Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme Vilna Ceran Jerusalemy a demandé au Tribunal administratif de la Polynésie française d'annuler l'arrêté du 28 avril 2016 par lequel le maire de la commune de Taputapuatea a rapporté la délégation de fonctions qui lui avait été accordée, ainsi que la délibération du 4 mai 2016 par laquelle le conseil municipal de cette commune a décidé de ne pas la maintenir dans ses fonctions d'adjointe au maire.
Par un jugement n° 1600338 du 25 octobre 2016, le Tribunal administratif de la Polynésie française a annulé les décisions attaquées.
Procédure devant la Cour :
I - Par une requête enregistrée le 30 novembre 2016 sous le n° 16PA03539, la commune de Taputapuatea, représentée par MeB..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de la Polynésie française n°1600338 du 25 octobre 2016 ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme C...devant le Tribunal administratif de la Polynésie française ;
3°) de mettre à la charge de Mme C...le versement de la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les deux décisions ont été prises au motif d'une perte de confiance et de la nécessité de garantir le bon fonctionnement de l'administration communale, le comportement de Mme C...ayant entraîné un conflit de loyauté au sein du conseil municipal.
Par un mémoire en défense enregistré le 1er février 2017, MmeC..., représentée par MeA..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 260 euros soit mise à la charge de la commune de Taputapuatea sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par la commune ne sont pas fondés.
II - Par une lettre enregistrée le 23 février 2018, Mme C...a demandé à la Cour, en application de l'article L. 911-4 du code de justice administrative :
1°) d'enjoindre à la commune de Taputapuatea de prendre toutes mesures propres à assurer l'exécution du jugement du Tribunal administratif de la Polynésie française n° 1600338 du
25 octobre 2016, sous astreinte de 15 000 FCFP par jour de retard ;
2°) de mettre à la charge de la commune le versement de la somme de 150 000 FCFP en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par ordonnance du 20 septembre 2018, le président de la Cour a décidé l'ouverture d'une procédure juridictionnelle, enregistrée sous le n° 18PA03144.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Hamon,
- et les conclusions de Mme Oriol, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 28 avril 2016, le maire de la commune de Taputapuatea a rapporté la délégation de fonctions qu'il avait accordée en 2014 à Mme Vilna Ceran Jerusalemy, conseiller municipal, en qualité de sixième adjointe au maire. En conséquence, le conseil municipal de Taputapuatea a, par une délibération du 4 mai 2016, décidé de ne pas maintenir l'intéressée dans ses fonctions d'adjointe au maire. La commune de Taputapuatea fait appel du jugement du 25 octobre 2016 par lequel le Tribunal administratif de la Polynésie française a annulé ces deux décisions.
Mme C...a par ailleurs saisi le Cour, le 23 février 2018, d'une demande tendant à ce que la Cour ordonne les mesures propres à assurer l'exécution de ce jugement.
2. Les requêtes de la commune de Taputapuatea et de Mme C...se rapportant à un même jugement et ayant fait l'objet d'une instruction commune, il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.
Sur la requête de la commune de Taputapuatea :
3. Aux termes de l'article L. 2122-18 du code général des collectivités territoriales : " Le maire est seul chargé de l'administration, mais il peut, sous sa surveillance et sa responsabilité, déléguer par arrêté une partie de ses fonctions à un ou plusieurs de ses adjoints et, en l'absence ou en cas d'empêchement des adjoints ou dès lors que ceux-ci sont tous titulaires d'une délégation à des membres du conseil municipal. (...) Lorsque le maire a retiré les délégations qu'il avait données à un adjoint, le conseil municipal doit se prononcer sur le maintien de celui-ci dans ses fonctions. ". Il résulte de ces dispositions que le maire peut, à tout moment, mettre fin aux délégations qu'il a consenties, sous réserve que sa décision ne soit pas inspirée par des motifs matériellement inexacts ou étrangers à la bonne marche de l'administration communale.
4. Il ressort des pièces du dossier, et notamment des attestations produites en appel par la commune, qu'à la date des décisions attaquées, Mme C...avait approché plusieurs élus de la commune pour les inviter à rejoindre un mouvement politique dissident de la majorité municipale, et leur faire part de sa défiance envers le maire de la commune. Ces faits étant suffisants pour porter atteinte au lien de confiance entre un maire et un adjoint, la commune de Taputapuatea est fondée à soutenir que c'est à tort que, pour annuler les décisions attaquées, le Tribunal administratif de la Polynésie française a retenu l'unique moyen de la requête, tiré de ce qu'elles auraient été prises pour un motif étranger à la bonne marche de l'administration communale. Elle est donc fondée à demander l'annulation du jugement attaqué et le rejet de la demande de MmeC....
Sur la demande d'exécution :
5. La Cour annule par le présent arrêt le jugement du Tribunal administratif de la Polynésie française du 25 octobre 2016. Par suite, les conclusions de Mme C...tendant à l'exécution de ce jugement ne peuvent qu'être rejetées.
Sur les conclusions présentées au titre des frais de justice :
6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Taputapuatea, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que Mme C...demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme C...le versement de la somme que la commune de Taputapuatea demande sur le fondement des mêmes dispositions.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de la Polynésie française n° 1600338 du
25 octobre 2016 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme C...devant le Tribunal administratif de la Polynésie française, ainsi que ses conclusions présentées en appel sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La demande d'exécution de Mme C...est rejetée.
Article 4 : Les conclusions de la commune de Taputapuatea présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Taputapuatea et à Mme Vilna Ceran Jerusalemy. Copie en sera adressée au Haut-Commissaire de la Polynésie française.
Délibéré après l'audience du 19 novembre 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Even, président de chambre,
- Mme Hamon, président assesseur,
- Mme d'Argenlieu, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 11 décembre 2018.
Le rapporteur,
P. HAMONLe président,
B. EVENLe greffier,
S. GASPARLa République mande et ordonne à la ministre des outre mer en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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Nos 16PA03539...