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26/09/2018 | FRANCE | N°17PA01356

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 26 septembre 2018, 17PA01356


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...C...a demandé au Tribunal administratif de Paris :

1°) de prononcer un dégrèvement d'un montant de 117 208 euros, correspondant au supplément d'impôt sur le revenu mis à sa charge au titre de l'année 2009 ;

2°) de prononcer la restitution du différentiel entre le montant qu'il a acquitté et le montant dû au titre de son impôt sur le revenu de l'année 2009, soit la somme de 1 449 euros ;

3°) d'ordonner le versement des intérêts moratoires en application de l'article L. 2

08 du livre des procédures fiscales.

Par un jugement n°1520335/2-3 du 21 février 2017, le Tribun...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...C...a demandé au Tribunal administratif de Paris :

1°) de prononcer un dégrèvement d'un montant de 117 208 euros, correspondant au supplément d'impôt sur le revenu mis à sa charge au titre de l'année 2009 ;

2°) de prononcer la restitution du différentiel entre le montant qu'il a acquitté et le montant dû au titre de son impôt sur le revenu de l'année 2009, soit la somme de 1 449 euros ;

3°) d'ordonner le versement des intérêts moratoires en application de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales.

Par un jugement n°1520335/2-3 du 21 février 2017, le Tribunal administratif de Paris a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 21 avril 2017 et 12 juin 2018,

M.C..., représenté par MeB..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Paris du 21 février 2017 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions litigieuses, la restitution du trop-versé et qu'il soit tiré les conséquences de ce dégrèvement pour l'imposition de l'indemnité de licenciement perçue en 2009 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 41 821 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il était salarié de la société britannique SEI Invest ;

- l'indemnité de licenciement perçue se rattache à l'activité qu'il a exercée dans le cadre de son contrat de travail ;

- l'instruction 14 A-3-12 du 2 mars 2012 reconnait qu'un revenu de nature salariale peut avoir pour période de référence une période pluriannuelle ;

- la période de référence de l'indemnité de licenciement est, dès lors, la période allant du 1er juillet 2007 au 31 mars 2009 ;

- la société SEI France ayant été dissoute en mai 2007, aucun contrat de travail français n'existait à compter de juillet 2007 ;

- la " clause-balai ", insérée à titre de précaution, dans l'accord de rupture ne saurait constituer en elle-même un contrat de travail avec SEI France, société inexistante à la date du

27 avril 2009, et faire opposition à l'existence d'un contrat de travail avec SEI Investments (Europe) Limited ;

- l'indemnité de licenciement qu'il a perçue doit être considérée comme se rapportant à son activité professionnelle exercée durant son contrat de travail britannique du 1er juillet 2007 au 31 mars 2009, dont 173 jours travaillés sur 443 ont été exercés au Royaume-Uni et pour laquelle il est fondé à se prévaloir des stipulations de l'article 15 de la convention fiscale conclue entre la France et le Royaume-Uni le 22 mai 1968 ;

- l'article 24 b) de ladite convention est par suite applicable ;

- la circonstance que la somme n'ait pas été imposée en Grande-Bretagne est sans portée ;

- l'exonération accordée par l'article 80 duodecies 1-1°) et 3°) du code général des impôts doit se répartir, pour une part, sur la fraction d'indemnité imposable en France en application du paragraphe premier de l'article 15 de la convention fiscale franco-britannique, et, pour le reliquat, sur la fraction d'indemnité exonérée en France et prise en compte pour le calcul du taux effectif d'imposition conformément au paragraphe premier de l'article 15 et à l'article 24 de la convention fiscale précitée.

Par un mémoire en défense enregistré le 22 mars 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les moyens soulevés par M. C...ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 28 mai 2018, la clôture de l'instruction a été fixée au

12 juin 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention fiscale conclue entre la France et le Royaume-Uni le 22 mai 1968 ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Magnard,

- les conclusions de M. Cheylan, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., substituant MeB..., représentant M.C....

1. Considérant qu'à l'issue d'un contrôle sur pièces du dossier fiscal de M.C..., résident fiscal en France, l'administration a estimé que l'indemnité de licenciement perçue par l'intéressé en 2009 pour 1 000 000 euros devait être totalement imposée en France à hauteur d'une somme de 794 152 euros correspondant à l'indemnité imposable après application des dispositions de l'article 80 duodecies du code général des impôts ; que par une proposition de rectification du 2 février 2012, elle a alors réintégré dans ses salaires imposables une somme de 306 296 euros en base ; que par la présente requête, M.C..., qui soutient avoir exercé son activité professionnelle en partie au Royaume-Uni, relève appel du jugement du 21 février 2017 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu en résultant au titre de l'année 2009 et en réduction de la cotisation initiale mise à sa charge au titre de la même année ;

Sur l'application de la loi fiscale française :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 4A du code général des impôts : " Les personnes qui ont en France leur domicile fiscal sont passibles de l'impôt sur le revenu en raison de l'ensemble de leurs revenus. / Celles dont le domicile fiscal est situé hors de France sont passibles de cet impôt en raison de leurs seuls revenus de source française. " ; qu'aux termes de l'article 12 du code général des impôts : " L'impôt est dû chaque année à raison des bénéfices ou revenus que le contribuable réalise ou dont il dispose au cours de la même année. " ; qu'il est constant que M. C...était résident fiscal de France du 1er juillet 2007 au 31 décembre 2009 ; que la somme litigieuse a été versée en 2009 et qu'elle relève, en ce qui concerne l'impôt sur le revenu, de la catégorie des traitements et salaires ; qu'ainsi, et alors même que cette somme aurait été versée à l'occasion d'un licenciement mettant fin à une activité partiellement exercée du 1er juillet 2007 au 31 mars 2009 au Royaume-Uni, c'est à bon droit qu'elle a été soumise à l'impôt au titre de l'année 2009 ;

Sur l'application de la convention fiscale franco-britannique :

3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 15 de la convention fiscale conclue entre la France et le Royaume-Uni le 22 mai 1968, trouvant à s'appliquer pour la France aux revenus perçus jusqu'au 31 décembre 2009, dans sa rédaction modifiée par l'article 13 de l'avenant du 15 octobre 1987 : " 1. Sous réserve des dispositions des articles 16, 18, 19 et 20, les salaires, traitements et autres rémunérations similaires qu'un résident d'un Etat contractant reçoit au titre d'un emploi salarié ne sont imposables que dans cet Etat, à moins que l'emploi ne soit exercé dans l'autre Etat contractant. Si l'emploi y est exercé, les rémunérations reçues à ce titre sont imposables dans cet autre Etat. // 2. Nonobstant les dispositions du paragraphe 1, les rémunérations qu'un résident d'un Etat contractant reçoit au titre d'un emploi salarié exercé dans l'autre Etat contractant ne sont imposables que dans le premier Etat si : / a) Le bénéficiaire séjourne dans l'autre Etat pendant une période ou des périodes n'excédant pas au total 183 jours au cours d'une période quelconque de 12 mois ; et / b) Les rémunérations sont payées par un employeur ou au nom d'un employeur qui n'est pas résident de l'autre Etat, et /

c) La charge des rémunérations n'est pas supportée par un établissement stable ou une base fixe que l'employeur a dans l'autre Etat.(...) " ; qu'aux termes de l'article 24 de ladite convention : " Les doubles impositions des revenus sont évitées de la manière suivante : (...) // b) Dans le cas de la France : / I)les revenus autres que ceux visés à l'alinéa II) ci-dessous sont exonérés des impôts français visés au paragraphe 1 de l'article 1er, lorsqu'ils sont imposables au Royaume-Uni en vertu de la Convention ; / II) la France accorde au résident de France, qui perçoit des revenus visés aux articles 9 et 17 ayant leur source au Royaume-Uni et ayant supporté l'impôt au Royaume-Uni conformément aux dispositions desdits articles, un crédit d'impôt correspondant au montant de l'impôt payé au Royaume-Uni. Ce crédit d'impôt, qui ne peut excéder le montant de l'impôt français afférent aux revenus susvisés, est imputé sur les impôts visés à l'alinéa b du paragraphe 1 de l'article 1er de la présente Convention, dans l'assiette desquels ces revenus sont compris (...)" ;

4. Considérant qu'ainsi que le soutient M.C..., l'indemnité en litige constitue une rémunération similaire aux salaires et traitements perçus au titre d'un emploi salarié au sens des stipulations précitées de l'article 15 de la convention franco-britannique ; qu'une telle indemnité, qui n'a pas d'autre cause que l'emploi exercé, est imposable dans l'Etat dans lequel était exercé l'emploi et non dans l'Etat de résidence à la date de la perception du revenu ; que M. C...fait valoir qu'il a perçu cette indemnité de son employeur, la société de droit britannique SEI Investments, au titre d'une activité professionnelle exercée de façon significative au Royaume-Uni sur la période du 1er juillet 2007 au 31 mars 2009 ; que toutefois, en se bornant à produire des états récapitulatifs établis par lui indiquant les jours passés aux Royaume-Uni et hors Royaume-Uni, des billets " Eurostar ", un relevé de compte

" Eurostar ", et des factures d'hôtel, documents qui ne peuvent, par eux-mêmes, justifier du lieu d'exercice de son activité professionnelle, ainsi qu'une attestation de son ancien employeur rédigée pour les besoins de l'instance et non accompagnée de documents justificatifs, et en l'absence de toute pièce relative aux modalités concrètes de ladite activité et notamment de contrat de travail, le requérant n'apporte, alors qu'il est seul en mesure de le faire, pas d'éléments permettant à la Cour de constater la consistance de l'activité exercée respectivement en France et au Royaume-Uni ; qu'ainsi, et alors même que M. C...n'aurait plus été, à compter de juillet 2007, employé par la société SEI France, c'est à bon droit que l'administration fiscale a estimé que l'indemnité de licenciement ne pouvait être regardée comme se rapportant à une activité professionnelle exercée au Royaume-Uni ; que le requérant n'est donc pas fondé à se prévaloir des stipulations de l'article 15 de la convention fiscale conclue entre la France et le Royaume-Uni le 22 mai 1968, ni, par voie de conséquence des stipulations de l'article 24 de ladite convention ; que l'indemnité litigieuse était par suite intégralement imposable en France ; que l'instruction 14 A-3-12 du 2 mars 2012 relative à l'incidence des conventions internationales sur l'imposition des gains issus de la levée d'option sur titres ne fait pas de la loi fiscale une interprétation différente de ce qui précède et n'est par suite pas invocable sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;

5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de la somme que le requérant demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...C...et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera adressée au régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris.

Délibéré après l'audience du 5 septembre 2018, à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- Mme Appèche, président assesseur,

- M. Magnard, premier conseiller.

Lu en audience publique le 26 septembre 2018.

Le rapporteur,

F. MAGNARDLe président,

I. BROTONS

Le greffier,

P. LIMMOIS

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

7

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N° 17PA01356


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 17PA01356
Date de la décision : 26/09/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: M. Franck MAGNARD
Rapporteur public ?: M. CHEYLAN
Avocat(s) : GOUPILLE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-09-26;17pa01356 ?
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