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06/12/2018 | FRANCE | N°17PA03108

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 06 décembre 2018, 17PA03108


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...D..., M. G...D..., M. N...D..., Mme K...D..., Mme I...D..., Mme H...D..., Mme F...D..., Mme C...D...et M. E...M...ont demandé au Tribunal administratif de Paris de condamner solidairement l'Assistance publique - hôpitaux de Paris et l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales à verser :

- à M. A...D...une somme de 803 610,39 euros en réparation des préjudices résultant pour lui de sa prise en charge par le service d'héma

tologie de l'hôpital Saint-Antoine ;

- à Mme K...D...une somme de 20 000 euro...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...D..., M. G...D..., M. N...D..., Mme K...D..., Mme I...D..., Mme H...D..., Mme F...D..., Mme C...D...et M. E...M...ont demandé au Tribunal administratif de Paris de condamner solidairement l'Assistance publique - hôpitaux de Paris et l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales à verser :

- à M. A...D...une somme de 803 610,39 euros en réparation des préjudices résultant pour lui de sa prise en charge par le service d'hématologie de l'hôpital Saint-Antoine ;

- à Mme K...D...une somme de 20 000 euros en réparation du préjudice moral d'affection résultant pour elle de la prise en charge de son époux, M. A...D..., par le service d'hématologie de l'hôpital Saint-Antoine ;

- à Mme I...D..., à Mme H...D...et à M. G...D...une somme de 10 000 euros chacun en réparation du préjudice moral d'affection résultant pour eux de la prise en charge de leur père, M. A...D..., par le service d'hématologie de l'hôpital Saint-Antoine ;

- à Mme F...D..., à Mme C...D..., à M. N...D...et à M. E... M...une somme de 5 000 euros chacun en réparation du préjudice moral d'affection résultant pour eux de la prise en charge de leur grand-père, M. A...D..., par le service d'hématologie de l'hôpital Saint-Antoine.

Par un jugement n° 1600495/6-1 du 21 juillet 2017, le Tribunal administratif de Paris a condamné l'Assistance publique - hôpitaux de Paris à verser à M. D...une somme de 204 742,06 euros, à la caisse primaire d'assurance maladie de la Côte d'Or une somme de 126 244,49 euros ainsi qu'une somme de 1 055 euros en application de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale et a rejeté le surplus de la requête des consorts D...et des demandes de la caisse primaire d'assurance maladie de la Côte d'Or.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 20 septembre 2017, la caisse primaire d'assurance maladie de la Côte d'Or, représentée par Me B...L..., demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 1600495/6-1 du 21 juillet 2017 du Tribunal administratif de Paris en tant que ce jugement a rejeté le surplus de ses conclusions indemnitaires ;

2°) de condamner l'Assistance publique - hôpitaux de Paris à lui verser, au titre des prestations servies à M. A...D...au titre de l'aide apportée par une tierce personne, la somme de 174 953,56 euros, soit 104 764,79 euros au titre des préjudices temporaires et 70 188,77 euros au titre des préjudices permanents, cette somme devant portée intérêts à compter du jour de la première demande, et les intérêts échus devant être capitalisés ;

3°) de mettre à la charge de l'Assistance publique - hôpitaux de Paris le versement de la somme de 1 055 euros au titre de l'indemnité forfaitaire ;

4°) de mettre à la charge de l'Assistance publique - hôpitaux de Paris le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient qu'elle a justifié que l'état de santé de M.D..., dû à la faute commise par l'Assistance publique - hôpitaux de Paris, avait nécessité le passage d'une pension d'invalidité de catégorie II à une pension d'invalidité de catégorie III, soit l'affectation d'une tierce personne dont l'aide a été rendue nécessaire par l'aggravation de la neuropathie liée à l'administration d'un surdosage de Velcade, qui est chiffré à la somme de 48 709,07 euros.

Par un mémoire en défense, enregistré le 5 avril 2018, l'Assistance publique - hôpitaux de Paris, représentée par MeJ..., conclut à ce qu'il soit déclaré que le montant de l'indemnité due au titre de l'assistance par une tierce personne susceptible d'être mise à sa charge s'élève à la somme de 119 654,55 euros, soit 102 606,33 pour M. D...et 17 048,17 euros pour la caisse primaire d'assurance maladie de la Côte d'Or.

Elle soutient que les premiers juges ont justement calculé l'indemnité due au titre de l'aide apportée par une tierce personne à M.D..., mais n'ont pas fait une juste répartition de cette somme en décidant de l'allouer en totalité à M. D...sans imputer la part due à la caisse primaire d'assurance maladie de la Côte d'Or ; il convient donc d'allouer à ce titre la somme de 102 606,33 euros à M. D...et la somme de 17 048,17 euros à la caisse d'assurance maladie de la Côte d'Or.

L'Assistance publique - hôpitaux de Paris demande en outre, dès lors qu'elle n'est pas à l'origine de cette omission et qu'elle n'en a pas bénéficié, de ne pas mettre à sa charge une somme sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique,

- le code de la sécurité sociale,

- le décret n° 98-255 du 31 mars 1998,

- l'arrêté du 26 décembre 2016 relatif aux montants de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale,

- l'arrêté du 20 décembre 2017 relatif aux montants de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale,

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Luben,

- les conclusions de Mme Bernard, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par le jugement du 21 juillet 2017 dont la réformation est demandée, le Tribunal administratif de Paris a estimé que la faute commise par l'Assistance publique - hôpitaux de Paris dans l'administration du traitement prescrit à M. D...a entraîné, en premier lieu l'aggravation de ses troubles neuropathiques, la réparation incombant à l'Assistance publique - hôpitaux de Paris à ce titre correspondant aux préjudices temporaires subis par M.D..., entièrement liés à cette aggravation, et qu'elle a entrainé, en second lieu, une perte de chance d'obtenir une amélioration de son état de santé, évaluée, dans les circonstances de l'espèce, à 35 %, la réparation incombant à l'Assistance publique - hôpitaux de Paris des préjudices permanents subis par M. D...devant dès lors être limitée à ce pourcentage.

2. S'agissant des préjudices permanents subis par M. D...qui, comme il a été jugé, dès lors que la victime a perdu une chance d'obtenir une amélioration de son état de santé, ne doivent être indemnisés par l'Assistance publique - hôpitaux de Paris qu'à hauteur de 35 % de leur montant total, le jugement attaqué, dans son point 21, a rappelé les modalités du calcul des indemnités respectives mises à la charge du tiers responsable que devaient recevoir, pour chaque poste de préjudice, la victime et la caisse primaire d'assurance maladie, en application des dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale : " il appartient au juge, pour chacun des postes de préjudice, tout d'abord, d'évaluer le montant du préjudice total en tenant compte de l'ensemble des dommages qui s'y rattachent, de fixer ensuite la part demeurée à la charge de la victime, compte tenu des prestations dont elle a bénéficié et qui peuvent être regardées comme prenant en charge un préjudice, et enfin de déterminer le montant de l'indemnité mise à la charge du tiers responsable au titre du poste de préjudice, ce montant correspondant à celui du poste si la responsabilité du tiers est entière et à une partie seulement en cas de partage de responsabilité ; que le juge accorde à la victime, dans le cadre de chaque poste de préjudice et dans la limite de l'indemnité mise à la charge du tiers, une somme correspondant à la part des dommages qui n'a pas été réparée par des prestations de sécurité sociale, le solde de l'indemnité mise à la charge du tiers étant, le cas échéant, accordé à la caisse ".

3. Pour ce qui concerne le poste de préjudice constitué par les frais liés au handicap, au titre des préjudices permanents, le jugement attaqué, en premier lieu, dans son point 23, a estimé qu'il résultait de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise, que le préjudice résultant pour M. D... de la nécessité de recourir à l'assistance d'une tierce personne à domicile pour les actes de la vie courante s'élevait à la somme totale de 341 870 euros pour l'ensemble de ses dépenses après consolidation, et que la caisse primaire d'assurance maladie de la Côte d'Or justifiait de ses débours, pour un montant de 48 709,07 euros, correspondant aux sommes qu'elle a versées à compter du 24 avril 2015, date du passage de M. D...d'une pension d'invalidité de 2ème catégorie à une pension de 3ème catégorie, entrainant l'attribution de l'assistance d'une tierce personne à domicile. En deuxième lieu, pour le même poste de préjudice constitué par les frais liés au handicap, le jugement attaqué, dans son point 24, a estimé que le montant total des frais d'adaptation du logement de M.D..., pris en charge par ce dernier, s'élevait à la somme de 32 590,75 euros. En troisième lieu, pour le même poste de préjudice constitué par les frais liés au handicap, le jugement attaqué, dans son point 25, a estimé que le surcoût, pour M.D..., résultant de la nécessité d'acquérir un véhicule ainsi équipé en remplacement de son ancien véhicule s'élevait à la somme de 23 680,86 euros. Ainsi, le total des frais liés au handicap s'élevait à la somme de 398 141,61 euros. Dès lors que, comme il a été jugé, la réparation de ce poste de préjudice incombant à l'Assistance publique - hôpitaux de Paris doit être limitée au pourcentage de 35 %, correspondant à la perte de chance d'obtenir une amélioration de son état de santé, de la somme totale, l'Assistance publique - hôpitaux de Paris devait être condamnée à verser à ce titre la somme de 139 349,56 euros. En application du quatrième alinéa de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, aux termes duquel " conformément à l'article 1346-3 du code civil, la subrogation ne peut nuire à la victime subrogeante, créancière de l'indemnisation, lorsqu'elle n'a été prise en charge que partiellement par les prestations sociales ; en ce cas, l'assuré social peut exercer ses droits contre le responsable, par préférence à la caisse subrogée ", et dès lors que le préjudice de l'assuré social, M.D..., s'élevait, comme il a été dit, à la somme totale de 398 141,61 euros, l'intégralité de l'indemnité due par l'Assistance publique - hôpitaux de Paris au titre du poste de préjudice constitué par les frais liés au handicap, soit la somme de 139 349,56 euros, doit être versée à M.D..., la caisse primaire d'assurance maladie de la Côte d'Or ne pouvant ainsi obtenir le remboursement de ses débours, établis à la somme de 48 709,07 euros pour ce poste de préjudice. Par suite, c'est à bon droit, et sans avoir effectué une erreur de calcul, que le jugement attaqué, dans son point 27, a estimé que devait être mise à la charge de l'Assistance publique - hôpitaux de Paris, au titre des préjudices permanents, la seule somme de 21 479,70 euros correspondant aux frais de santé futurs, à l'exclusion de la somme de 48 709,07 euros exposée par la caisse au titre du passage d'une pension d'invalidité de 2ème catégorie à une pension de 3ème catégorie servie à son assuré social, qui comportait l'attribution de l'assistance d'une tierce personne à domicile.

4. Il résulte de tout ce qui précède que la caisse primaire d'assurance maladie de la Côte d'Or n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 21 juillet 2017, le Tribunal administratif de Paris a condamné l'Assistance publique - hôpitaux de Paris à lui verser une somme de 126 244,49 euros, ainsi qu'une somme de 1 055 euros au titre de l'indemnité forfaitaire prévue par l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, et a rejeté le surplus de sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

Sur l'indemnité forfaitaire de gestion prévue par les dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale :

5. Aux termes de l'article 3 du décret visé ci-dessus du 31 mars 1998 : " En contrepartie des frais qu'ils engagent pour obtenir le remboursement, en application des articles 29 à 32 de la loi du 5 juillet 1985 susvisée, des prestations énumérées au II de l'article 1er de l'ordonnance du 7 janvier 1959 susvisée qu'ils ont versées soit à l'un de leurs agents victime d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions et imputable en tout ou partie à un tiers, soit aux ayants droit de cet agent, les collectivités et établissements mentionnés à l'article 2 des lois du 26 janvier 1984 et du 9 janvier 1986 susvisées perçoivent une indemnité forfaitaire à la charge du tiers responsable dont le montant est déterminé, sur la base de ces prestations, dans les conditions définies au sixième alinéa de l'article L. 454-1 du code de la sécurité sociale. / En cas de versement du capital-décès et lorsque l'accident dont l'agent a été victime n'est pas survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, les dispositions de l'alinéa précédent sont également applicables si la caisse primaire d'assurance maladie à laquelle l'agent était affilié au titre des prestations en nature maladie n'a pas fait application ou n'est pas susceptible de faire application, au titre de ces prestations, des dispositions des cinquième et sixième alinéas de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale. (...) ". Aux termes de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale : " (...) En contrepartie des frais qu'elle engage pour obtenir le remboursement mentionné au troisième alinéa ci-dessus, la caisse d'assurance maladie à laquelle est affilié l'assuré social victime de l'accident recouvre une indemnité forfaitaire à la charge du tiers responsable et au profit de l'organisme national d'assurance maladie. Le montant de cette indemnité est égal au tiers des sommes dont le remboursement a été obtenu, dans les limites d'un montant maximum de 910 euros et d'un montant minimum de 91 euros. A compter du 1er janvier 2007, les montants mentionnés au présent alinéa sont révisés chaque année, par arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget (...) " ; aux termes de l'article 1er de l'arrêté susvisé du 20 décembre 2017 relatif aux montants de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale : " Les montants maximum et minimum de l'indemnité forfaitaire de gestion visés aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale sont fixés respectivement à 1 066 euros et à 106 euros à compter du 1er janvier 2018 ".

6. L'Assistance publique - hôpitaux de Paris a été condamnée à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de la Côte d'Or, au titre de l'indemnité forfaitaire prévue par l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, la somme de 1 055 euros correspondant au plafond fixé par l'arrêté du 26 décembre 2016 susvisé alors en vigueur. Si le montant maximal de l'indemnité forfaitaire a été réévalué par l'arrêté susvisé du 20 décembre 2017 pour être porté à 1 066 euros, la caisse primaire d'assurance maladie de la Côte d'Or ne peut toutefois prétendre à ce que la différence entre la somme de 1 055 euros que le jugement attaqué a condamné l'Assistance publique - hôpitaux de Paris à lui verser et le montant maximal actuel de 1 066 euros lui soit versée dès lors que, comme il vient d'être dit, ses conclusions tendant à la majoration des sommes qui lui sont dues au titre des prestations versées doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la caisse primaire d'assurance maladie de la Côte d'Or est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la caisse primaire d'assurance maladie de la Côte d'Or, à l'Assistance publique - hôpitaux de Paris et à M. A...D....

Délibéré après l'audience du 22 novembre 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président,

- M. Luben, président assesseur,

- Mme Guilloteau, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 6 décembre 2018.

Le rapporteur,

I. LUBENLe président,

J. LAPOUZADELe greffier,

Y. HERBERLa République mande et ordonne à la ministre des solidarités et de la santé en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17PA03108


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 17PA03108
Date de la décision : 06/12/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-02-01-01 Responsabilité de la puissance publique. Responsabilité en raison des différentes activités des services publics. Service public de santé. Établissements publics d'hospitalisation.


Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: M. Ivan LUBEN
Rapporteur public ?: Mme BERNARD
Avocat(s) : PHILIP DE LABORIE

Origine de la décision
Date de l'import : 11/12/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-12-06;17pa03108 ?
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