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31/05/2018 | FRANCE | N°17PA03895

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 31 mai 2018, 17PA03895


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... C...A...a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 26 juillet 2017 par lequel le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit.

Par un jugement n° 1707564 du 6 novembre 2017, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 21 décemb

re 2017, M. C... A..., représenté par Me D..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 170...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... C...A...a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 26 juillet 2017 par lequel le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit.

Par un jugement n° 1707564 du 6 novembre 2017, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 21 décembre 2017, M. C... A..., représenté par Me D..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1707564 du 6 novembre 2017 du tribunal administratif de Melun ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de police du 26 juillet 2017 ;

3°) d'enjoindre au préfet de Seine-et-Marne de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 100 euros à lui verser sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'arrêté en litige n'est pas suffisamment motivé ;

- il est entaché d'un défaut d'examen de sa situation personnelle et son droit à être entendu a été méconnu ;

- il méconnaît les stipulations de l'article 6 paragraphe 5 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense enregistré le 24 avril 2018, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. C... A...ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Legeai a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M. C... A..., ressortissant algérien né en septembre 1992, a été interpellé le 26 juillet 2017 lors d'un contrôle d'identité gare Saint-Lazare à Paris ; que par un arrêté du même jour, le préfet de police lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office ; que M. C... A...relève régulièrement appel du jugement du 6 novembre 2017 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne (...), lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; 2° Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée sur le territoire sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré (...) / La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. (...) " ;

3. Considérant que l'arrêté attaqué vise l'article L. 511-1 I 1° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et énonce que M. C...A..., de nationalité algérienne, est dépourvu de document transfrontière (passeport), ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français et est également dépourvu de titre de séjour en cours de validité ; que cet arrêté comporte ainsi les considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de l'obligation de quitter le territoire français, sans que la circonstance qu'il a été fait usage d'un imprimé pré-rempli comportant des cases à cocher n'ait d'incidence sur la précision de cette motivation ; que si le préfet a également indiqué qu'il n'est pas porté une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale, cette mention, qui ne constitue pas le fondement de l'obligation de quitter le territoire français, n'avait pas à être assortie de précisions complémentaires ; que le moyen tirés de l'insuffisance de motivation de l'arrêté portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union. / Ce droit comporte notamment : / - le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre (...) " ; que si le moyen tiré de la violation de cette disposition par un Etat membre de l'Union européenne est inopérant, dès lors qu'il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne que cet article ne s'adresse qu'aux organes et aux organismes de l'Union, le droit d'être entendu, qui fait partie intégrante du respect des droits de la défense, principe général du droit de l'Union, implique que l'autorité administrative mette le ressortissant étranger en situation irrégulière à même de présenter, de manière utile et effective, son point de vue sur l'irrégularité du séjour et les motifs qui seraient susceptibles de justifier que l'autorité s'abstienne de prendre à son égard une décision de retour ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté en litige est intervenu à la suite de l'interpellation de M. C...A...lors d'un contrôle de police le 26 juillet 2017 à 7h45 ; qu'il ressort du procès-verbal d'audition signé par l'intéressé le même jour à 9h16 que M. C... A...a été entendu sur l'ensemble de sa situation administrative, avec l'assistance d'un interprète en langue arabe, et a pu faire valoir tous les éléments utiles, notamment relatifs à sa vie privée et familiale, avant que le préfet de police ne prenne, le même jour à 10h25, l'arrêté litigieux ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du principe du droit d'être entendu, tel qu'énoncé notamment au 2 de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, doit être écarté ; que, de même, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que le préfet de police n'aurait pas procédé à un examen sérieux de la situation du requérant avant de prendre sa décision l'obligeant à quitter le territoire français ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5. Au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; que, pour l'application de ces stipulations, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine ;

7. Considérant que M. C... A..., soutient être entré en France en 2013 pour rejoindre ses parents et ses frère et soeur mineurs présents sur le territoire français depuis 2006 et y avoir depuis établi le centre de sa vie privée et familiale ; qu'il n'apporte cependant aucun élément sur ses conditions de vie en France de 2013 à 2016, alors qu'il a déclaré aux services de police lors de son interpellation être entré en France en juillet 2014 ; que s'il fait valoir vivre depuis octobre 2016 avec une ressortissante française, avec laquelle il est lié par un pacte civil de solidarité depuis le 30 janvier 2017, ce lien était récent à la date de la décision litigieuse ; que, dans ces conditions, eu égard d'une part à la durée et aux conditions du séjour en France de M. C... A..., qui n'y allègue ni n'y établit son insertion professionnelle, d'autre part à la circonstance qu'il a vécu en Algérie, séparé de sa famille nucléaire, au moins jusqu'à l'âge de 21 ans, le préfet de police a pu l'obliger à quitter le territoire français sans porter à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au but poursuivi ; que, par suite, les moyens de M. C... A...tirés de la méconnaissance des stipulations, de l'article 6 paragraphe 5 de l'accord franco-algérien et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés ; que, pour les mêmes motifs, l'arrêté litigieux n'est pas entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle et familiale de l'intéressé ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C... A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ; que sa requête d'appel, y compris par voie de conséquence, ses conclusions à fins d'injonction et d'astreinte et celles présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doit être rejetée ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... C...A...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 4 mai 2018, à laquelle siégeaient :

- Mme Pellissier, présidente de chambre,

- M. Legeai, premier conseiller,

- Mme Nguyên Duy, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 31 mai 2018.

Le rapporteur,

A. LEGEAI La présidente,

S. PELLISSIER Le greffier,

M.B... La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent jugement.

2

N° 17PA03895


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 17PA03895
Date de la décision : 31/05/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme PELLISSIER
Rapporteur ?: M. Alain LEGEAI
Rapporteur public ?: M. ROMNICIANU
Avocat(s) : CAZENAVE

Origine de la décision
Date de l'import : 05/06/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-05-31;17pa03895 ?
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