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27/09/2018 | FRANCE | N°17PA02748

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 27 septembre 2018, 17PA02748


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...A...a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 13 juillet 2016 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays où elle pourrait être reconduite.

Par un jugement n° 1618334/1-2 du 25 avril 2017, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 4 août 2017, MmeA..., représentée par Me C...,

demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1618334/1-2 du 25 avril 2017 du tribunal administra...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...A...a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 13 juillet 2016 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays où elle pourrait être reconduite.

Par un jugement n° 1618334/1-2 du 25 avril 2017, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 4 août 2017, MmeA..., représentée par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1618334/1-2 du 25 avril 2017 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté du 13 juillet 2016 du préfet de police ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter de la date de notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, à défaut, de réexaminer sa demande et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour pendant la durée du réexamen, dans le même délai et sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros à verser à son conseil en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- le jugement est insuffisamment motivé ;

- la décision portant refus de titre de séjour est entachée d'une insuffisance de motivation ;

- elle a été prise au terme d'une procédure irrégulière dès lors que le préfet de police n'a pas saisi la commission du titre de séjour ;

- elle méconnait les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de destination sont illégales du fait de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour sur laquelle elles se fondent.

Par un mémoire en défense enregistré le 4 juillet 2018, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme A...ne sont pas fondés.

Mme A...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Paris du 16 juin 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Legeai a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que MmeA..., ressortissante ivoirienne née en août 1970, est entrée irrégulièrement en France en décembre 2004 selon ses déclarations, et soutient y résider habituellement depuis lors ; qu'elle a sollicité la régularisation exceptionnelle de sa situation administrative ; que, par un arrêté du 13 juillet 2016, le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays où elle pourrait être reconduite ; que Mme A...relève régulièrement appel du jugement du 25 avril 2017 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 juillet 2016 ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. (...) / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans (...) " ;

3. Considérant que Mme A...soutient qu'elle est entrée en France au mois de décembre 2004 et qu'elle y réside habituellement depuis lors, de sorte qu'à la date de la décision contestée elle résidait en France de façon habituelle depuis plus de dix ans ; que le préfet de police se borne en défense à contester la présence en France de l'intéressée au titre des années 2006, 2008 et 2009 ; que, toutefois, MmeA..., qui a en vain sollicité la régularisation de sa situation en juin 2007, août 2009 et juillet 2011, a produit pour l'année 2006 des ordonnances médicales des 25 janvier, 28 avril et 27 novembre assorties du cachet du pharmacien démontrant la délivrance de médicaments, une ordonnance pour une analyse sanguine délivrée le 3 mai à l'hôpital Saint-Joseph à Paris 14ème, un certificat de consultation à l'hôpital St-Joseph le 19 juillet, le renouvellement de l'aide médicale d'Etat en septembre et la délivrance de la carte solidarité transports en décembre, enfin un bulletin de paye concernant les journées des 22 et 23 décembre et un certificat démontrant qu'elle a suivi assidument un cours d'alphabétisation intensif de huit heures hebdomadaires entre octobre 2006 et février 2007 ; que, pour l'année 2008, Mme A...a produit les résultats d'une analyse biomédicale effectuée le 5 février, la preuve de sa visite au groupe hospitalier Cochin les 24 mai et 3 juin, ainsi qu'à l'hôpital Pierre Rouquès le 18 août, une ordonnance médicale du 6 novembre, le renouvellement de l'aide médicale d'Etat accordé le 19 août, enfin un relevé de son livret A démontrant des opérations au mois de mars ; que pour l'année 2009, Mme A...a produit des ordonnances médicales des 21 janvier, 6 mai et 14 août, avec cachet du pharmacien, la preuve du dépôt, le 19 août, d'une demande de bénéficier de la CMU, le renouvellement de l'aide médicale d'Etat accordé le 21 août, une attestation de dépôt de dossier de demande de régularisation à la préfecture de police le 26 août, une promesse d'embauche d'octobre et un document bancaire de décembre ; qu'ainsi, Mme A...établit sa présence habituelle en France pour les trois années contestées par le préfet de police ; qu'elle a produit pour l'ensemble des dix années précédant le 13 juillet 2016 des documents suffisamment nombreux et probants pour démontrer sa résidence habituelle en France durant l'ensemble de la période ; que, dans ces conditions, elle est fondée à soutenir qu'en ne saisissant pas la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande de régularisation de sa situation fondée sur les dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet de police a entaché sa décision d'un vice de procédure et l'a privée d'une garantie ;

4. Considérant que la décision de refus de titre de séjour ne peut dès lors, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, qu'être annulée, ainsi que, par voie de conséquence, les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;

5. Considérant que le présent arrêt n'implique pas que le préfet de police délivre un titre de séjour à Mme A...mais seulement qu'il réexamine sa situation après avoir pris l'avis de la commission du titre de séjour ; qu'il y a lieu de lui ordonner de procéder à ce réexamen dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt et de délivrer à l'intéressée une autorisation provisoire de séjour pendant toute la durée du réexamen de sa situation, sans qu'il soit besoin d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; qu'il y a lieu d'annuler ce jugement et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros à verser à Me C... en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 au titre des frais que l'intéressée aurait exposés si elle n'avait été bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1618334/1-2 du 25 avril 2017 du tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : L'arrêté du 13 juillet 2016 par lequel le préfet de police a refusé de délivrer à Mme A...un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays où elle pourrait être reconduite, est annulé.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de police de réexaminer la situation de MmeA..., après avoir pris l'avis de la commission du titre de séjour, dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt, et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour pendant toute la durée du réexamen de sa situation.

Article 4 : Une somme de 1 000 euros est mise à la charge de l'Etat à verser au conseil de Mme A... en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Article 5 : Le surplus des conclusions de Mme A...est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... A...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 13 septembre 2018, à laquelle siégeaient :

- Mme Pellissier, présidente de chambre,

- M. Diémert, président-assesseur,

- M. Legeai, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 27 septembre 2018.

Le rapporteur,

A. LEGEAILa présidente,

S. PELLISSIERLe greffier,

M. B...La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17PA02748


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 17PA02748
Date de la décision : 27/09/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme PELLISSIER
Rapporteur ?: M. Alain LEGEAI
Rapporteur public ?: M. PLATILLERO
Avocat(s) : OSTIER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-09-27;17pa02748 ?
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