Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme F... a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 7 février 2017 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français, dans un délai de trente jours, et a fixé son pays de renvoi.
Par un jugement n° 1701840-3 du 8 mars 2018, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 16 juillet 2018, MmeE..., représentée par
MeA..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1701840-3 du 8 mars 2018 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 février 2017 par lequel le préfet du Val-de-Marne a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et a fixé le pays de renvoi ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de procéder au réexamen de sa demande sur le fondement de l'article L. 911-1 du code de justice administrative ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'arrêté attaqué a été signé par une autorité incompétente ;
- il est entaché d'un défaut de motivation ;
- l'avis émis par la commission du titre de séjour est irrégulier ;
- l'arrêté contesté méconnait les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'arrêté méconnaît les dispositions des articles L. 313-11 7ème et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un courrier du 10 octobre 2018, le préfet du Val-de-Marne a été mis en demeure de produire en défense sur le fondement de l'article R. 612-3 du code de justice administrative.
Mme D...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris du
7 juin 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme d'Argenlieu a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. MmeE..., ressortissante angolaise, née le 5 septembre 1969, est entrée en France le 22 mars 2002 pour y solliciter l'asile et s'y est maintenue continûment depuis cette date selon ses déclarations. Elle a présenté une demande d'admission exceptionnelle au séjour le
17 septembre 2015. Son dossier a été soumis pour avis à la commission du titre de séjour le
10 janvier 2017, laquelle a rendu un avis défavorable. Par un arrêté du 7 février 2017, le préfet du Val-de-Marne a refusé de délivrer le titre de séjour sollicité, a obligé l'intéressée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.
2. En premier lieu, par un arrêté n° 2016/3464 du 9 novembre 2016, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture, visé dans l'arrêté contesté, le préfet du
Val-de-Marne a donné à M. C...B..., directeur de l'immigration et de l'intégration, délégation pour signer notamment les décisions de refus de titre de séjour. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté attaqué doit être écarté.
3. En deuxième lieu, le refus de séjour opposé à Mme D...le 7 février 2007 comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Ainsi, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision attaquée doit être écarté.
4. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 312-1 du code d'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans chaque département est instituée une commission de titre de séjour composée a) D'un maire ou de son suppléant désignés par le président de l'association des maires du département ou, lorsqu'il y a plusieurs associations de maires dans le département, par le préfet en concertation avec celles-ci et, à Paris, du maire, d'un maire d'arrondissement ou d'un conseiller d'arrondissement ou de leur suppléant désigné par le Conseil de Paris ; b) De deux personnalités qualifiées désignées par le préfet ou, à Paris, le préfet de police. (...) ". Aux termes de l'article R. 312-2 du même code : " Le préfet ou, à Paris, le préfet de police saisit pour avis la commission lorsqu'il envisage de refuser de délivrer ou de renouveler l'un des titres mentionnés aux articles L. 313-11, L. 314-11 et L. 314-12 à l'étranger qui remplit effectivement les conditions qui président à leur délivrance. " Selon l'article R. 312-8 dudit code : " Devant la commission, l'étranger fait valoir les motifs qu'il invoque à l'appui de sa demande d'octroi ou de renouvellement d'un titre de séjour. Un procès-verbal enregistrant ses explications est transmis au préfet avec l'avis motivé de la commission. L'avis de la commission est également communiqué à l'intéressé ". Aux termes de l'article R. 133-10 du code des relations entre le public et l'administration : " Le quorum est atteint lorsque la moitié au moins des membres composant la commission sont présents, y compris les membres prenant part aux débats au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle, ou ont donné mandat ". Aux termes de l'article R. 133-12 du même code : " La commission se prononce à la majorité des voix des membres présents ou représentés. Lorsqu'il a droit de vote, le président a voix prépondérante en cas de partage égal des voix ". L'article
R. 133-13 précise enfin : " Le procès-verbal de la réunion de la commission indique le nom et la qualité des membres présents, les questions traitées au cours de la séance et le sens de chacune des délibérations. Il précise, s'il y a lieu, le nom des mandataires et des mandants.
Tout membre de la commission peut demander qu'il soit fait mention de son désaccord avec l'avis rendu. L'avis rendu est transmis à l'autorité compétente pour prendre la décision ".
5. D'une part, il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme D...aurait fait état lors de la tenue de la commission du titre de séjour d'éléments relatifs à sa vie privée et familiale.
6. D'autre part, dans la mesure où l'" élu désigné par le préfet " conformément aux dispositions précitées du a) de l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, n'a pas siégé le jour où la commission du titre de séjour a examiné la demande de
MmeE..., le procès-verbal de la réunion de cette commission, ni, par conséquent, l'avis qu'elle a émis n'avait à mentionner le nom et la qualité dudit élu et sa signature. Par suite, le moyen tiré de ce que l'avis de la commission du titre de séjour aurait été émis suivant une procédure irrégulière doit être écarté.
7. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du même code : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2 (...) ".
8. La seule circonstance, à la supposer établie, que Mme D...serait présente en France depuis 15 ans, ne saurait constituer à elle seule une considération humanitaire ou un motif exceptionnel. Dès lors, elle n'est pas fondée à soutenir que le préfet a méconnu les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
9. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 7ème du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. I1 ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
10. Si Mme D...soutient qu'elle réside en France depuis 15 ans, qu'elle y est bien intégrée et qu'elle parle parfaitement le français, elle ne l'établit pas. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier qu'elle n'est pas dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine où elle a vécu jusqu'à l'âge de 33 ans et où vivent ses deux enfants majeurs. Dans ces conditions, l'appelante n'est pas fondée à soutenir que le préfet, en prenant l'arrêté attaqué, aurait porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Pour les mêmes raisons, elle n'est pas fondée à soutenir que la décision serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
11. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Val-de-Marne
Délibéré après l'audience du 7 janvier 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Even, président de chambre,
- Mme Hamon, président assesseur,
- Mme d'Argenlieu, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 29 janvier 2019.
Le rapporteur,
L. d'ARGENLIEULe président,
B. EVENLe greffier,
S. GASPAR
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18PA02357