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20/06/2018 | FRANCE | N°17PA02744

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 20 juin 2018, 17PA02744


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Menuiserie de la Brie a demandé au Tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2010 et 2011, à concurrence d'une somme de 60 770 euros en droits, dont 21 895 euros pour l'année 2010 et 38 875 euros pour l'année 2011 et de 3 725 euros au titre des pénalités, dont 2 014 euros pour 2010 et

1 711 euros pour 2011.

Par un

jugement n° 1506615/7 du 15 juin 2017, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa deman...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Menuiserie de la Brie a demandé au Tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2010 et 2011, à concurrence d'une somme de 60 770 euros en droits, dont 21 895 euros pour l'année 2010 et 38 875 euros pour l'année 2011 et de 3 725 euros au titre des pénalités, dont 2 014 euros pour 2010 et

1 711 euros pour 2011.

Par un jugement n° 1506615/7 du 15 juin 2017, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 4 août 2017, la société Menuiserie de la Brie, représentée par Me C...B..., demande à la Cour :

1°) de réformer ce jugement du Tribunal administratif de Paris du 15 juin 2017 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions litigieuses ;

Elle soutient que :

- le rôle de la gérante dans le développement de la société a été exceptionnel ;

- le travail effectué pour l'obtention et la coordination d'un important chantier est sans rapport avec la prestation matérielle de fabrication et de pose de menuiseries ;

- le taux de rentabilité obtenu après réintégration est excessif pour le secteur d'activité ;

- les termes de comparaison diffèrent selon les années ;

- les entreprises choisies pour la comparaison n'ont pas d'activité de coordination de chantier et de maitrise d'ouvrage, ne connaissent pas le même rythme de croissance et ont un régime juridique différent.

Par un mémoire en défense, enregistré le 16 janvier 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les moyens soulevés par la société Menuiserie de la Brie ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 21 février 2018, la clôture d'instruction a été fixée au 9 mars 2018.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Magnard,

- et les conclusions de M. Cheylan, rapporteur public.

1. Considérant que la Société à responsabilité limitée (SARL) Menuiserie de la Brie, qui réalise des prestations immobilières dans le domaine de la menuiserie et des prestations de service relatives à la coordination de chantiers en Seine-et-Marne, et dont Mme A...est la gérante et l'associée à hauteur de 24 % du capital social, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité pour la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2011 ; qu'à l'issue des opérations de contrôle, le service vérificateur a, selon la procédure de rectification contradictoire prévue par l'article L. 55 du livre des procédures fiscales, mis à la charge de la société des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 2010 et 2011, à concurrence d'une somme totale de 60 770 euros de droits, dont 21 895 euros au titre de l'exercice 2010 et 38 875 euros au titre de l'exercice 2011 et de 3 275 euros de pénalités, dont

2 014 euros pour 2010 et 1 711 euros pour 2011 ; que la société Menuiserie de la Brie relève appel du jugement du 28 février 2017 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 39-1-1° du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à la période d'imposition en litige : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : 1 Les frais généraux de toute nature, les dépenses de personnel et de main-d'oeuvre, le loyer des immeubles dont l'entreprise est locataire. / Toutefois les rémunérations ne sont admises en déduction des résultats que dans la mesure où elles correspondent à un travail effectif et ne sont pas excessives eu égard à l'importance du service rendu. Cette disposition s'applique à toutes les rémunérations directes ou indirectes, y compris les indemnités, allocations, avantages en nature et remboursements de frais (...) ; " ;

3. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que le caractère normal des rémunérations doit être apprécié au vu de l'ensemble des éléments des rémunérations de toute nature versées, qu'il s'agisse des sommes versées en contrepartie d'une prestation contractuelle, des indemnités allouées à titre de compléments de rémunération, de la valeur des avantages en nature et des indemnités, remboursements et allocations forfaitaires pour frais ; que, par ailleurs, le caractère excessif des rémunérations doit être établi en fonction de plusieurs critères objectifs, dont les taux de rémunération attribués aux personnels occupant des emplois analogues dans les entreprises similaires de la région, l'importance de la rémunération totale et éventuellement de la part de capital détenue par le contribuable, le volume des affaires sociales, la nature des fonctions exercées par le bénéficiaire et l'importance de ses responsabilités ;

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment de la vérification de comptabilité dont la société Menuiserie de la Brie a fait l'objet au titre de la période du

1er janvier 2009 au 31 décembre 2011, que ladite société a versé à sa gérante, MmeA..., des rémunérations à concurrence d'un montant de 196 816 euros en 2010 et 267 899 euros en 2011 ; qu'à l'issue des opérations de contrôle, l'administration a considéré ces rémunérations comme excessives, en application des dispositions du code général des impôts visées au point 2, et a procédé à des rectifications, à hauteur de la fraction des sommes considérée comme non déductible, soit 85 000 euros pour 2010 et 110 000 euros pour 2011 ; que, par avis rendu le 8 septembre 2015, la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires a maintenu ces rectifications dans leur principe, mais a toutefois considéré, au vu des pièces produites, que la rémunération non déductible de Mme A...devait être estimée à 60 000 euros en 2010 et 90 000 euros en 2011 ; que ces éléments ont été pris en compte par le service lorsqu'il a notifié les nouvelles conséquences financières du contrôle à la société, par courrier daté du 3 octobre 2014 ;

5. Considérant, en premier lieu, que, pour apporter la preuve qui lui incombe du caractère excessif des rémunérations versées, l'administration a fait valoir que les rémunérations de Mme A...sont disproportionnées, tant au regard du chiffre d'affaires de la société, qui a atteint le montant de 550 428 euros en 2010 et 1 325 727 euros en 2011, que des bénéfices opérés par l'entreprise, à concurrence de 60 772 euros en 2010 et 134 063 euros en 2011 ; qu'elle a également fait valoir que la rémunération de Mme A...représentait 82 % des frais de personnel en 2010 et 54 % de ces frais en 2011, soit des montants disproportionnés au regard des rémunérations versées par l'entreprise aux autres salariés ; qu'au vu de l'ensemble de ces éléments, le service a estimé que la comparaison des rémunérations en litige avec le chiffre d'affaires, le résultat comptable et la masse salariale faisait apparaître, par elle-même, le caractère excessif desdites rémunérations ; que si la société requérante fait valoir que le rôle de la gérante dans le développement de la société a été exceptionnel et que le travail effectué par Mme A...pour l'obtention et la coordination d'un important chantier est sans rapport avec la prestation matérielle de fabrication et de pose de menuiseries, elle n'apporte pas le moindre élément à l'appui de ses allégations, alors que pour sa part le ministre invoque, sans être contesté, la part prise par son époux, associé majoritaire et salarié de la société, dans le développement de celle-ci ; que dans ces conditions, la société ne saurait être regardée comme remettant valablement en cause la portée des constats effectués par l'administration en se bornant à faire valoir que taux de rentabilité obtenu après réintégration est excessif pour le secteur d'activité ;

6. Considérant, en deuxième lieu, que, pour apprécier le caractère excessif de la rémunération versée à MmeA..., le service a également procédé à une étude comparative avec cinq autres sociétés présentant la même forme juridique, le même code NACE, un chiffre d'affaires et un bénéfice comparables dans un même ressort géographique ; qu'il résulte notamment des pages 15 et 16 de la proposition de rectification du 8 mars 2013 que la rémunération accordée à sa gérante par la SARL Menuiserie de la Brie en 2010 était nettement supérieure à la moyenne de la rémunération versée par les autres sociétés à leurs gérants ; qu'ainsi, Mme A...a reçu la somme de 196 816 euros, très supérieure à la rémunération moyenne des autres gérants qui s'établissait, pour la même période, à la somme de 32 754 euros, alors même que les entreprises ayant servi à la comparaison disposaient, en moyenne, d'un chiffre d'affaires plus important, à hauteur de 648 810 euros et d'un bénéfice plus conséquent, à concurrence de 74 354 euros, contre 550 428 euros et 60 772 euros pour la SARL Menuiserie de la Brie ; que la même tendance a été relevée pour l'exercice clos en 2011, la moyenne des rémunérations des gérants des autres sociétés atteignant une somme de 49 574 euros, contre

267 899 euros reçus par Mme A...; qu'il résulte de la combinaison de ces éléments que Mme A...a reçu une rémunération six fois supérieure en 2010 et cinq fois supérieure en 2011 à celle versée en moyenne par des entreprises comparables ; que la circonstance que les termes de comparaison diffèrent selon les années n'est pas de nature à remettre en cause leur pertinence ; que si la société fait valoir que les entreprises choisies pour la comparaison n'ont pas d'activité de coordination de chantier et de maitrise d'ouvrage, elle n'apporte aucun élément permettant d'apprécier la part effective de cette dernière activité dans son propre chiffre d'affaires, alors que le ministre fait valoir pour sa part qu'elle s'est considérablement réduite entre 2009 et 2011 ; que la circonstance que les entreprises choisies par le service ne connaissent pas le même rythme de croissance et ont un régime juridique différent ne saurait dans ces conditions suffire à invalider les comparaisons effectuées ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Menuiserie de la Brie n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'État, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de la somme que la requérante demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société Menuiserie de la Brie est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Menuiserie de la Brie et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris.

Délibéré après l'audience du 6 juin 2018, à laquelle siégeaient :

- Mme Appèche, président,

- M. Magnard, premier conseiller,

- Mme Jimenez, premier conseiller.

Lu en audience publique le 20 juin 2018.

Le rapporteur,

F. MAGNARDLe président assesseur,

En application de l'article R. 222-26 du code

de justice administrative

S. APPECHE

Le greffier,

P. LIMMOIS

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 17PA02744


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 17PA02744
Date de la décision : 20/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme APPECHE
Rapporteur ?: M. Franck MAGNARD
Rapporteur public ?: M. CHEYLAN
Avocat(s) : CABINET D'AVOCATS MARTIN ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 26/06/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-06-20;17pa02744 ?
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