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05/07/2018 | FRANCE | N°16PA01361

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 05 juillet 2018, 16PA01361


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Cargo Air OOD a, par huit demandes, sollicité l'annulation de huit décisions du 13 janvier 2015 par lesquelles l'Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires (ACNUSA) lui a infligé des amendes administratives, d'un montant allant de 22 000 à 32 000 euros, en raison du dépassement par l'un de ses aéronefs, entre le 6 mai et le 9 mai 2014, des heures limites d'atterrissage ou de décollage imposées sur l'aérodrome de Paris-Charles-de-Gaulle.

Par un jugement nos 1512523, 1512527, 15

12529, 1512530, 1512532, 1512535, 1512536 et 1512537/2-1 du 31 décembre 2015, le T...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Cargo Air OOD a, par huit demandes, sollicité l'annulation de huit décisions du 13 janvier 2015 par lesquelles l'Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires (ACNUSA) lui a infligé des amendes administratives, d'un montant allant de 22 000 à 32 000 euros, en raison du dépassement par l'un de ses aéronefs, entre le 6 mai et le 9 mai 2014, des heures limites d'atterrissage ou de décollage imposées sur l'aérodrome de Paris-Charles-de-Gaulle.

Par un jugement nos 1512523, 1512527, 1512529, 1512530, 1512532, 1512535, 1512536 et 1512537/2-1 du 31 décembre 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés le 21 avril 2016 et le 20 juillet 2016, la société Cargo Air OOD, représenté par MeC..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Paris nos 1512523, 1512527, 1512529, 1512530, 1512532, 1512535, 1512536 et 1512537/2-1 du 31 décembre 2015 ;

2°) d'annuler les décisions rendues à son encontre par l'ACNUSA le 13 janvier 2015 et de prononcer la décharge du paiement, ou à titre subsidiaire, de réduire le montant des amendes qui lui ont été ainsi infligées ;

3°) de mettre à la charge de l'ACNUSA la somme de 8 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal administratif n'a pas répondu à tous ses arguments ;

- le principe d'individualisation des sanctions administratives de nature pécuniaire, celui de proportionnalité des sanctions administratives de nature pécuniaire et celui d'égalité ont été méconnus.

Par deux mémoires, enregistrés le 20 juin et le 16 août 2016, l'Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires, représentée par son président, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 4 000 euros soit mise à la charge de la société Cargo Air OOD au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient qu'aucun des moyens invoqués n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'aviation civile ;

- le code des transports ;

- l'arrêté du 20 septembre 2011 portant restriction d'exploitation de l'aérodrome de Paris-Charles-de-Gaulle (Val-d'Oise) ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Even,

- les conclusions de Mme Oriol, rapporteur public,

- les observations de Me B...pour la société Cargo Air OOD,

- et les observations de Me A...pour l'Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires (ACNUSA).

Considérant ce qui suit :

1. La société Cargo Air OOD relève appel du jugement du 31 décembre 2015 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de huit décisions, datées du 13 janvier 2015, par lesquelles l'Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires (ACNUSA) lui a infligé des amendes administratives, en raison du dépassement par l'un de ses aéronefs des heures limites d'atterrissage ou de décollage imposées sur l'aérodrome de Paris - Charles-de-Gaulle, entre le 6 mai et le 9 mai 2014.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Il n'est pas contesté que le tribunal administratif a répondu à l'ensemble des moyens soulevés en première instance par la société requérante. La circonstance qu'il n'aurait pas répondu à tous ses arguments est sans incidence sur la régularité du jugement.

Sur les sanctions litigieuses :

3. Aux termes de l'article L. 6361-12 du code des transports : " L'Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires prononce une amende administrative à l'encontre : 1° De la personne exerçant une activité de transport aérien public au sens de l'article L. 6412-1 (...) ne respectant pas les mesures prises par l'autorité administrative sur un aérodrome fixant : a) Des restrictions permanentes ou temporaires d'usage de certains types d'aéronefs en fonction de leurs émissions atmosphériques polluantes, de la classification acoustique, de leur capacité en sièges ou de leur masse maximale certifiée au décollage ; b) Des restrictions permanentes ou temporaires apportées à l'exercice de certaines activités en raison des nuisances environnementales qu'elles occasionnent ; c) Des procédures particulières de décollage ou d'atterrissage en vue de limiter les nuisances environnementales engendrées par ces phases de vol (...) ". L'article L. 6361-13 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur, précise que : " " Les amendes administratives mentionnées à l'article L. 6361-12 ne peuvent excéder, par manquement constaté, un montant de 1 500 euros pour une personne physique et de 20 000 euros pour une personne morale. S'agissant des personnes morales, ce montant maximal est porté à 40 000 euros lorsque le manquement concerne : (...) 2° Les mesures de restriction des vols de nuit ". Aux termes des dispositions du V de l'article 1er de l'arrêté du 20 septembre 2011 portant restriction d'exploitation de l'aérodrome de Paris-Charles-de-Gaulle : " (...) les aéronefs certifiés chapitre 3 avec une marge cumulée inférieure à 10 EPN dB ne peuvent, à compter du 30 mars 2014 : - atterrir entre 22 heures et 6 heures, heures locales ; - quitter le point de stationnement, en vue d'un décollage, entre 22 heures et 6 heures, heures locales ".

4. Il appartient au juge administratif saisi d'une contestation portant sur une sanction infligée par l'Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires, de se prononcer sur cette contestation comme juge de plein contentieux. Cette circonstance ne fait pas obstacle à ce que le juge administratif puisse annuler, pour un motif de légalité qui le justifie, une décision de cette Autorité infligeant une sanction.

5. Il est constant qu'un aéronef de type Boeing 737 de la société Cargo Air OOD, présentant une marge acoustique de 9,3 EPN dB, a atterri sur l'aérodrome Paris-Charles-de-Gaulle le 6 mai 2014 à 1 heure 58 minutes, le 7 mai à 1 heure 40 minutes, le 8 mai 2014 à 1 heure 33 minutes et le 9 mai à 1 heure 27 minutes, et que ce même appareil a décollé de cet aéroport les mêmes jours à 3 heures 2 minutes, 2 heures 38 minutes, 2 heures 31 minutes et 3 heures, en méconnaissance des heures limites d'atterrissage ou de décollage imposées par les dispositions de l'arrêté du 20 septembre 2011.

6. En premier lieu, il résulte de l'instruction, que si les sanctions contestées se rapportent à des infractions commises par le même appareil, l'autorité administrative compétente s'est livrée à un examen circonstancié de chaque affaire, sans utiliser un barème prédéterminé, en décrivant pour chaque décision les manquements constatés, en précisant les créneaux horaires au sein desquels ils ont été commis, et en qualifiant de graves les nuisances commises au détriment des riverains. Ces données de fait comparables n'imposaient pas au regard du principe d'individualisation des peines le prononcé d'amendes d'un montant différencié. Ces sanctions administratives ayant été infligées en tenant compte des circonstances propres à chaque espèce, n'ont donc pas méconnu le principe d'individualisation des peines.

7. En second lieu, il résulte de l'instruction qu'eu égard aux atterrissages et décollages litigieux, dont la réalité n'est pas contestée, qui se sont déroulés en pleine nuit, dans une zone densément peuplée, alors que les règlements en vigueur l'interdisaient, les amendes infligées, fixées à 22 000 euros pour les infractions à l'atterrissage et à 32 000 euros pour les infractions au décollage, sont proportionnées, d'autant que l'ACNUSA n'a pas retenu le montant maximal de l'amende prévu par l'article L. 6361-13 du code des transports fixé à 40 000 euros, pour tenir compte du fait que les infractions commises n'avaient pas de précédents. La simple affirmation formulée par la société requérante selon laquelle le montant de ces amendes serait d'un niveau supérieur aux moyennes constatées, alors qu'elle ne soutient même pas que ces infractions étaient moins graves, est sans incidence, de même que l'indication selon laquelle elle aurait dû en urgence répondre aux exigences d'un client confronté à la défaillance d'une compagnie concurrente. Enfin, la société requérante, qui est seule responsable de ses propres turpitudes, ne peut utilement soutenir que ces amendes litigieuses ont eu des conséquences défavorables sur sa situation financière.

8. Enfin, la société Cargo Air OOD, qui a commis des manquements litigieux durant quatre jours et à huit reprises, ne peut être considérée comme étant dans une situation identique à celle des entreprises avec lesquelles elle se compare, dans la mesure où les amendes qu'elle conteste ne sanctionnent que son propre comportement. Par suite, le moyen tiré de l'existence d'une violation du principe d'égalité et d'une discrimination ne peut qu'être écarté.

9. Il résulte de tout ce qui précède que la société Cargo Air OOD n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes. Par voie de conséquence ses conclusions présentées sur le fondement de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société Cargo Air OOD est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Cargo Air OOD et à l'Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires (ACNUSA).

Délibéré après l'audience du 27 juin 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Even, président de chambre,

- Mme Hamon, président assesseur,

- Mme d'Argenlieu, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 5 juillet 2018.

Le président rapporteur,

B. EVEN Le président assesseur,

P. HAMON

Le greffier,

S. GASPARLa République mande et ordonne au ministre chargé des transports en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 16PA01361


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 16PA01361
Date de la décision : 05/07/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

65-03-04-05 Transports. Transports aériens. Aéroports. Nuisances causées aux riverains.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: M. Bernard EVEN
Rapporteur public ?: Mme ORIOL
Avocat(s) : AVOCATS ASSOCIES HOLMAN FENWICK WILLAN

Origine de la décision
Date de l'import : 10/07/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-07-05;16pa01361 ?
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