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08/06/2018 | FRANCE | N°18PA00302

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 08 juin 2018, 18PA00302


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F... B...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 19 décembre 2016 par laquelle le préfet de police lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé son pays de destination.

Par un jugement n° 1707488 du 28 septembre 2017, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 26 janvier 2018, Mme B..., représentée par Me

E..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 28 septembre 2017 ;

2°) d'annuler cet a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F... B...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 19 décembre 2016 par laquelle le préfet de police lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé son pays de destination.

Par un jugement n° 1707488 du 28 septembre 2017, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 26 janvier 2018, Mme B..., représentée par Me E..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 28 septembre 2017 ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou " étudiant " dans un délai d'un mois à compter de la décision, à défaut de réexaminer sa situation administrative sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros à verser à Me E... contre renonciation de sa part au bénéfice de l'aide juridictionnelle en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- son conseil a reçu un avis de renvoi à une audience ultérieure sans précision de la date et de l'heure de la nouvelle audience, de sorte qu'elle n'a pu présenter d'observations orales ;

- le refus de séjour n'est pas suffisamment motivé ; sa demande devait être étudiée au regard des critères de la circulaire du 28 novembre 2012 ;

- il méconnaît les dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il est entaché d'erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation personnelle et familiale ;

- l'obligation de quitter le territoire est également entachée d'erreur manifeste d'appréciation et méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Mme B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris du 15 décembre 2017.

Le président de la 7ème chambre de la Cour a, en application des dispositions de l'article R. 611-8 du code de justice administrative, dispensé la présente requête d'instruction.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience :

- le rapport de Mme Heers,

- et les observations de Me E...pour MmeB....

Considérant ce qui suit :

1. Mme F...B..., ressortissante ivoirienne, a sollicité le 26 janvier 2016 un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 et de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Sa demande a été rejetée par le préfet de police par arrêté du 19 décembre 2016, qui l'a également, par la même décision, obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi. Mme B...forme appel du jugement du 28 septembre 2017 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Il ressort des pièces du dossier de première instance que le conseil de la requérante a pris connaissance le 30 juin 2017, par l'application " Télérecours ", d'un avis du même jour fixant au 14 septembre suivant à 14 heures l'audience à laquelle l'affaire serait appelée. Toutefois, le 6 septembre, un avis de report de l'affaire à l'audience du 14 septembre à 10 heures a été adressé par le greffe aux parties, dont le conseil de la requérante a pris connaissance le 7 septembre. Le 11 septembre, à 13h10, le greffe a envoyé, toujours par l'application " Télérecours ", un avis de renvoi à l'audience du 14 septembre 2017 à 10 heures et, à 13h11, un avis de renvoi indiquant que l'audience du 14 septembre 2017 était reportée à une audience ultérieure. Ce dernier avis ne précisait pas l'horaire de l'audience du 14 septembre qui était ainsi reportée ni la date de la nouvelle audience. Le conseil de Mme B...a pris connaissance à 15h53 de ces deux avis du 11 septembre 2017. Or le jugement attaqué mentionne que l'audience s'est tenue le 14 septembre. Le conseil de la requérante a d'ailleurs, dès le 29 septembre, adressé au président du tribunal administratif une lettre par laquelle elle s'étonnait de ce que l'affaire ait été appelée à l'audience du 14 septembre alors qu'elle avait reçu un avis de renvoi daté du 11 septembre, qu'elle joignait, et faisait valoir que sa cliente désirait présenter des observations à l'audience et en avait ainsi été empêchée.

3. Devant la Cour, MmeB..., qui se prévaut de ce que son conseil a reçu un avis de renvoi à une audience ultérieure sans précision de la date et de l'heure de la nouvelle audience, de sorte qu'elle n'a pu présenter d'observations orales, doit être regardée comme critiquant la régularité du jugement à cet égard. Or le tribunal administratif ne pouvait tout à la fois, le 11 septembre, délivrer aux parties l'information, d'ailleurs déjà délivrée le 6 septembre, selon laquelle l'affaire était renvoyée au 14 septembre et l'information selon laquelle l'affaire était reportée à une audience ultérieure. Ces informations confuses, voire contradictoires, ne permettent pas de considérer que les parties ont été régulièrement avisées comme l'exigent les dispositions de l'article R. 711-2 du code de justice administrative de la date de l'audience à laquelle l'affaire introduite pour Mme B...serait examinée. La procédure suivie a donc entaché le jugement d'irrégularité.

4. Ce jugement doit, dès lors, être annulé. Il y a lieu d'évoquer l'affaire et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme B...devant le tribunal administratif.

Sur la légalité de l'arrêté du préfet de police :

5. L'arrêté du préfet de police dont Mme B...demande l'annulation est suffisamment motivé dès lors qu'il comporte l'indication des considérations de fait et de droit sur lesquelles son auteur a entendu se fonder.

6. Par ailleurs, si la requérante soutient que sa demande devait être étudiée au regard des critères de la circulaire du ministre de l'intérieur en date du 28 novembre 2012, elle ne peut toutefois se prévaloir des énonciations de cette circulaire à l'appui de sa demande d'annulation du refus de séjour qui lui a été opposé, dès lors qu'elle ne comporte que des orientations générales destinées aux préfets.

7. Enfin, MmeB..., qui est née en 1997 et entrée en France le 25 septembre 2014 selon ses déclarations, soit depuis un peu plus de deux ans seulement à la date de l'arrêté contesté, fait valoir qu'elle réside en France avec ses deux parents et ses deux soeurs et qu'elle est actuellement scolarisée en lycée professionnel ; que, toutefois, elle est célibataire et sans enfant à charge ; que sa mère, Mme D...A..., qui a fait l'objet d'une décision de retrait de son titre de séjour au motif qu'elle avait bénéficié d'une reconnaissance frauduleuse de paternité pour l'enfant Djatou B...A..., est dépourvue de titre de séjour ; que Mme B...ne démontre pas l'intensité, l'ancienneté et la stabilité de ses liens personnels et familiaux en France, s'agissant notamment de ses liens avec son père, M. C... B..., par la seule production du titre de séjour de ce dernier, des actes de naissance de ses deux soeurs, de trois certificats de scolarité la concernant pour les années 2014, 2015 et 2016, d'une facture d'électricité, au nom de Mme D...A...et de M. C...B..., et d'un avis d'échéance au nom de Mme D...A... ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle serait dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine ; que, dès lors, le préfet de police, en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et en lui faisant obligation de quitter le territoire français, n'a pas, dans les circonstances de l'espèce, porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au regard des buts poursuivis par l'arrêté attaqué. Il n'a donc méconnu, en refusant le séjour à l'intéressée et en l'obligeant à quitter le territoire français, ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qui garantissent le droit au respect de la vie privée, ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui prévoient l'octroi d'une carte de séjour à l'étranger dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressée, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus. Pour les mêmes raisons, le préfet de police n'a pas davantage commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de son arrêté sur la situation personnelle de l'intéressée.

8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêté du préfet de police en date du 19 décembre 2016. Ses conclusions tendant à l'annulation de cet arrêté doivent donc être rejetées, de même que ses conclusions à fin d'injonction, dès lors que l'exécution du présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution, ainsi que ses conclusions tendant à la mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, de ses frais liés à l'instance, présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1707488 du Tribunal administratif de Paris du 28 septembre 2017 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme B...devant le tribunal administratif et le surplus de ses conclusions devant la cour sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F...B....

Copie en sera délivrée au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 18 mai 2018 à laquelle siégeaient :

- Mme Heers, président de chambre,

- M. Auvray, président assesseur,

- M. Boissy, premier conseiller,

Lu en audience publique le 8 juin 2018.

Le président-rapporteur,

M. HEERSL'assesseur le plus ancien,

B. AUVRAYLe greffier,

C. DABERT

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

5

N° 18PA00302


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 18PA00302
Date de la décision : 08/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme HEERS
Rapporteur ?: Mme Mireille HEERS
Rapporteur public ?: Mme MIELNIK-MEDDAH
Avocat(s) : STAMBOULI

Origine de la décision
Date de l'import : 19/06/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-06-08;18pa00302 ?
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