 26 mai 2015 mentionne les impositions concernées, la période d'imposition, le montant des rehaussements envisagés et les motifs de droit et de fait sur lesquels elle se fonde. Elle indique pour chacune des années vérifiées que la comptabilité de la société est dépourvue de valeur probante. Elle précise sur ce point que le vérificateur a relevé l'absence de justificatifs de recettes pour la période du

1er octobre 2011 au 28 février 2014, la présence d'achats sans factures correspondantes et l'enregistrement global quotidien des recettes sans relevés détaillés des recettes journalières correspondantes. Cette proposition de rectification expose ensuite pour chacun des exercices vérifiés les modalités selon lesquelles le chiffre d'affaires a été reconstitué à partir de la méthode dite " des liquides " en détaillant les différentes phases de la reconstitution ainsi que les calculs effectués. Elle comporte en annexe des tableaux qui présentent dans le détail les données utilisées par le vérificateur. Elle précise enfin les conséquences résultant de la reconstitution du chiffre d'affaires tant en matière d'impôt sur les sociétés que de taxe sur la valeur ajoutée. Il s'ensuit que le moyen tiré de la motivation insuffisante de la proposition de rectification du

26 mai 2015 manque en fait et doit être écarté.

4. La requérante ne saurait utilement se prévaloir des énonciations de la documentation administrative référencée BOI-CF-IOR-10-40 dès lors qu'elles se rapportent à la procédure d'imposition et ne comportent aucune interprétation de la loi fiscale au sens de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales.

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne le rejet de la comptabilité :

5. Il résulte de l'instruction que pour écarter la comptabilité comme comportant de graves irrégularités, l'administration a relevé que, dans le cadre des opérations de contrôle, la société requérante, qui procédait à un enregistrement journalier global des recettes, n'a pas été en mesure de présenter de justificatifs du détail des recettes pour la période du 1er octobre 2011 au

28 février 2014, date à laquelle une caisse enregistreuse a été mise en service au sein de l'établissement concerné, et notamment n'a produit aucun ticket de caisse ou note client. En outre, la ventilation des recettes entre les différents taux de taxe sur la valeur ajoutée pratiqués n'était attestée, sur cette période, par aucun justificatif et des achats non comptabilisés avaient été constatés. Dans ces conditions, et pour ces seuls motifs, l'administration, qui établit le caractère non probant de la comptabilité de la SARL Le Morgan's, était en droit de l'écarter et de procéder à une reconstitution du chiffre d'affaires réalisé, sans que l'intéressée puisse utilement faire valoir que les anomalies de stock constituaient de simples erreurs matérielles.

En ce qui concerne la reconstitution des recettes :

6. Il ressort de la proposition de rectification du 26 mai 2015 que pour reconstituer le chiffre d'affaires, le service vérificateur a appliqué la méthode dite " des liquides " consistant à déterminer, pour chaque catégorie de boissons revendues, les recettes réalisées au bar ou en salle, à partir des achats de boissons effectués auprès des différents fournisseurs de la société, tels qu'ils ressortent des factures d'achats et corrigés des variations de stocks. Le chiffre d'affaires ainsi reconstitué a été minoré afin de tenir compte des pertes et offerts, des boissons utilisées pour la préparation des mets ou comme adjuvants ainsi que de la consommation du personnel. Le vérificateur a exploité les bandes mensuelles de caisse du mois d'avril au mois de septembre 2014 produites par l'entreprise pour en déduire que la part du chiffre d'affaires des liquides s'établissait à 69,13 % et 32,32 % du chiffre d'affaires total, respectivement pour les consommations au bar et en salle et reconstituer ainsi le chiffre d'affaires total pour les trois exercices concernés. Si la SARL Le Morgan's fait valoir que l'échantillon de ventes ne prend pas en compte les périodes automnale et hivernale, elle est à l'origine du choix des journées retenues pour cet échantillon. Il lui appartenait de prendre l'initiative de produire des justificatifs supplémentaires, qu'elle seule était en mesure de présenter, afin de compléter les informations résultant de ces rouleaux de caisse. Si la société requérante soutient que le système de distribution de bière était défectueux, elle n'apporte aucun élément, qu'elle seule pourrait fournir, de nature à évaluer le montant des pertes qui pourrait être imputé à ce dysfonctionnement. En outre, les circonstances d'une part, que le chiffre d'affaires reconstitué par le service est supérieur à celui réalisé par l'exploitant précédent de l'établissement et d'autre part, que les coefficients de marge tels qu'ils ressortent de la comptabilité sont conformes aux normes moyennes de la profession, ne sauraient être prises en considération en présence d'irrégularités effectivement constatées dans la tenue des écritures comptables. Enfin, si la SARL Le Morgan's se prévaut pour la première fois en appel d'un rapport d'expertise du

23 janvier 2018 qui conclut que la reconstitution de l'administration fiscale repose sur des éléments erronés dans la mesure où l'établissement en cause serait un café-restaurant et non une brasserie supposant un service continu, ce rapport n'est pas de nature à invalider la méthode de reconstitution, qui repose sur les données provenant des bandes RAZ mensuelles afférentes à la période d'avril 2014 à septembre 2014, durant laquelle la société a utilisé une caisse enregistreuse et a exercé son activité dans des conditions dont elle n'allègue même pas qu'elles auraient différé de celles en vigueur durant les exercices contrôlés. En effet, l'administration s'est uniquement fondée sur les indications données par la SARL Le Morgan's au cours des opérations de contrôle, y compris en ce qui concerne les horaires d'ouverture de l'établissement. Dans ces conditions, l'administration, qui supporte la charge de la preuve, établit la pertinence de la méthode de reconstitution des recettes de la SARL Le Morgan's et, par suite, le bien-fondé des rehaussements assignés à celle-ci au titre de la période allant du 1er janvier 2011 au

30 septembre 2014 et des trois exercices correspondants.

7. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL Le Morgan's n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SARL Le Morgan's est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Le Morgan's et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris.

Délibéré après l'audience du 23 janvier 2019, à laquelle siégeaient :

- Mme Appèche, président,

- M. Magnard, premier conseiller,

- Mme Jimenez, premier conseiller.

Lu en audience publique le 6 février 2019.

Le rapporteur,

J. JIMENEZLe président assesseur,

En application de l'article R. 222-26 du code

de justice administrative

S. APPECHE

Le greffier,

P. LIMMOIS

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17PA03155


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 17PA03155
Date de la décision : 06/02/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme APPECHE
Rapporteur ?: Mme Julia JIMENEZ
Rapporteur public ?: M. CHEYLAN
Avocat(s) : MAMMAR

Origine de la décision
Date de l'import : 19/02/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2019-02-06;17pa03155 ?
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