Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A...C...a demandé au Tribunal administratif de Paris, d'une part, d'annuler l'arrêté du 14 février 2017 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, d'autre part, d'enjoindre à cette autorité de lui délivrer un tel titre.
Par un jugement n° 1706394 du 23 novembre 2017, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 25 janvier 2018, MmeC..., représentée par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 14 février 2017 et d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'arrêté contesté est entaché d'illégalité externe pour incompétence de son auteur ;
- cet arrêté est entaché d'illégalité interne pour méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et pour erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 31 mai 2018, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun moyen n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties on été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Auvray ;
- et les observations de Me B...pour MmeC....
Considérant ce qui suit :
1. MmeC..., ressortissante marocaine née le 24 août 1993 à Rabat, a sollicité son admission au séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par l'arrêté contesté du 14 février 2017, pris en exécution du jugement du 11 octobre 2016 par lequel le Tribunal administratif de Paris avait enjoint à l'administration de procéder au réexamen de la situation de l'intéressée, le préfet de police a refusé de lui délivrer une carte de séjour temporaire.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Selon les termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
3. Il ressort des pièces du dossier que MmeC..., entrée en France âgée de moins de 16 ans le 23 juillet 2009, a été confiée par ses parents à un oncle maternel auquel l'autorité parentale a été déléguée par jugement en date du 13 janvier 2011 du Tribunal de grande instance de Bobigny. L'intéressée a été scolarisée dès le mois de septembre 2009, a obtenu un certificat d'aptitude professionnelle de coiffure le 5 juillet 2012, puis son baccalauréat en juin 2016 et est inscrite en première année de licence d'Administration économique et sociale (AES) à l'Université de Paris VIII au titre de l'année 2016-2017. Il ressort en outre des pièces du dossier que si les parents de l'intéressée vivent au Maroc, ses deux soeurs résident en France sous couvert d'une carte de résident valable dix ans et son frère, chez qui elle réside et qui atteste la prendre en charge financièrement, est de nationalité française. Dans les circonstances particulières de l'espèce, MmeC..., présente en France depuis près de 9 ans à la date de l'arrêté contesté, est fondée à soutenir que ce dernier a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels il a été pris. Pour ce seul motif, l'intéressée est fondée à en demander l'annulation.
4. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Mme C...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
5. Eu égard au motif d'annulation retenu par le présent arrêt, il y a lieu de faire droit aux conclusions de Mme C...tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de police de délivrer à Mme C...une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.
Sur les frais liés au litige :
6. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 000 euros à Mme C...au titre des frais exposés par cette dernière à l'occasion du litige soumis au juge et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1706394 du 23 novembre 2017 du Tribunal administratif de Paris et l'arrêté du 14 février 2017, par lequel le préfet de police a refusé de délivrer un titre de séjour à MmeC..., sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de délivrer à Mme C...une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à Mme C...une somme de 1 000 euros au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...C..., au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 22 juin 2018 à laquelle siégeaient :
Mme Heers, président de chambre,
M. Auvray, président-assesseur,
M. Boissy, premier conseiller,
Lu en audience publique le 6 juillet 2018.
Le rapporteur,
B. AUVRAY
Le président,
M. HEERS
Le greffier,
C. DABERT
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18PA00298