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21/06/2018 | FRANCE | N°17PA03042

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 21 juin 2018, 17PA03042


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... A...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté en date du 13 décembre 2016 par lequel le préfet de police a refusé de renouveler son titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, en fixant son pays de destination.

Par un jugement n° 1703630/1-2 du 3 août 2017, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 7 septembre 2017 et

un mémoire enregistré le 1er avril 2018, Mme A..., représentée par MeD..., demande à la Cour :...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... A...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté en date du 13 décembre 2016 par lequel le préfet de police a refusé de renouveler son titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, en fixant son pays de destination.

Par un jugement n° 1703630/1-2 du 3 août 2017, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 7 septembre 2017 et un mémoire enregistré le 1er avril 2018, Mme A..., représentée par MeD..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1703630/1-2 du 3 août 2017 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet de police du 13 décembre 2016 ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation administrative en vue de la délivrance d'un titre de séjour mention " vie privée et familiale " ou " salarié " dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard et de lui délivrer dans cette attente une autorisation provisoire de séjour avec autorisation d'exercer un emploi ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son avocat, Me D..., au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- les premiers juges ont omis de statuer sur le moyen tiré de ce que la décision attaquée méconnaît l'article 3 de l'arrêté du 9 novembre 2011 ;

- l'arrêté litigieux est insuffisamment motivé ;

- c'est à tort que le Tribunal administratif de Paris a jugé inopérant le moyen tiré de ce que le préfet n'avait pas suffisamment motivé son refus de séjour en qualité de salariée sur le fondement de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, c'est au préfet de police qu'il appartient de démontrer la compétence du médecin chef du service médical qui a rendu l'avis concernant la situation de MmeA... ;

- la décision attaquée méconnaît les dispositions de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- c'est à tort que le Tribunal administratif de Paris a jugé inopérant le moyen tiré de ce que le préfet n'avait pas suffisamment motivé son refus de séjour en qualité de salariée sur le fondement de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- c'est à tort que le tribunal a jugé que la condition de résidence nécessaire pour demande un titre de séjour n'était pas remplie ;

- le préfet de police ne démontre pas qu'elle pourrait recevoir un traitement approprié à son état de santé dans son pays d'origine ;

- la prise en charge effective de sa pathologie n'est pas possible dans son pays d'origine ;

- le médecin, chef du service médical de la préfecture de police, a méconnu l'article 3 de l'arrêté du 9 novembre 2011 dès lors qu'il n'a pas pris en compte les perspectives d'évolution de sa maladie ;

- la décision attaquée méconnaît les dispositions des articles L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, R. 5221-3 14°, R. 5221-1, R. 5221-14, R. 5221-15 et R. 5521-17 du code du travail ;

- il appartenait au préfet, saisi d'un dossier préalablement incomplet de demande de titre de séjour portant la mention salarié, de solliciter toutes les pièces utiles à l'instruction de cette demande comme le prévoit l'article L. 114-5 du code des relations entre le public et l'administration ;

- il appartient au préfet, saisi d'une demande de titre de séjour en qualité de salarié de recevoir et de procéder à l'examen de la demande d'autorisation de travail et le préfet ne pouvait donc pas lui opposer l'absence de contrat de travail visé par les autorités ;

- le préfet n'apporte pas la preuve de la disponibilité effective du Celebrex au Mali en dépit de son autorisation de mise sur le marché, ni de celle des traitements par immunosuppresseurs envisagés par le docteur Champion-Raveneau dans son certificat du 16 février 2017.

Par un mémoire enregistré le 30 mars 2018, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 24 novembre 2017 du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,

- le code du travail,

- le code des relations entre le public avec l'administration,

- l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé,

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et son décret d'application n° 91-1266 du 19 décembre 1991,

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Mme C...a présenté son rapport au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., ressortissante malienne née le 27 juillet 1985, relève appel du jugement du 3 août 2017 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police du 13 décembre 2016 lui refusant le renouvellement de son titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, en fixant son pays de destination.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Mme A... soutient que les premiers juges ont omis de statuer sur le moyen tiré de ce que la décision attaquée qui ne mentionne pas les perspectives d'évolution de sa maladie, méconnaît l'article 3 de l'arrêté du 9 novembre 2011, aux termes duquel : " Au vu des informations médicales qui lui sont communiquées par l'intéressé ou, à la demande de celui-ci, par tout autre médecin, et au vu de tout examen qu'il jugera utile de prescrire, le médecin agréé ou le médecin praticien hospitalier mentionné à l'article 1er établit un rapport précisant le diagnostic des pathologies en cours, le traitement suivi et sa durée prévisible ainsi que les perspectives d'évolution. (...) ". Toutefois, il ressort du jugement attaqué qu'en relevant qu'aucun élément du dossier ne laisse accroire que le médecin chef du service médical de la préfecture, aurait méconnu l'évolution de la pathologie de Mme A..., le tribunal a suffisamment répondu au moyen soulevé par cette dernière. Par suite, le jugement attaqué n'est entaché d'aucune omission à statuer.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. Si Mme A...soutient que l'arrêté contesté est insuffisamment motivé, il ressort de cette décision qu'elle vise les textes et énonce les considérations de fait sur lesquels elle se fonde. Par suite, le moyen manque en fait.

4. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version applicable à la demande de titre de séjour présentée par Mme A...avant le 1er novembre 2016 : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 11°: A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis (...), à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. (...) ".

5. Si Mme A...soutient que, contrairement à ce qu'a estimé le tribunal, il incombe au préfet de police de démontrer la compétence du médecin chef du service médical, il ressort des pièces du dossier que le préfet a produit en première instance l'avis médical du 28 juin 2016 signé par le docteur Dufour, qui disposait par arrêté n° 2003-16426 du 24 octobre 2003 publié au Recueil des actes de la ville de Paris le 16 décembre 2003, compétence pour ce faire. Par suite, le moyen manque en fait.

6. Il ressort des pièces du dossier que pour refuser de lui délivrer un titre de séjour, le préfet de police s'est fondé sur l'avis précité du 28 juin 2016 du médecin, chef du service médical de la préfecture de police, qui a estimé que si l'état de santé de Mme A...nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, elle pouvait effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine et que le traitement et le suivi appropriés à son état étaient disponibles au Mali. Mme A...souffre d'une spondylarthrite ankylosante et est suivie par le docteur Champion qui atteste qu'elle souffre de douleurs articulaires très invalidantes nécessitant des traitements au long cours par anti-inflammatoires et qu'elle n'est plus soulagée par les anti-inflammatoires conventionnels comme le Cébutid mais par les anti-Cox 2, actuellement le Celebrex et qu'elle ne pourra pas bénéficier d'un traitement adapté à son état de santé en cas de retour dans son pays d'origine. Mme A...fait valoir que ce traitement ne figure pas sur la liste des médicaments essentiels au Mali prise par arrêté du 27 juin 2012 du ministre de la santé. Toutefois, il ressort de la nomenclature des médicaments disposant d'une autorisation de mise sur le marché éditée en 2016 par le ministère de la santé et de l'hygiène publique malien, produite par le préfet de police en défense, que le Celebrex est commercialisé au Mali. Si Mme A...fait également valoir que le même certificat mentionne qu'il sera " peut-être utile dans l'avenir de mettre la patiente sous anti TNF ", cette indication d'un traitement éventuel par immunosuppresseurs n'est pas de nature à remettre en cause la décision du préfet dont la légalité s'apprécie au moment où elle a été prise et qui s'appuie sur un avis médical qui, ainsi qu'il a été dit au point 2, prend en compte les évolutions des traitements nécessaires à l'état de santé du patient. En tout état de cause, le préfet fait valoir sans être contredit que des immunosuppresseurs figurent sur la liste des médicaments disponibles au Mali produite par la requérante elle-même. Par suite, Mme A...n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté contesté a été pris en méconnaissance des dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

7. Si Mme A...soutient que c'est à tort que le tribunal a estimé qu'elle ne pouvait être regardée comme résidant en France au sens des dispositions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au moment où son état de santé a nécessité une prise en charge médicale, il résulte de ce qui a été dit au point précédent que ce motif, erroné et surabondant, et sans incidence sur le bien-fondé du rejet du moyen tiré de la violation desdites dispositions.

8. L'article L. 114-5 du code des relations entre le public et l'administration dispose que : " Lorsqu'une demande adressée à l'administration est incomplète, celle-ci indique au demandeur les pièces et informations manquantes exigées par les textes législatifs et réglementaires en vigueur. Elle fixe un délai pour la réception de ces pièces et informations. ".

9. Mme A...soutient enfin qu'il appartenait au préfet, saisi d'un dossier préalablement incomplet de demande de titre de séjour portant la mention " salarié " de procéder à l'examen de la demande d'autorisation de travail et que n'ayant pas sollicité toutes les pièces utiles à l'instruction de cette demande comme le prévoit l'article L. 114-5 précité du code des relations entre le public et l'administration, le préfet ne pouvait lui opposer l'absence de contrat de travail visé par les autorités compétentes. S'il ressort de la fiche de salle produite par le préfet en première instance que Mme A... a demandé le renouvellement de son titre de séjour en qualité d'étranger malade, il ressort également des pièces du dossier que le préfet de police a examiné le droit au séjour de l'intéressée en qualité de salariée à la suite à l'envoi par cette dernière d'un contrat de travail et de bulletins de salaire. Toutefois, Mme A...ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l'article L. 114-5 du code des relations entre le public et l'administration dès lors que le préfet ne s'est pas fondé sur l'absence de documents ou de justificatifs nécessaires à l'instruction du dossier de l'intéressée, mais sur ce que celle-ci ne disposait pas d'un contrat de travail visé par les services de la main d'oeuvre étrangère, conformément à l'article R. 5221-3 4° du code du travail, ce qu'elle ne conteste pas. Dès lors, les moyens tirés de ce que la procédure aurait été menée en méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 411-5 du code des relations entre le public et l'administration et de ce que le refus de titre de séjour en qualité de salariée serait illégale, ne peuvent qu'être écartés.

10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Il y a lieu, en conséquence, de rejeter ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celle présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... A...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 7 juin 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président de chambre,

- Mme C..., première conseillère,

- MmeB..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 21 juin 2018.

La rapporteure,

M. C...Le président,

J. LAPOUZADE

La greffière,

Y. HERBER

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17PA03042


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 17PA03042
Date de la décision : 21/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: Mme Marianne JULLIARD
Rapporteur public ?: M. SORIN
Avocat(s) : RAPOPORT

Origine de la décision
Date de l'import : 26/06/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-06-21;17pa03042 ?
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