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07/06/2018 | FRANCE | N°17PA01563

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 9ème chambre, 07 juin 2018, 17PA01563


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Interaction Tertiaire, antérieurement dénommée Interaction Tertiaire Médical, a demandé au Tribunal administratif de Paris le remboursement immédiat du crédit d'impôt compétitivité emploi (CICE) au titre de l'année 2014 pour un montant de 28 376 euros.

Par un jugement n° 1513858/1-1 du 8 mars 2017, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 9 m

ai 2017, le 30 octobre 2017, le 30 novembre 2017 et le 29 janvier 2018, la société à responsabilité li...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Interaction Tertiaire, antérieurement dénommée Interaction Tertiaire Médical, a demandé au Tribunal administratif de Paris le remboursement immédiat du crédit d'impôt compétitivité emploi (CICE) au titre de l'année 2014 pour un montant de 28 376 euros.

Par un jugement n° 1513858/1-1 du 8 mars 2017, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 9 mai 2017, le 30 octobre 2017, le 30 novembre 2017 et le 29 janvier 2018, la société à responsabilité limitée Interaction Tertiaire, représentée par la SCPA Bondiguel et associés, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1513858/1-1 du 8 mars 2017 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de prononcer le remboursement de ce crédit ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle a le statut d'une PME communautaire dès lors qu'elle ne dépasse pas le seuil de 250 salariés, même en tenant compte des effectifs des entreprises liées, les travailleurs intérimaires devant être pris en compte dans l'effectif de l'entreprise utilisatrice et non dans celui de l'entreprise de travail temporaire, ce qui, en application des dispositions du II de l'article 199 ter C du code général des impôts, la rend éligible au remboursement immédiat du crédit d'impôt compétitivité emploi prévu à l'article 244 quater C du même code ; il n'existe qu'une seule définition de la PME au sens communautaire, qui est celle résultant de l'annexe I au règlement du 6 août 2008 à laquelle renvoie l'article 199 C du code général des impôts ; il résulte des termes de l'article 5 de cette annexe que seul le personnel permanent doit être pris en compte pour l'appréciation de la condition d'effectif et non les intérimaires mis à la disposition des entreprises clientes ;

- même en tenant compte des effectifs des entreprises liées du Groupe Interaction constitué de 31 sociétés, le seuil de 250 personnes n'est pas atteint, l'effectif permanent total de ce groupe étant de 185 personnes ; le service de la Commission européenne en charge de la détermination des contours de la notion de PME communautaire lui a confirmé que les salariés intérimaires recrutés pour être mis à disposition des clients ne sont pas inclus dans l'effectif de la société d'intérim.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 26 octobre 2017, le 17 novembre 2017 et le 19 janvier 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la société Interaction Tertiaire ne sont pas fondés.

.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le règlement (CE) n° 800/2008 de la Commission du 6 août 2008 déclarant certaines catégories d'aide compatibles avec le marché commun en application des articles 87 et 88 du traité ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Notarianni,

- les conclusions de M. Platillero, rapporteur public

- et les observations de Me Noel-Garoche avocat de la société Interaction Tertiaire.

1. Considérant que la SARL Interaction Tertiaire, antérieurement dénommée Interaction Médical, qui exerce l'activité d'entreprise de travail temporaire, relève appel du jugement du 8 mars 2017 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande de remboursement immédiat de la fraction non imputée sur l'impôt sur les sociétés d'un crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) au titre de l'année 2014 pour un montant de 28 376 euros ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 244 quater C du même code : "I.-Les entreprises (...) peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt ayant pour objet le financement de l'amélioration de leur compétitivité à travers notamment des efforts en matière d'investissement, de recherche, d'innovation, de formation, de recrutement, de prospection de nouveaux marchés, de transition écologique et énergétique et de reconstitution de leur fonds de roulement (...) II.-Le crédit d'impôt mentionné au I est assis sur les rémunérations que les entreprises versent à leurs salariés au cours de l'année civile (...) Pour les salariés qui ne sont pas employés à temps plein ou qui ne sont pas employés sur toute l'année, le salaire minimum de croissance pris en compte est celui qui correspond à la durée de travail prévue au contrat au titre de la période où ils sont présents dans l'entreprise(...) " ; qu'aux termes de l'article 199 ter C du code général des impôts : " I.-Le crédit d'impôt défini à l'article 244 quater C est imputé sur l'impôt sur le revenu dû par le contribuable au titre de l'année au cours de laquelle les rémunérations prises en compte pour le calcul du crédit d'impôt ont été versées. L'excédent de crédit d'impôt constitue, au profit du contribuable, une créance sur l'Etat d'égal montant. Cette créance est utilisée pour le paiement de l'impôt sur le revenu dû au titre des trois années suivant celle au titre de laquelle elle est constatée, puis, s'il y a lieu, la fraction non utilisée est remboursée à l'expiration de cette période (...) II.-La créance mentionnée au premier alinéa du I est immédiatement remboursable lorsqu'elle est constatée par l'une des entreprises suivantes : 1° Les entreprises qui satisfont à la définition des micro, petites et moyennes entreprises donnée à l'annexe I au règlement (CE) n° 800/2008 de la Commission du 6 août 2008 déclarant certaines catégories d'aide compatibles avec le marché commun en application des articles 87 et 88 du traité (...) " ; qu'il résulte de la combinaison des dispositions précitées que les sociétés satisfaisant aux conditions de seuils retenues pour la définition des petites et moyennes entreprises au sens du droit communautaire, prévue par le règlement n° 800/2008 de la commission du 6 août 2008 déclarant certaines catégories d'aide compatibles avec le marché commun en application des articles 87 et 88 du traité, sont, en vertu des dispositions de l'article 199 tec C du code général des impôts, en droit de d'obtenir le remboursement immédiat de la créance de crédit d'impôt compétitivité entreprise prévu à l'article 244 quater C du même code ;

3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 2 du règlement du 6 août 2008 déclarant certaines catégories d'aide compatibles avec le marché commun en application des articles 87 et 88 du traité : " Aux fins du présent règlement, on entend par : (...) 7) " petites et moyennes entreprises " ou " PME " : les entreprises remplissant les critères définis à l'annexe I (...) " ; qu'aux termes du 1 de l'article 2 de l'annexe I à ce règlement : " 1. La catégorie des micro, petites et moyennes entreprises (" PME ") est constituée des entreprises qui occupent moins de 250 personnes (...) " ; qu'aux termes de l'article 5 de la même annexe : " L'effectif correspond au nombre d'unités de travail par an (UTA), c'est-à-dire au nombre de personnes ayant travaillé dans l'entreprise considérée ou pour le compte de l'entreprise considérée à temps plein pendant toute l'année considérée. Le travail des personnes n'ayant pas travaillé toute l'année ou ayant travaillé à temps partiel, quelle que soit sa durée, ou le travail saisonnier, est compté comme des fractions d'UTA. L'effectif est composé : a) des salariés b) des personnes travaillant pour cette entreprise, ayant un lien de subordination avec elle et assimilées à des salariés au regard du droit national (...) " ; qu'eu égard à la finalité de ce règlement, les définitions qu'il donne, qui n'ont pas été remises en cause par le règlement (UE) n° 651/2014 de la Commission du 17 juin 2014 déclarant certaines catégories d'aides compatibles avec le marché intérieur en application des articles 107 et 108 du traité, doivent recevoir une interprétation privilégiant leur aspect économique ; qu'ainsi, pour la mise en oeuvre du critère relatif à l'effectif, s'agissant des salariés de l'entreprise auxquels s'ajoutent dans les même conditions selon les proratas fixés à l'article 6 de la même annexe, les salariés des entreprises liées et des entreprises partenaires au sens de son article 3, seuls doivent être pris en compte les salariés ou les personnes assimilées à des salariés qui ont travaillé dans cette entreprise ou pour son compte au cours de l'année considérée ; que, dans le cas d'une entreprise de travail temporaire, les travailleurs intérimaires, bien que juridiquement liés à cette entreprise par un contrat de travail, ont vocation à être placés dans les entreprises clientes de l'entreprise de travail intérimaire, sous le contrôle et la direction desquelles ils travaillent, et non à travailler dans l'entreprise de travail intérimaire ou pour son compte ; qu'ils ne doivent dès lors pas être pris en compte dans son effectif pour l'application de ce règlement ; qu'il est sans incidence, pour l'appréciation de ce critère relatif à l'effectif, que les rémunérations des travailleurs intérimaires soient versées par l'entreprise de travail temporaire et non par les entreprises clientes auprès desquelles ils sont placés ;

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'administration a rejeté la demande de restitution immédiate du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi présentée par la société Interaction Médical, devenue Interaction Tertiaire, au motif que la société requérante détenait 90 % du capital de la société EURL Interaction laquelle possédait des participations au capital de 31 sociétés et que le total des effectifs permanents et des salariés intérimaires de l'ensemble de ces sociétés liées dépassant le seuil de 250 salariés énoncé par l'article 2 de l'annexe I au règlement communautaire précité, elle ne pouvait être regardée comme constituant une PME au sens communautaire ;

5. Considérant, toutefois, en premier lieu, qu'il résulte de la combinaison des dispositions précitées que, pour la mise en oeuvre du critère d'effectif de moins de 250 salariés prévu au 1° du II de l'article 199 ter C du code général des impôts, la société requérante est fondée à soutenir que seuls devaient être pris en compte les salariés permanents de la société Interaction Tertiaire et des sociétés liées ou partenaires et non les salariés intérimaires de ces sociétés de travail temporaires, destinés à être placés dans leurs entreprises clientes ; que, par ailleurs, si l'administration fait valoir que le crédit d'impôt litigieux est assis sur les rémunérations versées par les entreprises à leurs salariés et que la société requérante est légalement tenue de verser elle-même les rémunérations dues aux salariés intérimaires avec lesquels elle conclut un contrat de mission, cette situation est sans incidence sur le droit à restitution immédiate de la créance de crédit d'impôt et ne peut être prise en compte que pour le calcul du montant de la créance de crédit d'impôt, lequel n'est pas critiqué par l'administration qui ne soutient au demeurant pas qu'il incluait des rémunérations non éligibles ;

6. Considérant, en second lieu, que la société requérante fait valoir, en produisant des justificatifs nouveaux en appel, notamment des attestations établies par l'expert-comptable des sociétés du groupe Interaction, que l'effectif permanent total de l'ensemble de ce groupe est de 185 personnes seulement ; qu'il résulte de l'instruction que même en tenant compte intégralement des effectifs des entreprises liées du Groupe Interaction constitué de 31 sociétés, l'effectif permanent du groupe Interaction n'est pas supérieur à 250 personnes ; qu'ainsi, contrairement à ce qu'a retenu l'administration, la sociétés Interaction Tertiaire répond à la condition d'effectif prévue par l'annexe I du règlement communautaire susmentionné lui permettant d'être regardée comme une PME au sens communautaire ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SARL Interaction Tertiaire est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande et à demander à la Cour de prononcer le remboursement immédiat du crédit d'impôt litigieux ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à la SARL Interaction Tertiaire sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1513858/1-1 du 8 mars 2017 du Tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : Il est accordé à la société Interaction Tertiaire le remboursement immédiat d'un crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi d'un montant de 28 376 euros au titre de l'exercice clos en 2014.

Article 3 : L'Etat versera à la société Interaction Tertiaire une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société Interaction Tertiaire et au ministre de l'action et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 31 mai 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Jardin, président de chambre,

- M. Dalle, président assesseur,

- Mme Notarianni, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 7 juin 2018.

Le rapporteur,

L. NOTARIANNI

Le président,

C. JARDIN

Le greffier,

C. BUOT

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17PA01563


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 17PA01563
Date de la décision : 07/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-01-08-01 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Bénéfices industriels et commerciaux. Calcul de l'impôt.


Composition du Tribunal
Président : M. JARDIN
Rapporteur ?: Mme Laurence NOTARIANNI
Rapporteur public ?: M. PLATILLERO
Avocat(s) : BONDIGUEL

Origine de la décision
Date de l'import : 12/06/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-06-07;17pa01563 ?
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