La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/06/2018 | FRANCE | N°17PA02589

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 12 juin 2018, 17PA02589


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...A...a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler la décision implicite née du silence gardé par le préfet de Seine-et-Marne sur le recours gracieux qu'elle a présenté en vue d'obtenir la délivrance d'un titre de séjour.

Par un jugement n° 1605004 du 30 mai 2017, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 26 juillet et 6 décembre 2017, Mme A..., représentée par MeC..., deman

de à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1605004 du 30 mai 2017 du Tribunal administratif de M...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...A...a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler la décision implicite née du silence gardé par le préfet de Seine-et-Marne sur le recours gracieux qu'elle a présenté en vue d'obtenir la délivrance d'un titre de séjour.

Par un jugement n° 1605004 du 30 mai 2017, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 26 juillet et 6 décembre 2017, Mme A..., représentée par MeC..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1605004 du 30 mai 2017 du Tribunal administratif de Melun ;

2°) d'annuler la décision implicite née du silence gardé par le préfet de Seine-et-Marne sur le recours gracieux qu'elle a présenté en vue d'obtenir la délivrance d'un titre de séjour ;

3°) d'enjoindre au préfet de Seine-et-Marne de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " l'autorisant à travailler ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le préfet a commis une erreur de droit en rejetant sa demande sur le fondement du 11°de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article L. 311-12 du même code, alors qu'elle a demandé un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision attaquée a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle ne représente pas un danger pour l'ordre public.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 août 2017, le préfet de Seine-et-Marne conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme A...ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Lescaut a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que Mme B...A..., ressortissante centrafricaine, entrée régulièrement en France le 23 septembre 2015, sous couvert d'un visa C Schengen d'une durée de 90 jours, a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 1° de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en qualité d'accompagnante de son conjoint malade ; que, par une décision en date du 4 avril 2016, le préfet de Seine-et-Marne a refusé de faire droit à sa demande au motif que les dispositions précitées du 1° de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne lui étaient pas applicables, dès lors que sa demande avait pour objet d'accompagner son époux malade ; que, par une lettre en date du 25 mai 2016, Mme A...a formé un recours gracieux à l'encontre de cette décision et sollicité du préfet de Seine-et-Marne la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le silence gardé pendant plus de quatre mois par le préfet de Seine-et-Marne sur cette demande a fait naître une décision implicite de rejet ; que Mme A...relève appel du jugement du 30 mai 2017 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

3. Considérant qu'il est constant que Mme A...est arrivée en France pour rejoindre son époux qui réside régulièrement sur le territoire français, ainsi que leur fille et leurs petits-enfants, lesquels sont de nationalité française ; que son époux, titulaire d'une carte d'invalidité au taux égal ou supérieur à 80 %, fait l'objet d'un suivi constant après sa greffe rénale intervenue le 2 février 2016, dès lors qu'il souffre d'un rejet chronique de son greffon et d'une insuffisance rénale dont la surveillance et le traitement nécessitent qu'il soit suivi en France, ainsi que cela ressort du certificat médical établi le 22 juin 2015 par le néphrologue du service de néphrologie et de transplantation du centre hospitalier universitaire Bicêtre, du compte-rendu opératoire du 2 février 2016 rédigé par l'hôpital Saint-Antoine à Paris à la suite de l'opération de M. A...le 2 février 2016, et du certificat médical établi le 23 février 2018 par le néphrologue du service de néphrologie dialyse de l'hôpital de Melun ; que ces différentes pathologies et complications nécessitent un accompagnement constant ; que, compte tenu de l'ensemble de ces circonstances, et alors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la vie familiale de MmeA..., de son époux, dont la situation régulière n'est pas contestée, de sa fille et de ses petits enfants qui ont la nationalité française, pourrait se poursuivre dans un autre pays que la France, la requérante est fondée à soutenir que la décision implicite de rejet en litige porte une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale et, par suite, méconnaît les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Mme A...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite de refus de titre de séjour en litige ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : "Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ;

6. Considérant que le présent arrêt implique nécessairement qu'il soit enjoint au préfet de Seine-et-Marne de délivrer à Mme A...un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 000 euros à verser à Mme A...au titre des frais qu'elle a exposés ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Melun n°1605004 du 30 mai 2017 et la décision implicite née du silence gardé par le préfet de Seine-et-Marne sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de Seine-et-Marne de délivrer à Mme A...un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Mme A...une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...A..., au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 3 mai 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Formery, président,

- Mme Poupineau, président assesseur,

- Mme Lescaut, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 12 juin 2018.

Le rapporteur,

C. LESCAUT Le président,

S-L. FORMERY

Le greffier,

N. ADOUANE

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 17PA02589 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 17PA02589
Date de la décision : 12/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. FORMERY
Rapporteur ?: Mme Christine LESCAUT
Rapporteur public ?: M. LEMAIRE
Avocat(s) : BALEZOU GLOUM

Origine de la décision
Date de l'import : 19/06/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-06-12;17pa02589 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award