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12/06/2018 | FRANCE | N°17PA01579

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 12 juin 2018, 17PA01579


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...A...a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 12 mai 2015 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant son pays de destination.

Par un jugement n° 1508951 du 10 juin 2016, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés

les 9 mai 2017 et 15 janvier 2018, MmeA..., représentée par MeB..., demande à la Cour :

1°) d'...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...A...a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 12 mai 2015 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant son pays de destination.

Par un jugement n° 1508951 du 10 juin 2016, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 9 mai 2017 et 15 janvier 2018, MmeA..., représentée par MeB..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1508951 du 10 juin 2016 du Tribunal administratif de Melun ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet du Val-de-Marne en date du 12 mai 2015 ;

3°) à titre principal, d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et de lui délivrer durant cet examen une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travailler ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

S'agissant de la décision de refus de séjour :

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation, le préfet du Val-de-Marne n'ayant pas tenu compte du fait qu'elle souffre d'achondroplasie ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'elle justifie de motifs exceptionnels pour l'attribution d'un titre de séjour eu égard à la durée de son séjour en France supérieure à dix ans et à son intégration dans la société française ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors que l'intéressée réside de manière ininterrompue en France depuis plus de dix ans et n'a plus aucune famille dans son pays d'origine qu'elle a quitté à l'âge de 26 ans ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est entachée des mêmes illégalités que la décision de refus de séjour ;

- elle est privée de base légale en raison de l'illégalité de la décision de refus de séjour.

La requête a été communiquée au préfet du Val-de-Marne, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Mme A...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris du 31 mars 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Lescaut a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que MmeA..., ressortissante malienne, est entrée en France le 7 février 2001 munie d'un visa court séjour ; qu'elle a sollicité le bénéfice d'une admission exceptionnelle au séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'après avis défavorable de la commission du titre de séjour rendu le 24 mars 2015, le préfet du Val-de-Marne a, par un arrêté du 12 mai 2015, opposé un refus à sa demande, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office à l'expiration de ce délai ; que Mme A...relève appel du jugement en date du 10 juin 2016 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la légalité de la décision de refus de titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des termes mêmes de l'arrêté contesté qu'il vise notamment la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et qu'il précise que Mme A...ne remplit pas les conditions de l'article L. 313-11, 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qu'elle n'atteste pas de l'intensité d'une vie privée et familiale en France, qu'elle est célibataire, sans charges de famille et n'atteste pas être démunie d'attaches familiales à l'étranger ; que l'arrêté litigieux se réfère à l'avis défavorable rendu par la commission du titre de séjour le 24 mars 2015 et aux motifs qu'elle ne justifie ni d'un motif exceptionnel ni d'une circonstance humanitaire ; que l'arrêté contesté comporte ainsi, de manière suffisante, l'énoncé des considérations de droit et de fait qui fondent la décision portant refus de titre de séjour ; que, dès lors, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision portant refus de séjour doit être écarté ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Val-de-Marne n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation personnelle de Mme A...avant de rejeter la demande de titre de séjour dont elle l'avait saisi ;

4 Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. (...) " ;

5. Considérant que, si Mme A...se prévaut de l'ancienneté de son séjour en France, de son état de santé, et de ses liens familiaux, les circonstances qu'elle fait valoir, au vu de l'ensemble des pièces du dossier, ne suffisent pas à regarder la situation de l'intéressée comme relevant de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels de nature à justifier une admission exceptionnelle au séjour ; que, dès lors, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision en litige aurait méconnu les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

6. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) " ;

7. Considérant que MmeA..., entrée en France en 2001, se prévaut de l'ancienneté de son séjour en France et des liens personnels et familiaux dont elle y dispose en faisant valoir que son frère, de nationalité française, et sa soeur, titulaire d'une carte de résident, vivent sur le territoire français ; qu'elle n'établit pas qu'elle entretiendrait des relations régulières avec son frère, pas plus qu'elle ne justifie que son état de santé nécessiterait l'aide indispensable de sa soeur ; que, l'intéressée, qui soutient qu'il lui est impossible d'exercer un emploi en raison de son état de santé, est célibataire et sans enfant à charge, et ne démontre pas être dépourvue d'attaches dans son pays d'origine qu'elle a quitté à l'âge de 26 ans et où réside son fils majeur ; que, dans ces conditions, la décision de refus de titre de séjour du préfet du Val-de-Marne n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au but en vue duquel cette décision a été prise ; qu'ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

8. Considérant que, pour les motifs exposés aux points 5 et 7, la requérante n'est pas davantage fondée à soutenir que le préfet du Val-de-Marne a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision de refus de titre de séjour sur sa situation personnelle ;

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

9. Considérant, en premier lieu, que l'obligation de quitter le territoire français contestée découle du refus de titre de séjour opposé à la requérante en application de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il s'ensuit que sa motivation se confond avec celle du refus de titre de séjour dont a fait l'objet MmeA..., lequel est, ainsi qu'il a été dit au point 2, suffisamment motivé ; que, par suite, le moyen tiré du défaut de motivation de la décision portant obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écarté ;

10. Considérant, en deuxième lieu, que pour les mêmes motifs que ceux cités au point 7, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

11. Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte des motifs qui précèdent que Mme A...n'établit pas pouvoir bénéficier de l'attribution d'un titre de séjour de plein droit au titre des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;

12. Considérant, en quatrième lieu, que les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne prévoient pas la délivrance d'un titre de séjour de plein droit ; que, par suite, Mme A...ne saurait utilement se prévaloir de ces dispositions pour contester l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français ;

13. Considérant, en dernier lieu, que les moyens dirigés contre la décision de refus de titre de séjour n'étant pas fondés, l'exception d'illégalité de cette décision invoquée à l'appui des conclusions de Mme A...dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours ne peut qu'être écartée ;

14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...A...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Val-de-Marne.

Délibéré après l'audience du 3 mai 2018 à laquelle siégeaient :

- M. Formery, président de chambre,

- Mme Poupineau, président assesseur,

- Mme Lescaut, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 12 juin 2018.

Le rapporteur,

C. LESCAUTLe président,

S.-L. FORMERY

Le greffier,

N. ADOUANE

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 17PA01579 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 17PA01579
Date de la décision : 12/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. FORMERY
Rapporteur ?: Mme Christine LESCAUT
Rapporteur public ?: M. LEMAIRE
Avocat(s) : OSTIER

Origine de la décision
Date de l'import : 19/06/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-06-12;17pa01579 ?
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