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13/11/2018 | FRANCE | N°17PA03686

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 13 novembre 2018, 17PA03686


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C...a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler la décision implicite du directeur interrégional des services pénitentiaires de Paris, rejetant sa réclamation préalable reçue le 26 mai 2015 tendant au versement des indemnités de mission journalière au titre de la journée de départ pour les missions qu'il a effectuées en outre-mer à compter de mars 2012, ainsi que la décision du 7 août 2015 de rejet de son recours gracieux.

Par un jugement n° 1507937 du 3 octobre 2017, le Tr

ibunal administratif de Melun a annulé ces décisions et a enjoint au directeur inter...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C...a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler la décision implicite du directeur interrégional des services pénitentiaires de Paris, rejetant sa réclamation préalable reçue le 26 mai 2015 tendant au versement des indemnités de mission journalière au titre de la journée de départ pour les missions qu'il a effectuées en outre-mer à compter de mars 2012, ainsi que la décision du 7 août 2015 de rejet de son recours gracieux.

Par un jugement n° 1507937 du 3 octobre 2017, le Tribunal administratif de Melun a annulé ces décisions et a enjoint au directeur interrégional des services pénitentiaires de Paris de verser à M. C... les indemnités de mission journalière correspondantes.

Procédure devant la Cour :

Par un recours, enregistré le 4 décembre 2017, la garde des sceaux, ministre de la justice demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande de M. C... devant le tribunal administratif de Melun.

Elle soutient que :

- En vertu de l'article 2 de l'arrêté du 3 juillet 2006 fixant les taux des indemnités de mission prévues à l'article 3 du décret n° 2006-781 du 3 juillet 2006, les journées de départ du territoire outre-mer donnent droit à une indemnité de mission réduite selon les prestations servies ; en conséquence, dès lors que les frais de repas et d'hébergement au titre de la journée de départ sont supportés par l'Etat du fait de la prise en charge par ce dernier des frais de transport aérien, l'agent, qui ne supporte pas ces frais, ne peut en demander le remboursement.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 avril 2018, M. C..., représenté par MeA..., conclut au rejet de la requête et demande à ce que soit mis à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient qu'aucun moyen de la requête n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le décret n° 2006-781 du 3 juillet 2006 ;

- l'arrêté du 3 juillet 2006 fixant les taux des indemnités de mission prévues à l'article 3 du décret n° 2006-781 du 3 juillet 2006 fixant les conditions et les modalités de règlement des frais occasionnés par les déplacements temporaires des personnels civils de l'État ;

- l'arrêté du 8 décembre 2006 fixant les conditions et les modalités de règlement des frais occasionnés par les déplacements des personnels civils de l'État pour le ministère de la justice ;

- l'arrêté du 14 avril 2015 fixant les conditions et les modalités de règlement des frais occasionnés par les déplacements des personnels civils de l'État pour le ministère de la justice ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Mantz,

- les conclusions de Mme Jayer, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... est premier surveillant affecté au sein de l'équipe nationale des transfèrements au Centre pénitentiaire Sud francilien de Réau. Par un courrier en date du 26 mai 2015, réceptionné le 27 mai 2015 par les services de l'administration pénitentiaire, il a sollicité le versement des indemnités de mission journalière au titre de la " journée de départ " pour les missions qu'il a effectuées en outre-mer entre mars 2012 et mai 2015. Le directeur interrégional des services pénitentiaires de Paris a rejeté implicitement cette demande. Par courrier du 28 juillet 2015, réceptionné le même jour par les services de l'administration pénitentiaire, M. C... a formé un recours gracieux à l'encontre de cette dernière décision, qui a été rejeté par une décision du 7 août 2015. La garde des sceaux, ministre de la justice relève appel du jugement du 3 octobre 2017 par lequel le Tribunal administratif de Melun a annulé les décisions contestées par M. C..., et a enjoint à cette autorité de verser à ce dernier les indemnités de missions journalières qui lui étaient dues au titre de la journée de départ pour les missions qu'il a effectuées outre-mer depuis mars 2012.

2. Aux termes de l'article 3 du décret du 3 juillet 2006 fixant les conditions et les modalités de règlement des frais occasionnés par les déplacements temporaires des personnels civils de l'État : " Lorsque l'agent se déplace pour les besoins du service hors de sa résidence administrative et hors de sa résidence familiale à l'occasion d'une mission [...], il peut prétendre : / [...] à des indemnités de mission qui ouvrent droit, cumulativement ou séparément, selon les cas, au : / 1° Remboursement forfaitaire des frais supplémentaires de repas ; / 2° Remboursement forfaitaire des frais d'hébergement et, pour l'étranger et l'outre-mer, des frais divers, sur production des justificatifs de paiement de l'hébergement auprès du seul ordonnateur. / Toutefois, pour l'étranger et l'outre-mer, dans le cas où l'agent est logé ou nourri gratuitement, les indemnités de mission allouées sont réduites dans la limite d'un pourcentage fixé par arrêté conjoint du ministre chargé de la fonction publique, du ministre chargé du budget, du ministre chargé des affaires étrangères et du ministre chargé de l'outre-mer [...] ". Aux termes de l'article 2 du même décret : " Pour l'application du présent décret, sont considérés comme : / 1° Agent en mission : agent en service, muni d'un ordre de mission pour une durée totale qui ne peut excéder douze mois, qui se déplace, pour l'exécution du service, hors de sa résidence administrative et hors de sa résidence familiale (...) ". Aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 3 juillet 2006 fixant les taux des indemnités de mission prévues à l'article 3 du décret du 3 juillet 2006 susvisé : " Pour l'application de l'article 3 du décret du 3 juillet 2006 susvisé : / [...] b) Missions outre-mer : / Le taux maximal de l'indemnité de mission est fixé à 90 pour la Martinique, la Guadeloupe, la Guyane, La Réunion, Mayotte et Saint-Pierre-et-Miquelon. / Le taux maximal de l'indemnité de mission est fixé à 120 ou 14 320 F CFP pour la Nouvelle-Calédonie, les îles Wallis et Futuna et la Polynésie française [...] ". Aux termes du premier alinéa de l'article 2 du même arrêté : " Pour l'outre-mer, le taux maximal de l'indemnité de mission est réduit de 65 % lorsque l'agent est logé gratuitement, de 17,5 % lorsqu'il est nourri à l'un des repas du midi ou du soir et de 35 % lorsqu'il est nourri gratuitement aux repas du midi et du soir ". Aux termes de l'article 11 de l'arrêté du 8 décembre 2006 fixant les conditions et les modalités de règlement des frais occasionnés par les déplacements des personnels civils de l'État pour le ministère de la justice, applicable à l'ensemble des dates des missions litigieuses : " L'agent peut prétendre à une indemnité de repas lorsqu'il se trouve en mission pendant la totalité de la période comprise entre 11 heures et 14 heures pour le repas du midi et pendant la totalité de la période comprise entre 18 heures et 21 heures pour le repas du soir. ". Aux termes de l'article 12 du même arrêté : " L'agent peut prétendre à une indemnité d'hébergement lorsqu'il se trouve en mission pendant la totalité de la période comprise entre 0 heure et 5 heures ". Aux termes du premier alinéa de l'article 22 du même arrêté : " L'indemnité de mission se décompte par journée complète passée en outre-mer où s'accomplit le déplacement. La journée d'arrivée et la journée de départ donnent lieu chacune à l'attribution d'une indemnité journalière ". Aux termes de l'arrêté du 14 avril 2015 fixant les conditions et les modalités de règlement des frais occasionnés par les déplacements temporaires des personnels civils de l'Etat pour le ministère de la justice, applicable à l'ensemble des missions litigieuses effectuées à compter du 17 avril 2015 : " L'agent qui se déplace sur le territoire métropolitain pour les besoins du service hors de sa résidence administrative et hors de sa résidence familiale à l'occasion d'une mission ou d'un intérim perçoit des indemnités forfaitaires selon les modalités suivantes : a) Une indemnité de repas est versée à l'agent s'il est en mission pendant la totalité de la période comprise entre 11 heures et 14 heures pour le repas de midi et pendant la totalité de la période comprise entre 18 heures et 21 heures pour le repas du soir ; b) Une indemnité d'hébergement est versée à l'agent lorsqu'il est en mission pendant la totalité de la période comprise entre minuit et 5 heures du matin, sur présentation des pièces justificatives de paiement de l'hébergement. Le montant forfaitaire de cette indemnité est égal au plafond fixé par l'article 8 ". Enfin, aux termes de l'article 16 du même arrêté : " L'indemnité de mission se décompte par journée complète passée en outre-mer où s'accomplit le déplacement. La journée d'arrivée et la journée de départ donnent lieu chacune à l'attribution d'une indemnité journalière ".

3. Il résulte de la combinaison des dispositions précitées qu'un agent du ministère de la justice en mission outre-mer est susceptible de se voir allouer une indemnité de mission journalière destinée à couvrir forfaitairement, d'une part, ses frais supplémentaires de repas du midi et du soir, et d'autre part, ses frais d'hébergement. Cette indemnité est due au titre de chacune des journées de présence complètes de l'agent sur le territoire outre-mer, mais également au titre des deux journées dites " d'arrivée " et de " départ ", correspondant respectivement au jour de l'arrivée de l'agent sur le lieu ultramarin d'accomplissement de sa mission et à celui du départ de ce lieu. Pour être bénéficiaire de l'indemnité d'hébergement au titre d'une journée considérée, l'agent doit se trouver en mission pendant la totalité de la période comprise entre 0 heure et 5 heures de ladite journée, qu'il s'agisse d'une journée " complète passée outre-mer ", d'une journée " d'arrivée " ou d'une journée " de départ ". En outre, pour être bénéficiaire de l'indemnité de repas, au titre d'une journée considérée, l'agent doit se trouver en mission pendant la totalité de la période comprise entre 11 heures et 14 heures pour le repas du midi et pendant la totalité de la période comprise entre 18 heures et 21 heures pour le repas du soir, qu'il s'agisse également d'une journée complète passée outre-mer, d'une journée d'arrivée ou de départ. Le montant maximal de l'indemnité perçue par l'agent est fixé à 90 euros pour la Martinique, la Guadeloupe, la Guyane, la Réunion, Mayotte et Saint-Pierre-et-Miquelon, et à 120 euros pour la Nouvelle-Calédonie, les îles Wallis et Futuna et la Polynésie française. Toutefois, ce montant doit être réduit de 65 % lorsque, au titre d'une journée considérée, l'agent a été logé gratuitement et de 17,5 % par repas lorsque, pour la même journée, celui-ci a été nourri gratuitement, soit au titre de l'un des deux repas du midi ou du soir soit au titre des deux.

4. Il résulte de ce qui a été dit au point 3 que le droit de l'agent du ministère de la justice en mission outre-mer à percevoir l'indemnité d'hébergement au titre de la journée de départ doit s'apprécier au regard de sa situation au cours de la période comprise entre 0 heure et 5 heures de cette journée de départ du lieu ultramarin et non, contrairement à ce que soutient la garde des sceaux, ministre de la justice, au regard du fait que l'agent ne supporte pas de frais d'hébergement à l'occasion du voyage aérien de nuit de retour vers la métropole. Ainsi, la circonstance que l'agent prenne un vol lors de la journée de départ d'outre-mer, notamment postérieurement à 5 heures du matin, pour n'arriver en métropole, quelle qu'en soit l'heure, que le lendemain de cette journée de départ, et qu'il doive ainsi être regardé comme ayant été logé gratuitement au cours du voyage aérien du fait de la prise en charge des frais de transport par l'Etat, si elle est susceptible, en fonction de l'heure de départ du vol, d'avoir une incidence sur le droit de l'agent à percevoir une indemnité de repas du midi et de repas du soir au titre de la journée de départ, ne saurait en revanche faire obstacle à ce qu'il perçoive une indemnité d'hébergement au titre de la journée de départ, à laquelle il a droit dès lors qu'il n'a pas été logé gratuitement entre 0 heures et 5 heures de ladite journée.

5. Il résulte d'ailleurs de ce qui a été dit au point 4 que, en mentionnant que " la circonstance que l'intéressé a été nourri gratuitement et qu'il puisse en outre être regardé comme ayant été logé gratuitement lors des voyages qu'il a effectués en partie de nuit pour revenir en métropole à l'issue de ces vingt-neuf missions outre-mer était seulement de nature à entraîner la réduction du montant des indemnités de missions journalières qui lui étaient dues au titre des journées de départ correspondantes ", les premiers juges n'ont pas entendu signifier que le montant de l'indemnité journalière due au titre de la journée de départ devait être réduit de sa fraction correspondant à l'indemnité d'hébergement du fait que l'agent serait logé gratuitement dans l'avion, mais ont simplement entendu signifier que le montant de l'indemnité journalière au titre de la journée de départ était susceptible d'être réduit de sa fraction correspondant à l'indemnité de repas, que ce soit au titre de l'un des deux repas du midi ou du soir ou au titre des deux.

6. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la garde des sceaux, ministre de la justice, n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a annulé la décision de rejet implicite du directeur interrégional des services pénitentiaires de Paris de la réclamation préalable de M. C..., ainsi que la décision du 7 août 2015 de rejet de son recours gracieux.

Sur les frais liés au litige :

7. Il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. C... et non compris dans les dépens dans la présente instance.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la garde des sceaux, ministre de la justice, est rejetée.

Article 2 : l'Etat versera à M. C... la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la garde des sceaux, ministre de la justice et à M. B... C....

Délibéré après l'audience du 12 octobre 2018 à laquelle siégeaient :

- Mme Heers, président de chambre,

- Mme Julliard, présidente-assesseure,

- M. Mantz, premier conseiller,

Lu en audience publique le 13 novembre 2018.

Le rapporteur,

P. MANTZLe président,

M. HEERSLe greffier,

F. DUBUY

La République mande et ordonne à la garde des sceaux, ministre de la justice en ce qui la concerne ou à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent jugement.

2

N° 17PA03686


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 17PA03686
Date de la décision : 13/11/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-08-03-004 Fonctionnaires et agents publics. Rémunération. Indemnités et avantages divers. Frais de déplacement.


Composition du Tribunal
Président : Mme HEERS
Rapporteur ?: M. Pascal MANTZ
Rapporteur public ?: Mme JAYER
Avocat(s) : JANURA

Origine de la décision
Date de l'import : 20/11/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-11-13;17pa03686 ?
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