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08/06/2018 | FRANCE | N°17PA02568

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 08 juin 2018, 17PA02568


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Ronde et Jolie a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des retenues à la source auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2012 et 2013 ainsi que des majorations et pénalités y afférentes.

Par un jugement n° 1612839/1-2 du 23 mai 2017, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 24 juillet 2017, la SARL Ronde et Jolie, repr

ésentée par MeA..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Ronde et Jolie a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des retenues à la source auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2012 et 2013 ainsi que des majorations et pénalités y afférentes.

Par un jugement n° 1612839/1-2 du 23 mai 2017, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 24 juillet 2017, la SARL Ronde et Jolie, représentée par MeA..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge de la totalité des impositions contestées en matière de retenue à la source ainsi que des pénalités y afférentes ;

3°) de condamner l'Etat au paiement d'une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La société requérante soutient que :

- les prestations litigieuses ne sont pas " fournies " ou " utilisées " en France au sens de l'article 182 B du code général des impôts et de la doctrine administrative.

Par un mémoire en défense enregistré le 22 janvier 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la SARL Ronde et Jolie ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Heers,

- et les conclusions de Mme Mielnik-Meddah, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La SARL Ronde et Jolie exploite en France deux sites internet. Elle a conclu plusieurs contrats de prestations de services en 2012 et 2013 avec la société cambodgienne Khmerdev pour un total de 24 250 euros. Les contrats avaient pour objet la maintenance, la mise à jour, la protection et le développement des sites internet. Après avoir procédé à une vérification de la comptabilité de la SARL Ronde et Jolie, l'administration fiscale a considéré que les sommes versées par la société au profit de la société cambodgienne en échange des prestations devaient être assujetties à la retenue à la source prévue à l'article 182 B du code général des impôts. Le 15 mars 2016, l'administration a mis en demeure la société de payer la somme de 15 431 euros dont 2 806 euros au titre des pénalités. A la suite du rejet par l'administration de sa réclamation tendant à la décharge de ces impositions, la société Ronde et Jolie a porté le litige devant le Tribunal administratif de Paris. Elle relève appel du jugement du 23 mai 2017 par lequel le tribunal administratif a rejeté sa demande en décharge des retenues à la source au titre des années 2012 et 2013 ainsi que des majorations et pénalités y afférentes.

En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :

2. Aux termes de l'article 182 B du code général des impôts : " I - Donnent lieu à l'application d'une retenue à la source lorsqu'ils sont payés par un débiteur qui exerce une activité en France à des personnes ou des sociétés, relevant de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt sur les sociétés, qui n'ont pas dans ce pays d'installation professionnelle permanente : (...) c. Les sommes payées en rémunération des prestations de toute nature fournies ou utilisées en France. (...) ". Il résulte de ces dispositions que les sommes payées par un débiteur établi en France à des personnes morales qui n'ont pas dans ce pays d'installations professionnelles permanentes pour le paiement de prestations de toute nature fournies ou utilisées en France donnent lieu à retenue à la source lorsque ces personnes morales sont passibles de l'impôt sur les sociétés en France, sans qu'il y ait lieu de rechercher si elles y ont été effectivement soumises.

3. Il n'est pas contesté que la société cambodgienne Khmerdev n'a aucune installation professionnelle en France et qu'elle a perçu plusieurs sommes payées par une société française pour des prestations de services relatifs à deux sites internet. Il n'est pas contesté non plus qu'à ce titre, elle était passible de l'impôt sur les sociétés.

4. Il résulte de l'instruction que la société Khmerdev a réalisé des prestations comprenant des missions de maintenance, de protection, de mise à jour et de développement des sites web appartenant à la SARL Ronde et Jolie. De telles prestations ont contribué directement au développement de l'activité de cette société sur le territoire français puisque celle-ci consiste précisément en l'exploitation économique de ces sites. En conséquence, alors même qu'elles ont été exécutées à l'étranger, ces prestations ont été utilisées en France au sens de l'article 182 B du code général impôts et doivent donc être assujetties à la retenue à la source prévue au même article au titre des années 2012 et 2013.

En ce qui concerne l'interprétation de la loi fiscale :

5. Aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente. Sont également opposables à l'administration, dans les mêmes conditions, les instructions ou circulaires publiées relatives au recouvrement de l'impôt et aux pénalités fiscales ".

6. L'instruction administrative du 12 septembre 2012, codifiée à la documentation de base sous la référence BOI-IR-DOMIC-10-10 n° 230, dont se prévaut la SARL Ronde et Jolie, ne contient aucune interprétation de la loi fiscale différente de celle dont il a été fait application aux points 3 et 4. Elle ne fait que souligner la nécessité de rechercher le lieu de l'utilisation effective de la prestation pour l'application des dispositions de l'article 182 B du code général des impôts et donner une liste non exhaustive d'exemples de ce qui est considéré comme des prestations utilisées en France.

7. L'instruction administrative du 12 septembre 2012, codifiée à la documentation de base sous la référence BOI-IR-DOMIC-10-10 n° 280, dont se prévaut la SARL Ronde et Jolie, précise que les rémunérations afférentes aux prestations matériellement fournies et utilisées hors de France ne sont pas soumises à la retenue à la source. La société requérante n'apporte cependant aucun élément de nature à établir que les prestations fournies par la société cambodgienne sont utilisées hors de France alors même que les sites sont hébergés en France par une société française. La société requérante ne peut donc se prévaloir de cette instruction administrative.

8. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions en décharge des impositions contestées, y compris les majorations à l'encontre desquelles n'est soulevé aucun moyen spécifique, doivent être rejetées, ainsi que les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SARL Ronde et Jolie est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Ronde et Jolie et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera délivrée au directeur régional des finances publiques d'Île-de-France et du département de Paris.

Délibéré après l'audience du 18 mai 2018 à laquelle siégeaient :

- Mme Heers, président de chambre,

- M. Auvray, président assesseur,

- M. Boissy, premier conseiller,

Lu en audience publique le 8 juin 2018.

Le président-rapporteur,

M. HEERSL'assesseur le plus ancien,

B. AUVRAYLe greffier,

C. DABERT

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 17PA02568


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 17PA02568
Date de la décision : 08/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-02-06-01 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur le revenu. Cotisations d`IR mises à la charge de personnes morales ou de tiers. Retenues à la source.


Composition du Tribunal
Président : Mme HEERS
Rapporteur ?: Mme Mireille HEERS
Rapporteur public ?: Mme MIELNIK-MEDDAH
Avocat(s) : CHRETIEN

Origine de la décision
Date de l'import : 19/06/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-06-08;17pa02568 ?
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