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18/10/2018 | FRANCE | N°18PA00174

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 18 octobre 2018, 18PA00174


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 9 février 2017 du préfet de police rejetant sa demande de titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays où il pourrait être reconduit.

Par jugement n° 1708599 du 27 septembre 2017, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 15 janvier 2018, M. A..., représenté par Me

Saligari, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1708599 du 27 septembre 2017 du trib...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 9 février 2017 du préfet de police rejetant sa demande de titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays où il pourrait être reconduit.

Par jugement n° 1708599 du 27 septembre 2017, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 15 janvier 2018, M. A..., représenté par Me Saligari, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1708599 du 27 septembre 2017 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté du 9 février 2017 du préfet de police ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de 15 jours à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et de le munir, dans l'attente, d'une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler, dans le même délai et sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à son conseil au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la décision de refus de titre de séjour est insuffisamment motivée et le préfet n'a pas procédé à un examen complet de sa demande ;

- elle est entachée d'un vice de procédure en l'absence de saisine de la commission du titre de séjour ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- la décision d'obligation de quitter le territoire français et celle fixant le pays de renvoi sont illégales pour les mêmes motifs ;

- la décision d'obligation de quitter le territoire français et celle fixant le pays de renvoi méconnaissent les stipulations des articles 2 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense enregistré le 26 juillet 2018, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A...ne sont pas fondés.

M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 4 décembre 2017 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Paris.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Legeai,

- et les observations de MeB..., substituant Me Saligari, avocat de M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M.A..., ressortissant de la République du Congo né en janvier 1957, est entré en France en 1982 selon ses déclarations. Le 10 octobre 2016, il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par arrêté du 9 février 2017, le préfet de police a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays où il pourrait être reconduit. M. A... fait régulièrement appel du jugement du 27 septembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 9 février 2017.

Sur la légalité du refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, l'arrêté attaqué vise l'article L. 313-14 code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au regard duquel a été examinée la demande de titre de séjour et précise les faits qui en constituent le fondement, notamment la circonstance que l'intéressé n'a pu démontrer sa résidence habituelle en France depuis plus de dix ans et ne justifie pas de l'intensité de ses attaches privées et familiales en France. Si l'arrêté attaqué ne mentionne pas la situation professionnelle de M.A..., il ne ressort d'aucune pièce du dossier que l'intéressé aurait fait état d'une telle activité. Il ne ressort pas plus des pièces du dossier que le préfet de police n'aurait pas procédé à un examen complet et particulier de la situation du requérant. Par suite, les moyens tirés de l'insuffisance de motivation et du défaut d'examen manquent en fait et doivent être écartés.

3. En deuxième lieu, le deuxième alinéa de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que " l'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans ". M. A...soutient qu'il résidait en France depuis plus de dix ans à la date de l'arrêté attaqué. Toutefois, les justificatifs présentés au titre des années 2007 à 2010 sont insuffisamment nombreux et probants pour établir de façon certaine sa résidence habituelle en France sur cette période. En outre, l'intéressé a été condamné à une peine d'interdiction du territoire français pour une durée de dix ans le 21 octobre 1999 et les périodes durant lesquelles un étranger se maintient en France en méconnaissance de peines d'interdiction du territoire, fussent-elles non exécutées, prononcées contre lui par le juge pénal ne sauraient être prises en compte au titre de la condition de résidence habituelle énoncée par les dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision attaquée serait entachée d'un vice de procédure pour défaut de saisine préalable de la commission du titre de séjour doit être écarté.

4. En troisième lieu, le premier alinéa de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 ".

5. M. A...fait valoir qu'il justifie d'une résidence habituelle sur le territoire français depuis plus de dix ans, qu'il est le père d'un enfant français né en février 1992 à Sens, qu'il a été affecté par le décès en 2010 de la mère de son fils, que, depuis cette date, il est suivi par un psychologue et bénéficie d'une prise en charge médico-légale régulière et qu'il est inséré dans la société française. Toutefois, d'une part, comme dit précédemment, l'intéressé n'établit pas la continuité de sa résidence en France depuis plus de dix ans. En tout état de cause, une résidence de plus de dix ans ne constitue pas, en elle-même, des considérations humanitaires ou un motif exceptionnel d'admission au séjour. D'autre part, l'intéressé, qui ne démontre pas avoir vécu en 2010 avec son ex-compagne, est en France célibataire, sans charge de famille, et ne justifie pas d'une réelle insertion professionnelle, nonobstant la publication d'un ouvrage ou son implication associative. Dès lors, le préfet de police a pu sans erreur manifeste d'appréciation estimer que les éléments dont se prévaut l'intéressé ne constituent pas des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels au sens des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

6. En quatrième lieu, il ressort des pièces du dossier que M. A...a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le seul fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-11 (7°) du même code est inopérant.

7. En cinquième lieu, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Pour l'application de ces stipulations, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.

8. M. A...fait valoir qu'il réside en France depuis plus de trente ans, qu'il est le père d'un enfant français et inséré socialement et professionnellement en France. Toutefois, ainsi qu'il a précédemment été développé au point 5, le requérant n'établit pas la durée de son séjour en France, ni son insertion dans la société française, ni même ses relations avec son fils âgé de vingt-cinq ans à la date de la décision attaquée, alors qu'il n'est pas dépourvu d'attaches dans son pays d'origine, où réside notamment sa soeur. Dès lors, la décision portant refus de titre de séjour ne peut être regardée comme portant au droit de M. A...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

9. Enfin, si M.A..., qui n'a pas demandé un titre de séjour en qualité d'étranger malade, soutient qu'il fait l'objet d'un suivi médical en raison d'une pathologie psychologique grave, mais n'établit ni que la rupture de sa prise en charge en France aurait des conséquences particulièrement graves, ni être dans l'impossibilité de bénéficier de cette même prise en charge dans son pays d'origine. Dès lors, et pour les mêmes motifs que ceux précédemment développés aux points 5 et 8, le moyen tiré de ce que le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressé doit être écarté.

Sur les décisions portant obligation de quitter le territoire et fixant le pays de renvoi :

10. D'une part, si M. A...indique reprendre, à l'encontre des décisions portant obligation de quitter le territoire et fixation du pays de renvoi, l'ensemble des moyens invoqués à l'encontre du refus du titre de séjour, ces moyens, qui ne sont assortis d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé, ne peuvent qu'être rejetés.

11. D'autre part, l'article 2 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule : " Le droit de toute personne à la vie est protégé par la loi (...) " et l'article 3 de la même convention prévoit que : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". Si M. A...soutient qu'en l'obligeant à quitter la France et à retourner dans son pays d'origine, le préfet de police le soumet à un traitement inhumain et dégradant en raison de son état de vulnérabilité psychologique, il ne justifie aucunement de la réalité des risques invoqués. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations des articles 2 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police du 9 février 2017. Sa requête d'appel, y compris ses conclusions à fins d'injonction et celles tendant à ce que l'Etat, qui n'est pas partie perdante, supporte les frais de procédure sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, ne peut qu'être rejetée.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 11 octobre 2018, à laquelle siégeaient :

- Mme Pellissier, présidente de chambre,

- M. Legeai, premier conseiller,

- Mme Nguyên Duy, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 18 octobre 2018.

Le rapporteur,

A. LEGEAI La présidente,

S. PELLISSIER Le greffier,

A. LOUNISLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

6

N° 18PA00174


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18PA00174
Date de la décision : 18/10/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme PELLISSIER
Rapporteur ?: M. Alain LEGEAI
Rapporteur public ?: M. PLATILLERO
Avocat(s) : SALIGARI

Origine de la décision
Date de l'import : 30/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-10-18;18pa00174 ?
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