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21/12/2018 | FRANCE | N°17PA02171

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 21 décembre 2018, 17PA02171


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision par laquelle la société Orange a implicitement rejeté ses demandes tendant à ce que soient établis des listes d'aptitude et des tableaux d'avancement relatifs au corps d'inspecteur, au titre des années 2004 à 2010, et au réexamen de ses possibilités de promotion interne au sein de ce corps à compter du 1er décembre 2004, d'enjoindre à la société Orange de réexaminer ses possibilités de promotion interne au grade d'inspec

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision par laquelle la société Orange a implicitement rejeté ses demandes tendant à ce que soient établis des listes d'aptitude et des tableaux d'avancement relatifs au corps d'inspecteur, au titre des années 2004 à 2010, et au réexamen de ses possibilités de promotion interne au sein de ce corps à compter du 1er décembre 2004, d'enjoindre à la société Orange de réexaminer ses possibilités de promotion interne au grade d'inspecteur, par l'établissement rétroactif des listes d'aptitude et des tableaux d'avancement pour le grade d'inspecteur de 2004 à 2010 et de mettre à la charge de la société Orange une somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1600553/5-2 du 18 mai 2017, le Tribunal administratif de Paris a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 28 juin 2017 et 20 mars 2018, M. B...représenté par MeC..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Paris n° 1600553/5-2 du 18 mai 2017 ;

2°) d'annuler la décision implicite contestée ;

3°) d'ordonner à la société Orange de réexaminer rétroactivement ses possibilités de promotion interne au grade d'inspecteur pour les années 2004 à 2010 par l'établissement rétroactif des listes d'aptitudes et des tableaux d'avancement pour le grade d'inspecteur pour les années 2004 à 2010 ;

4°) de condamner la société Orange à lui verser une somme de 30 000 euros en réparation du préjudice lié à l'illégalité qu'elle a commise en bloquant les promotions internes et d'avancement de ses fonctionnaires reclassés après le 26 novembre 2004 ;

5°) de mettre à la charge de la société Orange une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier ;

- le dispositif mis en oeuvre par le décret du 26 novembre 2004 est illégal en tant qu'il ne prévoit qu'une seule voie de promotion interne et que celle-ci est elle-même illégale ;

- la modalité de sélection mise en oeuvre ne peut être assimilée ni à un concours au sens de

l'article 26 de la loi du 11 janvier 1984, ni à un examen professionnel ou à une liste d'aptitude en application de ces mêmes dispositions ;

- la société Orange était tenue d'établir des listes d'aptitude ou des examens professionnels et des tableaux d'avancement pour le grade d'inspecteur, de 2004 à 2010 ;

- la décision refusant d'établir rétroactivement, de 2004 à 2010, des listes d'aptitudes, et des tableaux d'avancement est donc entachée d'une erreur de droit.

Par un mémoire en défense et quatre mémoires complémentaires, enregistrés les 7 mars,

25 avril, 13 juillet, 24 septembre et 19 octobre 2018, la société Orange représentée par MeA..., conclut au rejet de la requête et à la condamnation de M. B...à lui verser une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Un mémoire complémentaire a été enregistré le 29 novembre 2018 pour la société Orange.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;

- la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 modifiée relative à l'organisation du service public de La Poste et de France Télécom ;

- le décret n° 2004-1300 du 26 novembre 2004 relatif aux dispositions statutaires applicables à certains corps de fonctionnaires de France Télécom ;

- le décret n° 2011-1279 du 29 novembre 2011 relatif au statut particulier des corps d'inspecteurs de France télécom ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme d'Argenlieu,

- les conclusions de Mme Oriol, rapporteur public,

- et les observations de M.B....

Considérant ce qui suit

1. M.B..., fonctionnaire de l'Etat, employé par la société France Télécom devenue Orange, a intégré le grade de reclassement de contrôleur divisionnaire le 28 décembre 1990. En janvier 2010, il a été détaché au ministère du travail, puis au ministère de l'économie et des finances au sein duquel il est désormais intégré. M. B...a demandé au président de la société Orange, le

23 septembre 2015, de réexaminer rétroactivement ses possibilités de promotion interne au grade d'inspecteur à compter du 1er décembre 2004, après établissement de listes d'aptitude et de tableaux d'avancement. Aucune réponse n'y a été apportée. M. B...fait appel du jugement du 18 mai 2017 par lequel le Tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à l'annulation du refus implicite de la société Orange.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Il ressort du jugement attaqué, et notamment de son considérant 7, que les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de reprendre l'ensemble des arguments des parties, ont répondu au moyen tiré de l'illégalité de l'absence d'établissement à titre rétroactif de listes d'aptitudes et des tableaux d'avancement. Le moyen tiré de l'irrégularité du jugement, en ce qu'il serait entaché d'une omission à statuer, doit donc être rejeté.

Sur le fond :

3. Aux termes de l'article 26 de la loi susvisée du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat : " En vue de favoriser la promotion interne, les statuts particuliers fixent une proportion de postes susceptibles d'être proposés au personnel appartenant déjà à l'administration (...), non seulement par voie de concours (...), mais aussi par la nomination de fonctionnaires (...) suivant l'une des modalités ci-après : 1°) Examen professionnel ; 2°) Liste d'aptitude établie après avis de la commission paritaire du corps d'accueil (...). ". En vertu de l'article 10 de la même loi : " (...) les statuts particuliers pris en la forme indiquée à l'article 8 ci-dessus peuvent déroger, après avis du Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat prévu à l'article 13 ci-après, à certaines des dispositions du statut général qui ne correspondraient pas aux besoins propres de ces corps ou aux missions que leurs membres sont destinés à assurer, notamment pour l'accomplissement d'une obligation statutaire de mobilité. Les statuts particuliers de corps interministériels ou communs à plusieurs départements ministériels ou établissements publics de l'Etat peuvent déroger, après avis du Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat, à certaines des dispositions du statut général qui ne correspondraient pas aux besoins propres à l'organisation de la gestion de ces corps au sein de chacun de ces départements ministériels ou établissements. ". L'article 10 de cette même loi dispose quant à lui que : " En ce qui concerne les membres des corps recrutés par la voie de l'Ecole nationale d'administration, des corps enseignants et des personnels de la recherche, des corps reconnus comme ayant un caractère technique, les statuts particuliers pris en la forme indiquée à l'article 8 ci-dessus peuvent déroger, après avis du Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat prévu à l'article 13 ci-après, à certaines des dispositions du statut général qui ne correspondraient pas aux besoins propres de ces corps ou aux missions que leurs membres sont destinés à assurer, notamment pour l'accomplissement d'une obligation statutaire de mobilité. Les statuts particuliers de corps interministériels ou communs à plusieurs départements ministériels ou établissements publics de l'Etat peuvent déroger, après avis du Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat, à certaines des dispositions du statut général qui ne correspondraient pas aux besoins propres à l'organisation ". L'article 29 de la loi du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et à France Télécom, enfin, prévoit que : " Les dispositions de l'article 10 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée s'appliquent à l'ensemble des corps de fonctionnaires de La Poste et de France Télécom. "

4. Les décisions administratives ne peuvent légalement disposer que pour l'avenir. Toutefois, s'agissant des décisions relatives à la carrière des fonctionnaires ou des militaires, l'administration peut, en dérogation à cette règle générale, leur conférer une portée rétroactive dans la mesure nécessaire pour assurer la continuité de la carrière de l'agent intéressé ou procéder à la régularisation de sa situation.

5. Si la société Orange fait valoir qu'elle a fait le choix, à compter du 1er décembre 2004, de privilégier la voie du concours pour la promotion interne des fonctionnaires reclassés, cette circonstance ne la dispensait pas de faire application, à la condition qu'elles soient légales, des dispositions réglementaires des statuts particuliers et notamment du statut du corps d'inspecteur tel qu'issu des décrets n° 58-777 du 25 août 1958 et n° 2011- 1679 du 29 novembre 2011, lesquelles prévoyaient l'établissement de listes d'aptitude pour l'accès à ce corps.

6. Si la société Orange a ainsi commis une illégalité fautive, cette circonstance ne l'obligeait pas pour autant à réexaminer rétroactivement les possibilités de promotion interne de M. B... au grade d'inspecteur, à compter du 1er décembre 2004, après établissement de listes d'aptitude pour les années 2004 à 2010. En effet, l'avancement au choix n'étant pas de droit, l'établissement de listes d'aptitude à titre rétroactif n'était pas nécessaire à la continuité de la carrière de M.B.... Par ailleurs, ne résultant de l'annulation contentieuse d'aucune décision concernant l'intéressé, cet établissement n'était pas davantage nécessaire à la régularisation de la situation de M.B....

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a refusé de faire droit à sa demande. Par voie de conséquence, les conclusions à fin d'injonction présentées par l'appelant doivent également être rejetées.

Sur les conclusions présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société Orange, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. B...demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... le versement de la somme que demande la société Orange sur le fondement de ces mêmes dispositions.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la société Orange sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...B...et à la société Orange.

Délibéré après l'audience du 11 décembre 2018 à laquelle siégeaient :

- M. Even, président,

- M. Dellevedove, premier conseiller,

- Mme d'Argenlieu, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 21 décembre 2018.

Le rapporteur,

L. d'ARGENLIEULe président,

B. EVENLe greffier,

I. BEDRLa République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

5

N° 17PA02171


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 17PA02171
Date de la décision : 21/12/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-13-02-01 Fonctionnaires et agents publics. Contentieux de la fonction publique. Effets des annulations. Reconstitution de carrière.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: Mme Lorraine D'ARGENLIEU
Rapporteur public ?: Mme ORIOL
Avocat(s) : CABINET DE GUILLENCHMIDT et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 01/01/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-12-21;17pa02171 ?
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