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12/10/2018 | FRANCE | N°17PA02527

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 12 octobre 2018, 17PA02527


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La régie autonome des transports parisiens (RATP) a demandé au Tribunal administratif de Paris, d'une part, d'annuler la décision du 7 novembre 2014 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a annulé la décision de l'inspecteur du travail du 1er juin 2014 et a déclaré M. C... A...apte à son poste de machiniste receveur en horaires du matin avec affectation principale à la conduite de tramways et affectation possible à la conduite de bus pendant

1/10ème de son temps de travail et, d'autre part, d'annuler la décision...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La régie autonome des transports parisiens (RATP) a demandé au Tribunal administratif de Paris, d'une part, d'annuler la décision du 7 novembre 2014 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a annulé la décision de l'inspecteur du travail du 1er juin 2014 et a déclaré M. C... A...apte à son poste de machiniste receveur en horaires du matin avec affectation principale à la conduite de tramways et affectation possible à la conduite de bus pendant 1/10ème de son temps de travail et, d'autre part, d'annuler la décision du 7 juin 2016, par laquelle le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a confirmé la décision de l'inspecteur du travail du 4 février 2016 déclarant M. A... apte à son poste de machiniste-receveur en horaires du matin avec affectation principale à la conduite de tramways et affectation possible à la conduite de bus pendant 1/10ème de son temps de travail, ensemble les deux décisions.

Par un jugement n° 1500327 du 24 mai 2017, le Tribunal administratif de Paris a annulé la décision du ministre du travail du 7 novembre 2014, en tant qu'elle reconnaît M. A... apte à son poste de machiniste-receveur avec une affectation principale à la conduite de tramways, et rejeté le surplus des conclusions de la première requête et par un jugement n° 1612011 du 24 mai 2017, le tribunal a annulé la décision du ministre du travail du 7 juin 2016, ainsi que la décision de l'inspecteur du travail du 4 février 2016, en tant qu'elles reconnaissent M. A... apte à son poste de machiniste-receveur avec une affectation principale à la conduite de tramways, et rejeté le surplus des conclusions de la seconde requête.

Procédure devant la Cour :

I. Par une requête enregistrée sous le n° 17PA02527, le 21 juillet 2017 et un mémoire en réplique enregistré le 9 février 2018, M. A..., représenté par MeD..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1612011 du 24 mai 2017 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de confirmer la décision du 7 novembre 2014 du ministre chargé du travail et de le reconnaître apte à son poste de machiniste-receveur en horaires du matin avec affectation principale à la conduite des tramways et affectation possible à la conduite de bus au maximum pendant 1/10ème de son temps de travail ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser, dans le dernier état de ses écritures, la somme de 3 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les entiers dépens de l'instance.

Il soutient que :

- la fonction de machiniste-receveur comprenant autant la conduite des bus que des tramways dès lors que le salarié est habilité à la conduite des tramways et dès lors que son habilitation à la conduite des tramways ne lui a jamais été retirée alors que la RATP avait toute latitude pour ce faire, il revenait à l'inspecteur du travail de prendre en considération l'intégralité de ses missions pour apprécier son aptitude ;

- c'est donc à bon droit que le ministre a prévu pour lui une affectation principale à la conduite des tramways ;

- la RATP ne saurait se prévaloir d'une modification de ses fonctions pour solliciter l'annulation de l'avis médical sans avoir recueilli son accord ; ainsi le retrait de son habilitation à la conduite des bus aurait dû être formalisé par un avenant à son contrat de travail.

Par un mémoire en défense enregistré le 10 janvier 2018 et des pièces complémentaires enregistrées le 14 septembre 2018, la RATP, représentée par MeB..., conclut à la confirmation du jugement attaqué, au rejet de la requête et à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

La RATP a produit un mémoire d'observations complémentaires enregistré le 17 septembre 2018.

La requête a été communiquée à la ministre du travail qui n'a pas produit de mémoire en défense.

II. Par une requête enregistrée, sous le n° 17PA02528, le 21 juillet 2017 et un mémoire en réplique enregistré le 9 février 2018, M. A..., représenté par MeD..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1500327 du 24 mai 2017 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de confirmer la décision du 7 novembre 2014 du ministre chargé du travail et de le reconnaître apte à son poste de machiniste-receveur en horaires du matin avec affectation principale à la conduite des tramways et affectation possible à la conduite de bus au maximum pendant 1/10ème de son temps de travail ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser, dans le dernier état de ses écritures, la somme de 3 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les entiers dépens de l'instance.

Il soutient que :

- la fonction de machiniste-receveur comprenant autant la conduite des bus que des tramways dès lors que le salarié est habilité à la conduite des tramways et dès lors que son habilitation à la conduite des tramways ne lui a jamais été retirée alors que la RATP avait toute latitude pour ce faire, il revenait à l'inspecteur du travail de prendre en considération l'intégralité de ses missions pour apprécier son aptitude ;

- c'est donc à bon droit que le ministre a prévu pour lui une affectation principale à la conduite des tramways ;

- la RATP ne saurait se prévaloir d'une modification de ses fonctions pour solliciter l'annulation de l'avis médical sans avoir recueilli son accord ; ainsi le retrait de son habilitation à la conduite des bus aurait dû être formalisé par un avenant à son contrat de travail.

Par un mémoire en défense enregistré le 10 janvier 2018, la RATP, représentée par Me B..., conclut à la confirmation du jugement attaqué, au rejet de la requête et à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

La requête a été communiquée au ministre du travail qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Julliard,

- les conclusions de Mme Jayer, rapporteur public,

- et les observations de Me Job, avocat de la RATP.

Considérant ce qui suit :

1. Les requêtes susvisées n° 17PA02527 et n° 17PA02528, présentées par M. A... présentent à juger des questions semblables et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

2. M. A... a été embauché au poste de machiniste receveur à la RATP le 23 janvier 2006 et a été habilité le 13 février 2009 à conduire des tramways. Le 22 avril 2013, dans le cadre d'une visite médicale à la demande de l'agent, le médecin du travail l'a déclaré " apte avec aménagement : faire uniquement le matin, peut conduire un bus pas plus d'une fois tous les 45 jours ". Après un deuxième avis du médecin du travail du 3 mai 2013, l'inspecteur du travail a indiqué, dans une première décision du 4 octobre 2013, que l'agent était apte sans restriction à la conduite de tramways et apte à la conduite de bus avec un aménagement de son poste. Saisi sur recours hiérarchique, le ministre du travail a annulé la décision de l'inspecteur du travail et a considéré dans une décision du 3 avril 2014 que M. A... était apte à son poste de machiniste receveur en horaires du matin avec affectation principale à la conduite de tramways et affectation possible à la conduite de bus pendant 1/10ème de son temps de travail. Le 31 janvier 2014, le médecin du travail s'est à nouveau prononcé en faveur d'une aptitude avec aménagement de poste les matins, avec conduite de tramways possible sans limitation et conduite de bus pas plus d'une fois tous les 45 jours. L'inspecteur du travail a rejeté le recours formé par la RATP par une décision du 1er juin 2014 que, sur recours hiérarchique, le ministre du travail a annulée par une décision du 7 novembre 2014, au motif de l'absence de saisine préalable pour avis du médecin du travail, en reconnaissant M. A... apte à son poste de machiniste receveur en horaires de matin avec affectation principale à la conduite de tramways et affectation possible à la conduite de bus au maximum pendant 1/10ème de son temps de travail. Par une première requête enregistrée le 8 janvier 2015, la RATP a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du ministre du travail du 7 novembre 2014. Par un nouvel avis du 12 octobre 2015, le médecin du travail a déclaré M. A... apte selon les préconisations du ministre du travail dans sa décision du 7 novembre 2014. Statuant sur le recours formé par la RATP, après avoir recueilli l'avis du médecin du travail émis le 21 janvier 2016, l'inspecteur du travail, a estimé dans une décision du 4 février 2016, que M. A... était apte à son poste de machiniste receveur en horaires du matin avec affectation principale à la conduite de tramway et affectation possible à la conduite des bus pendant 1/10ème de son temps de travail, décision confirmée le 7 juin 2016 par le ministre du travail sur recours hiérarchique de la RATP. Par une seconde requête enregistrée le 1er août 2016, la RATP a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du ministre du travail du 7 juin 2016, ainsi que la décision de l'inspecteur du travail du 4 février 2016. M. A... relève appel des deux jugements rejetant ses demandes.

Sur le bien-fondé des jugements attaqués :

3. Aux termes des dispositions de l'article L. 1226-2 du code du travail dans sa version applicable à la date des décisions contestées : " Lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités. Cette proposition prend en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise. L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail. ".

4. Si M. A... soutient, en premier lieu, que dès lors que son habilitation à la conduite des tramways ne lui a jamais été retirée, alors que la RATP avait toute latitude pour ce faire, il revenait à l'inspecteur du travail ainsi qu'au ministre de prendre en considération l'intégralité de ses missions pour apprécier son aptitude, et que c'est donc à bon droit que leurs décisions prévoient pour lui une affectation principale à la conduite des tramways. Toutefois, l'aptitude d'un salarié à reprendre son activité professionnelle est appréciée en prenant en compte les fonctions que l'employé occupait effectivement avant la période de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident non professionnel, quel que soit l'emploi prévu par le contrat de travail de l'intéressé. Par suite, saisi d'un recours de l'employeur de M. A... sur l'avis médical, l'administration devait se prononcer sur l'aptitude du salarié à reprendre les dernières fonctions effectivement exercées par lui avant son congé maladie, à savoir la conduite de bus et le service de ligne. Ainsi, en tant qu'elles se prononcent sur l'aptitude de M. A... à conduire des tramways alors qu'il est constant qu'il avait cessé de se voir confier cette tâche au plus tard en avril 2013, les décisions de l'inspecteur du travail du 4 février 2016 et du ministre du travail du 7 novembre 2014 et du 7 juin 2016 sont entachées d'illégalité.

5. M. A... fait valoir, en deuxième lieu, que la RATP ne saurait se prévaloir d'une modification de ses fonctions qui aurait dû recueillir son accord. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que cette modification était dictée par le respect des préconisations des avis médicaux successifs d'inaptitude partielle du salarié qui s'imposaient à l'employeur en absence de contestation par M. A... de leur contenu, ainsi que du règlement de sécurité et d'exploitation de la RATP qui réserve la conduite des tramways aux agents aptes sans restriction, dont le requérant n'invoque pas l'illégalité.

6. Enfin, le moyen tiré de ce que le retrait de l'habilitation à la conduite de tramways aurait dû être formalisé par un avenant au contrat de travail de M. A... est inopérant à l'encontre des décisions litigieuses qui, ainsi qu'il vient d'être dit, ne trouvent pas leur fondement dans l'existence d'un tel retrait. Il résulte, en tout état de cause, de l'article 8 du contrat de travail signé le 20 janvier 2006 par M. A... qu'il s'y engage au respect des obligations découlant, notamment, des règles, instructions et consignes intérieures de la RATP.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le Tribunal administratif de Paris a annulé la décision du 4 février 2016 de l'inspecteur du travail ainsi que les décisions des 7 novembre 2014 et 7 juin 2016 du ministre du travail, en tant qu'elles le reconnaissent apte à son poste de machiniste receveur avec une affectation principale à la conduite de tramways.

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à verser à M. A... et à la RATP la somme qu'ils demandent sur le fondement de ces dispositions.

Sur les dépens :

9. Les conclusions de M. A... tendant au remboursement de ses dépens sont rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : Les requêtes de M. A... sont rejetées.

Article 2 : Les conclusions des parties au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que celles de M. A... tendant au remboursement des dépens, sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié M. C... A..., à la régie autonome des transports parisiens et à la ministre chargée du travail.

Délibéré après l'audience du 21 septembre 2018, à laquelle siégeaient :

- Mme Heers, présidente de chambre,

- Mme Julliard, présidente-assesseure,

- M. Mantz, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 12 octobre 2018.

La rapporteure,

M. JULLIARDLa présidente,

M. HEERS La greffière,

C. DABERT La République mande et ordonne à la ministre du travail en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

Nos 17PA02527, 17PA02528


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 17PA02527
Date de la décision : 12/10/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07-01-04-035-02 Travail et emploi. Licenciements. Autorisation administrative - Salariés protégés. Conditions de fond de l'autorisation ou du refus d'autorisation. Motifs autres que la faute ou la situation économique. Inaptitude ; maladie.


Composition du Tribunal
Président : Mme HEERS
Rapporteur ?: Mme Marianne JULLIARD
Rapporteur public ?: Mme JAYER
Avocat(s) : HIRSCH

Origine de la décision
Date de l'import : 23/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-10-12;17pa02527 ?
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