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29/01/2019 | FRANCE | N°16PA03794

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 29 janvier 2019, 16PA03794


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Morgan et Co a demandé au Tribunal administratif de Paris de constater le caractère irrégulier et infondé de la résiliation pour faute du marché dont elle était titulaire pour assurer les travaux de réhabilitation et de réaffectation des espaces du patrimoine immobilier de la Monnaie de Paris, décidée par cette dernière le 15 octobre 2014, puis de la condamner à lui verser la somme de 430 223,03 euros au titre des situations de travaux non réglées et des matériaux, la somme de 244 177,4

9 euros au titre des ordres de service non réglés, la somme de 180 000 euros au ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Morgan et Co a demandé au Tribunal administratif de Paris de constater le caractère irrégulier et infondé de la résiliation pour faute du marché dont elle était titulaire pour assurer les travaux de réhabilitation et de réaffectation des espaces du patrimoine immobilier de la Monnaie de Paris, décidée par cette dernière le 15 octobre 2014, puis de la condamner à lui verser la somme de 430 223,03 euros au titre des situations de travaux non réglées et des matériaux, la somme de 244 177,49 euros au titre des ordres de service non réglés, la somme de 180 000 euros au titre de son manque à gagner, la somme de 30 000 euros au titre de l'atteinte à sa réputation professionnelle, et la somme de 30 000 euros en compensation du retard des paiements.

Par un jugement n° 1500907/3-2 du 19 octobre 2016, le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et deux mémoires enregistrés les 16 décembre 2016, 30 mars 2017 et 9 août 2017, la société Morgan et Co, représentée par MeA..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Paris n° 1500907/3-2 du 19 octobre 2016 ;

2°) de condamner la Monnaie de Paris à payer à la société Morgan et Co la somme de

430 223,03 euros au titre des situations de travaux non réglées et des matériaux indument utilisés, la somme de 244 177,49 euros au titre des ordres de services non réglés, la somme de 180 000 euros au titre de son manque à gagner, la somme de 30 000 euros au titre de l'atteinte à sa réputation professionnelle et la somme de 30 000 euros en compensation du retard des paiements, en raison du caractère abusif de la résiliation du marché objet du présent litige ;

3°) de mettre à la charge de la Monnaie de Paris la somme de 9 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle a régulièrement contesté dans le délai requis le décompte de liquidation conformément à l'article 48.3 du CCAG, par une lettre du 10 mars 2015, ledit décompte étant au demeurant tardif ;

- le premier juge a confondu les années 2015 et 2016 à partir du 3ème considérant ;

- la Monnaie de Paris s'est fondée sur de simples correspondances de signalement non contradictoirement discutées pour résilier le marché ;

- cette résiliation du marché n'a pas été précédée d'une mise en demeure de se conformer aux obligations requises dans un délai qui ne peut être inférieur à quinze jours ;

- la Monnaie de Paris a commis des fautes dans la procédure mise une oeuvre à la suite de la résiliation ;

- la Monnaie de Paris se borne à invoquer l'absence de délivrance des attestations fiscales et sociales, alors que les travaux avaient d'ores et déjà été effectués, sans avoir été payés dans leur intégralité ;

- la faute alléguée par la Monnaie de Paris n'a jamais été avérée, puisque la société Morgan et Co n'a jamais été sanctionnée par l'URSSAF, ni poursuivie ;

- il a été porté atteinte à sa présomption d'innocence ;

- il existe une disproportion entre le manquement invoqué et non prouvé et la résiliation ;

- cette résiliation infondée est donc fautive ;

- cette rupture brutale des relations contractuelles doit être indemnisée ;

- la résiliation des marchés en litige constitue une rupture brutale de nature à engager la responsabilité de la Monnaie de Paris ;

- elle doit bénéficier d'une juste réparation ;

- la Monnaie de Paris n'ayant pas apporté de réponse à sa contestation, c'est le décompte établi par la société Morgan et Co qui est définitivement opposable à la Monnaie de Paris.

Par deux mémoires en défense, enregistrés le 6 mars 2017 et le 11 août 2017, la Monnaie de Paris conclut à titre principal au rejet de cette requête d'appel pour irrecevabilité, à titre subsidiaire à la confirmation du jugement attaqué, à titre infiniment subsidiaire au rejet des conclusions de la société Morgan et Co comme dépourvues de tout fondement et à sa condamnation à lui verser la somme de 194 599,41 euros, augmentée des intérêts moratoires capitalisés au taux légal, et une somme de 4 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et au titre des dépens, dont les constats d'huissier, plus 4 000 euros pour recours abusif.

Elle soutient que :

- la présente requête est irrecevable ;

- la société Morgan et Co ayant fait l'objet d'une radiation d'office le 9 mars 2016 conformément à l'article R. 123-125 du code du commerce, n'a actuellement plus aucune domiciliation, et celle qui est indiquée est manifestement erronée ;

- la personne qui représente la société Morgan et Co dans l'instance qu'elle a engagée devant la Cour n'établit pas qu'elle était régulièrement habilitée à la saisir ;

- la société requérante n'a pas respecté le processus prescrit par les articles 13 et 50 du CCAG Travaux qui impose au titulaire d'un marché d'adresser un mémoire en réclamation préalable à l'administration pour tous les différends avant de saisir la juridiction administrative ;

- le jugement attaqué n'est entaché que d'une pure erreur matérielle sur l'année 2016 au lieu de 2015 ;

- les manquements relevés étaient graves et de nature à justifier la résiliation ;

- contrairement à ce qui est affirmé, la société Morgan et Co n'a jamais " apporté tous les documents le 15 octobre 2014 " et la directrice générale adjointe de la Monnaie de Paris n'a jamais demandé les mots de passe et identifiants URSSAF à la société Morgan et Co ;

- le formalisme de la décision de résiliation a été respecté ;

- elle a résilié le marché dont était titulaire la requérante, non en raison de ladite dette, mais au regard de son obligation de procéder ainsi au titre des dispositions du CCAG applicable au marché en cause et de l'article 19 du décret n° 2005-1742 du 30 décembre 2005 aux termes duquel : " Après signature du marché, en cas d'inexactitude des documents et renseignements mentionnés aux I et II de l'article 17 ainsi qu'aux I et II de l'article 18, ou en cas de refus de produire les pièces requises aux échéances fixées conformément au 1° du I de l'article 18, il est fait application aux torts du titulaire des conditions de résiliation prévues par le marché. " ;

- la Monnaie de Paris devait obligatoirement résilier le marché en cause dès lors que la société Morgan et Co n'était pas en mesure de justifier qu'elle respectait la réglementation prohibant le travail illégal ;

- aucune disproportion de la mesure ne peut donc être alléguée dès lors qu'en application des dispositions de l'article 19 du décret n° 2005-1742 du 30 décembre 2005 et du CCAG applicable au marché en cause, seule la résiliation s'imposait en l'espèce au regard de la faute de la société requérante ;

- le moyen tiré de la prétendue atteinte à la présomption d'innocence est inopérant ;

- la Monnaie de Paris n'a pas commis de fautes lors de l'exécution de la décision de résiliation et a parfaitement respecté la procédure prévue par l'article 47 du CCAG Travaux ;

- la société Morgan et Co se contente d'avancer des montants de préjudice sans apporter aucune preuve au soutien de ses prétentions ;

- l'administration est en droit de présenter au juge administratif une demande reconventionnelle tendant à ce que son cocontractant soit condamné à lui verser les sommes dont elle est créancière.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 relative aux marchés publics passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics ;

- le décret n° 2005-1742 du 30 décembre 2005 fixant les règles applicables aux marchés passés par les pouvoirs adjudicateurs mentionnés à l'article 3 de l'ordonnance du 6 juin 2005;

- l'arrêté du 8 septembre 2009 portant approbation du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Even,

- les conclusions de Mme Oriol, rapporteur public,

- et les observations de MeB....

Considérant ce qui suit :

1. La société Morgan et Co relève appel du jugement du 19 octobre 2016 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande dirigée contre la résiliation pour faute décidée par la Monnaie de Paris le 15 octobre 2014, du marché dont elle était titulaire pour assurer les travaux de réhabilitation et de réaffectation des espaces de son patrimoine immobilier, et tendant à la condamnation de la Monnaie de Paris à lui verser diverses sommes au titre des situations de travaux non réglées et des matériaux, des ordres de service non réglés, de son manque à gagner, de l'atteinte à sa réputation professionnelle, et de la compensation du retard des paiements.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En premier lieu, le tribunal administratif ayant jugé que les conclusions de la société Morgan et Co étaient irrecevables, le moyen tiré de ce que les premiers juges auraient entaché leur jugement d'une insuffisance de motivation en ne répondant pas aux moyens de fond portant sur la résiliation supposée fautive du marché, ne peut qu'être écarté.

3. En second lieu, aux termes de l'article 45 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux, auquel se réfère le marché litigieux : " Le représentant du pouvoir adjudicateur peut mettre fin à l'exécution des prestations faisant l'objet du marché avant l'achèvement de celles-ci, soit de son fait ou de celui de son mandataire dans les conditions prévues à l'article 46.2, soit pour faute du titulaire dans les conditions prévues à l'article 46.3, soit dans le cas des circonstances particulières mentionnées à l'article 46.1. Le pouvoir adjudicateur peut également mettre fin, à tout moment, à l'exécution des prestations pour un motif d'intérêt général. Dans ce cas, le titulaire a droit à être indemnisé du préjudice qu'il subit du fait de cette décision, selon les modalités prévues à l'article 46.4. La décision de résiliation du marché est notifiée au titulaire. Sous réserve des dispositions particulières mentionnées à l'article 47, la résiliation prend effet à la date fixée dans la décision de résiliation ou, à défaut, à la date de sa notification. Le règlement du marché est effectué alors selon les modalités prévues aux articles 13.3 et 13.4, sous réserve des stipulations de l'article 47. L'article 46 précise, selon les cas, si le titulaire a droit à être indemnisé du fait de la décision de résiliation. Aux termes de l'article 47.1.1. En cas de résiliation, il est procédé, le titulaire ou ses ayants droit, tuteur, administrateur ou liquidateur, dûment convoqués dans les conditions prévues par les documents particuliers du marché, aux constatations relatives aux ouvrages et parties d'ouvrages exécutés, à l'inventaire des matériaux approvisionnés ainsi qu'à l'inventaire descriptif du matériel et des installations de chantier. Il est dressé procès-verbal de ces opérations dans les conditions prévues à l'article 12. Ce procès-verbal comporte l'avis du maître d'oeuvre sur la conformité aux dispositions du marché des ouvrages ou parties d'ouvrages exécutés Ce procès-verbal est signé par le maître de l'ouvrage. Il emporte réception des ouvrages et parties d'ouvrages exécutés, avec effet de la date d'effet de la résiliation, tant pour le point de départ du délai de garantie défini à l'article 44 que pour le point de départ du délai prévu pour le règlement final du marché à l'article 13.3.2. ". Aux termes de l'article 47.1.2 : " Dans les dix jours suivant la date de signature de ce procès-verbal, le représentant du pouvoir adjudicateur fixe les mesures qui doivent être prises avant la fermeture du chantier pour assurer la conservation et la sécurité des ouvrages ou parties d'ouvrages exécutés. Ces mesures peuvent comporter la démolition de certaines parties d'ouvrages. A défaut d'exécution de ces mesures par le titulaire dans le délai imparti par le représentant du pouvoir adjudicateur, le maître d'oeuvre les fait exécuter d'office.

Sauf dans les cas de résiliation ouvrant droit à indemnité, ces mesures sont à la charge du titulaire. " Aux termes de l'article 47.2.1 : " En cas de résiliation du marché, une liquidation des comptes est effectuée. Le décompte de liquidation du marché, qui se substitue au décompte général prévu à l'article 13.4.2, est arrêté par décision du représentant du pouvoir adjudicateur et notifié au titulaire. " Aux termes de l'article 47.2.2 : " Le décompte de liquidation comprend :.a) Au débit du titulaire : - le montant des sommes versées à titre d'avance et d'acompte ;- la valeur, fixée par le marché et ses avenants éventuels, des moyens confiés au titulaire que celui-ci ne peut restituer ainsi que la valeur de reprise des moyens que le pouvoir adjudicateur cède à l'amiable au titulaire ;- le montant des pénalités ;- le cas échéant, le supplément des dépenses résultant de la passation d'un marché aux frais et risques du titulaire dans les conditions fixées à l'article 48.b) Au crédit du titulaire : - la valeur contractuelle des travaux exécutés, y compris, s'il y a lieu, les intérêts moratoires ;- le montant des rachats ou locations résultant de l'application de l'article 47.1.3 ; - le cas échéant, le montant des indemnités résultant de l'application des articles 46.2 et 46.4. " Aux termes de l'article 47.2.3 : " Le décompte de liquidation est notifié au titulaire par le pouvoir adjudicateur, au plus tard deux mois suivant la date de signature du procès-verbal prévu à l'article 47.1.1. Cependant, lorsque le marché est résilié aux frais et risques du titulaire, le décompte de liquidation du marché résilié ne sera notifié au titulaire qu'après règlement définitif du nouveau marché passé pour l'achèvement des travaux. Dans ce cas, il peut être procédé à une liquidation provisoire du marché, dans le respect de la règlementation en vigueur. " Aux termes de l'article 50 portant sur le règlement des différends et des litiges : " Le représentant du pouvoir adjudicateur et le titulaire s'efforceront de régler à l'amiable tout différend éventuel relatif à l'interprétation des stipulations du marché ou à l'exécution des prestations objet du marché.50.1. Mémoire en réclamation. " Aux termes de l'article 50.1.1 : " Si un différend survient entre le titulaire et le maître d'oeuvre, sous la forme de réserves faites à un ordre de service ou sous toute autre forme, ou entre le titulaire et le représentant du pouvoir adjudicateur, le titulaire rédige un mémoire en réclamation. Dans son mémoire en réclamation, le titulaire expose les motifs de son différend, indique, le cas échéant, les montants de ses réclamations et fournit les justifications nécessaires correspondant à ces montants. Il transmet son mémoire au représentant du pouvoir adjudicateur et en adresse copie au maître d'oeuvre. Si la réclamation porte sur le décompte général du marché, ce mémoire est transmis dans le délai de quarante-cinq jours à compter de la notification du décompte général. Le mémoire reprend, sous peine de forclusion, les réclamations formulées antérieurement à la notification du décompte général et qui n'ont pas fait l'objet d'un règlement définitif. " Aux termes de l'article 50.1.2 : " Après avis du maître d'oeuvre, le représentant du pouvoir adjudicateur notifie au titulaire sa décision motivée dans un délai de quarante-cinq jours à compter de la date de réception du mémoire en réclamation. " Aux termes de l'article 50.1.3 : " L'absence de notification d'une décision dans ce délai équivaut à un rejet de la demande du titulaire. " Aux termes de l'article 50.2 : " Lorsque le représentant du pouvoir adjudicateur n'a pas donné suite ou n'a pas donné une suite favorable à une demande du titulaire, le règlement définitif du différend relève des procédures fixées aux articles 50.3 à 50.6. " Aux termes de l'article 50.3.1 : " A l'issue de la procédure décrite à l'article 50.1, si le titulaire saisit le tribunal administratif compétent, il ne peut porter devant cette juridiction que les chefs et motifs énoncés dans les mémoires en réclamation. " Aux termes de l'article 50.3.2 : " Pour les réclamations auxquelles a donné lieu le décompte général du marché, le titulaire dispose d'un délai de six mois, à compter de la notification de la décision prise par le représentant du pouvoir adjudicateur en application de l'article 50.1.2, ou de la décision implicite de rejet conformément à l'article 50.1.3, pour porter ses réclamations devant le tribunal administratif compétent. " Aux termes de l'article 50.3.3 : " Passé ce délai, il est considéré comme ayant accepté cette décision et toute réclamation est irrecevable ".

4. Il résulte des stipulations précitées du cahier des clauses administratives générales du marché que les sommes correspondant aux éventuels préjudices subis par le cocontractant du fait d'une faute commise par la personne responsable du marché en cas de résiliation figure au nombre des dépenses que doit comprendre le décompte de résiliation. Ces mêmes stipulations imposent une réclamation préalable en cas de différend avant saisine du juge administratif.

5. Il résulte de l'instruction que le décompte de liquidation litigieux a été établi par la Monnaie de Paris conformément aux articles 47.1.1 et 47.2.3 du CCAG-Travaux et remis à la société Morgan et Co le 13 février 2015, dans le délai de deux mois consécutif à l'établissement, le 5 janvier précédent, du procès-verbal de fin de chantier qui valait réception des travaux.

6. Un mémoire du titulaire du marché ne peut être regardé comme constituant une réclamation au sens du cahier des clauses administratives générales que s'il comporte l'énoncé d'un différend et expose, de façon précise et détaillée, les chefs de la contestation en indiquant, d'une part, les montants des sommes dont le paiement est demandé et, d'autre part, les motifs de ces demandes, notamment les bases de calcul des sommes réclamées. Si la société Morgan et Co a adressé des courriers de réclamation à la Monnaie de Paris les 5 et 17 décembre 2014, antérieurement à la notification de ce décompte de liquidation, pour lui demander de régler les sommes dont elle s'estimait créditrice en raison de l'exécution des travaux du marché, elle s'est alors bornée à critiquer le bien-fondé de la résiliation en débat sans demander la réparation d'un quelconque préjudice. En outre, le courrier daté du 10 mars 2015, adressé postérieurement à la requête introductive d'instance qui a été enregistré par le greffe du tribunal administratif le

20 janvier 2015, par lequel la société Morgan et Co a indiqué à la Monnaie de Paris qu'elle demanderait une pleine et entière réparation de ses préjudices, ne peut être considéré comme constituant une réclamation préalable. La société Morgan et Co ne peut donc être regardée comme ayant contesté le décompte de liquidation, y compris sur le terrain indemnitaire, en adressant une véritable réclamation préalable à la Monnaie de Paris avant de saisir de saisir le juge administratif, dans le délai de 45 jours prévu par l'article 50.1.1 du CCAG-Travaux, qui expirait en l'espèce le

30 mars 2015, et non pas le 30 mars 2016, comme indiqué par les premiers juges en raison d'une simple erreur matérielle.

7. Sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de l'appel, la société Morgan et Co n'est donc pas fondée à soutenir que c'est à tort, que, par le jugement attaqué, qui n'est entaché d'aucune irrégularité, le Tribunal administratif de Paris a rejeté comme irrecevables ses demandes dirigées contre le décompte de liquidation établi par la Monnaie de Paris.

Sur les conclusions reconventionnelles de la Monnaie de Paris :

8. Il résulte de ce qui précède que le présent arrêt fait droit aux conclusions subsidiaires de la Monnaie de Paris. Par suite, il n'y a pas lieu de statuer sur ses conclusions reconventionnelles tendant à ce que la société Morgan et Co lui règle le solde du décompte de liquidation, soit la somme de 194 599,41 euros assortie des intérêts moratoires, qui ont été présentées à titre infiniment subsidiaire.

Sur les frais de justice :

9. Les dispositions énoncées par l'article L. 761-1 du code de justice administrative, font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de la Monnaie de Paris au titre des frais de justice. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, en revanche, en application de ces mêmes dispositions, de mettre à la charge de la société Morgan et Co la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la Monnaie de Paris.

Sur les conclusions de la Monnaie de Paris présentées sur le fondement de l'article

R. 741-12 du CJA :

10. Aux termes de l'article R. 741-12 du code de justice administrative : " Le juge peut infliger à l'auteur d'une requête qu'il estime abusive une amende dont le montant ne peut excéder

3 000 euros ". La faculté ouverte au juge par ces dispositions constitue un pouvoir propre. Par suite, les conclusions tendant à ce que la société requérante soit condamnée au versement d'une telle amende ne sont pas recevables. En tout état de cause, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'infliger une amende pour recours abusif à la société Morgan et Co.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société Morgan et Co est rejetée.

Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions reconventionnelles de la Monnaie de Paris.

Article 3 : La société Morgan et Co versera la somme de 2 000 euros à la Monnaie de Paris sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions de la Monnaie de Paris présentées sur le fondement de l'article R. 741-12 du CJA sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société Morgan et Co et à la Monnaie de Paris.

Délibéré après l'audience du 7 janvier 2019, à laquelle siégeaient :

- M. Even, président de chambre,

- Mme Hamon, président assesseur,

- Mme d'Argenlieu, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 29 janvier 2019.

Le président rapporteur,

B. EVEN Le président assesseur,

P. HAMON

Le greffier,

S. GASPARLa République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

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N° 16PA03794


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 16PA03794
Date de la décision : 29/01/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Marchés et contrats administratifs - Fin des contrats - Résiliation.

Marchés et contrats administratifs - Exécution financière du contrat - Règlement des marchés.

Marchés et contrats administratifs - Règles de procédure contentieuse spéciales - Recevabilité.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: M. Bernard EVEN
Rapporteur public ?: Mme ORIOL
Avocat(s) : SELARL RSDA

Origine de la décision
Date de l'import : 05/02/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2019-01-29;16pa03794 ?
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