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22/06/2018 | FRANCE | N°17PA02010

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 22 juin 2018, 17PA02010


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Galerie Ariane A...a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution sociale sur cet impôt, ainsi que des pénalités y afférentes, qui lui ont été assignées au tire des exercices clos entre le 1er juillet 2005 et le 31 décembre 2008.

Par un jugement n° 1316014 du 31 décembre 2014, le Tribunal administratif de Paris a prononcé une réduction de 482 200 eur

os de la base imposable à l'impôt sur les sociétés et à la contribution sociale assignés ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Galerie Ariane A...a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution sociale sur cet impôt, ainsi que des pénalités y afférentes, qui lui ont été assignées au tire des exercices clos entre le 1er juillet 2005 et le 31 décembre 2008.

Par un jugement n° 1316014 du 31 décembre 2014, le Tribunal administratif de Paris a prononcé une réduction de 482 200 euros de la base imposable à l'impôt sur les sociétés et à la contribution sociale assignés au titre de l'exercice clos en juin 2007, prononcé la décharge correspondante et rejeté le surplus de sa demande.

Par un arrêt n° 15PA00820 du 13 mai 2016, la Cour de céans a rejeté l'appel formé par la société Galerie Ariane A...contre ce jugement.

Par une décision n° 401491 du 29 mai 2017, le Conseil d'Etat, saisi d'un pourvoi présenté par la SAS Galerie ArianeA..., a annulé l'arrêt n° 15PA00820 du 13 mai 2016 et renvoyé l'affaire devant la Cour.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés respectivement le 19 février 2015 et 29 janvier 2016, puis par des mémoires produits après cassation les 10 août 2017 et 17 avril 2018, la SAS Galerie ArianeA..., représentée par MeB..., demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 4 du jugement n° 1316014 du 31 décembre 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté le surplus de sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution sociale à cet impôt, ainsi que des pénalités y afférentes, auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos entre le 1er juillet 2005 et le 31 décembre 2008 ;

2°) de prononcer les décharges sollicitées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 15 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les impositions contestées sont mal fondées au motif, d'une part, que les prix auxquels elle a cédé meubles et objets d'art à la société Hosur Panama, son précédent actionnaire et principal fournisseur, n'étaient pas anormalement bas de sorte que c'est à tort que le service a estimé que cette opération était constitutive d'un transfert indirect de bénéfices à l'étranger au sens de l'article 57 du code général des impôts, d'autre part, que les dépenses dont la déductibilité lui a été refusée ont pourtant été justifiées et exposées dans son intérêt.

Par un mémoire en défense et un mémoire en duplique, enregistrés respectivement le 15 juin 2015 et le 12 avril 2016 puis, après cassation, par un mémoire enregistré le 30 novembre 2017, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la SAS Galerie Ariane A...ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Auvray,

- les conclusions de Mme Mielnik-Meddah, rapporteur public,

- et les observations de Me B...pour la société Galerie ArianeA... ;

Considérant ce qui suit :

1. La société par actions simplifiée Galerie ArianeA..., qui exerçait à Paris une activité de commerce d'antiquités, de meubles et d'objets d'art, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration fiscale a, d'une part, mis à la charge de la société des cotisations supplémentaires d'impôts sur les sociétés et de contribution sociale sur cet impôt au titre de l'exercice couru du 1er juillet au 31 décembre 2007, d'autre part, réduit les déficits qu'elle avait déclarés au titre des exercices clos les 30 juin 2005, 30 juin 2006, 30 juin 2007 et 31 décembre 2008. La SAS Galerie Ariane A...relève appel du jugement du 31 décembre 2014 en tant qu'il a rejeté le surplus de sa demande.

Sur le bien-fondé des impositions et des remises en cause des déficits déclarés :

2. En premier lieu, selon l'article 57 du code général des impôts, applicable en matière d'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 de ce code : " Pour l'établissement de l'impôt sur le revenu dû par les entreprises qui sont sous la dépendance ou qui possèdent le contrôle d'entreprises situées hors de France, les bénéfices indirectement transférés à ces dernières, soit par voie de majoration ou de diminution des prix d'achat ou de vente, soit par tout autre moyen, sont incorporés aux résultats accusés par les comptabilités. Il est procédé de même à l'égard des entreprises qui sont sous la dépendance d'une entreprise ou d'un groupe possédant également le contrôle d'entreprises situées hors de France / La condition de dépendance ou de contrôle n'est pas exigée lorsque le transfert s'effectue avec des entreprises établies dans un Etat étranger ou dans un territoire situé hors de France dont le régime fiscal est privilégié au sens du deuxième alinéa de l'article 238 A ". Il résulte de ces dispositions que, lorsqu'elle constate que les prix facturés par une entreprise établie en France à une entreprise étrangère qui lui est liée sont inférieurs à ceux pratiqués, soit par cette entreprise avec d'autres clients dépourvus de liens de dépendance avec elle, soit par des entreprises similaires exploitées normalement avec des clients dépourvus de liens de dépendance, sans que cet écart s'explique par la situation différente de ces clients, l'administration doit être regardée comme établissant l'existence d'un avantage qu'elle est en droit de réintégrer dans les résultats de l'entreprise établie en France, sauf pour celle-ci à justifier que cet avantage a eu pour elle des contreparties au moins équivalentes. A défaut d'avoir procédé à de telles comparaisons, l'administration n'est, en revanche, pas fondée à invoquer la présomption de transferts de bénéfices ainsi instituée mais doit, pour démontrer qu'une entreprise a consenti une libéralité en facturant des prestations à un prix insuffisant, établir l'existence d'un écart injustifié entre le prix convenu et la valeur vénale du bien cédé ou du service rendu.

3. La société par actions simplifiée Galerie ArianeA..., dont Mme A... était présidente-directrice générale et associée à hauteur de 1 % du capital, exerçait une activité de commerce d'antiquités, de meubles et d'objets d'art, plus particulièrement dans les domaines de l'art oriental, le mobilier étranger néo-classique et le mobilier français de l'époque Empire. La société Hosur Corporation, dont le siège était situé à Panama (société Hosur Panama), détenait une participation à hauteur de 99 % du capital social de la société Galerie ArianeA..., qu'elle a cédée en 2002 à la société holding Hosur Corporation domiciliée au Luxembourg(société Hosur Luxembourg). Dans la perspective de sa cessation d'activité liée au départ à la retraite de MmeA..., la société Galerie Ariane A...a vendu entre février et juillet 2007 un ensemble de 334 lots d'antiquités à la société Hosur Panama pour un montant total de 4 567 652 euros. Ultérieurement, les sociétés Galerie Ariane A...et Hosur Panama sont convenues de céder simultanément, dans le cadre d'une vente aux enchères publiques qui s'est tenue les 25 et 26 octobre 2007 à New York chez Sotheby's, plus de 800 lots. Parmi les lots proposés au cours de cette vente aux enchères figuraient 193 lots, nombre d'ailleurs ramené à 183 par le jugement attaqué devenu définitif sur ce point, que la société Hosur Panama avait acquis auprès de la société Galerie Ariane A...entre les mois de févier et de juillet 2007. A l'issue de la vérification de comptabilité de la société Galerie Ariane A..., l'administration fiscale a, par une proposition de rectification du 14 décembre 2009, estimé que cette société aurait pu bénéficier d'un prix de vente sensiblement plus élevé si elle avait directement présenté l'ensemble de ses lots à la vente aux enchères publiques organisée chez Sotheby's seulement quelques mois plus tard. Elle a en conséquence réintégré au résultat imposable de la requérante au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2007, sur le fondement de l'article 57 du code général des impôts, la différence, égale à 4 822 862 euros, entre le produit de la vente aux enchères des lots en cause et le prix qui avait été facturé lors des cessions intervenues entre février et juillet 2007. Par cette même proposition de rectification, l'administration a en outre réintégré diverses charges déduites par la société Galerie Ariane A...au motif qu'elles n'étaient pas justifiées ou qu'elles ne relevaient pas d'une gestion commerciale normale, ce qui l'a conduite à réduire les déficits déclarés par la société requérante au titre des exercices non prescrits clos les 30 juin 2005, 30 juin 2006, 30 juin 2007 et 31 décembre 2008, ainsi que les déficits qui, également déclarés par l'intéressée au titre des exercices prescrits clos les 30 juin 2003 et 2004, avaient été reportés et imputés sur les résultats des exercices non prescrits et soumis à vérification.

En ce qui concerne le transfert indirect de bénéfices à l'étranger :

4. Le vérificateur a relevé, d'une part, que 193 des 334 lots cédés par la requérante à la société Hosur Panama au prix de 2 822 890 euros avaient été revendus aux enchères publiques chez Sotheby's pour un montant total de 7 852 662 euros seulement quelques mois plus tard, d'autre part, que l'organisation de cette vente aux enchères avait donné lieu à un contrat unique conclu le 13 avril 2007 entre Sotheby's et les sociétés Galerie Ariane A...et Hosur Panama et que l'ensemble des objets destinés à cette vente aux enchères, y compris ceux acquis par la société Hosur Panama, avaient été expédiés simultanément aux Etats-Unis d'Amérique dans les mêmes conteneurs. L'administration en a alors déduit que la cession des 334 lots par la société Galerie Ariane A...à la société Hosur Panama révélait un écart injustifié entre le prix convenu entre ces deux sociétés et la valeur vénale de ces lots et a réintégré au résultat imposable de la requérante, sur le fondement de l'article 57 du code général des impôts, la différence, égale à 4 822 862 euros, entre le produit issu de la vente aux enchères publiques des lots en cause et le prix auquel elle les avait cédés quelques mois plus tôt à la société Hosur Panama.

5. Toutefois, il résulte de l'instruction, notamment d'articles de la presse spécialisée, et n'est du reste pas contesté par l'administration, que la vente aux enchères chez Sotheby's des lots présentés à la fois par la requérante et la société Hosur Panama a revêtu un caractère exceptionnel, voire historique, ce qu'établit le fait que les lots en cause ont, en moyenne, été vendus à un prix représentant 198 % de la fourchette basse et 131 % de la fourchette haute de l'estimation effectuée avant la vente par douze experts indépendants mandatés par Sotheby's, avec un taux de lots invendus de 3 %, niveau particulièrement faible comparé à celui, compris entre 38 % et 45 %, constaté lors de ventes contemporaines chez Sotheby's ou Christie's qui, citées par la société Galerie ArianeA..., se sont en outre soldées par un produit représentant entre 44 % et 48 % de l'estimation basse des experts.

6. Si le ministre soutient que le caractère aléatoire d'une vente aux enchères publiques était, en l'espèce, limité par la fixation d'un prix de réserve, pour en déduire que la société Galerie Ariane A...eût pu bénéficier de prix nettement supérieurs en proposant elle-même à la vente aux enchères les lots qu'elle avait cédés quelques mois plus tôt à la société Hosur Panama, non seulement la requérante soutient, sans être contredite, que sur les 880 lots présentés, 80 % ne bénéficiaient pas d'un prix de réserve, mais encore et surtout, d'une part, ce prix de réserve, qui correspond à l'estimation basse, n'aurait garanti qu'un produit égal à la moitié de celui réalisé, d'autre part, une telle technique ne prémunit en tout état de cause pas contre le risque d'invendus. En outre, pour justifier l'intérêt que présentait pour elle la vente des 334 lots à la société Hosur Panama, l'un de ses fournisseurs historiques depuis 1982, la requérante établit que cette transaction de gré à gré, qui ne présentait ainsi aucun caractère aléatoire et a en outre été réalisée avec une marge de 27 % correspondant à la pratique compte tenu du grand nombre d'objets cédés au même acquéreur, de surcroît professionnel, lui a permis de solder sa dette de 3,5 millions d'euros à l'égard de la société Hosur Panama qui, par un courrier du 21 décembre 2006 rappelant l'existence de sa créance, demande clairement à l'intéressée de lui " vendre entre 3 et 5 millions d'objets afin que nous soyons propriétaires d'objets et non pas de créances ". Si le ministre relève, en outre, que la marge réalisée par la société requérante s'est élevée à 65 % lors de la vente chez Sotheby's alors qu'elle n'a été que de 27 % sur les lots qu'elle avait cédés seulement quelques mois plus tôt à la société Hosur Panama, la vente aux enchères dont il s'agit a, comme il vient d'être dit, revêtu un caractère exceptionnel, au demeurant grâce à la présentation de lots " phares " par la société Hosur Panama, dont la participation a permis d'atteindre une estimation basse de l'ensemble de lots proposés de 12 millions de dollars américains, condition posée par Sotheby's pour organiser cette vente aux enchères, étant par ailleurs fait observer que les marges de 27 % et de 65 % ne portent pas sur les mêmes lots et ont été réalisées dans des conditions fort différentes, la première à l'occasion d'une transaction de gré à gré portant sur 334 lots cédés à un même acheteur de surcroît professionnel, la seconde dans le cadre aléatoire d'une vente aux enchères.

7. Il résulte de ce qui précède que l'administration n'établit pas l'existence d'un écart injustifié, révélateur d'une libéralité, entre le prix auquel la société Galerie Ariane A...a cédé les 334 lots litigieux à la société Hosur Panama et leur valeur vénale. Par suite, la requérante est fondée à demander que sa base imposable à l'impôt sur les sociétés et à la contribution sociale soit réduite de 4 822 862 euros, montant de la rectification qui lui a été notifiée sur le fondement de l'article 57 du code général des impôts. Il y a dès lors lieu de prononcer la décharge des droits, intérêts de retard et pénalités correspondant à cette réduction de base.

En ce qui concerne la déductibilité des charges :

8. Aux termes du 1 de l'article 39 du code général des impôts, applicable à l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : " Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (au Luxembourg) notamment : 1° Les frais généraux de toute nature (au Luxembourg) ". En vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, s'il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci. Il appartient, dès lors, au contribuable de justifier tant du montant des charges qu'il entend, en application du I de l'article 39 du code général des impôts précité, déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du même code que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité. Le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée. Dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive.

9. En premier lieu, il résulte de l'instruction et, notamment, de la proposition de rectification du 14 décembre 2009, que le vérificateur a notamment remis en cause le caractère fiscalement déductible des charges inscrites au compte 6063000 " fournitures d'entretien et petit équipement " au titre des exercices clos les 30 juin 2003 et 30 juin 2004, au compte 606450 " fournitures informatiques et réparations " au titre des mêmes exercices, au compte 613500 " locations " au titre de l'exercice clos le 30 juin 2003 et au compte 625700 " réceptions " au titre du même exercice, au motif que la société Galerie Ariane A... n'avait présenté aucune pièce de nature à justifier les sommes ainsi déduites de son résultat.

10. S'agissant du compte " fournitures d'entretien et petit équipement ", la société requérante, qui mentionne qu'après la production de quatre factures d'un montant total de 3 784,40 euros au titre de l'exercice clos le 30 juin 2003, l'administration a admis ces charges dans cette mesure, sollicite que soient également admises les autres charges, d'un montant total de 8 363,79 euros, dès lors qu'elles sont de même nature. Toutefois, il est constant que les factures correspondantes ne sont pas produites, ce qui fait obstacle à ce que la demande de la société Galerie Ariane A...soit satisfaite. S'agissant de l'exercice suivant, l'intéressée soutient, sans être nullement contredite, que le service a refusé d'admettre en déduction une facture établie par Electrorama, d'un montant HT de 1 349 euros, au seul motif que la facture présentée indique un montant TTC de 1 613,40 euros. Ce dernier montant correspondant à un montant HT de 1 349 euros, il y a lieu de faire droit à la demande de l'intéressée. En revanche, dès lors qu'il est constant que cette dernière n'est pas à même de produire les factures afférentes aux autres charges, d'un montant total de 7 498,14 euros, les prétentions de la requérante ne peuvent qu'être rejetées.

11. S'agissant du compte " fournitures informatiques et réparations ", la société Galerie Ariane A...soutient, sans être contredite, que le service a, au titre de l'exercice clos le 30 juin 2003, refusé deux factures, de 451,81 euros et de 298,55 euros, de Sony et d'Apple, réglées par une carte American Express. Dans ces conditions, il y a lieu d'admettre la déductibilité de ces dépenses.

12. S'agissant du compte " locations ", la requérante soutient que le service a, au titre de l'exercice clos le 30 juin 2003, omis de prendre en compte une facture de 392,70 $, soit 342,88 euros, émise par la société First Sedans, et refusé de prendre en compte les dépenses de locations de véhicules, d'un montant total de 1 493,63 euros. Il résulte de l'instruction et, en particulier, de la proposition de rectification du 14 décembre 2009, que le vérificateur n'a pas réintégré de facture d'un montant de 342,88 euros établie par First Sedans, mais une facture de 256,09 euros. Quant aux dépenses de 1 493,63 euros, il est constant que la société Galerie Ariane A...n'est pas en mesure de produire les factures s'y rapportant. Dans ces conditions, les demandes de l'intéressée ne peuvent qu'être rejetées.

13. Enfin, s'agissant du compte 625700 " réceptions " dont le montant total, égal à 16 569,36 euros au titre de l'exercice clos le 30 juin 2003, a été rejeté par le vérificateur, si la société requérante soutient qu'elle a, postérieurement à la vérification de comptabilité, indiqué au service l'identité des bénéficiaires, elle ne produit pas les factures correspondantes. Par suite, les dépenses en cause ne peuvent être admises en déduction.

14. En deuxième lieu, i1 résulte également de l'instruction et, en particulier, de la proposition de rectification du 14 décembre 2009, que le vérificateur a remis en cause le caractère fiscalement déductible de dépenses exposées par la société Galerie Ariane A..., intitulées " cadeaux à la clientèle ", inscrites au compte 6234000 au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2008. Ayant constaté, au vu des factures qui lui ont alors été présentées, que les opérations en cause consistaient en l'achat de plaids en cashmere, de bougies d'ambiance, de trois montres de marque et d'un cadeau de mariage, le service a estimé que ces dépenses n'avaient pas été exposées dans l'intérêt de la société, relevant en outre le montant en cause, soit 43 149,52 euros, au regard du chiffe d'affaires, limité à 102 827 euros, réalisé par la société au titre de l'exercice clos en 2008.

15. La société Galerie ArianeA..., qui soutient sans être contredite avoir fourni en début de contrôle la liste des bénéficiaires, en l'espèce d'anciens clients ayant acquis des lots lors de la vente aux enchères d'octobre 2007, des journalistes de la presse spécialisée, des directeurs de chez Sotheby's et des représentants des sociétés chargées du transport des lots, fait valoir qu'il s'agit de gratifications dont le montant doit s'apprécier non pas au regard du chiffre d'affaires déclaré en 2008, mais de celui réalisé au titre de l'exercice précédent et procédant pour l'essentiel de la vente aux enchères qui, ayant eu lieu en octobre 2007, s'est déroulée dans des conditions exceptionnellement favorables ainsi qu'il a déjà été dit. Par suite, la société requérante, qui relève que ces cadeaux étaient destinés, d'une part, à l'entretien de ses relations avec des acteurs du monde de l'art, d'autre part, à la recherche ou à l'entretien d'une clientèle existante ou potentielle, doit être regardée comme établissant l'existence et la valeur de la contrepartie qu'elle en a retirée. Dans ces conditions, la société Galerie Ariane A...est fondée à demander que sa base imposable au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2008 soit réduite de 43 149,52 euros.

16. En troisième lieu, le service vérificateur a également remis en cause des dépenses inscrites au compte 6226000 " déplacements - missions - réceptions ", exposées au cours des exercices clos les 30 juin 2003, 2004, 2005, 2006 et 2007, ainsi qu'au cours des exercices clos les 31 décembre 2007 et 2008, au motif que ces charges, pour lesquelles aucun justificatif n'avait été présenté au cours du contrôle, correspondaient au règlement de dépenses de restauration, de transport, d'hôtellerie et de notes de frais au profit de Mme A...qui disposait de la carte bleue et de la carte American Express de la société requérante, ce dont l'administration a déduit que ces dépenses ne revêtaient pas un caractère professionnel.

17. Le ministre maintient, dans son mémoire enregistré le 30 novembre 2017, que ces charges ont été comptabilisées sans justificatifs, que Mme A...a reconnu ne pas les avoir conservés et que la clientèle de la Galerie Ariane A...étant pour l'essentiel américaine, seuls les frais d'hôtel pour des séjours à New York ont été admis en déduction par ses services à concurrence de 40 952,85 euros. Il résulte toutefois de l'instruction et, en particulier, de la production de nombreuses pièces particulièrement documentées, que la Galerie ArianeA..., qui fait valoir que les dépenses litigieuses sont inhérentes à l'exploitation d'une galerie d'antiquités qui, spécialisée dans l'art oriental, le mobilier étranger néo-classique et le mobilier français de l'époque Empire, est ainsi amenée à déployer une activité internationale consistant à s'approvisionner et à rencontrer des clients et des prospects dans plusieurs pays, ce qui nécessite des frais de déplacement, d'hébergement et de représentation, y compris pour participer à des foires internationales et organiser des expositions ou événements à la Galerie. Dans ces conditions les charges en cause, appuyées des factures correspondantes produites devant le juge de l'impôt ainsi que des relevés de comptes justifiant de leur paiement, doivent être regardées comme ayant été, en totalité, exposées dans l'intérêt de la société requérante et, par suite, comme déductibles de ses résultats, en vertu du 1, ainsi d'ailleurs que du 5, de l'article 39 du code général des impôts. Compte tenu des charges admises lors de l'entretien avec le supérieur du vérificateur, les montants restant en litige s'élèvent à 106 919,54 euros, 85 348,25 euros, 101 854,63 euros, 84 884,53 euros, 62 305,23 euros, 58 276,90 euros et 70 607,27 euros, respectivement au titre des exercices clos les 30 juin 2003, 2004, 2005, 2006, 2007 ainsi que les 31 décembre 2007 et 2008.

18. Aux termes du troisième alinéa du I de l'article 209 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux faits de l'espèce : " Sous réserve de l'option prévue à l'article 220 quinquies, en cas de déficit subi pendant un exercice, ce déficit est considéré comme une charge de l'exercice suivant et déduit du bénéfice réalisé pendant ledit exercice. Si ce bénéfice n'est pas suffisant pour que la déduction puisse être intégralement opérée, l'excédent du déficit est reporté sur les exercices suivants ".

19. Les résultats de la société Galerie Ariane A...sont restés déficitaires même après les rectifications opérées par le service au titre des exercices clos entre le 30 juin 2006 et le 31 décembre 2008, à l'exception de l'exercice couru du 1er juillet au 31 décembre 2007. En outre, alors même que les exercices clos les 30 juin 2003, 2004 et 2005 étaient prescrits, l'administration était en droit de vérifier le bien-fondé des déficits déclarés par la requérante au titre de ces exercices dès lors qu'ils étaient reportables sur les résultats des exercices suivants, non prescrits et vérifiés, dont ils constituaient une charge.

20. Dans ces conditions, les déficits rectifiés en dernier lieu par l'administration doivent être majorés de 107 669,90 euros au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2003 en vertu des points 11 et 17 du présent arrêt, de 86 697,25 euros au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2004 en vertu des points 10 et 17, de 101 854,63 euros au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2005 en vertu du point 17, de 84 884,53 euros au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2006 en vertu du point 17, de 62 305,23 euros au titre de l'exercice clos le 30 juin 2007 en vertu du point 17 et de 113 756,79 euros au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2008 en vertu des points 15 et 17.

21. Le résultat de l'exercice clos le 31 décembre 2007 étant, quant à lui bénéficiaire, il y a lieu d'imputer sur ce dernier les déficits cumulés accusés au titre des exercices clos les 31 décembre 2003, 2004, 2005 et 2006 ainsi qu'au titre de l'exercice clos le 30 juin 2007, soit un total de 443 411,54 euros. Dès lors, la société Galerie Ariane A...est seulement fondée à demander que sa base imposable à l'impôt sur les sociétés et à la contribution sociale qui lui ont été assignés au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2007 soit, conformément à ce qui a été dit aux points 7, 17 et 20, réduite de 4 822 862 euros, de 58 276,90 euros et de 443 411,54 euros, correspondant à un total de 5 324 550,44 euros, en ce inclus la réduction de base de 482 200 euros décidée par le jugement attaqué.

22. Il résulte de tout ce qui précède que la société Galerie Ariane A...est seulement fondée à demander, d'une part, que la réduction de sa base imposable à l'impôt sur les sociétés et à la contribution sociale au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2007 soit portée de 482 200 euros à 5 324 550 euros, d'autre part que les déficits des exercices non prescrits et vérifiés, clos les 30 juin 2006 et 2007 ainsi que le 31 décembre 2008, soient fixés conformément au point 20.

Sur les frais liés au litige :

23. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat le versement à la requérante d'une somme de 2 500 euros au titre des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : Les déficits des exercices non prescrits, clos le 30 juin 2006, le 30 juin 2007 et le 31 décembre 2008 sont majorés conformément aux points 20 et 22 du présent arrêt.

Article 2 : La base d'imposition à l'impôt sur les sociétés et à la contribution sociale assignés à la société Galerie Ariane A...au titre de l'exercice couru du 1er juillet au 31 décembre 2007 est réduite de 5 324 550 euros.

Article 3 : La société Galerie Ariane A...est déchargée des droits, intérêts de retard et majorations correspondant à la réduction de base définie à l'article 2 ci-dessus.

Article 4 : Le jugement n° 1316014 du 31 décembre 2014 du Tribunal administratif de Paris est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 5 : L'Etat versera à la société Galerie Ariane A...une somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la société par actions simplifiée Galerie Ariane A... et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera adressée à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction de contrôle fiscal d'Ile-de-France Ouest.

Délibéré après l'audience du 8 juin 2018, à laquelle siégeaient :

- Mme Heers, président de chambre,

- M. Auvray, président-assesseur,

- M. Boissy, premier conseiller,

Lu en audience publique le 22 juin 2018.

Le rapporteur,

B. AUVRAYLe président,

M. HEERSLe greffier,

F. DUBUY

La République mande et ordonne au ministre l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17PA02010


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 17PA02010
Date de la décision : 22/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-01-04-082 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Bénéfices industriels et commerciaux. Détermination du bénéfice net. Acte anormal de gestion.


Composition du Tribunal
Président : Mme HEERS
Rapporteur ?: M. Brice AUVRAY
Rapporteur public ?: Mme MIELNIK-MEDDAH
Avocat(s) : CMS BUREAU FRANCIS LEFEBVRE

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-06-22;17pa02010 ?
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