La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

27/06/2018 | FRANCE | N°16PA03416

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 27 juin 2018, 16PA03416


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au Tribunal administratif de la Polynésie française d'annuler, d'une part, le certificat de cessation d'activité pris à son égard par le centre hospitalier de la Polynésie française le 26 octobre 2015, d'autre part, l'arrêté du 23 novembre 2015 prononçant sa radiation et l'admettant à faire valoir ses droits à la retraite et, enfin, de condamner solidairement le centre hospitalier de la Polynésie française et la Polynésie française à lui verser son traitement de 499 490 francs

CFP pour le mois de novembre 2015, une somme de

499 490 francs CFP mensuelle ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au Tribunal administratif de la Polynésie française d'annuler, d'une part, le certificat de cessation d'activité pris à son égard par le centre hospitalier de la Polynésie française le 26 octobre 2015, d'autre part, l'arrêté du 23 novembre 2015 prononçant sa radiation et l'admettant à faire valoir ses droits à la retraite et, enfin, de condamner solidairement le centre hospitalier de la Polynésie française et la Polynésie française à lui verser son traitement de 499 490 francs CFP pour le mois de novembre 2015, une somme de

499 490 francs CFP mensuelle à compter du 1er décembre 2015, jusqu'à sa réintégration effective dans son emploi avec reconstitution de ses droits sociaux et, enfin, une somme de 12 000 000 francs CFP en réparation du préjudice moral et financier subi du fait de son éviction illégale du service.

Par un jugement n° 1600132 du 11 octobre 2016, le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et trois mémoires complémentaires, enregistrés les 25 novembre 2016, 14 janvier et 3 mars et 19 mai 2017 M. C...A..., représenté par MeD..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de la Polynésie française n° 1600132 du 11 octobre 2016 ;

2°) d'annuler le certificat de cessation d'activités pris à son égard par le centre hospitalier de la Polynésie française le 26 octobre 2015 ;

3°) d'annuler l'arrêté du 23 novembre 2015 prononçant sa radiation et l'admettant à faire valoir ses droits à la retraite ;

4°) de condamner solidairement le centre hospitalier de la Polynésie française et la Polynésie française à lui verser son traitement de 499 490 francs CFP pour le mois de novembre 2015, une somme de 499 490 francs CFP mensuelle à compter du 1er décembre 2015 jusqu'à sa réintégration effective dans son emploi, avec reconstitution de ses droits sociaux, ainsi qu'une somme de 12 000 000 francs CFP en réparation du préjudice moral et financier subi du fait de son éviction illégale du service ;

5°) de transmettre le dossier au parquet pour enquête et poursuites pénales des responsables, et à la chambre territoriale des comptes si le président de la Polynésie française a bien signé l'arrêté contesté ;

6°) de mettre à la charge de la Polynésie française une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les premiers juges ont commis une erreur dans la notification du jugement en y mentionnant que l'appel devait être présenté par un avocat ;

- les écritures de la Polynésie française ne sont pas recevables puisque la SCP de Chaisemartin n'a pas été expressément désignée et que le ministre de la fonction publique n'a pas été expressément autorisé à soutenir la Polynésie française dans cette affaire ;

- le certificat de cessation d'activité est un acte faisant grief ;

- les décisions attaquées ont été prises par une autorité incompétente et sont insuffisamment motivées ;

- le certificat de cessation d'activité est entaché d'un défaut de base légale ;

- la décision du 23 novembre 2015 était rétroactive ;

- ayant travaillé du 1er au 30 novembre 2015, il a droit au versement de son salaire pour service fait ;

- il a subi un préjudice moral du fait de cette éviction brutale et rapide ;

- il doit être indemnisé de ce préjudice moral par le versement d'une somme de 6 000 000 francs CFP.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 décembre 2016, le Centre hospitalier de la Polynésie française, représentée par MeB..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. A...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Par un mémoire en défense et un mémoire complémentaire, enregistrés les 27 janvier et 5 avril 2017, la Polynésie française, représentée par Me Arnaud de Chaisemartin, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. A...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 ;

- la délibération n° 87-11 AT du 29 janvier 1987 portant institution d'un régime de retraite des travailleurs salariés de la Polynésie française ;

- la délibération n° 95-125 AT du 14 décembre 1995 portant statut général de la fonction publique de la Polynésie française ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme d'Argenlieu,

- les conclusions de Mme Oriol, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M.A..., né le 26 octobre 1955, technicien chef relevant du cadre d'emplois des techniciens de la fonction publique de la Polynésie française, était affecté au centre hospitalier de la Polynésie française et mis à disposition de l'organisation syndicale A Tia I Mua. Il a été informé, le 28 septembre 2015, par une lettre du ministre chargé de la fonction publique, qu'il était atteint par la limite d'âge au 31 octobre 2015 et qu'il serait mis fin à ses fonctions à cette date. Par une lettre du 26 octobre 2015, le directeur du centre hospitalier de la Polynésie française lui a adressé un " certificat de cessation d'activité " par lequel il lui indiquait, qu'à compter du 31 octobre 2015, il ne ferait plus partie de ses effectifs et ne serait plus rémunéré par lui. Il a été radié des cadres et admis à faire valoir ses droits à pension par un arrêté du ministre en charge de la fonction publique du 23 novembre 2015. M. A...relève appel du jugement du 11 octobre 2016 par lequel le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions des 26 octobre 2015 et 23 novembre 2015, ainsi qu'à la condamnation du centre hospitalier de la Polynésie française et de la Polynésie française à l'indemniser de son préjudice résultant de l'illégalité fautive des décisions contestées.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En premier lieu, la circonstance à la supposer établie que la notification du jugement aurait mentionné à tort que l'appel devait, à peine d'irrecevabilité, être présenté par un avocat est, en tout état de cause, sans incidence sur la régularité dudit jugement.

3. En second lieu, le " certificat de cessation d'activité " par lequel le centre hospitalier de la Polynésie française a, le 26 octobre 2015, informé M. A...qu'il ne ferait plus partie de ses effectifs et ne serait plus rémunéré à compter du 1er novembre 2015 fait grief. C'est donc à tort que les premiers juges ont estimé que ce certificat était insusceptible de recours et que les conclusions tendant à son annulation étaient par suite irrecevables.

4. Il résulte de ce qui précède que le jugement attaqué doit être annulé en tant qu'il a, à tort, rejeté pour irrecevabilité les conclusions tendant à l'annulation du " certificat de cessation d'activité " du 26 octobre 2015. Par suite, il y a lieu de se prononcer immédiatement, par la voie de l'évocation sur les conclusions tendant à l'annulation de cette décision. En revanche, il convient de statuer par l'effet dévolutif de l'appel sur le surplus des conclusions présentées par M. A...tendant à l'annulation de l'arrêté du 23 novembre 2015 et à la condamnation du centre hospitalier de la Polynésie française et du gouvernement de la Polynésie française.

Sur les fins de non recevoir opposées au sujet cde la procédure d'appel :

5. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que par un arrêté n° 1990 du

17 mars 2017, le ministre du travail et de la formation professionnelle en charge de la fonction publique et de la recherche a désigné Me Arnaud de Chaisemartin, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation pour représenter les intérêts de la Polynésie française dans l'affaire l'opposant à M. A... devant la Cour administrative d'appel de Paris. Dans ces conditions, le conseil de la Polynésie française ayant été régulièrement désigné par la Polynésie française pour la représenter, ses écritures ne sauraient être écartées des débats comme étant irrecevables.

6. En deuxième lieu, aux termes de l'article 2 de l'arrêté CM du 23 mai 2013 portant délégation de pouvoir du conseil des ministres de la Polynésie française : " En application des dispositions de l'article 92-2° de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française, le conseil des ministres délègue en matière de procédure contentieuse au ministre de la fonction publique, le pouvoir d'intenter ou de soutenir toute action relative aux litiges avec les agents de l'administration de la Polynésie française, les fonctionnaires détachés ou les agents mis à disposition auprès de la PF, y compris les litiges avec les personnels de cabinet de la PF recrutés à compter du 29 décembre 2006 ". En l'espèce, il résulte de ce qui a été dit au point 5, que c'est le ministre en charge notamment de la fonction publique qui intervient au soutien des intérêts de la Polynésie française. Or, ce ministre s'est vu déléguer le pouvoir de représenter la Polynésie française dans tous les litiges l'opposant à ses agents par l'arrêté précité du 23 mai 2013. Par suite, disposant de la qualité pour agir au nom de la Polynésie française, les écritures déposées par le ministre en charge de la fonction publique en appel ne sauraient être écartées des débats comme étant irrecevables.

Sur le fond :

En ce qui concerne les conclusions à fin d'annulation :

7. Aux termes de l'article LP 87 de la délibération susvisée du 14 décembre 1995 : " La limite d'âge pour les fonctionnaires est fixé au dernier jour du mois au cours duquel l'âge de soixante ans est atteint (...) Sous peine d'irrecevabilité, les demandes de prolongation doivent intervenir au moins trois mois avant la survenance de la limite d'âge ".

8. Une collectivité publique est tenue, sans disposer d'aucun pouvoir d'appréciation, d'admettre à faire valoir ses droits à pension l'agent atteignant la limite d'âge légale, et qui ne s'est prévalu d'aucun droit à prolongation au delà de la limite d'âge.

9. Il ressort des pièces du dossier que si, le 4 mai 2015, M. A...a fait part à la confédération syndicale qui l'employait de son acceptation de prolonger encore de deux années son activité professionnelle, il est revenu sur cette décision, le 10 septembre 2015, en adressant à la direction des ressources humaines du gouvernement polynésien, un courriel, dont l'authenticité n'est pas utilement remise en cause, aux termes duquel, il demandait que son dossier soit retiré de l'ordre du jour de la prochaine commission administrative paritaire, renonçant ainsi à prolonger son activité au-delà de l'âge légal de la retraite. C'est dans ces conditions, que le ministre de la fonction publique polynésienne a, par une lettre n° 1718/MTF, indiqué au directeur du centre hospitalier de la Polynésie française et à M.A..., le

23 septembre 2015, que " n'ayant pas formulé de demande de prolongation au-delà de la limite d'âge dans le délai fixé par le dernier alinéa de l'article L. 87 ", il se voyait " dans l'obligation de mettre fin aux fonctions de M. A...à compter du 31 octobre 2015 au soir et ce en vue d'une radiation des cadres pour faire valoir ses droits à la retraite auprès de la CPS ". M. A..., qui a attesté avoir reçu notification de cette lettre, ne l'a pas contestée dans les deux mois. Par la suite, la direction des ressources humaines et des affaires médicales du centre hospitalier de la Polynésie française a, le 26 octobre 2015, informé M. A...qu'il ne ferait plus partie de ses effectifs à compter du 31 octobre 2015 au soir et, qu'à compter de cette date, il ne serait plus rémunéré. Enfin, par un arrêté du 23 novembre 2015, visant la lettre du

28 septembre 2005, le ministre en charge de la fonction publique, Jean-Christophe Bouisson a prononcé la cessation définitive des fonctions de M. A...à compter du 31 octobre 2015 au soir, l'a radié du cadre d'emplois des techniciens de la fonction publique de la Polynésie française et l'a autorisé à faire valoir ses droits à pension de retraite auprès de la caisse de prévoyance sociale.

10. Il résulte de ce qui précède que M. A...se trouvait dans la situation d'un agent public ayant atteint l'âge limite de départ à la retraite, sans avoir sollicité une prolongation de son activité au-delà de cette limite. Par suite, tant le centre hospitalier de la Polynésie française que le gouvernement polynésien avaient compétence liée pour prendre respectivement le " certificat de cessation d'activité ", l'arrêté emportant cessation définitive des fonctions de l'intéressé et prononcer sa radiation du cadre d'emplois des techniciens de la fonction publique polynésienne. Dans ces conditions, l'ensemble des moyens soulevés par M. A...à l'encontre de ces deux actes ne peuvent être qu'être écartés comme inopérants.

11. Il résulte de ce qui précède que les conclusions tendant à l'annulation de la décision du centre hospitalier de la Polynésie française du 26 octobre 2015 doivent être rejetées. Et M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Polynésie française a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 23 novembre 2015.

En ce qui concerne les conclusions à fin d'indemnisation :

12. Les décisions contestées, ainsi que cela ressort des points 9 et 10, n'étant pas illégales, les conclusions présentées par M. A...tendant à ce que le centre hospitalier de la Polynésie française et le gouvernement polynésien soient condamnés solidairement à lui verser son traitement de 499 490 francs CFP pour le mois de novembre 2015, alors qu'il ne démontre pas avoir travaillé au cours de ce mois, une somme mensuelle de 499 490 francs CFP à compter du 1er décembre 2015 jusqu'à sa réintégration effective dans son emploi avec reconstitution de ses droits sociaux et, enfin, une somme de 12 000 000 F CFP en réparation du préjudice moral et financier subi du fait de son éviction illégale du service, ne peuvent être qu'écartées.

13. M. A...n'est donc pas fondé à soutenir que, c'est à tort, que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Polynésie française a rejeté ses conclusions à fin d'indemnisation. Par voie de conséquence, les conclusions présentées par M. A...tendant à ce que le parquet et la chambre territoriale des comptes soient saisis doivent, en tout état de cause, être rejetées.

Sur les frais de justice :

14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du centre hospitalier de la Polynésie française et du gouvernement de la Polynésie française la somme que M. A...réclame au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de M. A...une somme de 2 000 euros à verser solidairement au centre hospitalier de la Polynésie française et au gouvernement de la Polynésie française sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de la Polynésie française n° 1600132

du 11 octobre 2016 est annulé en tant qu'il a déclaré irrecevables les conclusions de M. A...tendant à l'annulation du " certificat de cessation d'activité " du 26 octobre 2015.

Article 2 : Les conclusions présentées par M. A...devant le Tribunal administratif de la Polynésie française et devant la Cour sont rejetées.

Article 3 : M. A...versera solidairement au centre hospitalier de la Polynésie française et au gouvernement de la Polynésie française une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...A..., ainsi qu'au centre hospitalier de Papeete et au gouvernement de la Polynésie française. Une copie sera adressée au Haut-Commissaire de la République en Polynésie française.

Délibéré après l'audience du 5 juin 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Even, président,

- Mme Hamon, président assesseur,

- Mme d'Argenlieu, premier conseiller.

Lu en audience publique le 27 juin 2018.

Le rapporteur,

L. d'ARGENLIEU

Le président,

B. EVEN Le greffier,

S. GASPAR

La République mande et ordonne à la ministre des outre-mer en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

7

N° 16PA03416


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 16PA03416
Date de la décision : 27/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-10-01 Fonctionnaires et agents publics. Cessation de fonctions. Mise à la retraite pour ancienneté ; limites d'âge.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: Mme Lorraine D'ARGENLIEU
Rapporteur public ?: Mme ORIOL
Avocat(s) : GAULTIER-FEUILLET

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-06-27;16pa03416 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award