La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/11/2018 | FRANCE | N°18PA01464

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 08 novembre 2018, 18PA01464


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...A...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 12 septembre 2017 par lequel le préfet de police a refusé de renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours en fixant son pays de destination.

Par un jugement n° 1718548 du 5 avril 2018, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 1er mai 2018, MmeA..., représentée p

ar Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1718548 du 5 avril 2018 du Tribun...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...A...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 12 septembre 2017 par lequel le préfet de police a refusé de renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours en fixant son pays de destination.

Par un jugement n° 1718548 du 5 avril 2018, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 1er mai 2018, MmeA..., représentée par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1718548 du 5 avril 2018 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 12 septembre 2017 du préfet de police ;

3°) d'enjoindre au préfet de police, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) d'enjoindre au préfet de police, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, de procéder à un nouvel examen de sa demande dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour valant autorisation de travail ;

5°) de mettre à la charge de l'État le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- la décision de refus de titre de séjour n'est pas suffisamment motivée ;

- le préfet de police n'a pas procédé à un examen suffisant de sa situation personnelle ;

- le préfet de police a méconnu les dispositions de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet de police a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle ;

- il a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas suffisamment motivée ;

- elle est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- elle a été prise en méconnaissance des stipulations du 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- elle a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision fixant le pays de renvoi est illégale en raison de l'illégalité des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français.

Par un mémoire enregistré le 19 septembre 2018, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme A...ne sont pas fondés.

Mme A...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris du 13 septembre 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et 1'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Poupineau a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. MmeA..., ressortissante marocaine, entrée en France selon ses déclarations le 3 mars 2016, a sollicité le renouvellement de son titre de séjour portant la mention " conjoint de Français " sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 12 septembre 2017 le préfet de police a rejeté sa demande, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et fixé le pays à destination duquel l'intéressée pourrait être reconduite à l'expiration de ce délai. Mme A...fait appel du jugement en date du 5 avril 2018, par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la décision de refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, aux termes de l'arrêté contesté, le préfet de police a visé les dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que celles de l'article L. 313-12 du même code, dont Mme A...s'était prévalue à l'appui de sa demande. Il a également indiqué les raisons pour lesquelles il a considéré que Mme A...ne remplissait pas les conditions pour obtenir le titre de séjour qu'elle sollicitait en relevant que l'intéressée n'était pas en mesure de justifier d'une communauté de vie avec son époux dont elle était divorcée depuis le 20 mars 2017 et qu'elle n'établissait pas la réalité des violences conjugales dont elle prétendait avoir été victime. Il a enfin exposé des éléments sur sa situation personnelle en rappelant qu'elle était sans charge de famille en France et qu'elle disposait d'attaches familiales dans son pays d'origine. Ainsi, le préfet de police a suffisamment énoncé les considérations de droit et de fait fondant sa décision de refus de titre de séjour. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de cette décision doit être écarté.

3. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier, et, en particulier, de la motivation de la décision de refus de titre de séjour contestée, que le préfet de police a procédé à un examen suffisant de la situation personnelle de MmeA....

4. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français (...) ". Aux termes de l'article L. 313-12 de ce code : " (...) Le renouvellement de la carte de séjour délivrée au titre du 4° de l'article L. 313-11 est subordonné au fait que la communauté de vie n'ait pas cessé, sauf si elle résulte du décès du conjoint français. Toutefois, lorsque l'étranger a subi des violences familiales ou conjugales et que la communauté de vie a été rompue, l'autorité administrative ne peut procéder au retrait du titre de séjour de l'étranger et en accorde le renouvellement (...) ".

5. Mme A...a épousé un ressortissant français le 22 septembre 2015 au Maroc. Il est, toutefois, constant, ainsi que l'a relevé le préfet de police dans son arrêté, qu'à la date de la décision en litige, la communauté de vie entre les époux avait cessé. A cet égard, la requérante fait valoir qu'elle a été victime de violences conjugales au cours du mois de janvier 2017, qui l'ont conduite à porter plainte contre son époux, lequel l'aurait contrainte à quitter leur domicile. Cependant il ne ressort pas des pièces du dossier que la rupture de la communauté de vie de Mme A... avec son conjoint, qui a sollicité le divorce à la fin de l'année 2016, trouve son origine dans les violences alléguées. Par suite, l'arrêté du préfet de police n'a pas été adopté en méconnaissance des dispositions précitées des articles L. 313-11, 4° et L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

6. En dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

7. Il ressort des pièces du dossier que Mme A...est entrée en France le 3 mars 2016 pour y rejoindre son époux de nationalité française. A la date de la décision contestée de refus de titre de séjour, elle était séparée de celui-ci et n'avait pas de charge de famille. En revanche, elle disposait d'attaches familiales dans son pays où résidaient sa mère ainsi que ses soeurs et son frère. Elle-même a vécu au Maroc jusqu'à l'âge de 51 ans. Par ailleurs, si elle fait valoir qu'elle a effectué une formation d'" assistante maternelle-garde d'enfants " et qu'après avoir obtenu une certification le 27 juin 2017, elle a été recrutée par une agence de garde d'enfants, tout en cumulant deux emplois d'aide ménagère, ces éléments ne témoignent pas d'une intégration particulière de l'intéressée à la société française. Ainsi, dans ces circonstances, eu égard en particulier à l'absence d'attaches personnelles et familiales de Mme A...et à la durée de son séjour en France, le préfet de police, en opposant à Mme A...une décision de refus de titre de séjour, n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cette décision a été prise et n'a ainsi pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, il n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressée.

Sur la mesure d'éloignement :

8. Il résulte des dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que la motivation de l'obligation de quitter le territoire français se confond avec celle du refus de titre de séjour dont elle découle nécessairement et n'implique pas, dès lors que ce refus est lui-même motivé et que les dispositions législatives qui permettent d'assortir le refus de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ont, comme en l'espèce, été rappelées, de mention spécifique pour respecter les exigences de motivation des actes administratifs. Ainsi qu'il a été dit au point 2, la décision par laquelle le préfet de police a rejeté la demande de titre de séjour de Mme A...comporte l'énoncé des considérations de fait et de droit qui en constituent le fondement et est, dès lors, suffisamment motivée. Par suite, le moyen tiré de l'absence de motivation de l'obligation de quitter le territoire français qui a été opposée à Mme A...ne peut qu'être écarté.

9. En deuxième lieu, Mme A...n'établissant pas que la décision portant refus de titre de séjour en litige serait illégale, l'exception d'illégalité de cette décision soulevée à l'appui de ses conclusions à fin d'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français, doit être écartée.

10. En troisième lieu, les moyens soulevés par Mme A...tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation commise par le préfet de police, doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux exposés ci-dessus au point 7.

11. En quatrième et dernier lieu, la requérante, qui est de nationalité marocaine, ne peut utilement se prévaloir de la méconnaissance des stipulations de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié dans le champ desquelles elle n'entre pas.

Sur la décision fixant le pays de renvoi :

12. Mme A...n'établissant pas que les décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français en litige seraient illégales, l'exception d'illégalité de ces décisions soulevée à l'appui de ses conclusions à fin d'annulation de la décision fixant le pays de renvoi, doit être écartée.

13. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 18 octobre 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Formery, président de chambre

- Mme Poupineau, président assesseur,

- M. Doré, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 8 novembre 2018.

Le rapporteur,

V. POUPINEAULe président,

S.-L. FORMERY

Le greffier,

C. RENÉ-MINE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

7

N° 18PA01464


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 18PA01464
Date de la décision : 08/11/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. FORMERY
Rapporteur ?: Mme Valérie POUPINEAU
Rapporteur public ?: M. LEMAIRE
Avocat(s) : L et P ASSOCIATION D'AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 13/11/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-11-08;18pa01464 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award